Ernst-August Bremicker [ajouts bibliquest entre crochets]
Truth & Testimony, 2021-4 p.164
Table des matières :
5.1 - Un acte non autorisé et indépendant
6 - Couper les coloquintes en morceaux
« Et Élisée retourna à Guilgal. Or il y avait une famine
dans le pays. Et les fils des prophètes étaient assis devant lui ; et il
dit à son jeune homme : Mets la grande marmite, et cuis un potage pour les
fils des prophètes. Et l’un d’eux sortit aux champs pour cueillir des herbes, et
il trouva de la vigne sauvage et y cueillit des coloquintes [sorte de courges] sauvages,
plein sa robe ; et il rentra et les coupa en morceaux dans la marmite du
potage, car on ne les connaissait pas. Et on versa à manger aux hommes ;
et il arriva que, comme ils mangeaient du potage, on cria et dit : Homme
de Dieu, la mort est dans la marmite ! Et ils n’en pouvaient manger. Et il
dit : Apportez de la farine. Et il la jeta dans la marmite, et dit :
Verses-en à ce peuple, et qu’ils mangent. Et il n’y avait rien de mauvais dans
la marmite
» (2 Rois 4:38-41).
Ce court récit de la vie du prophète Élisée reste instructif
aujourd’hui. Paul écrit en Romains 8:6 : « Car la pensée de la chair
(autrement dit « avoir un état d’esprit charnel »), c’est la mort
». Tel
semble être l’enseignement fondamental de ce court récit du livre des Rois ;
il s’y trouve encore d’autres leçons pratiques pour nous.
Élisée est un type de notre Seigneur agissant en grâce et en miséricorde.
Les fils des prophètes représentent des personnes en relation avec le Seigneur Jésus pour apprendre de Lui (comme Ses disciples). Ils sont assis devant Élisée.
Le serviteur d’Élisée censé faire cuire le potage, est comme une image du Saint Esprit qui veille à ce que nous puissions recevoir la Parole de Dieu pour qu’elle devienne notre nourriture spirituelle.
Élisée et ses disciples sont à Guilgal, une place importante dans l’histoire du peuple d’Israël. C’est le premier endroit où ils campèrent après avoir traversé le Jourdain. C’est là qu’eut lieu la circoncision. Pour nous, ce lieu symbolise la fin judiciaire de la chair (le péché intérieur) dans la mort du Christ. Dieu a condamné la chair dans la mort de notre Seigneur et a prononcé le jugement sur elle (Col. 2:11-15). La chair a été condamnée devant Dieu dans la mort de Christ parce qu’elle n’est pas bonne. Le croyant est mort avec Christ (Col. 3:3). C’est ainsi que Dieu voit les choses.
Néanmoins, il se peut que nous fassions l’expérience que la chair continue à être active à de multiples reprises. C’est ce que nous enseigne le récit de 2 Rois 4 ; c’est pourquoi ce n’est pas pour rien que ces versets mentionnent Guilgal. Même si nous sommes morts avec Christ et que la chair a été condamnée, elle peut encore se manifester dans la vie du croyant. C’est pourquoi Paul nous exhorte à mortifier nos membres qui sont sur la terre, c’est-à-dire à condamner les actions extérieures de la chair (Col. 3:5).
Il peut sembler surprenant qu’il y eut une famine dans un lieu tel que Guilgal, surtout qu’Élisée était présent. Une famine dans le pays indiquait une mauvaise condition et une infidélité au sein du peuple d’Israël (Deut. 28:15-44). S’ils avaient écouté leur Dieu, il n’y aurait pas eu de famine. Pour nous, la famine représente un manque de spiritualité. Dieu met Sa main sur nous (personnellement et collectivement) si nous nous détournons de Lui. Le manque ou la carence sont là ; cependant Élisée y remédie à la fin. C’est la grâce et la miséricorde divines, des choses que nous voyons fréquemment en rapport avec ce prophète.
Une question importante se pose : que faisons-nous en temps
de pénurie spirituelle au sein du peuple de Dieu ? Le livre de Ruth nous
enseigne qu’il est fatal de s’éloigner de la bonne position. Partir ne résout
jamais les problèmes. Ici, il y a un enseignement différent. Les fils des
prophètes sont assis devant Élisée et attendent manifestement qu’il les
nourrisse. Le comportement de ces jeunes gens nous montre la voie, et nous
motive à rester avec notre Seigneur (cf. Jean 6:68). Soyons comme Marie de
Béthanie qui avait pris place aux pieds de notre Seigneur avec une pleine
conviction d’y rester. Au psaume 33 v.18-19, le psalmiste dit : « L’œil
de l’Éternel est sur ceux qui le craignent… pour les conserver en vie durant la
famine
». Nous ressentons une pénurie spirituelle à notre époque, et
pourtant nous connaissons Celui qui comble tous les besoins.
Élisée ordonne maintenant à son serviteur de mettre en place une grande marmite. Cela peut paraître surprenant. Comment peut-on penser à un grand récipient en temps de famine ? Un petit récipient ne serait-il pas plus approprié ? Mais la réponse est que même dans les jours de famine, nous pouvons attendre de grandes choses d’un Dieu qui est grand. Lorsque Lui agit par Son Esprit, il y a toujours abondance. Ses provisions sont illimitées et Ses réserves sont toujours pleines. Cela vaut aussi bien pour notre étude biblique personnelle que pour nos rassemblements. Nous nous attendons à Lui et nous comptons sur Lui, et Il donne en abondance.
L’un des fils des prophètes décide d’aller aux champs pour recueillir des herbes. Sans doute le fait-il avec de bonnes intentions pour rendre le potage plus appétissant. Pourtant il part sans qu’on lui ait demandé de le faire. Il est pareillement dangereux aujourd’hui de ne pas attendre ce que le Seigneur veut nous donner, mais d’essayer à notre guise de rendre la nourriture de la Parole de Dieu plus « alléchante », en y ajoutant quelque chose que nous avons nous-mêmes trouvé. Dans ces conditions, la chair se met en activité, et de suite la mort est dans la marmite, et tout est gâté. Il y a bien des choses dans ce monde qui peuvent sembler rendre la Parole de Dieu plus « alléchante ». Si nous laissons entrer dans notre vie spirituelle des éléments du monde, ou sa façon de penser, ou d’autres pensées charnelles, notre vie de foi en pâtira. La pensée de la chair, l’état d’esprit [ou : l’entendement] de la chair, est la mort et restera la mort. La Parole de Dieu ne tolère aucun ajout ni supplément. Tout ce que nous ajoutons nous-mêmes lui ôte sa puissance. Il y aurait eu un empoisonnement mortel en 2 Rois 4 si Élisée n’était pas intervenu.
En outre, la fin ne justifie pas les moyens. Redisons-le, l’intention
pouvait être bonne, mais le résultat désastreux. Si nous ajoutons des choses
étrangères à la bonne nourriture de la Parole de Dieu, les conséquences seront
graves. Tel était le danger pour les croyants de Colosses : « Prenez
garde que personne ne fasse de vous sa proie par la philosophie et par de vaines
déceptions, selon l’enseignement des hommes, selon les éléments du monde, et
non selon Christ
» (Col. 2:8). Si nous perdons Christ comme la Tête, nous
deviendrons la proie d’autres choses. Les mélanges de philosophie, de statuts
ou de commandements humains sont dangereux et portent en eux la semence de mort,
même si ce n’est pas immédiatement visible. Le monde chrétien est plein de coloquintes
sauvages. Il est important de ne pas quitter le champ de notre Boaz pour chercher
d’autres nourritures. Si nous le faisons, nous risquons de cueillir des coloquintes
sauvages.
Une autre question pratique se pose ici : où « cueillons-nous »
la nourriture spirituelle pour nous-mêmes, et peut-être pour en présenter à nos
frères ? Il s’agit d’une exhortation particulière aux frères qui
enseignent, mais elle s’applique à tous. Est-ce que nous nous nourrissons du « lait
pur
» de la Parole de Dieu (1 Pierre 2:2) ou y mêlons-nous autres choses ?
À première vue, on peut ne pas discerner un faux enseignement. Une vigne
sauvage et des coloquintes sauvages ne se distinguent guère extérieurement d’une
vigne de qualité et de bonnes courges. Notre ennemi est extrêmement rusé. Il déguise
l’erreur de manière à ce qu’on ne la reconnaisse pas à première vue.
Les coloquintes sont coupées en morceaux et ajoutées au potage. Cela contribue à masquer l’erreur. De plus, le fils de prophète n’apporta pas les coloquintes à Élisée, mais il le court-circuita. Si nous voulons contribuer à nourrir les autres, nous devons d’abord apporter ce que nous avons acquis au Seigneur afin qu’Il le transforme en bénédiction. C’est ce que firent les disciples avant de donner à manger à des foules dans les Évangiles.
La nourriture fut distribuée, et ce n’est qu’alors que l’ajout mortel apparut. Si on nous propose de la nourriture spirituelle, il nous faut un œil exercé pour voir si c’est réellement, ou non, de la nourriture pour l’âme. Cette compétence de jugement est importante pour chacun de nous, y compris pour ce qui se rattache à la prédication publique de la Parole. Les Corinthiens étaient explicitement exhortés à porter ce jugement (1 Cor. 14:29). Nous ne devrions pas faire dans notre vie spirituelle ce que nous ne ferions jamais dans la sphère naturelle de notre vie (c’est-à-dire consommer du poison).
En même temps, nous pouvons être encouragés par le fait de savoir que même les petits enfants ont une onction du Saint (1 Jean 2:20) qui leur permet de détecter l’erreur. La réaction des fils des prophètes en est aussi une illustration : un recul instinctif.
Les fils des prophètes font la seule chose juste à faire : ils ne se contentent pas de parler du problème à Élisée, mais ils crient vers lui, le reconnaissant comme un homme de Dieu. Il existe une solution pour tout problème spirituel. Il nous faut seulement nous tourner vers la bonne personne dans la prière.
Élisée n’institue pas une commission d’enquête pour identifier les substances nocives dans la nourriture. Une telle démarche n’aurait de toute façon servi à rien. Au lieu de cela, il envoie chercher de la farine, et la fait jeter dans la marmite. L’enseignement important pour nous ici est que nous n’avons pas toujours besoin de traiter toutes les erreurs. Bien sûr, nous devons reconnaître l’erreur — mais il n’est pas nécessairement approprié, dans chaque cas, d’en examiner les détails.
La farine est un type de Christ et de la doctrine pure de tout ce qui Le concerne. Tout ce que nous ingérons comme nourriture spirituelle ou que nous transmettons à d’autres doit être en accord avec la Parole de Dieu — et donc avec Christ.
C’était la solution aux problèmes rencontrés par les Colossiens. Paul leur présente la gloire et l’excellence de la personne de Christ en qui habite toute la plénitude de la Déité (2:9). Une personne formée à détecter de la fausse monnaie n’a pas besoin de connaître tous les faux billets, mais seulement les vrais. Un pilote qui veut diriger un navire dans un chenal encombré de récifs n’a pas besoin de connaître l’emplacement de chaque récif, mais seulement les endroits où le passage est sûr. Le croyant qui veut marcher avec le Seigneur n’a pas besoin de connaître les voix étrangères, mais seulement la voix du bon Berger. Nous avons besoin de reconnaître « la vraie » et d’être remplis de Christ et de Sa Parole. Nous pourrons alors jouir avec joie et plaisir de la nourriture qu’Il nous offre.