Edward Dennett [ajouts de Bibliquest entre crochets]
Christian Friend, vol. 11, 1884, p. 38
Table des matières :
3 - [Hébreux 5 et 6 sur Melchisédec]
6 - [Romains 5 à 8 négligés ?]
Quel est l’enseignement approprié pour les croyants en général à l’heure actuelle ?
En réponse à cette question, on cite souvent le verset de 1 Pierre 2:2 : « désirez ardemment, comme des enfants nouveau-nés, le pur lait intellectuel afin que vous croissiez par lui ». Beaucoup soutiennent que cela signifie que le « lait » est l’aliment approprié pour le jeune croyant. Sans aborder la question du sens exact du mot utilisé (c’est une question très difficile), le sens de ce verset de l’Écriture est tout simplement que le croyant devrait désirer la parole de Dieu tout comme les nouveau-nés désirent le lait. C’est d’abord une question d’appétit, et ensuite ce verset nous dit que la parole de Dieu est l’aliment approprié pour le croyant, comme le lait l’est pour le nouveau-né. C’est ce que l’Esprit de Dieu enseigne par ce verset, et cela est d’autant plus évident si l’on ajoute les mots qui font suite « afin que vous croissiez par lui à salut ». C’est donc en se nourrissant de la parole de Dieu qu’on grandit, et qu’on continue à grandir jusqu’au salut complet.
Un autre passage nous donnera davantage de lumière sur notre sujet. L’apôtre Paul, écrivant aux Corinthiens, dit : « Je vous ai donné du lait à boire, non pas de la viande, car vous ne pouviez pas encore la supporter, et même maintenant encore vous ne le pouvez pas, car vous êtes encore charnels. Car, puisqu’il y a parmi vous de l’envie et des querelles, n’êtes-vous pas charnels et ne marchez-vous pas à la manière des hommes ? » (1 Cor 3:2,3). Il est clair dans ce cas que l’apôtre nourrissait ces croyants avec du « lait » en raison de leur mauvais état, et qu’il déplorait d’avoir à le faire ; et que s’ils avaient davantage répondu à la grâce et à l’amour de Dieu en rédemption, il les aurait nourris avec de la « viande » et non du « lait ». Penser que les saints ont besoin de « lait » revient donc à supposer qu’ils sont dans un état tel que celui des Corinthiens. Fournir le nécessaire en rapport avec un tel état, ne fait qu’encourager un état qu’au contraire nous devrions tous déplorer. Nous apprenons en outre que l’enseignement approprié à une assemblée peut être entièrement inadapté pour une autre. On peut bien alors mettre cette question sur le cœur des docteurs : ont-ils suffisamment d’exercice de discernement spirituel sur l’état des âmes, pour être guidés dans leur ministère ? Ce serait une grande erreur de développer la vérité des Éphésiens à une assemblée du genre des Corinthiens, ou la vérité des Corinthiens à une assemblée d’Éphésiens.
On peut également se référer à un autre passage. Commençant à parler de Melchisédec, l’apôtre s’arrête pour ajouter « au sujet duquel nous avons beaucoup de choses à dire et qui sont difficiles à expliquer, puisque vous êtes devenus paresseux à écouter. Car lorsque vous devriez être des docteurs, vu le temps, vous avez de nouveau besoin qu’on vous enseigne quels sont les premiers rudiments des oracles de Dieu, et vous êtes devenus tels, que vous avez besoin de lait et non de nourriture solide ; car quiconque use de lait est inexpérimenté dans la parole de la justice, car il est un petit enfant ; mais la nourriture solide est pour les hommes faits, qui, par le fait de l’habitude, ont les sens exercés à discerner le bien et le mal. C’est pourquoi, laissant la parole du commencement du Christ, avançons vers l’état d’hommes faits » (Hébreux 5:11-14 ; 6:1).
Il y a plusieurs points qui demandent sérieusement notre attention. L’apôtre pleure sur l’incapacité des saints à recevoir la vérité qu’il avait à communiquer. Vu le temps qu’ils avaient été chrétiens, ils auraient dû être des docteurs, et voilà qu’il était nécessaire de revenir aux éléments de base de la vérité ; car ils étaient devenus comme ceux qui ont besoin de lait — preuve qu’ils étaient inexpérimentés dans l’usage de la Parole, et qu’ils étaient devenu des nains quant à leur croissance. Ils étaient encore des bébés, d’où la fervente exhortation du début du chapitre 6. En un mot, ces chers croyants n’étaient plus disposés à aller de l’avant. Quel est celui qui, ayant la pensée de Christ, pourrait se satisfaire d’un tel état ? Quel docteur pourrait calmement accepter cet état, et continuer à les nourrir de lait, comme s’ils n’avaient besoin de rien de plus ?
Nous ferions bien de peser ces avertissements solennels. N’y a-t-il pas autant de raison de les adresser à beaucoup de croyants aujourd’hui ? N’y en a-t-il pas des centaines et des milliers qui ne se soucient jamais de rien au-delà de l’Évangile ? Cela est triste si un saint de Dieu cesse de s’intéresser à la bonne nouvelle de la grâce de Dieu : ce qui occupe le cœur de Dieu peut bien occuper le cœur des Siens. Mais il s’agit d’autre chose que de se nourrir seulement et uniquement de l’évangile ou des éléments les plus simples de la vérité. Il ne s’agit pas de cela. Nous avons besoin de Christ dans tous les caractères, les aspects et les fonctions qui nous sont présentés. Si nous manquons à le reconnaître, nous aussi nous deviendrons rapidement des nains comme ces croyants hébreux.
On nous dira certainement : « Mais rappelez-vous combien il y a d’âmes nouvellement converties. Ce sont vraiment des bébés. Ne les nourrira-t-on pas avec du lait ? ». Or la Parole de Dieu est notre seul guide, et nous avons au moins deux exemples de la manière dont l’Esprit de Dieu s’adresse à de tels cas.
Les épîtres aux Thessaloniciens ont été écrites peu de temps après que l’assemblée se soit formée là — les deux épitres probablement dans l’année après que les saints se soient tournés des idoles vers Dieu pour servir le Dieu vivant et vrai, et pour attendre des cieux son Fils (1 Thess. 1:9,10). Qu’y trouvons-nous ? Dans la première épître, nous avons le retour de notre Seigneur présenté sous tous ses aspects, et même distingué de Sa venue dans le monde, en plus d’instructions pratiques pour l’édification de ces saints sur leur très sainte foi. Dans la seconde épitre, l’apôtre va plus loin encore, et enseigne le caractère complet de l’apparition de Christ, la vérité de l’homme de péché, le fait bienheureux que l’assemblée doit être enlevée de cette scène avant que le fils de perdition ne soit révélé, etc. On peut difficilement qualifier ces sujets d’élémentaires. Ils étaient cependant pour l’instruction et la consolation de ces « petits enfants », et ils étaient nécessaires pour leur compréhension du christianisme.
Nous avons un autre exemple dans la première épître de Jean qui classe l’ensemble de la famille de Dieu en pères, jeunes gens et petits enfants. De quelle manière l’apôtre s’adresse-t-il à cette dernière classe, les plus jeunes des enfants de Dieu ? « Petits enfants, » commence-t-il, « c’est la dernière heure ; et comme vous avez entendu que l’antichrist vient, etc. » (1 Jean 2:18). Il souligne ensuite le danger résultant du fait que des antichrists soient déjà là. Il les met en garde en donnant les marques de l’antichrist, et les conduit à la source de leur sécurité : l’onction du Saint et la Parole de Dieu. Cela correspond tout à fait à l’enseignement de Paul en 2 Thessaloniciens.
Nous avons donc ici la sagesse divine pour nous guider dans l’enseignement des « petits enfants ». Ils doivent être nourris de la Parole de Dieu ; ils doivent être fortifiés contre les dangers par les révélations et les avertissements qu’elle fournit ; et ils doivent avoir un Christ complet — Christ déployé dans tout ce qu’Il est en Lui-même, dans tout ce qu’Il est pour Dieu, et dans tout ce qu’Il est pour eux, — pour pouvoir croitre par-là à salut. C’est tout à fait différent que de les occuper de questions douteuses et de controverses au lieu de Christ. On peut aussi ajouter que le maintien de la simplicité dans la manière dont on enseigne est entièrement compatible avec le fait de conduire les âmes dans la connaissance de leur part en Christ et des dangers du chemin. Nous n’hésitons pas à dire, que si tant de jeunes convertis se sont détournés, et si beaucoup plus encore ont cédé aux influences du monde, c’est dû très souvent à ce que nous avons manqué à leur fournir la nourriture appropriée. Ne connaissant guère plus que le pardon des péchés, ils n’ont eu que peu d’intérêt pour les Écritures, et ont négligé alors les moyens de croissance et de sécurité.
L’ordre doctrinal des épîtres nous donne la même leçon. L’épître aux Romains peut sans doute être appelée l’épître de base. Mais combien s’arrêtent à Romains 5:1 ? Combien apprennent la vérité de Romains 6 ? Ou s’ils en apprennent la doctrine, y en a-t-il beaucoup qui ne passent jamais par l’expérience de Romains 7, de manière à entrer dans la jouissance des richesses de bénédictions contenues dans Romains 8 ? L’épître aux Colossiens va un stade au-delà de celle aux Romains, et celle aux Éphésiens encore un stade de plus que celle aux Colossiens. Et il est certain qu’on ne verra jamais un chrétien « Philippien » qui n’ait pas appris au préalable la vérité de ces épîtres précédentes. Les saints doivent-ils toujours être privés de ces trésors divins ? Allons-nous renoncer, même pour les petits enfants, à la vérité de la mort et de la résurrection avec Christ ? On perdrait alors les fondements du christianisme, et on retomberait facilement et vite sur un terrain juif et une expérience juive.
Le Seigneur fasse que nous tous, quel que soit notre niveau de croissance, soyons toujours plus désireux de saisir ce pour quoi nous avons également été saisi par Jésus-Christ ! [Phil. 3:12].