ANDRÉ Georges
Table des matières abrégée :
Table des matières détaillée :
1.1 - Stéphanas 1 Cor. 16:15-18
1.2 - Épaphrodite Phil. 2:25-30 ; 4:18-20
1.3 - Onésiphore 2 Tim. 1:16-18
2.1 - Étienne : « Ton témoin » (Actes 22:20)
2.2.1 - « L’évangéliste » (Actes 21:8)
2.2.2 - « L’Éthiopien » (v. 26-40)
3.1 - Lydie (Actes 16:14-15, 40)
4.1 - AQUILAS - APOLLOS – ÉPAPHRAS
4.1.1 - Aquilas et Priscilla (Actes 18:1-3, 18-19, 26)
4.1.2 - Apollos (Actes 18:24-28)
4.1.3 - Épaphras (Col. 1:7-8 ; 4:12-13)
4.2 - SILAS - ARISTARQUE - TYCHIQUE
4.3.1.2 - L’accueil de Saul à Jérusalem
4.3.1.3 - À Antioche (Actes 11:22-30)
4.3.1.4 - Le premier voyage avec Paul
4.3.1.5 - La séparation (Actes 15)
4.3.2 - Luc « Le médecin bien-aimé » (Col. 4:14)
1 Corinthiens 4:1
« Le Dieu à qui je suis et que je sers »
(Actes 27:23)
Dans ses épîtres Paul ne se présente pas toujours comme apôtre, mais parfois comme esclave (doulos), soulignant par là qu’il est la propriété de son Maître, dont il dépend entièrement.
Il est aussi serviteur (diakonos) en relation avec son travail. Ainsi en 2 Corinthiens 6:4, où il se recommande comme serviteur de Dieu. Tel était Épaphras en Colossiens 1:7. Le mot a donné « diacre », correspondant entre autres à 1 Timothée 3:8.
Mais quand Paul ajoute « … que je sers », il ne s’agit plus d’un service courant ; lorsque le mot se réfère à un service envers Dieu, il implique la révérence, l’adoration (ainsi par exemple Actes 24:14 : je sers (latreuô) le Dieu de mes pères).
D’autres mots encore sont employés pour serviteur ou service. Mais celui de notre titre « hupêretês » signifie à l’origine un sous-rameur. Pas même un marin, mais un subordonné qui agit sous la direction d’un autre. Ainsi sont désignés Jean-Marc en Actes 13:5 et Paul lui-même en Actes 26:16. Dans notre passage, l’apôtre souligne la position d’humilité qu’il prend avec Apollos vis-à-vis des Corinthiens, qui « s’enflaient pour l’un contre un autre » (1 Cor. 4:6). Mais il convenait de mettre aussi en évidence que tous deux étaient des « administrateurs » des mystères de Dieu, conscients de la responsabilité confiée par le Seigneur quant à sa Parole.
Un serviteur fidèle se
laissera conduire par son Maître et agira dans sa dépendance. Il se souviendra
toujours qu’il Lui appartient, mais aussi qu’il est appelé à remplir
soigneusement le service reçu ; dans le sentiment de la grâce
qui lui est accordée de pouvoir
servir, ses pensées s’élèveront vers le Donateur de toutes choses qu’il adore
(« sers » 2 Tim. 1:3).
« Ayant ce
ministère comme ayant obtenu miséricorde
nous ne nous lassons point » (2 Cor. 4:1). Quand on parle de service, on
croit facilement accomplir un devoir, ou, sans le dire, s’acquérir un mérite ou
quelque réputation. De fait, c’est une grâce que le Seigneur accorde aux siens
de pouvoir accomplir quelque service que ce soit. Si l’on en est conscient, on
ne se lassera pas. Il est relativement facile de commencer, mais persévérer
sans se lasser… ? Un serviteur du Seigneur, un frère, une sœur, fidèles
tout le long de leur vie sont un des grands témoignages de cette grâce :
ils ne se sont pas lassés.
« Nous ne nous lassons point ; mais si même notre homme extérieur dépérit, toutefois l’homme intérieur est renouvelé de jour en jour » (v. 16). Sans ce renouvellement quotidien de la vie intérieure, il n’est point de persévérance. « Nous avons ce trésor dans des vases de terre, afin que l’excellence de la puissance soit de Dieu et non pas de nous » (v. 7).
Il importe de discerner
les occasions que le Seigneur place devant nous et de s’y engager humblement.
L’apôtre dit à Timothée (2 Tim. 2:15) : « Etudie-toi à te présenter
approuvé à Dieu
, ouvrier qui n’a pas
à avoir honte, exposant justement la parole de la vérité ». Qu’il s’agisse
de la présentation de la Parole, ou d’un autre service, chacun encourra des
critiques, plus ou moins bienveillantes ! « Ne mets pas ton cœur à
toutes les paroles qu’on dit », relève l’Ecclésiaste (7:21). S’adressant à
son enfant dans la foi, Paul l’engage à s’étudier à se présenter approuvé à Dieu
. L’approbation des hommes ne
compte pas avant tout ; après avoir examiné devant le Seigneur avec soin
les objections fondées qu’on a pu recevoir (« étudie-toi »), s’en
remettre à Lui, sans se laisser décourager, quel que soit le service. Le menu
n’aura peut-être pas plu à l’hôte d’une sœur qui exerçait l’hospitalité ;
elle a pourtant fait de son mieux « pour le Seigneur » ; et s’en
remet à Son appréciation.
« Chacun » a
reçu quelque don de grâce et est invité à l’employer « les uns pour les
autres comme bon dispensateur de la grâce variée de Dieu » (1 Pierre 4:10).
Romains 12 souligne qu’il importe de servir « selon
la mesure de foi que Dieu a départie à chacun… selon
la grâce qui nous a été
donnée », et 2 Corinthiens 10:13 ajoute « selon
la mesure de la règle que le Dieu de mesure nous a
départie » (cf. 1 Cor. 12:18).
En conclusion, l’apôtre engage à « abonder toujours dans l’œuvre du Seigneur, sachant que votre travail n’est pas vain dans le Seigneur » (1 Cor. 15:58). Mais à la base de tout, il faut l’amour (1 Cor. 13).
Nous considérerons donc divers serviteurs de Christ, chacun marqué par un caractère particulier.
Les premiers par leur dévouement
: Stéphanas —
Épaphrodite — Onésiphore. Deux autres dont le témoignage
est souligné au début des Actes : Etienne envers
les Juifs, fidèle jusqu’à la mort ; et Philippe envers les Samaritains
puis envers l’eunuque d’Éthiopie.
Le service discret
d’une Lydie, d’une Phœbé, d’une Tabitha, chacune
dans son domaine : l’hospitalité, le service pour l’assemblée, le travail
diligent pour les pauvres.
Enfin divers compagnons de Paul
:
Un Apollos, docteur qui se laisse pourtant enseigner par Aquilas et sa femme, pour ensuite être d’un grand profit aux Corinthiens. Épaphras plein de sollicitude pour les Colossiens. Aquilas accueille ; Apollos enseigne ; Épaphras prie.
Un Silas, au don de prophète, participant au deuxième voyage, persévérant malgré la persécution endurée à Philippes ; Aristarque, fidèle compagnon de la fin de la carrière itinérante ; Tychique, que l’apôtre envoie aux assemblées pour porter des lettres, des nouvelles, et en quérir.
Un Barnabas enfin, qui accueille le jeune Saul à Jérusalem ; puis va le chercher à Tarse pour, avec lui, enseigner l’assemblée d’Antioche ; et partage ensuite son premier voyage. Luc, fidèle jusqu’au bout, médecin bien-aimé, qui n’a pas abandonné Paul pendant « l’hiver » de la prison finale.
Quel que soit son don particulier, le dévouement est le propre d’un serviteur. De fait, ce n’est pas un don comme le service de la Parole, mais une qualité à laquelle tout croyant est appelé.
« Vous connaissez la maison de Stéphanas, qu’elle est les prémices de l’Achaïe, et qu’ils se sont voués au service des saints ».
Vous connaissez bien cette famille, dit l’apôtre. Chacun sans doute a bénéficié de leur fidèle service. Le père n’a pas été seul actif, mais toute sa maison, son épouse, ses enfants. Ils étaient « les prémices de l’Achaïe », parmi les premiers convertis ; Paul les avait baptisés (1:16). Par quoi les connaissait-on si bien ? N’étaient-ils pas, comme dit l’apôtre à Tite, « les premiers dans les bonnes œuvres » (Tite 3:14) ? Ils s’étaient « voués » au service des saints. Ce mot implique à la fois décision et humilité : pas un service occasionnel, pas pour se faire bien voir, mais un zèle vraiment produit par l’amour. Stéphanas : non un homme de 1 Corinthiens 14, mais de 1 Corinthiens 13 ! Aux Romains, l’apôtre avait écrit : « Que chacun de nous cherche à plaire à son prochain, en vue du bien, pour l’édification. Car aussi le Christ n’a pas cherché à plaire à lui- même » (15:2-3).
Il ne nous est pas dit que Stéphanas présentait la Parole ou exhortait. Lui et les siens donnaient l’exemple ! Et cela dans une assemblée tourmentée, souvent hostile à l’apôtre, où il y avait suffisance, et corruption, et disputes… Tranquillement, se souvenant que tous les frères étaient des « saints », la maison de Stéphanas poursuivait son service.
Aussi Paul peut-il
exhorter les Corinthiens à se soumettre à de tels
hommes et « à quiconque coopère à l’œuvre et
travaille » (v. 16). Non pas une soumission légale ou servile, mais une
estime reconnaissante pour de tels frères (v. 18).
À Éphèse, d’où apparemment il écrivait sa lettre, l’apôtre avait rencontré à la fois bien des encouragements, mais aussi beaucoup d’opposition, au point d’en avoir « désespéré même de vivre » (2 Cor. 1:8). Mais voilà qu’un jour était apparu Stéphanas avec ses deux amis, Fortunat et Achaïque, qui venaient « suppléer à ce qui avait manqué » de la part des Corinthiens. Probablement un secours matériel, que d’ailleurs Paul n’aurait pas accepté de l’assemblée de Corinthe, parce qu’il s’y trouvait des gens qui s’en seraient prévalu pour dire que Paul les visitait dans un but intéressé. Mais surtout les trois hommes, Stéphanas en tête, avaient « recréé son esprit ». Que de chagrins l’apôtre avait eus au .sujet des Corinthiens. Il pouvait bien dire qu’ils étaient « restés en arrière » (traduction littérale de « ce qui a manqué »). Maintenant son esprit était « rafraîchi » (cf. Phm. 7:20). Il voulait bien espérer qu’à cette nouvelle celui des Corinthiens eux-mêmes en serait réconforté.
Par-dessus tout « reconnaissez de tels hommes », c’est-à-dire prenez un rang inférieur à leur égard. D’autres coopèrent à l’œuvre et travaillent ; ce ne sont pas nécessairement des docteurs, ou des conducteurs, si utiles soient-ils, mais des frères qui, dans la pratique, rendent tant de services divers, et réconfortent les cœurs des saints.
Épaphrodite avait fait un long et dangereux voyage pour apporter à Paul, prisonnier, un don de la part des Philippiens (2:25 ; 4:18).
L’apôtre lui donne cinq titres divers, qui parlent d’eux-mêmes : « mon frère, mon compagnon d’œuvre, mon compagnon d’armes, votre envoyé et ministre pour mes besoins ». Il donnera ce nom de frère à bien d’autres, mais dira rarement « mon frère ». Philémon est son compagnon d’œuvre ; Archippe son compagnon d’armes (Phm. 1:2).
Pour accomplir son service, Épaphrodite avait exposé sa vie (2:30, 27). Une grave maladie s’était déclarée ; Paul n’a fait aucun miracle pour le guérir, pas plus qu’il n’en a jamais fait pour un croyant. Dieu a eu pitié de lui, dit-il, évitant et à Paul et aux Philippiens un grand sujet de tristesse.
Épaphrodite est celui
qui transmet
des dons et de la joie
(4:18 ; 2:28-29). Paul l’a prié de retourner à Philippes. Malgré les
dangers de la route, Épaphrodite était toujours disponible, « messager
fidèle pour ceux qui l’envoient » (Prov. 25:13).
Combien il importe d’apprécier de tels serviteurs : « Honorez de tels hommes… Recevez-le dans le Seigneur » (2:29). « Pour l’œuvre » il a exposé sa vie. Il a participé au sacrifice et au service de la foi des Philippiens. L’apôtre s’en réjouit avec eux tous (2:17).
De longs voyages ne sont plus nécessaires aujourd’hui pour transmettre aux serviteurs du Seigneur dans les champs lointains les contributions des assemblées. Mais nos frères qui s’en occupent accomplissent un très grand travail de correspondance, d’intérêt affectueux, de conseils souvent nécessaires et bienvenus. Ils savent aussi se rendre sur les lieux pour mieux comprendre quels sont les besoins, quels encouragements il y a eu, quelles réponses le Seigneur a données aux prières, afin à leur tour d’en informer ceux qui, au pays, s’intéressent aux serviteurs expatriés et intercèdent pour eux. C’est bien un service public, un « office » (leitourgia) accompli avec dévouement (cf. Rom. 15:27).
Un croyant d’Éphèse.
Son nom signifie « celui qui apporte profit », qui console
. C’est bien ce qui l’a marqué.
Pour pouvoir consoler les autres, il faut avoir été consolé soi-même, et par le
Seigneur, et peut-être aussi par ses frères (2 Cor. 1:4).
L’apôtre en rend un beau témoignage : « Tu sais mieux que personne combien de services il a rendus dans Éphèse ». Nous ignorons quels étaient ces services, mais le Seigneur ne les a pas oubliés. Quant à lui-même, Paul peut dire : « Il m’a souvent consolé ». Un simple croyant consoler un apôtre !
À son passage à Milet (Actes 20) Paul avait dit aux anciens d’Éphèse qu’ils ne verraient probablement plus son visage. Ils avaient beaucoup pleuré, s’étaient jetés à son cou, l’avaient couvert de baisers. Quelques années après, que devait dire le vieil apôtre, captif à Rome pour la seconde fois ? « Tous ceux qui sont en Asie,… se sont détournés de moi » (2 Tim. 1:15) !
Onésiphore n’est pas appelé comme d’autres un compagnon d’armes, mais on pourrait dire un compagnon de peine. Paul n’était pas un surhomme. Combien il avait apprécié l’encouragement apporté par un Onésiphore.
Et voilà qu’un jour, dans cette terrible prison romaine, la porte s’ouvre, et qui apparaît devant l’apôtre, abandonné de presque tous ? — Onésiphore ! Il avait fallu beaucoup de courage et de persévérance à l’Éphésien pour trouver l’apôtre. Il n’avait pas eu honte de sa chaîne et avait dû chercher très soigneusement pour le trouver. N’y avait-il personne dans l’assemblée de Rome pour indiquer à Onésiphore où était Paul, comment on pouvait l’atteindre ? Personne de l’assemblée n’allait-il le voir de temps à autre ? Apparemment pas ! Pourtant lorsque Paul était arrivé à Rome, les frères étaient venus à sa rencontre, et Paul en avait rendu grâces à Dieu et pris courage (Actes 28:15). Mais maintenant… ?
Onésiphore semble être allé de lui-même vers le vieil apôtre ; il n’avait pas été envoyé par l’assemblée d’Éphèse. Mais il venait avec son cœur. Et combien l’apôtre l’a senti.
« Le Seigneur fasse miséricorde à la maison d’Onésiphore ». Onésiphore lui seul avait consolé, avait rendu des services, était venu à Rome. Mais une bénédiction particulière allait reposer sur sa famille, parce que lui, le père, avait été fidèle ; et lui- même au jour où tout sera manifesté (« dans ce jour-là » v. 18), miséricorde lui sera faite de la part du Seigneur.
L’apôtre va clore sa dernière lettre (2 Tim. 4:19). Il fait saluer les vieux amis, Prisca et Aquilas ; puis il ajoute : « …et la maison d’Onésiphore ». Peut-être le père était-il décédé, ou n’était-il pas encore rentré de son voyage. Il n’en reste pas moins que la toute dernière salutation de l’apôtre est pour la maison de ce fidèle serviteur.
Le dévouement ne demande pas un grand don, mais un grand cœur.
Les chapitres de la Parole qui nous présentent le témoignage d’Étienne et de Philippe se placent tout au début de l’histoire de l’Église, à cette époque de fraîcheur où elle était encore en quelque sorte judéo-chrétienne. Il y avait eu de remarquables manifestations de la puissance de l’Esprit, mais l’ennemi était là pour, s’il était possible, l’entraver, ou même pour détruire le nouvel édifice que le Seigneur allait bâtir : l’opposition des autorités, leurs menaces, leurs sévices ; puis la ruse de l’ennemi dans le cas d’Ananias et Sapphira ; enfin, une contestation entre frères Hellénistes et Juifs de Jérusalem (Actes 6). Les Hellénistes, apparemment Juifs de la dispersion qui se trouvaient dans la ville temporairement ou en permanence, devaient logiquement parler grec, leurs frères juifs, araméen. Leurs cultures, leurs éducations, leurs manières de voir les choses, étaient bien différentes au point de vue humain, d’où une tension sous-jacente, même entre frères. On en retrouve l’écho aussi dans l’assemblée de Rome, entre croyants venus du judaïsme et ceux des nations (Rom. 14). À Jérusalem il semble que les murmures des Hellénistes contre les Hébreux, « parce que leurs veuves étaient négligées dans le service journalier », n’étaient qu’un prétexte suscité par l’ennemi pour cristalliser cette tension existante (v. 1).
Avec sagesse et amour, les apôtres disent à la multitude de proposer sept hommes d’entre eux, ayant un bon témoignage, pleins de l’Esprit Saint et de sagesse, qui soient établis sur cette affaire. Il ne convenait pas qu’eux-mêmes s’en occupent directement. L’assemblée n’est pas nommée (les apôtres en faisaient partie), mais plutôt « la multitude » des disciples, qui d’ailleurs étaient ceux qui fournissaient les fonds nécessaires à la communauté (4:32-35). Sept hommes sont choisis, tous des Hellénistes d’après leurs noms ; ils sont présentés aux apôtres, qui, après avoir prié, leur donnent la main d’association. Ces sept vont s’occuper du problème ; il semble bien qu’il ait été résolu, puisqu’au verset 7 il n’y avait plus d’entrave à la « croissance » de la Parole de Dieu. Ce service de « diacre » allait mener plus loin ceux qui l’accomplissaient fidèlement, en particulier Étienne et Philippe (cf. 1 Tim. 3:13).
Son nom signifie couronne. Il avait dû faire la joie de ses parents à sa naissance pour qu’ils lui donnent un tel nom. Sans doute ne soupçonnaient-ils pas qu’un jour leur fils recevrait la couronne du martyre (Apoc. 2:10) !
La « multitude » n’avait pas choisi n’importe qui pour accomplir ce service de diacre. Il y fallait « un bon témoignage ». Étienne en particulier était un « homme plein de foi et de l’Esprit Saint » (v. 3 et 5). Son activité a été tout d’abord matérielle. Dans un cas de ce genre, ce sont bien, d’après 2 Corinthiens 8:23, les assemblées qui « envoient ». Il n’en est pas de même lorsqu’il s’agit du service de la Parole, où l’ouvrier dépend directement du Seigneur, tout en recherchant la communion de ses frères. La seule occasion où l’assemblée envoie est celle de Barnabas (Actes 11:22) en qui elle avait toute confiance. Il faut aussi distinguer entre l’appel fondamental au service (Gal. 1:1) et les directions dans le service (par ex. Actes 16:6, 9-10).
Le Seigneur avait en vue pour Étienne un témoignage extérieur qui allait s’élargissant. Il était « plein de grâce et de puissance parmi le peuple » (v. 8). Bien vite quelques-uns se lèvent et disputent contre lui (v. 9). Ne pouvant résister à la sagesse et à l’Esprit par lequel il parlait, ils subornent des hommes qui portent contre lui des accusations similaires à celles que l’on avait portées contre le Seigneur Jésus : détruire le temple, parler contre la loi. Ce fut l’occasion pour Étienne de rendre aux Juifs un témoignage tout particulier, basé sur la Parole, en leur présentant tout le conseil de Dieu depuis Abraham jusqu’à Christ.
Son discours est encadré par la gloire de Dieu. Au début : « Le Dieu de gloire » s’est révélé à Abraham (7:2) ; à la fin du discours brusquement interrompu, Étienne a les yeux attachés sur le ciel et « voit la gloire de Dieu » (v. 55). Il en porte le reflet sur son visage, « comme le visage d’un ange » (6:15). Jacob, au pied de l’échelle, avait vu les anges monter et descendre sur elle. Étienne, pour ainsi dire au sommet de l’échelle, réalise la contemplation « à face découverte de la gloire du Seigneur, étant transformé en la même image, de gloire en gloire » (2 Cor. 3:18).
Quelle hardiesse, et à la fois quelle sérénité, devant ses accusateurs (v. 51-55). Avant la lapidation, alors que tous frémissaient de rage et grinçaient des dents contre lui, plein de l’Esprit Saint, il voyait « les cieux ouverts et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu ». Pourquoi « debout » ? Jésus était-il là, prêt à accueillir le premier des martyrs ? Mais aussi prêt à revenir pour son peuple, si le témoignage d’Étienne avait été reçu ? (cf. Mat. 22:6-7 ; 21:38-41 ; Luc 19:14).
Et, dans ses derniers
moments, quel parallèle remarquable avec son Maître. Le Seigneur Jésus avait
dit : « Père, entre tes mains je remets
mon esprit ». Lui pouvait en quelque sorte détacher volontairement sa vie
de son corps (Jean 10:18). Étienne dit : « Seigneur Jésus, reçois
mon esprit » (v. 59). —
Jésus avait dit : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils
font ». Étienne ne peut le dire, le temps de l’ignorance était révolu, les
Juifs avaient positivement rejeté leur Messie. Aussi sa prière pleine d’amour
est-elle : « Seigneur, ne leur impute point ce péché ». — Jésus
a « rendu l’esprit » (Mat. 27:50) ; Étienne s’est
« endormi ». Au jour de la résurrection, avec tous les rachetés, il
se « réveillera et sera rassasié de Son image » (Ps. 17:15).
La communion d’Étienne et de Philippe dans le même service n’a duré qu’un temps bien court. Étienne s’est endormi après avoir rendu son témoignage ; il semblait ne pas y en avoir de résultat visible. Pourtant, si « Saul consentait à sa mort », l’attitude du martyr devait être le début du tournant de sa vie. Le témoignage d’Étienne faisait partie de ces « aiguillons » contre lesquels le Seigneur lui dit qu’il était dur de regimber (Actes 26:14). Quand Saul a la vision du Seigneur dans le temple de Jérusalem, il rappelle avec honte qu’il était « présent et consentant » à la mort d’Étienne ; alors Jésus peut lui dire : « Va, car je t’enverrai au loin vers les nations » (Actes 22:20-21).
Le témoignage de Philippe sera tout autre. Il s’étendra au loin ; il n’aura pas duré quelques mois seulement, mais toute une longue vie ; le serviteur en verra les fruits. Ni l’un ni l’autre n’ont choisi le chemin qu’ils devraient suivre, mais dans la dépendance du Seigneur ils ont été fidèles à ce qui était placé devant eux. Lequel des deux a le mieux « réussi sa vie » ? Tous deux sans doute, puisque tous deux, selon Ses voies mystérieuses, dans l’obéissance, ont glorifié Dieu.
Le service de Philippe comme diacre est interrompu par la persécution qui disperse les croyants dans les contrées de Judée et de Samarie (Actes 8:1).
Malgré le grand chagrin qu’il ressent de la mort de son cher ami, Philippe ne s’attarde pas à mener deuil sur son compagnon (d’autres le feront, v. 2), mais il descend en Samarie et prêche le Christ. Il s’est « levé de devant son mort » et va apporter la joie à ceux qui reçoivent l’évangile qu’il présente (v. 8, 39). Il ne s’est pas laissé décourager, mais va dans cette contrée hostile aux Juifs pour y parler du Seigneur Jésus lui-même. Il ne prêche pas des doctrines, mais « le Christ » (v. 5, 12, 35).
Les apôtres restés à Jérusalem sont de cœur avec lui et envoient Pierre et Jean « pour que les Samaritains reçoivent l’Esprit Saint » (v. 15). En effet, c’est à Pierre que le Seigneur avait confié les « clés du royaume des cieux » (Mat. 16:19) ; l’apôtre en avait ouvert la porte aux Juifs (Actes 2), ici aux Samaritains ; il le fera pour les nations chez Corneille (Actes 10).
Philippe était descendu en Samarie conduit par le Seigneur, sans avoir été ni envoyé par ceux de Jérusalem, ni même les avoir consultés ; mais il est heureux d’accueillir les apôtres, qui à leur tour évangélisent plusieurs villages des Samaritains (v. 25).
La prédication de Philippe en Samarie avait porté beaucoup de fruit et amené « une grande joie ». Abruptement, un « ange du Seigneur » lui dit de s’en aller sur le chemin de Gaza, « lequel est désert ». Faut-il vraiment abandonner tous ces jeunes croyants, au lieu de les affermir dans la vérité ? Philippe ne demande pas pourquoi, mais se lève et s’en va. Il entreprend cette longue route à pied, pour arriver juste au moment où passait le char de l’intendant. L’Esprit lui dit de s’y joindre. Comment un homme couvert de poussière et harassé de la route pouvait-il se présenter à un personnage aussi important ? Mais il accourt ; il s’empresse de répondre au besoin ; Jésus avait dit à Zachée : « Descends vite » ; le père « court » au-devant du prodigue. Philippe va se mettre au niveau de l’eunuque sans chercher à s’imposer : il « s’assied avec lui » ; ainsi avait fait Ézéchiel avec les captifs (3:15), et le Seigneur lui-même, tant de fois avec ses disciples (Mat. 5:1 ; Marc 9:35). Il « ouvre sa bouche », comme autrefois Elihu (Job 32:20). Il saisit l’occasion de l’écriture que lisait l’eunuque pour lui annoncer, non pas des doctrines, mais « Jésus ». L’Esprit de Dieu opère ; l’Éthiopien demande le baptême ; et quand ils sont remontés de l’eau, l’Esprit du Seigneur enlève Philippe. L’eunuque continue son chemin « tout joyeux » parce que Jésus, « l’Agneau dont la vie a été ôtée de la terre », remplit son cœur. Quel contraste avec le jeune homme riche, qui, n’ayant pas voulu suivre Jésus, s’en allait tout triste (Marc 10:22).
Philippe persévérera dans le service d’évangéliste que le Seigneur lui confie, à travers toutes les villes, « jusqu’à ce qu’il arrive à Césarée ». Là il s’établira (Actes 21:8), se mariera, aura famille, quatre filles certainement attachées au Seigneur et dont le témoignage est souligné. Paul et ses nombreux compagnons seront accueillis dans cette maison hospitalière.
Le service du Seigneur n’est pas l’apanage des hommes, les sœurs y ont aussi leur part. Considérons tout d’abord la place de la femme dans la Parole de Dieu. Dès le chapitre 2 de la Genèse, l’Éternel fait à l’homme « une aide qui lui corresponde ». Dans l’histoire profane, l’homme en a bien plutôt fait son esclave, aujourd’hui encore en divers pays. La Parole nous présente les choses autrement, qu’il s’agisse d’épouse ou de mère : la foi de la mère de Moïse, qui partage celle de son mari ; la prière d’Anne, solitaire ; les mères pieuses de divers rois de Juda. Proverbes 31 parle de l’épouse qui « fait du bien à son mari et non du mal, tous les jours de sa vie » (v. 12).
Déjà la loi de Moïse avait placé père et mère sur le même plan : « Honore ton père et ta mère » (Ex. 20:12), exhortation que reprendra Éphésiens 6:2. Il y a pourtant un danger pour la mère d’être ou trop restrictive, concentrée uniquement sur sa famille, ou insatisfaite d’une vie trop monotone. Il vaut donc la peine de souligner les services qui lui sont présentés : l’hospitalité, exercée par la veuve de Sarepta, ou la Sunamite (1 Rois 17 ; 2 Rois 4) ; le travail des femmes qui filaient pour les tentures du tabernacle, selon que leur cœur les y portait (Ex. 35:25-26) ; celles qui assistaient le Seigneur de leurs biens (Luc 8:2-3), ou le recevaient dans leur maison (10:38-42) ; l’exercice de la bienfaisance, dont une pauvre veuve avec ses deux pites est un modèle (Luc 21:1-4), et dont Tabitha donne l’exemple (Actes 2:36-39).
Et les sœurs non mariées peuvent, parfois avec d’autant plus de liberté, accomplir bien des services pour le Seigneur et les siens.
Les femmes chrétiennes
ont une place privilégiée dans les Actes. Elles répondent nombreuses à la
prédication de l’évangile (5:14 ; 8:12 ; 17:4, 34, etc). Si elles
avaient part à la foi, elles participaient aussi à la persécution : Saul
traînait « hommes et
femmes pour
être jetés en prison » (Actes 8:3 ; 9:2). Quand pour la première fois
l’apôtre et ses compagnons mettent le pied en Europe, après un si long voyage,
c’est « aux femmes qui étaient assemblées » qu’ils parlaient (Actes
16:13).
Nous en retiendrons trois, de conditions sociales et familiales apparemment bien différentes : Lydie, la marchande de pourpre, mariée et ouvrant sa maison ; Phœbé, probablement célibataire, servante de l’assemblée ; puis Tabitha, qui paraît plus âgée, peut-être veuve, qui pensait surtout aux pauvres, active pour les autres.
Il n’y avait pas de synagogue à Philippes ; on avait coutume de faire la prière au bord du fleuve ; s’étant assis là, Paul et ses compagnons parlaient aux femmes, se mettant à leur niveau, comme un Autre l’avait fait au puits de Sichar. Une âme est touchée, une prosélyte qui « servait » (révérait) Dieu. Il voyait les besoins dans son cœur, cette bonne terre où allait tomber la semence de la Parole. Elle avait laissé son commerce pour venir à la réunion de prière ; elle écoute ; le Seigneur lui ouvre le cœur ; elle est attentive. Par la foi elle reçoit l’évangile ; elle est baptisée, ainsi que sa maison. Paul et Silas auraient pu se dire, à quoi bon venir si loin pour une âme ?
« Si vous jugez que je suis fidèle au Seigneur, entrez dans ma maison » : pas une invitation polie, mais pressante : « elle nous y contraignit ». « Demeure avec nous », disaient les disciples d’Emmaüs au soir de la résurrection. Les uns reçoivent les serviteurs du Seigneur et les entourent ; d’autres les repoussent : un Gaïus (3 Jean 5-8) — un Diotrèphe (v. 10).
Un cœur s’est ouvert. Maintenant une maison, une famille, s’ouvrent pour les serviteurs du Seigneur. Quelques frères s’y retrouveront (v. 40). Ainsi se forme la première assemblée en Europe.
Les moments de communion chez Lydie, avant et après la prison, ont été bien courts : « Ayant vu les frères, ils les exhortèrent et partirent ». Pourtant la reconnaissance d’avoir été conduits là remplissait le cœur des serviteurs lorsqu’ils poursuivaient leur route. Quand Paul écrira aux Philippiens, il rendra grâces à Dieu « pour tout le souvenir que j’ai de vous… à cause de la part que vous prenez à l’évangile, depuis le premier jour jusqu’à maintenant » (Phil. 1:3-5). De la prison de Philippes à la prison de Rome, il avait eu la joie de voir des âmes venir au Seigneur, pour lesquelles il était si heureux de prier.
N’avait-il pas valu la
peine de s’asseoir
avec les quelques
femmes au bord du fleuve ? De nos jours il est difficile de grouper
beaucoup de monde pour entendre l’Évangile. Mais le Seigneur ouvre des portes
nombreuses à ceux et celles qui savent ouvrir leur maison, recevoir quelques
personnes, considérer la Bible avec elles, prier ensemble. Ce ne sont pas des
évangélistes, mais des témoins.
L’Évangile nous parle des « femmes du chemin » (Luc 8:2-3), telle une Marie de Magdala ; aussi des « femmes qui écoutent », entre autres Marie de Béthanie (10:39). Elle ne sera pas au tombeau : elle avait versé son parfum sur les pieds du Seigneur au bon moment, en vue de sa sépulture. Les « femmes du chemin » sont venues apporter leurs parfums à un sépulcre vide. Une Marie de Magdala, si attachée à son Maître, n’avait pourtant pas compris qu’il devait ressusciter. Les unes et les autres ont eu leur part. Celles du chemin, qui L’avaient suivi depuis la Galilée et L’avaient servi, étaient au pied de la croix. Leur cœur les avait amenées là, même si leur intelligence spirituelle insuffisante les conduira aussi au tombeau, « chercher parmi les morts Celui qui est vivant ». Marie de Béthanie n’y était pas.
La longue liste de noms de Romains 16 fait penser au jour où tout sera mis en lumière, où « chacun recevra ce qu’il aura fait dans le corps, soit bien, soit mal ». Les péchés auront été effacés par le sang de Christ. Mais retracer les étapes du chemin couvert de faux pas rendra chacun d’autant plus conscient de la grâce infinie qui y a pourvu. Le bien, Lui l’aura produit par son Esprit ; il en sera « glorifié dans ses saints et admiré dans tous ceux qui auront cru » (2 Thess. 1:10).
En tête de liste, nous trouvons Phœbé, « notre sœur, servante de l’assemblée à Cenchrée », en aide à plusieurs, à l’apôtre lui-même. On la voit comme à l’affût de se dévouer, que ce soit pour la probablement petite assemblée, pour les familles, pour les enfants, pour les malades ; à la disposition du Seigneur pour une tâche que des frères n’auraient pas su accomplir.
Recevez-la dans le Seigneur, dit l’apôtre à l’assemblée de Rome « comme il convient à des saints », et « assistez-la dans toute affaire pour laquelle elle aurait besoin de vous ». Elle a aidé les autres ; elle appréciera votre appui dans cette grande ville inconnue. Rendez-lui les services nécessaires, elle qui en a tant rendu.
Très probablement, Phœbé emportait à Rome l’épître de Paul, la précieuse épître fondamentale pour tout l’enseignement chrétien, seule femme qui ait eu cet honneur.
« Pleine de bonnes œuvres et d’aumônes », Tabitha n’avait apparemment pas de famille, puisque les disciples prennent soin de sa dépouille lors de sa mort. Aucune mention de parenté n’est faite. Sa sollicitude pour les veuves pourrait faire penser qu’elle l’était elle-même.
Active pour les autres, elle avait le « don de l’aiguille », qui correspond bien à son prénom de Dorcas (gazelle) ! Visiteuse aux mains pleines, elle apportait les vêtements, mais aussi les secours ; « première dans les bonnes œuvres », comme l’apôtre y exhorte en Tite 3:8. Elle accomplissait ce « service religieux pur et sans tache » dont parle Jacques, de visiter les orphelins et les veuves dans leur affliction (1:27).
Elle avait su mettre à profit le temps de sa vie, dont les veuves secourues rendent témoignage en pleurant, parlant des choses qu’elle avait faites « pendant qu’elle était avec elles ».
Quel moment pour Tabitha quand elle se met sur son séant et que Pierre appelle les saints et les veuves montrant les robes et les vêtements, tout ce qu’elle avait fait. À son réveil elle peut constater le travail de toute une vie ! Un témoignage vivant en résulte : « Plusieurs crurent au Seigneur ». Au jour des noces de l’Agneau, le « fin lin » tissé sur la terre, les justes actes des saints, constitueront la robe de l’épouse (Apoc. 19:12).
Aujourd’hui encore peut se continuer le service de ces trois sœurs : ouvrir son cœur, ouvrir sa porte, ouvrir ses mains.
Trois serviteurs bien différents, chacun d’eux fidèle dans ce que le Seigneur lui a confié : Aquilas accueille, et favorise l’harmonie ; Apollos enseigne, et contribue par la grâce à l’avancement de ceux qui ont cru ; Épaphras combat toujours par des prières, pour que les croyants demeurent parfaits et bien assurés dans toute la volonté de Dieu.
Juif du Pont, chassé de Rome avec sa femme (peut-être romaine vu son nom), le couple était venu à Corinthe, après avoir probablement perdu tous ses biens. Leur métier était de faire des tentes. Paul, arrivé seul dans cette ville, va en quelque sorte chercher refuge auprès d’eux ; étant du même métier, ils travaillent ensemble. Un foyer s’est ouvert. Sans doute s’y entretenait-on des choses de Dieu dans une heureuse communion. Une amitié profonde s’est nouée, qui durera jusqu’à la fin de la vie de l’apôtre (2 Tim. 4:19). En ce foyer règne l’harmonie : entre les époux, dans le travail, avec l’apôtre, dans le service du Seigneur ; harmonie plus tard avec Apollos.
Quand il a fallu se déplacer de lieu en lieu, à Éphèse (Actes 18:19), puis à Rome (Rom. 16:4), puis revenir à Éphèse (2 Tim. 4:19), le foyer est toujours ouvert. Le couple apporte la bénédiction avec lui. Paul les désignera comme « compagnons d’œuvre dans le Christ Jésus » (Rom. 16:3). Non seulement ils ont travaillé avec lui, mais pour sa vie ils ont « exposé leur propre cou ». Toutes les assemblées des nations rendaient grâces pour leur service. La Parole est loin de nous en donner tous les détails. Aquilas n’était pas une « tête » pour qui on peut prendre parti (1 Cor. 4:6) ; les deux avaient tout donné pour le Seigneur, leur temps, leur foyer, même exposé leur vie. Ils étaient disponibles pour toutes les occasions placées sur leur chemin. Faut- il s’étonner qu’ils aient attiré sympathie et reconnaissance ?
Six fois le couple est nommé dans la Parole. Trois fois Aquilas vient en tête : comme chef de maison (Actes 18:2) ; pour enseigner Apollos (v. 26) ; pour, avec l’assemblée qui se réunit dans leur maison, saluer affectueusement l’assemblée de Corinthe (1 Cor. 16:19). Priscilla a la première responsabilité en Actes 18:18, lorsqu’on part à Éphèse. Un frère d’autrefois disait : « Quand il faut faire les bagages, Madame vient d’abord » ! En Romains 16:3 et 2 Timothée 4:19, elle est saluée la première : c’est la politesse envers Madame ! Mais combien touchante est, à la fin de Timothée, cette salutation aux vieux amis, quand tous en Asie se sont détournés de l’apôtre.
N’ayant pas d’enfants, ils ont pu d’autant mieux se vouer au service du Seigneur ; Priscilla a dû accepter, en tant que « aide qui corresponde », tout le travail et les inconvénients qui pouvaient en résulter. Ce n’est pas une petite affaire d’avoir l’assemblée dans sa maison et d’y accueillir les serviteurs du Seigneur, et tant d’autres visiteurs. Nous pouvons bien penser aussi que « leurs prières n’étaient pas interrompues » (1 Pierre 3:7). Ensemble appuyés sur le Seigneur, ils formaient, comme le dit l’Ecclésiaste, « la corde triple qui ne se rompt pas vite ». Accueillir chez soi est une joie pour le mari, mais l’épouse en a la peine ; tous deux ouvrent leur cœur.
Apollos est le docteur qui enseigne. Il venait d’Alexandrie, dont l’école était célèbre, où, trois siècles auparavant, on avait traduit l’Ancien Testament en grec, la traduction des 70. Il était éloquent et savait comment présenter « la voie du Seigneur » dans laquelle il était instruit. Il était puissant dans les Écritures, bien sûr celles de l’Ancien Testament, où le Messie était à tant de reprises annoncé. Il parlait avec hardiesse, avec courage. Il enseignait diligemment. Vraiment il avait toutes les qualités, mais… il ne connaissait « que le baptême de Jean ». Il ignorait donc la résurrection du Seigneur Jésus, sa glorification, les résultats de son œuvre, tels que Paul les présentait.
Aquilas et Priscilla entendent sa prédication et se rendent compte de ce qui lui manque. Le couple était parmi les derniers arrivés dans cette grande assemblée ; ils auraient pu se détourner d’Apollos, ou au contraire le réfuter publiquement. Paul n’est pas là, mais le Seigneur pourvoit à l’ignorance d’Apollos. Aquilas et Priscilla le prennent chez eux ; dans cette intimité harmonieuse, dans cette ambiance d’affection, leur aide est acceptée. Apollos, le grand personnage, accepte d’être corrigé par deux ouvriers qui faisaient des tentes ! Quoique nommé en premier, Aquilas n’a pas prié Priscilla de sortir ! Ensemble ils expliquent plus exactement la voie de Dieu. Ils ne disent pas ; Tu es dans l’erreur. Ils prennent la peine de préciser avec soin tout l’enseignement qu’ils avaient eux-mêmes reçu de l’apôtre. Ils ne s’imposent pas, mais parlent avec tact, et Apollos se laisse enseigner. Quelle bénédiction en résulte !
Aussi les frères peuvent-ils lui donner une lettre de recommandation comme serviteur, lorsqu’il se propose de passer en Achaïe. En Romains 16:1, la servante de l’assemblée était recommandée pour qu’on lui prête assistance. En 2 Corinthiens 3:1, l’apôtre lui-même ne demandait pas de lettre de recommandation. Son ministère parlait (v. 2 ; 4:2 ; 10:18). Mais d’autres en avaient besoin, étant inconnus.
Arrivé en Achaïe, Apollos « contribue beaucoup par la grâce à l’avancement de ceux qui avaient cru ». Il n’était pas un évangéliste, mais il « arrosait » (1 Cor. 3:6). Il réfutait publiquement les Juifs « par les Écritures » ; le Seigneur lui-même avait enseigné les deux disciples d’Emmaüs, leur expliquant « dans toutes les Écritures, les choses qui le regardent » (Luc 24:27).
Apollos est conscient que le service utile qu’il peut accomplir n’est qu’une grâce de Dieu. Il avait démontré son humilité en se laissant enseigner par Aquilas. Pourtant les Corinthiens vont s’enfler pour lui contre Paul, l’admirant outre mesure (1 Cor. 4:6).
Quel danger de comparer des serviteurs les uns avec les autres : « Qui est-ce qui met de la différence entre toi et un autre ? Et qu’as-tu que tu n’aies reçu ? Et si aussi tu l’as reçu, pourquoi te glorifies- tu, comme si tu ne l’avais pas reçu ? » (1 Cor. 4:7).
Paul doit rappeler aux Corinthiens que lui, évangéliste qui a « planté » à Corinthe (2:1-2), et Apollos qui a « arrosé », c’est-à-dire enseigné, ne sont que des serviteurs, « comme le Seigneur a donné à chacun d’eux ». « Moi j’ai planté, Apollos a arrosé ; mais Dieu a donné l’accroissement. De sorte que ni celui qui plante n’est rien, ni celui qui arrose, mais Dieu qui donne l’accroissement » (3:7).
C’est un privilège d’être « collaborateurs de Dieu ». C’est une grâce (2 Cor. 4:1 ; 1 Cor. 15:10). Malheur au serviteur qui se croit être au-dessus des autres (Rom. 12:3). Mais malheur aussi à ceux qui « s’enflent pour l’un contre un autre » (1 Cor. 4:6-7).
En refusant d’aller à Corinthe à l’invitation de Paul, Apollos agit avec tact et respect pour son compagnon. Il fallait éviter toute rivalité ou parti. Ne pas non plus avoir l’air de cultiver une animosité contre Paul (1 Cor. 16:12).
Beaucoup plus tard, dix ans peut-être, lorsque Apollos est en Crète, Paul en parle avec affection : « Accompagne avec soin… Apollos, afin que rien ne leur manque » (Tite 3:13).
On se demande parfois qui est le plus important, de l’évangéliste, sans lequel les âmes ne seraient pas amenées au Seigneur, ou du docteur, sans lequel elles ne feraient pas de progrès ! (en cela on oublie déjà que le Seigneur peut opérer dans les âmes sans instrument !). Mais comme nous l’avons vu ci-dessus, « ni celui qui plante n’est rien, ni celui qui arrose ». Le zèle d’un Paul, la connaissance d’un Apollos, n’auraient produit aucun fruit, si Dieu n’avait opéré. Mais « le Seigneur a donné à chacun d’eux » de collaborer à l’édifice que Lui-même construit. Le fondement a été posé ; « que chacun considère comment il édifie dessus » (1 Cor. 3:10).
Paul l’appelle « bien-aimé compagnon de service », quelqu’un sur qui on pouvait compter ; un « fidèle serviteur du Christ », et un « esclave du Christ Jésus » (1:7 ; 4:12).
Il avait apporté l’évangile à Colosses où Paul n’était apparemment pas allé (2:1). Il fait le long voyage d’Asie à Rome pour venir voir l’apôtre et — encouragement pour lui — lui fait connaître premièrement l’amour des Colossiens dans l’Esprit (v. 8). Non pas d’abord les sujets d’inquiétude, mais cet amour qui, sans les excuser, « couvre (ne dévoile pas) une multitude de péchés ».
Il y avait à Colosses des problèmes pour lesquels Épaphras venait consulter Paul : le danger des « discours persuasifs » de la sagesse humaine (2:4, 8), la philosophie, les vaines déceptions de l’enseignement des hommes qui ne sont pas selon Christ ; le légalisme, qui juge les autres et cherche à s’imposer (v. 16-18) ; l’ascétisme qui prétend à la « dévotion volontaire et à l’humilité », mais n’est de fait que « la satisfaction de la chair » qui veut s’acquérir une réputation de sainteté ! (v. 20-23)
Épaphras est avant tout marqué par la prière. Étant loin de Colosses, sachant tous les dangers qui menaçaient ses frères, il « combattait toujours pour eux par des prières » (4:12). Pas un service qui fait briller, mais s’accomplit dans le secret. Il s’y employait constamment, étant « dans un grand travail de cœur » pour les Colossiens, et pour ceux de Laodicée, et pour ceux de Hiérapolis. Peut-être ses amis n’en auraient-ils rien su, si l’apôtre, conduit par l’Esprit de Dieu, n’en avait « rendu témoignage » (4:13).
Quel exemple pour nous, jeunes frères et sœurs ! On ne peut pas être « serviteur » sans la prière. Le parfait Serviteur nous en a donné le modèle, en particulier à sept reprises dans l’Évangile de Luc. En Actes 12, l’assemblée prie pour Pierre. La première chose qui sera dite de Paul après sa conversion : « Voici il prie » (Actes 9:11).
En Philémon 23, nous retrouvons Épaphras auprès de Paul comme « compagnon de captivité dans le Christ Jésus ». Était-il resté dans ce logement que l’apôtre avait loué à Rome avec un soldat qui le gardait ? De fait Tychique et Onésime porteront la lettre (Col. 4:7-9) et informeront les Colossiens de tout ce qui concernait le prisonnier. Pendant ce temps Épaphras, partageant sa captivité, pouvait « toujours » combattre par des prières.
Trois serviteurs bien différents les uns des autres, chacun d’eux fidèle au Seigneur dans ce qu’il avait placé devant lui : Silas, le prophète itinérant, accompagne Paul dans son deuxième voyage — Aristarque, le compagnon de la fin du troisième et du quatrième voyage — Tychique, l’envoyé toujours disponible.
Le premier voyage de Paul et de Barnabas avait « ouvert aux nations la porte de la foi » (Actes 14:27). L’Évangile s’était répandu, des assemblées avaient été formées, des persécutions endurées.
Pendant le séjour des deux apôtres à Antioche, quelques-uns descendus de Judée voulaient imposer aux frères des nations la circoncision et l’observation de la loi. Paul et Barnabas ne cèdent pas, et montent à Jérusalem selon une résolution des frères d’Antioche (15:2), et, quant à Paul lui-même, « selon une révélation » (Gal. 2:2). L’apôtre expose d’abord, « dans le particulier, à ceux qui étaient considérés », l’évangile qu’il prêche parmi les nations. Il ne « cède pas par soumission, pas même un moment, afin que la vérité de l’Évangile demeure » (v. 5). Ensuite vient la réunion avec « les apôtres et les anciens », où le Seigneur intervient pour que les nations ne soient pas soumises à la loi. Barnabas et Paul, dans ce milieu-là, se bornent à « raconter quels miracles et quels prodiges Dieu avait faits par leur moyen parmi les nations ». Grande discussion, intervention de Pierre, puis de Jacques. La décision qui a sauvé l’Église de la division, et probablement de son extinction, est alors communiquée aux assemblées des nations, par une lettre approuvée par les « apôtres et les anciens avec toute l’assemblée ». Paul et Barnabas reçoivent de la part de Jacques et Céphas et Jean, considérés comme des colonnes, la main d’association pour aller vers les nations. (Gal. 2:9).
Pourtant le légalisme n’était pas mort ! Quand Céphas vient à Antioche, Paul doit lui résister (Gal. 2:11). Pierre avait mangé avec ceux des nations ; mais quand des frères viennent de Jérusalem d’auprès de Jacques, il se sépare des gentils, craignant ceux de la circoncision ; il entraîne avec lui d’autres Juifs et même Barnabas. À Colosses aussi, le légalisme cherchait à s’imposer et Paul doit donner un enseignement bien précis à son égard (Col. 2:16-19). De nos jours non seulement il s’est répandu dans la chrétienté et dans certains groupements évangéliques, mais même parfois parmi ceux qui se réunissent au nom du Seigneur.
Pour porter la lettre à Antioche avec Paul et Barnabas, les apôtres et les anciens, avec toute l’assemblée, choisissent Judas et Silas, « hommes d’entre ceux qui tenaient la première place parmi les frères » (Actes 15:28). Pour la première fois le nom de Silas est donc mentionné. Qu’impliquait cette « première place parmi les frères » ne nous est pas dit, mais ayant le don de prophète, le plus grand des dons, et sans doute l’exerçant dans la dépendance du Saint Esprit, il avait été reconnu par ses frères comme ayant une place prépondérante dans l’assemblée de Jérusalem.
On lui fait confiance, ainsi qu’à Judas, et tous deux « ayant été congédiés » vont à Antioche. Ce mot « congédiés » implique qu’ils ne sont pas partis sans être entourés par les frères et par leurs prières. Ceux d’Antioche, quand ils entendent la lecture de la lettre « se réjouissent de la consolation ». Judas et Silas, tous deux prophètes, exhortent les frères par plusieurs discours et les fortifient (v. 32). Combien en effet ils en avaient besoin. Sans doute avaient-ils vécu une période d’attente anxieuse de la décision qui viendrait de Jérusalem. Si l’obligation de la circoncision et de l’observation de la loi avait été maintenue, c’en était probablement fait de l’assemblée d’Antioche, du ministère de Paul et de Barnabas et de tout ce qui a suivi. Mais le Seigneur l’avait promis, parlant de l’assemblée qu’il bâtirait : « Les portes du hadès ne prévaudront pas contre elle » (Mat. 16).
Le ministère de Silas s’est prolongé pendant quelque temps, puis, avec Judas, il est renvoyé « en paix » à Jérusalem (le v. 34 ne paraît pas authentique). Paul et Barnabas restent encore à Antioche et enseignent, avec plusieurs autres aussi, la parole du Seigneur.
Dans sa sollicitude pour les assemblées, Paul songe maintenant à entreprendre un second voyage. Il voudrait aller avec Barnabas visiter les frères là où ils avaient annoncé la parole (v. 36). Barnabas envisage de prendre avec eux son neveu Jean-Marc, mais Paul ne partage pas cette pensée, puisque le jeune homme les avait abandonnés au début du premier voyage. Les deux amis, irrités, se séparent et la Parole ne mentionne pas qu’ils se soient retrouvés. Paul parlera pourtant de Barnabas avec estime aux Corinthiens (1 Cor. 9:6) ; et plus tard Marc sera restauré dans le service. (2 Tim. 4:11).
Maintenant, quel compagnon choisir ? Ce n’est pas l’assemblée qui décide, mais Paul « fait choix pour lui de Silas » (Actes 15:40). Tous deux partent « après avoir été recommandés à la grâce du Seigneur par les frères ».
Silas va partager toutes les expériences de ce deuxième voyage, commençant par la joie des assemblées, lorsqu’on leur remet les ordonnances établies par les apôtres et les anciens à Jérusalem. Elles sont affermies dans la foi, croissent en nombre chaque jour. Puis vient un long déplacement : Phrygie, Galatie, Asie, Mysie, Bithynie, Troade, où il ne semble pas que l’Évangile ait rencontré des échos ou que des assemblées aient été formées. Enfin, de nuit, Paul a la vision pour passer en Macédoine. Timothée qui s’est joint à eux depuis Lystre, et Luc depuis la Troade, les accompagnent en Europe, où ils débarquent à Néapolis et vont de là à Philippes.
Silas va sans doute pouvoir exercer son don de prophète. Mais il n’y a pas de synagogue à Philippes. Seules quelques femmes se réunissent au bord du fleuve, où l’on a coutume de faire la prière. Les quatre s’asseyent et parlent à celles qui étaient assemblées (16:13). Lydie écoute, et nous avons vu quelle bénédiction en résulte.
On continue à aller régulièrement à la prière ; mais un jour, Paul et Silas sont l’objet d’une persécution terrible : leurs vêtements sont arrachés, ils sont fouettés, jetés en prison, les pieds fixés dans le bois. Que faire dans cette horrible situation ? Quelle épreuve pour Silas ! Il avait quitté une place en vue à Jérusalem, où il était retourné après la mission à Antioche. Il avait suivi Paul sur son désir ; avaient-ils vraiment agi selon la direction du Seigneur ? Les deux hommes ne se découragent pas, et pendant la nuit, une prédication extraordinaire s’élève dans cette prison sinistre : « Paul et Silas, en priant, chantent les louanges de Dieu ; et les prisonniers les écoutent » (v. 35).
Un grand tremblement de terre ébranle la prison, les portes s’ouvrent, les liens se détachent, le geôlier veut se suicider, mais Paul intervient, et l’homme tout effrayé demande : « Que faut-il que je fasse pour être sauvé ? » Vient la réponse, toujours valable : « Crois au Seigneur Jésus, et tu seras sauvé, toi et ta maison ». Paul et Silas annoncent la parole à toute la famille ; en cette même heure de la nuit tous sont baptisés. La communion réjouit les cœurs (v. 34).
Libérés, les deux hommes, accompagnés apparemment de Timothée, entrent chez Lydie, voient les frères, les exhortent et partent. L’assemblée était déjà formée, semble-t-il en bien peu de temps. Le ministère de Silas y avait sans doute contribué. Mais les précieux moments de communion ici-bas sont courts, et, malgré leurs plaies mal fermées, les trois serviteurs continuent leur chemin. À Thessalonique, quelques Juifs, persuadés, se joignent à Paul et Silas, une multitude de Grecs, des femmes de premier rang en assez grand nombre. Mais survient la persécution. Pour les protéger, les frères envoient Paul et Silas de nuit à Bérée. Eux, sans crainte, à peine arrivés, entrent dans la synagogue des Juifs, où la Parole est reçue avec bonne volonté. Plusieurs croient. Des femmes grecques de qualité et des hommes aussi.
Les Juifs de Thessalonique provoquent une nouvelle persécution ; les frères renvoient aussitôt Paul, qui s’en va seul à Athènes, Silas et Timothée demeurant encore à Bérée.
En un premier temps, Paul les invite à le rejoindre, mais d’après 1 Thessaloniciens 3, il voit la nécessité de rester seul et d’envoyer Timothée, sans doute avec Silas, à Thessalonique, « pour affermir les Thessaloniciens et les encourager touchant leur foi ».
Tous deux rejoindront Paul à Corinthe avec un don de la part de l’assemblée (Actes 18:5). Paul s’adjoint ces deux compagnons pour écrire les deux épîtres aux Thessaloniciens.
À Corinthe même, Silas continuera son ministère, comme Paul en rend témoignage : « Le Fils de Dieu, Jésus Christ, a été prêché… au milieu de vous par moi et par Silas et par Timothée » (2 Cor. 1:19). Comme autrefois à Antioche, Silas exerçait le don confié par le Seigneur.
Ce n’était pas une petite affaire d’être compagnon de Paul, et de partager toutes les fatigues du voyage, les dangers, les souffrances, mais aussi les joies. Participer à la vie d’un frère entièrement consacré au Seigneur ; porter chaque jour sa croix ; endurer les souffrances ; rendre un témoignage de valeur.
Silas a fait l’expérience que la persécution fait chanter, mais que parfois les chrétiens font pleurer (Phil. 3:18 ; 2 Cor. 2:4, etc). Marc avait eu peur de la persécution au début du premier voyage ; Barnabas avait voulu s’en aller dans son pays d’origine au début du second ; Silas (Silvain) a été, comme le dit Pierre, « un frère fidèle, comme je le pense » (1 Pierre 5:12). C’est la dernière mention que nous ayons de lui ; il a donc écrit sous la dictée de Pierre la première épître de l’apôtre, « attestant que cette grâce dans laquelle vous êtes est la vraie grâce de Dieu ».
Silas a beaucoup reçu : le Seigneur lui a confié un grand don ; il a été choisi, avec tout le crédit que cela implique, pour porter les lettres de Jérusalem à Antioche ; de cette ville, il a été renvoyé « en paix », en témoignage d’appréciation du ministère exercé. Il a été protégé par les frères à Thessalonique. Partout où il a passé, il a apporté la consolation. Un ministère constructif et béni, marqué par le vrai amour et pour le Seigneur, et pour les siens.
Souvenons-nous avant tout de la parole de Jésus lorsque les disciples se disputaient pour savoir qui était le plus grand parmi eux : « Que le plus grand parmi vous soit comme le plus jeune, et celui qui conduit comme celui qui sert… Or moi je suis au milieu de vous comme celui qui sert ». (Luc 22:26-27) Tout le récit de la vie de Silas est empreint de cette humilité.
Peu connu, il est désigné cependant comme fidèle compagnon de Paul : compagnon de voyage (Actes 19:29 ; 20:4 ; 27:2), compagnon d’œuvre (Col. 4:11), enfin compagnon de captivité (v. 10).
2 Corinthiens 11:25-27 nous relate toutes les difficultés des voyages avec Paul. Sans confort, souvent à pied, ou en navire battu par la tempête : « Trois fois j’ai fait naufrage ; j’ai passé un jour et une nuit dans les profondeurs de la mer ; en voyage souvent, dans les périls sur les fleuves, dans les périls de la part des brigands, dans les périls de la part de mes compatriotes, dans les périls de la part des nations, dans les périls à la ville, dans les périls au désert, dans les périls en mer, dans les périls parmi de faux frères, en peine et en labeur, en veilles, souvent, dans la faim et la soif, dans les jeûnes souvent, dans le froid et la nudité ». Aristarque a dû partager tout cela.
Il apparaît pour la première fois dans le théâtre d’Éphèse comme compagnon de voyage de Paul, au milieu de l’émeute où l’on voulait faire un mauvais sort à l’apôtre. C’est un Macédonien ; il vient de Thessalonique. Il avait donc dejà dû accompagner Paul jusqu’à Éphèse, ou l’y retrouver au début de son troisième voyage (Actes 19:1).
Quand le tumulte a cessé, on part pour la Macédoine, et vient en Grèce, où l’on reste trois mois ; de nombreux compagnons se joignent à Paul parmi lesquels se retrouve Aristarque (Actes 20:4). En Troade, on reste sept jours, afin d’être avec les disciples « le premier jour de la semaine… pour rompre le pain » (20:7). Aristarque a sans doute assisté à la chute d’Eutyche et à sa réanimation.
À l’escale de Milet, Paul donne ses exhortations dernières aux anciens d’Éphèse (20:17-38). Aristarque participe à la scène émouvante où l’apôtre les quitte, après avoir prié avec eux qui se jettent à son cou et le couvrent de baisers. Diverses étapes s’échelonnent au cours du voyage, suivies de la longue marche vers Jérusalem. Aristarque n’y est pas expressément mentionné, mais Trophime son compagnon (21:29).
Le quatrième voyage commence à Césarée. Il est décidé de faire voile pour l’Italie. Aristarque est avec l’apôtre, et Luc (27:2). Paul est prisonnier, mais le centurion use d’humanité envers lui. D’escale en escale, on arrive en Crète ; puis l’on se risque, contre l’avis de Paul, a tourner l’île pour trouver un port plus commode pour hiverner. Survient la tempête qui va tout mettre en question. On n’a pas voulu obéir à la parole d’avertissement, et maintenant le naufrage menace les deux cent soixante- seize passagers. Aristarque partage les angoisses, le mal de mer, les jours et les nuits sans manger, sans voir ni soleil, ni étoiles. Il assiste à la démolition progressive du navire. Ce sera, pour finir, à la nage, ou sur un des débris de l’embarcation, qu’il atteindra Malte.
C’est terrible d’assister à un naufrage, en mer bien sûr, mais aussi dans la vie : dans un ménage, dans une famille, voire dans une assemblée. Être impuissant dans une telle situation. Pourtant un ange vient donner l’assurance que tous parviendront à terre sains et saufs, mais à travers quelles péripéties !
On retrouve Aristarque à Rome, compagnon de captivité. A-t-il voulu volontairement rester près de l’apôtre, partager la détention avec lui ? En tout cas, quel encouragement pour Paul ! Avec Marc et Juste, ils sont « les seuls compagnons d’œuvre pour le royaume de Dieu, qui aussi m’ont été en consolation » (Col. 4:11).
Hébreux 13:3 nous exhorte à nous souvenir des prisonniers. Les Hébreux avaient montré de la sympathie pour eux (10:34). Combien de chrétiens sont aujourd’hui prisonniers pour leur foi ! Plus que jamais peut-être dans l’histoire de l’Église ; et l’on pense aux familles dans le besoin, abandonnées à elles-mêmes, tandis que le père gémit au loin. … « Souvenez-vous des prisonniers », tout spécialement dans la prière, saisissant aussi l’occasion d’assister les leurs.
En Philémon v. 24, Aristarque sera encore mentionné avec d’autres comme compagnons d’œuvre de l’apôtre. Quel privilège d’être deux ou plusieurs pour servir ensemble le Seigneur. « S’ils tombent, l’un relèvera son compagnon » (Éccl. 4:10). Jésus a envoyé les disciples deux à deux, donnant ainsi plus de poids à leur témoignage. L’apôtre Paul lui- même n’est pour ainsi dire jamais seul, sauf peut- être au début du troisième voyage. On peut prier ensemble ; prendre conseil l’un de l’autre dans la dépendance du Seigneur ; mieux répondre aux divers besoins rencontrés.
Mais il peut venir un temps, et ce fut le cas pour Jésus lui-même, où tous l’abandonnèrent : « J’ai attendu… des consolateurs, mais je n’en ai pas trouvé » (Ps. 69:20). « Je suis comme le hibou des lieux désolés. Je veille, et je suis comme un passereau solitaire sur un toit » (Ps. 102:6-7). « L’heure vient, et elle est venue, que vous serez dispersés chacun chez soi, et que vous me laisserez seul ; — et je ne suis pas seul, car le Père est avec moi » (Jean 16:32). Tout à la fin de sa vie, ce fut l’expérience de l’apôtre. Plusieurs s’étaient détournés de lui, « Luc seul est avec moi ». Dans sa première défense, personne n’avait été témoin à décharge : « Tous m’ont abandonné… mais le Seigneur s’est tenu près de moi » (2 Tim. 4:16-17).
L’« envoyé » toujours disponible, d’un apôtre prisonnier.
Venu d’Asie il avait rejoint Paul vers la fin du quatrième voyage (Act. 20:4). Le caractère de son service est d’être « envoyé ». Comme en cela il suit les traces de son Maître ! Tout l’Évangile de Jean souligne que Jésus est l’envoyé du Père. Sans doute est-il venu pour faire Sa volonté, mais c’est le Père qui « introduit le Premier-né dans le monde », et alors « tous les anges de Dieu lui rendent hommage » (Héb. 1:6). Tychique n’a pas demandé si le voyage serait agréable, si l’accueil serait chaleureux. Paul l’envoie, il va.
Il va apporter des nouvelles de l’apôtre et quérir des nouvelles des assemblées pour les lui apporter. Il porte même des épîtres. Quelle confiance fallait-il avoir en lui pour lui remettre peut-être le seul exemplaire que Paul avait écrit, et qui allait devenir, étant « Parole de Dieu », la nourriture solide dont l’Église aurait besoin à travers les siècles !
C’est un bien-aimé frère, dit l’apôtre, un fidèle serviteur dans le Seigneur, un compagnon d’œuvre (Éph. 6:21-22 ; Col. 4:7).
Les Éphésiens avaient eu une affection particulière pour Paul. Aussi désire-t-il qu’ils « sachent ce qui le concerne, comment il se trouve ». Tychique vous fera tout savoir. Il est envoyé vers vous tout exprès, afin que vous connaissiez l’état de nos affaires et qu’il console vos cœurs. Non seulement il apportera des nouvelles, mais comme Silas autrefois, également la consolation.
Aux Colossiens de même, l’apôtre envoie Tychique pour leur faire savoir tout ce qui le concerne, mais aussi « pour qu’il connaisse l’état de vos affaires ». Paul désirait être renseigné sur la vie des assemblées. Comme à Éphèse, Tychique consolerait leur cœur.
Quelques années plus tard, écrivant à Tite en Crète, Paul envisage d’envoyer Tychique auprès de lui, afin qu’il le remplace, semble-t-il, pendant que Tite lui-même viendrait auprès de l’apôtre à Nicopolis où il a résolu de passer l’hiver.
Aujourd’hui on peut aussi obtenir des nouvelles par le moyen de lettres d’information sur l’œuvre du Seigneur. Il est ainsi possible d’être bien renseigné sur les problèmes et les joies que rencontrent ceux qui travaillent dans le champ du Seigneur. On peut d’autant mieux prier pour eux avec précision.
Silas a été fidèle dans son ministère de prophète. Aristarque a été un fidèle compagnon de l’apôtre et Tychique un messager fidèle. Quelle récompense au jour où tout sera mis en lumière, quand le Maître pourra dire : « Bien, bon et fidèle esclave ; tu as été fidèle en peu de chose… entre dans la joie de ton Maître » ! (Mat. 25:21).
À l’aube du christianisme, nous trouvons Barnabas dont le service se déroule pendant une vingtaine d’années dans les Actes. Luc au contraire ne vient sur la scène qu’au cours du deuxième voyage de Paul (« nous » Actes 16:10) qui s’est séparé de Barnabas, et se retrouvera avec l’apôtre dans les derniers jours de sa vie (2 Tim. 4:11), — l’espace d’une quinzaine d’années.
« Barnabas » était un surnom donné par les apôtres signifiant : « fils de consolation » (Actes 4:36) ; non pas « fils de tonnerre » comme Jésus avait surnommé Jacques et Jean, probablement à cause de leurs tempéraments naturels (Marc 3:17 cf. Luc 9:54). La « consolation » est un caractère de Dieu ; il faut avoir fait soi-même l’expérience de cette consolation pour être « capable de consoler ceux qui sont dans quelque affliction que ce soit, par la consolation dont nous sommes nous-mêmes consolés de Dieu » (2 Cor. 1:4). Cela implique encouragement, soulagement dans l’épreuve, capacité de s’adapter pour donner de l’aide. Jésus emploie le même terme pour parler du Saint Esprit, le Consolateur.
Cypriote de naissance, tout en étant Lévite (Actes 4:36), Barnabas avait dû être occupé des choses de Dieu dès sa jeunesse. Les Lévites (*), très nombreux dans les Nombres (3:43), étaient bien rares au temps d’Esdras (8:15, 18-19) ; très rarement mentionnés dans le Nouveau Testament (Luc 10:32; Jean 1:19).
(*) Voir notre brochure « Le service des Lévites »
Rien ne nous est dit de la conversion de Barnabas ; le premier trait que la parole nous rapporte est sa générosité : « Ayant une terre, il la vendit et en apporta la valeur, et la mit aux pieds des apôtres » (Actes 4:37). Plein de l’Esprit, il a su donner, matériellement et spirituellement. Il a renoncé à tout ce qu’il avait pour être disciple du Seigneur (Luc 14:33).
Il est frère ou cousin de Marie, mère de Jean- Marc, son neveu (ou cousin) (Col. 4:10). Il ne s’est pas marié (1 Cor. 9:5-6), restant ainsi entièrement libre pour le service du Seigneur (1 Cor. 7:32). Il faut pour cela un appel spécial.
Barnabas a tout donné. Ananias et Sapphira vendent leur terre, qui avait peut-être beaucoup plus de valeur que celle de Barnabas. Mais ils en gardent la moitié pour eux, faisant croire qu’ils donnent le tout. Ils mentent à Dieu et tentent l’Esprit Saint, et le jugement ne tarde pas : tous deux expirent.
Sur le chemin de Damas, Jésus était apparu à Saul respirant menace et meurtre ; le jeune homme avait été terrassé et rendu aveugle. Conduit dans la ville, il est trois jours sans voir, sans manger, sans boire. Le Seigneur lui envoie un disciple nommé Ananias. S’il avait accompli son dessein, Saul aurait amené cet homme lié à Jérusalem. Ananias le savait (Actes 9:13-14). Le Seigneur lui dit : Va. Et Ananias s’en va. Imposant les mains à son interlocuteur, il dit : « Saul, frère… » Quelle bénédiction est pour le jeune homme cette visite d’Ananias, qui de la part du Seigneur vient lui montrer combien il devra souffrir pour Son nom, lorsqu’il portera ce Nom « devant les nations, et les rois et les fils d’Israël ».
Dieu a « révélé son Fils » dans le cœur du persécuteur. Celui-ci ne se rend pas à Jérusalem, mais s’en va en Arabie, puis retourne à Damas (Gal. 1:16-17) (*). Trois ans plus tard, il monte à la ville sainte. Il est un « marginal ». Il ne peut plus aller avec les Juifs ; et les frères de Jérusalem le craignent et ne veulent pas le recevoir (Actes 9:26). Barnabas le prend, s’entretient avec lui et lui témoigne tout son intérêt. Persuadé de la réalité de sa conversion, il l’amène alors aux apôtres, et lui- même leur raconte comment, sur le chemin, Saul a vu le Seigneur qui lui a parlé. Barnabas a cru à l’opération de la grâce de Dieu. Il n’a pas mis en doute la réalité du travail de l’Esprit dans le jeune homme.
(*) Voir R.B. L’épître aux Galates et notre brochure sur le même sujet.
Le but de Saul montant à Jérusalem avait été de « faire la connaissance de Céphas » ; il demeure chez lui « quinze jours » (Gal. 1:18). Combien ont dû être bienfaisantes les conversations échangées entre l’ancien qui avait connu Jésus dans sa vie sur la terre, et le jeune qui en avait eu la vision dans la gloire. David, dans sa jeunesse, fuyant devant Saül, s’était réfugié auprès de Samuel, « et ils habitèrent à Naïoth » (1 Sam. 19:18). Quelles leçons le jeune David devait-il apprendre du vieux prophète ! L’un avait été à l’école de Dieu toute sa vie, l’autre y entrait.
Ananias — Barnabas — Céphas : trois hommes qui ont marqué les débuts de la vie de la foi du futur grand apôtre des nations. Combien il importe de s’intéresser aux jeunes croyants, de leur transmettre le message du Seigneur comme Ananias, de les prendre par la main comme Barnabas, et de les accueillir chez soi pour s’entretenir avec eux de Celui qui est devenu précieux à nos cœurs.
Après la mort d’Étienne Philippe était descendu en Samarie et y prêchait Jésus. D’autres aussi avaient été dispersés par la tribulation qui arriva à l’occasion d’Étienne. Tout d’abord ils ne présentent la parole qu’à des Juifs. Mais quelques-uns, qui étaient des Cypriotes et des Cyrénéens, arrivés à Antioche, parlent aussi aux Grecs, annonçant le Seigneur Jésus. La main du Seigneur est avec eux, et un grand nombre ayant cru se tourne vers Lui, — fruit du témoignage de simples croyants qui ont à cœur de parler de leur Sauveur. L’assemblée de Jérusalem en entend les nouvelles, et charge Barnabas de passer jusqu’à Antioche. Quelle confiance les frères devaient-ils avoir en cet homme pour l’envoyer seul s’enquérir de ce nouveau développement de l’Évangile ! Comment Barnabas avait-il acquis une telle confiance de la part de ses frères ? Il était un « homme de bien et plein de l’Esprit Saint et de foi » (v. 24). Le bien, la bonté, est un fruit de la lumière (Éph. 5:9). Plein de l’Esprit, il répondait à l’exhortation d’Éphésiens 5:18. Notons en passant que « soyez remplis » est un impératif présent passif : non pas remplissez-vous, mais laissez-vous remplir. Cela correspond au « Demeurez en moi » de Jean 15. Non se « crisper » dans le service, mais s’abandonner à l’action de l’Esprit qu’il est important de ne pas attrister, ni éteindre. Et « marcher par l’Esprit », qui donne « puissance, amour, et conseil » (sobre bon sens) (2 Tim. 1:7).
Quand Barnabas arrive à Antioche et qu’il voit la grâce de Dieu, « il se réjouit ». Il ne s’occupe pas d’abord des problèmes qui pouvaient se présenter, mais sait discerner l’œuvre que Dieu a opérée, et la joie remplit son cœur.
Va-t-il d’emblée instruire ces jeunes croyants et leur dire « comment on fait à Jérusalem » ? Tout d’abord, « il les exhortait tous à demeurer attachés au Seigneur de tout leur cœur ». Il leur présente, non des doctrines, mais une Personne. Il parle à leurs cœurs pour que le Seigneur les remplisse. Ministère positif, constructif. Quand le fils prodigue rentre au foyer paternel, le père dit : « Il fallait se réjouir, car celui-ci, ton frère… est revenu à la vie » (Luc 15:32). Quand « Christ est annoncé », Paul prisonnier peut dire « en cela je me réjouis, et aussi je me réjouirai » (Phil. 1:18). Faut-il s’étonner qu’« une grande foule fut ajoutée au Seigneur » ?
Ces jeunes croyants ont pourtant besoin d’être fondés dans la vérité. Barnabas est conduit à aller à Tarse chercher Saul. Ensemble, pendant toute une année, ils vont « enseigner dans l’assemblée » une grande foule. Barnabas, connaissant le caractère de Saul et sa personnalité, aurait pu craindre qu’il le dépasse. C’est d’ailleurs ce qui arrivera : Il est parlé d’abord de « Barnabas et Saul », plus tard de « Paul et Barnabas ». Mais qu’importe ! L’assemblée en a besoin. Barnabas est à la disposition du Seigneur. Il mène Saul à Antioche, et tous deux vont coopérer pendant bien quelques années.
L’enseignement suivi de la Parole est important. Le besoin en est ressenti partout, mais encore plus dans les pays lointains, où l’Évangile a été annoncé, et les jeunes croyants ont besoin d’être instruits. Il y a aussi, et nous en rendons grâces à Dieu, tout le ministère écrit que nous ont laissé nos prédécesseurs, et que le Seigneur continue à donner par son Esprit.
Barnabas a cherché Saul à Tarse ; il l’a trouvé ; il l’a mené à Antioche. Dans la dépendance du Seigneur, il peut être indiqué d’entraîner dans un service un jeune qui a besoin d’apprendre aux côtés de son aîné. C’était prématuré, lorsque Barnabas et Saul ont porté à Jérusalem le don des frères d’Antioche, d’emmener avec eux Jean, surnommé Marc (12:25). Le jeune homme se lassera vite dans le service (13:13).Il importe d’avoir du discernement.
Saul, lui, avait été préparé. Bien sûr il avait tout de suite annoncé l’Évangile à Damas. Mais trois ans d’Arabie l’avaient amené à méditer profondément sur les choses de Dieu. Il avait « parlé ouvertement au nom du Seigneur » à Jérusalem, discuté même avec les Hellénistes. À Tarse il avait sa famille, quoique, plus tard peut-être, sa sœur ait habité à Jérusalem, au moins son neveu (Actes 23:16). Paul parle d’avoir été « dans les pays de Syrie et de Cilicie » (Gal. 1:21). Était-ce durant le séjour à Tarse ?
Quoi qu’il en soit, quand Barnabas vient, il quitte sans doute définitivement les siens, et entreprend ce ministère itinérant qui le conduira dans toute la partie orientale de l’empire.
Apprenant les besoins des frères de Jérusalem, ceux d’Antioche déterminent « d’envoyer quelque chose pour leur service ». Ils ont assez confiance en Barnabas et Saul pour le faire parvenir par leurs mains (11:29).
« C’est à Antioche premièrement que les disciples furent nommés chrétiens » (v. 26). Les « chrétiens » sont ceux qui suivent Christ. Quel témoignage était rendu ! Des apôtres il avait été dit : « Ils les reconnaissaient pour avoir été avec Jésus » (4:13). L’expression ne se retrouve que trois fois dans le Nouveau Testament. Agrippa dit ironiquement à Paul : « Tu me persuaderas bientôt d’être chrétien » (Actes 26:28). Pierre souligne que le chrétien peut être appelé à souffrir. L’important est « qu’il glorifie Dieu en ce nom » (1 Pierre 4:16).
Il y avait à Antioche, dans l’assemblée, des prophètes et des docteurs, cinq hommes très différents les uns des autres. Barnabas, Saul, mais aussi Siméon, probablement un Noir, Lucius le Cyrénéen, et un homme de la haute société, Manahem, qui avait été nourri avec Hérode le tétrarque. C’est à ces cinq, qui « servaient le Seigneur et jeûnaient », que l’Esprit Saint dit de mettre à part pour lui Barnabas et Saul « pour l’œuvre à laquelle je les ai appelés ». Les cinq hommes jeûnent encore, prient, imposent les mains à Barnabas et Saul, et « les laissent aller ».
Le jeûne implique de renoncer à toute entrave à la communion. Cela peut être abstention ou restriction (Daniel 10:3) de nourriture. Son but est avant tout « pour faire entendre votre voix en haut » (És. 58:4) et prendre une attitude vis-à-vis de son prochain pleine de compassion et d’estime, en partageant aussi avec lui ce dont nous pouvons disposer (v. 6-7).
Barnabas et Saul ont été « envoyés par l’Esprit Saint » (Actes 13:4) et dépendent directement de leur Maître (Rom. 14:4). Lui va les conduire tout d’abord à Chypre, où Paul accomplit son premier miracle et prend dorénavant la prééminence (13:13). Barnabas ne sera nommé en premier que lorsque les deux viendront à Jérusalem (15:12, 25), et à Lystre où l’on prendra Barnabas pour Jupiter et Paul pour Mercure (14:12, 14).
Les deux apôtres, de ville en ville, parlent d’abord aux Juifs (13:14, 46). C’est à eux premièrement qu’il faut annoncer la Parole de Dieu. Mais puisqu’ils la rejettent « nous nous tournons vers les nations ». Paul répondait en cela à l’appel que le Seigneur lui avait donné dans le temple de Jérusalem, lorsqu’il avait réitéré sa confession d’avoir persécuté les chrétiens et d’avoir été consentant quand le sang d’Étienne fut versé : « Va, car je t’enverrai au loin vers les nations » (22:20-21).
Barnabas partage avec Paul la prédication, mais aussi la persécution (13:50). Cette persécution s’accentuera jusqu’à la lapidation de Paul à Iconium. L’apôtre en gardera le souvenir douloureux toute sa vie, rappelant à Timothée, au soir de sa carrière, ses souffrances « telles qu’elles me sont arrivées à Antioche, à Iconium et à Lystre, quelles persécutions j’ai endurées » (2 Tim. 3:11).
Barnabas a partagé tout cela ; le lendemain de la lapidation il s’en va avec Paul à Derbe. Ils retournent les deux à Lystre, à Iconium, à Antioche « fortifiant les âmes des disciples, et les exhortant à persévérer dans la foi » (14:22). Dans chaque assemblée, avec prières et jeûne, ils leur choisissent des anciens et les recommandent au Seigneur. Enfin tous deux se rendent par mer à Antioche, « d’où ils avaient été recommandés à la grâce de Dieu pour l’œuvre qu’ils avaient accomplie ».
Ils réunissent l’assemblée et « racontent toutes les choses que Dieu avait faites avec eux, et comment il avait ouvert aux nations la porte de la foi ». Cette assemblée d’Antioche, première des nations, s’intéresse vivement à l’œuvre accomplie par les deux apôtres. Pourquoi à la fin du deuxième voyage semble-t-il que l’accueil fut bien différent ? Après que l’apôtre a passé à Jérusalem, et salué l’assemblée, il descend à Antioche, mais il ne nous est rien dit d’une occasion comme la première fois de raconter (non pas de rendre compte) tout ce que Dieu avait fait par son moyen. Après quelque temps Paul s’en va tout seul, traversant la Galatie et la Phrygie, « fortifiant tous les disciples ». (18:22-23).
En parlant de Silas, nous avons déjà vu ce chapitre. Paul et Barnabas sont amenés à monter à Jérusalem et redescendent avec Judas et Silas à Antioche, apportant les bonnes nouvelles, et « enseignant et annonçant avec plusieurs autres aussi, la parole du Seigneur ».
Quelques jours après, Paul propose à Barnabas de retourner visiter les frères dans toutes les villes où ils avaient annoncé l’évangile (15:36). Une divergence surgit entre eux : Barnabas veut prendre avec eux son neveu Jean-Marc. Paul trouve bon de ne pas emmener un homme qui les avait abandonnés dès la Pamphylie et n’était pas allé à l’œuvre avec eux.
L’irritation sépare les deux hommes l’un de l’autre, semble-t-il définitivement. Barnabas prend Marc pour aller à Chypre, et l’on n’entend plus parler de son activité, quoique Paul mentionne son nom avec estime aux Corinthiens (9:6) et aux Galates (2:1, 9) (*). Les plus grands serviteurs du Seigneur ont aussi eu leurs faiblesses !
Il n’est pas mauvais parfois, que deux frères qui ont collaboré au même travail, aillent ensuite chacun dans un champ d’activité différent. Abraham avait proposé à Lot de se quitter. Le mal n’était pas là, mais dans la décision de s’acheminer vers Sodome.
Paul ne s’est pas laissé arrêter ; il a fait choix pour lui de Silas, comme nous l’avons vu. Et plus tard Jean-Marc sera « utile pour le service » (2 Tim. 4:11) ; il écrira l’Évangile qui porte son nom.
(*) Notons en passant que Barnabas est probablement décédé aux alentours de l’an 60, donc avant Paul. La « lettre de Barnabas » que Tischendorf avait trouvée dans le Codex Sinaiticus au Couvent de Sainte Catherine n’a pas été reconnue comme canonique, malgré Clément d’Alexandrie et Origène. Elle a dû être écrite après l’an 70, c’est-à-dire après la destruction de Jérusalem.
Quoiqu’il ait très probablement écrit l’Évangile qui porte son nom, puis les Actes, Luc ne s’y nomme pas.
En Actes 16:10, jusqu’au verset 17, parce qu’il dit « nous », on comprend qu’il accompagne l’apôtre dans cette partie de son voyage pour gagner l’Europe. On le retrouve en Actes 20:6 à Philippes, où il était apparemment resté depuis le premier passage de Paul. Il partage la fin du troisième voyage jusqu’à Jérusalem, (21:18) et vit avec Paul ses derniers moments de liberté. Puis il l’accompagnera depuis Césarée (27:1) jusqu’à Rome (28:16), et sera avec lui dans sa première détention (Col. 4:14 ; Phm. 24). Enfin lui seul restera avec le vieillard dans la dure captivité finale (2 Tim. 4:11).
Il est nommé parmi les « compagnons d’œuvre » (Phm. 24), sans que nous sachions quel a été son travail. C’est un homme discret, qui a plus écrit que parlé. Son grec montre qu’il était cultivé. Il a été présent aux moments difficiles ; et si l’apôtre le mentionne comme médecin, c’est sans doute qu’il a bénéficié de ses soins.
Dans les épîtres il est toujours nommé aux côtés de Démas ; l’un a quitté l’apôtre pour s’en aller dans « le présent siècle » qu’il a « aimé », Luc est resté fidèle jusqu’au bout.
Hébreux 11 nous donne comme une galerie de tableaux d’hommes et de femmes qui dans l’ancienne alliance ont été marqués par la foi. Les Actes et les Épîtres nous présentent une pléiade de serviteurs dont nous avons considéré quelques-uns. Quel était leur ressort à tous ? — « L’amour du Christ nous étreint, en ce que nous avons jugé ceci, que si un est mort pour tous, tous donc sont morts, et qu’il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour Celui qui pour eux est mort et a été ressuscité » (2 Cor. 5:14-15),
« Si quelqu’un me sert, qu’il me suive ; et où je suis, moi, là aussi sera mon serviteur : si quelqu’un me sert, le Père l’honorera » (Jean 12:26).
G.A.
Juillet 1983