Questions sur le dispensationalisme

Mark Grasso

Truth & Testimony 2021-2 p. 86-92


Table des matières :

1 - Dieu a-t-il changé d’avis ?

2 - Comment les dispensations s’accordent-elles avec les alliances ?

3 - Le Seigneur Jésus et les apôtres n’ont-ils pas appliqué les Écritures de l’Ancien Testament à l’Assemblée (par exemple Actes 2:16-17 ; Héb. 10 ; 1 Pierre 2:9) ?

4 - L’Assemblée est-elle « l’Israël de Dieu » (Gal. 6:16) ?

5 - Comment les dispensationalistes peuvent-ils prétendre interpréter la Bible littéralement alors qu’ils donnent une interprétation non-littérale au mot « éternel » dans l’Ancien Testament (par exemple Dan. 7:14) ?

6 - Si, au cours de son ministère terrestre, le Seigneur a présenté Son royaume aux Juifs, cela signifiait-il qu’Il ne serait pas allé à la croix ou n’aurait pas eu à y aller à la croix s’ils L’avaient accepté ?

7 - L’argument concernant l’enlèvement pré-tribulationiste en opposition à l’enlèvement post-tribulationiste a-t-il de l’importance ?


[En Éph. 1:10 le mot grec « oikonomia » est parfois translittéré par « économie » ; Darby le traduit par « administration » et la version autorisée anglais KJV traduit par « dispensation »

Le terme « millénium » désigne le règne de mille ans de Christ évoqué en Apoc. 20].


1 - Dieu a-t-il changé d’avis ?

Bien que la souveraineté de Dieu Lui permette, en un sens, d’agir comme il Lui plait, Dieu n’a jamais changé Ses pensées, en particulier pas sur la voie du salut. Les dispensations ont trait aux différentes manières dont Dieu a choisi de régler Ses relations avec l’humanité à différentes périodes de temps. Aucune d’entre elles n’a été, ni ne sera, entreprise comme une expérience pour voir si les êtres humains peuvent et veulent faire ce qu’il Lui plaît, et le passage d’une dispensation à une autre ne suggère pas non plus que Dieu essaie quelque chose de nouveau. L’idée que l’enseignement sur les dispensations implique que Dieu change d’avis, peut provenir d’une approche de la Bible qui place l’humanité au centre, ou bien d’une pensée erronée selon laquelle, dans chaque dispensation, Dieu teste l’humanité d’une manière nouvelle pour voir si le résultat change. Dieu a toujours connu la fin dès le commencement (Ésaïe 46:10), y compris le fait qu’il n’y aurait personne qui fasse le bien dans aucune dispensation (Rom. 3:9-19). Dans Sa miséricorde, Dieu a préordonné le Seigneur Jésus-Christ pour être notre Pâque, qui ôterait nos péchés (1 Pierre 1:18-20 ; 1 Cor. 5:7).

Le fait d’observer les différentes manières d’agir de Dieu envers l’humanité au cours de différentes dispensations, nous aide à comprendre que chacun d’entre nous était, par nature, dans un état désespéré, sans espoir, et ne méritait donc rien d’autre que le jugement de Dieu, et que cela a été et est toujours le cas pour chaque être humain, quelle que soit la manière dont Dieu a réglé ses relations avec l’humanité. Cela magnifie également la patience de Dieu envers l’humanité et prouve que le chemin du salut a toujours été par la grâce du côté de Dieu et par la foi du côté des individus. Les hommes pieux de l’Ancien Testament le savaient (voir par exemple Ps. 51:16-17). Dieu a passé par-dessus leurs péchés parce que le Seigneur Jésus devait venir et Son œuvre à la croix devait faire l’expiation de ces péchés (ou plutôt la propitiation pour ces péchés ; Rom. 3:25). Leur foi a pu être différente de la nôtre en ce sens qu’ils ne pouvaient mettre leur confiance que dans ce que Dieu avait révélé de Lui-même avant ou pendant leur dispensation. Cependant, dans chaque dispensation, les justes ont vécu et vivent encore par la foi (Habakuk 2:4 ; Rom. 1:17 ; 3:26-28 ; Gal. 3:11).

Ceci étant dit, et tandis que nous recevons notre salut par la foi en l’œuvre de Christ et comme un don de Dieu (Rom. 3:24-30 ; Éph. 2:8-9), les bénédictions que nous recevons en tant que chrétiens sont différentes (et bien plus élevées), de celles connues ou goûtées dans le passé[, c’est-à-dire dans d’autres dispensations]. Ce point est traité en 1 Pierre 1:9-12.


2 - Comment les dispensations s’accordent-elles avec les alliances ?

Les alliances sont un sujet traité ailleurs. On peut considérer en particulier huit alliances dans la Bible. À l’exception de l’alliance avec Noé, dont la promesse était au bénéfice de toute l’humanité (à savoir que Dieu ne retrancherait plus jamais toute chair par un déluge : Gen. 9:8-17), chaque alliance avait une portée limitée (par exemple, l’alliance avec David était qu’il aurait un fils régnant sur son trône : Ps. 89:3-4). Les alliances concernent avant tout des bénédictions sur la terre. La seule alliance qui s’étende au-delà — c’est-à-dire la nouvelle alliance que Dieu conclura avec son peuple terrestre au cours du millénium et qui leur donnera le pardon des péchés et une nouvelle nature (Jér. 31:31-34) — est basée sur l’œuvre du Seigneur sur la croix (Luc 22:20).

Par conséquent, les alliances et les dispensations sont distinctes, bien que l’histoire d’Israël sous l’ancienne alliance et l’alliance palestinienne (les deux alliances conditionnelles ; Ex. 19 ; Deut. 29) aient prouvé qu’ils ne pouvaient pas réaliser ce qu’ils s’étaient engagés à faire au mont Sinaï — c’est-à-dire accomplir la loi.

Pour être complet, ce qu’on appelle la « théologie de l’alliance » n’a pas grand-chose à voir avec les alliances décrites dans les Écritures. Elle se fonde plutôt sur trois alliances qui ne se trouvent pas dans la Bible. Elle implique également de « spiritualiser » l’Ancien Testament et d’ignorer l’interprétation naturelle de la Parole de Dieu.


3 - Le Seigneur Jésus et les apôtres n’ont-ils pas appliqué les Écritures de l’Ancien Testament à l’Assemblée (par exemple Actes 2:16-17 ; Héb. 10 ; 1 Pierre 2:9) ?

Lorsque Dieu a donné des prophéties à l’époque de l’Ancien Testament, Il avait forcément l’intention que ceux qui les entendent les interprètent selon le sens naturel des mots utilisés. Si Dieu avait voulu dire autre chose par l’une de ses prophéties (par exemple, qu’une référence à Israël était en fait une référence à l’Église, laquelle était un mystère non révélé dans l’Ancien Testament : Éph. 3), Dieu aurait été trompeur. Il est clair que Dieu n’agit jamais de la sorte.

Il existe de nombreux exemples de prophéties de l’Ancien Testament qui sont comprises selon les termes dans lesquels elles ont été données et qui s’accomplissent de la même manière. Par exemple, ce que Dieu a dit à Abram au sujet de sa semence en Genèse 15:13-16 doit avoir été compris par Abram comme signifiant ce que Ses paroles révélaient clairement. Cette prophétie s’est ensuite accomplie à la lettre. Pour prendre un autre exemple, les chefs des prêtres (ou principaux sacrificateurs) et les scribes savaient que le Christ naîtrait à Bethléem parce que c’était ce que Michée avait prophétisé (Matthieu 2:4-6). Dans ce cas, même les non-croyants savaient que Dieu voulait dire ce qu’Il disait.

À aucun moment le Seigneur Jésus ou les apôtres n’ont suggéré qu’une quelconque écriture de l’Ancien Testament ne s’accomplirait pas conformément à ses termes. Si l’approche de l’interprétation de la Bible associée au dispensationalisme (en particulier l’attente d’un règne littéral de 1000 ans du Christ sur terre) avait été erronée, le Seigneur aurait donné une réponse très différente à la question des disciples en Actes 1:6-7.

Cependant, le fait que les prophéties de l’Ancien Testament s’accompliront selon leurs termes (les mots) ne signifie pas qu’elles ne puissent pas avoir un accomplissement spirituel dans l’intervalle. Les promesses de Dieu à des individus ou à des groupes de personnes sont toujours fondées sur la grâce. Par conséquent, la grâce qui permettra à une prophétie de l’Ancien Testament de s’accomplir dans l’avenir, peut donner lieu à une bénédiction similaire dans l’intervalle (par exemple Actes 2:16-17 ; 15:13-18). En fait, l’accomplissement spirituel d’une prophétie au jour de la grâce est souvent plus béni que son accomplissement complet dans un jour futur. Par exemple, les croyants d’aujourd’hui sont le peuple spécial de Dieu (1 Pierre 2:9) d’une manière plus profonde qu’Israël ne l’a jamais été ou ne le sera jamais, à cause de notre relation plus étroite avec Dieu et du caractère précieux de l’Assemblée pour Son Fils.


4 - L’Assemblée est-elle « l’Israël de Dieu » (Gal. 6:16) ?

Paul reconnaissait que les Juifs, les Gentils et l’Assemblée étaient séparés et distincts (1 Cor. 10:32). Chaque fois que ses lettres font référence à Israël, il s’agit d’Israël (par exemple Rom. 9:3-4 ; 11:1 ; Éph. 2:12). Le fait que, pour ceux qui sont dans le Christ Jésus, il n’y ait pas de distinction entre Juifs et Gentils au jour de la grâce n’y change rien — les mots clés des versets voisins (Éph. 2:6,7,10,13) sont « dans le Christ Jésus ».

Cependant, Paul savait aussi que « tous ceux qui sont d’Israël ne sont pas Israël » (Rom. 9:6) — en d’autres termes, tous ceux qui étaient « d’Israël » par naissance n’avaient pas la foi en Dieu et ne faisaient donc pas vraiment partie de Son peuple. L’« Israël de Dieu » dont il est question en Galates 6:6 est la partie des Juifs qui s’est repentie, a fait confiance à Dieu et est devenue membre de l’Assemblée (c’est-à-dire le « résidu selon l’élection de la grâce » dont il est question en Rom. 11:5). Sur cette base, ils sont véritablement Son peuple.

Le contexte immédiat dans lequel apparaît le verset démontre également que l’« Israël de Dieu » ne peut être un synonyme de l’Assemblée, car Paul fait référence à certains croyants en disant « ceux qui marcheront » au début de ce v.16. Le contexte plus large de la lettre indique que « ceux qui » sont des croyants Gentils (Paul écrivait à une assemblée de Gentils). L’Israël de Dieu est donc l’autre groupe parmi les deux groupes qui forment un seul corps (Éph. 2:14-16).


5 - Comment les dispensationalistes peuvent-ils prétendre interpréter la Bible littéralement alors qu’ils donnent une interprétation non-littérale au mot « éternel » dans l’Ancien Testament (par exemple Dan. 7:14) ?

Le dispensationalisme est souvent associé à une interprétation « littérale » de l’Écriture, ce qui signifie, non pas que chaque mot de la Bible est appliqué d’une manière absolument littérale sans référence à son contexte, mais que les mots, les versets et les passages reçoivent leur signification naturelle basée sur leur contexte immédiat et sur leur contexte plus large, qui comprend l’ensemble des Écritures. On appelle cela aussi la méthode « historico-grammaticale ». Cette approche reconnaît, entre autres, que les prophéties symboliques sont interprétées en fonction du sens des métaphores utilisées.

D’un point de vue chronologique, la révélation de l’Ancien Testament couvre essentiellement la période allant de la création des cieux et de la terre (Gen. 1:1) jusqu’au millénium. Les choses antérieures ou postérieures à cette période, et plus généralement les choses éternelles, ne sont pas révélées dans l’Ancien Testament ou, dans les rares cas où elles peuvent être évoquées, elles ne sont décrites que de manière voilée (par exemple Prov. 8:22-31). En outre, la prophétie de l’Ancien Testament se concentre sur la terre, et non sur le ciel.

Daniel se réfère au règne du Seigneur sur la terre comme à un royaume « éternel » (par exemple Dan. 7:14) parce que les saints de l’Ancien Testament, y compris les hommes pieux tels que Daniel, n’ont reçu aucune révélation des choses éternelles à venir après que le Seigneur aura remis Son royaume à Son Père à la fin de Son règne de 1000 ans et que la terre aura été consumée par le feu (1 Cor. 15:24 ; Apoc. 20:4, 6 ; 2 Pierre 3:10).

Pour Daniel, le règne du Seigneur serait l’accomplissement des prophéties de Dieu concernant la terre. Dans la dispensation qui prévalait à l’époque où il a prophétisé, Dieu n’avait pas fait connaître le fait que le règne prendrait fin. C’est pourquoi l’Esprit de Christ a inspiré Daniel à le décrire comme un royaume éternel. Cependant, avec le bénéfice du Nouveau Testament, nous savons que le royaume auquel Daniel fait référence, prendra fin comme indiqué en Apocalypse 20, après quoi il y aura un nouveau ciel et une nouvelle terre (qui se distinguent des « nouveaux cieux » et de la « nouvelle terre » dont il est question dans l’Ancien Testament (par exemple Ésaïe 65:17) — ces termes faisant également référence au millénium en raison des grands changements qui se produiront sur la terre et dans le ciel après que le Seigneur aura établi Son règne).

En outre, le passage clé sur la nouvelle alliance (également appelée « alliance éternelle ») confirme qu’elle durera aussi longtemps que l’univers durera (Jér. 31:31-36 ; 32:40).


6 - Si, au cours de son ministère terrestre, le Seigneur a présenté Son royaume aux Juifs, cela signifiait-il qu’Il ne serait pas allé à la croix ou n’aurait pas eu à y aller s’ils L’avaient accepté ?

D’une manière générale, la Bible ne répond pas aux questions « que serait-il arrivé si » qui peuvent se poser à notre esprit humain. C’est pourquoi il est préférable de ne pas débattre de questions telles que celle qui précède, car cela n’a guère de valeur spirituelle.

Comme nous l’avons déjà dit, nous savons que Dieu n’est jamais pris par surprise. En raison de Son omniscience et de Sa sagesse, Il est capable de faire en sorte que les innombrables fils de l’histoire du monde se combinent pour Sa gloire. En ce qui concerne le sujet évoqué dans la question, le Seigneur Jésus est venu vers Son propre peuple parce que Dieu lui avait promis un libérateur, mais Son rejet a ensuite servi de base pour qu’Il devienne Son véritable Rédempteur en donnant Sa vie sur la croix (ce qui est aussi l’accomplissement de prophéties de l’Ancien Testament telles qu’Ésaïe 53). En outre, le même rejet, et le même sacrifice, ont conduit Dieu et le Seigneur Jésus à commencer quelque chose de nouveau, à savoir ouvrir la voie du salut au monde entier et appeler les croyants hors du monde pour former Son Assemblée (Matthieu 13 ; Col. 1:25-27). Quand on considère les choses sous cet angle, on voit que la question du « que serait-il arrivé si » est sans importance. Ce qui est bien plus important à voir, et précieux à considérer, c’est la gloire de Dieu.


7 - L’argument concernant l’enlèvement pré-tribulationiste en opposition à l’enlèvement post-tribulationiste a-t-il de l’importance ?

En 1 Thessaloniciens 1:10, le Seigneur Jésus est décrit comme « celui qui nous délivre de la colère qui vient ». Apocalypse 3:10 contient Sa promesse qu’Il « préservera [l’assemblée] de l’heure de l’épreuve, qui va venir sur la terre habitée toute entière, pour éprouver ceux qui habitent sur la terre ». Certains suggèrent que la colère et l’épreuve dont il est question dans ces versets sont le jugement éternel (c’est-à-dire la « colère » dont il est question en Jean 3:36), et poursuivent en soutenant que l’Assemblée doit passer par la tribulation.

Cependant, la période de la tribulation et les jugements que le Seigneur fera venir sur la terre en préalable à l’établissement de Son royaume (c’est-à-dire la « colère » dont il est question dans plusieurs versets de l’Apocalypse) sont dirigés contre Son peuple terrestre, contre le monde et contre la partie professante de la chrétienté qui restera sur la terre après l’enlèvement. Dieu n’a pas destiné l’assemblée à la colère (1 Thes. 5:9). Il n’est pas dans Ses desseins que l’Assemblée soit jugée d’une telle manière. Ce ne serait pas non plus cohérent avec Ses conseils (desseins) qu’un rassemblement appelé pour être à part et céleste ait à subir des jugements dirigés vers la terre (Actes 17:31).

Comme l’indiquent les versets cités ci-dessus, une partie de l’œuvre du Seigneur pour les croyants d’aujourd’hui consiste à nous délivrer de la colère à venir. La suggestion que l’église passera par la tribulation est un sérieux affront à Son amour pour Son Assemblée.

La véritable attente de tout croyant est l’enlèvement, qui n’est précédé que d’une seule chose : le cri de rassemblement du Seigneur (1 Thes. 4:16). S’attendre d’abord à l’antichrist, serait une vision pervertie pour un chrétien, et ne serait pas propice à l’accomplissement de 1 Jean 3:3.

Le Seigneur Jésus n’a pas conclu les Écritures en suggérant qu’il faudrait attendre au moins sept ans avant Son retour. Au contraire, Il nous a laissé la merveilleuse promesse qu’Il viendra pour nous très bientôt (Apoc. 22.20).