par Henri Rossier
[note Bibliquest : Texte édité en 1915 : en tenir compte pour comprendre plusieurs allusions aux temps ACTUELS]
Table des matières :
2 - CHAPITRE 1:1-2 — L’Éternel rugit
3 - CHAPITRE 1:3 à ch. 2 — Ainsi dit l’Éternel
5 - CHAPITRE 3 à 5:17 — Écoutez cette parole
8 - CHAPITRE 5:18 à 6 : Les deux « Malheur »
10 - CHAPITRE 7 à 9: 6 : Les visions
11 - CHAPITRE 9: 7-15 : La providence de Dieu et la restauration finale d’Israël
Amos prophétisait sous les règnes d’Ozias (ou Azaria), et de
Jéroboam II (2), les plus longs, sauf un seul, qu’enregistrent les annales de
Juda et d’Israël. Mais un règne prolongé ne démontre pas nécessairement
l’approbation de Dieu : celui de Manassé, le plus long de tous, fut une
succession d’iniquités. La carrière d’Ozias fut tout autre que celle de
Jéroboam. Ce dernier, s’il accomplit de grandes choses aux yeux des hommes, fit
« ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel », et cependant Dieu voulut bien se
servir de lui pour sauver
Israël, car
Il « n’avait pas dit qu’il effacerait le nom d’Israël de dessous les cieux » (2
Rois 14: 27). Depuis Jéroboam, jusqu’à la déportation des dix tribus, la ruine
de cette maison royale fut complète.
Ozias, roi de Juda, à l’opposé de Jéroboam, son contemporain, « fit ce qui est droit aux yeux de l’Éternel » (2 Rois 15: 3), jusqu’au jour où, son orgueil ayant usurpé les fonctions des sacrificateurs dans le temple, il fut frappé de la lèpre. Ses successeurs, Jotham, Ézéchias et Josias, marchèrent dans les voies de l’Éternel, et la fidélité de ces quelques rois, vrais fils de David, ajourna le jugement déjà suspendu sur Juda.
Les règnes d’Ozias et de Jéroboam ayant coïncidé pendant quatorze années, on pourrait en conclure que, semblable à celle d’Osée (*), la prophétie d’Amos eut une longue durée. Au contraire, elle fut émise pendant une période très courte de ces règnes, c’est-à-dire »deux ans avant le tremblement de terre ».
(*) Voyez « Le livre du prophète osée », par H. R., pages 4, 5.
« Les paroles d’Amos, qui était d’entre les bergers de Thekoa, qu’il a vues touchant Israël, aux jours d’Ozias, roi de Juda, et aux jours de Jéroboam, fils de Joas, roi d’Israël, deux ans avant le tremblement de terre » (v. 1).
Amos était de Thekoa, ville de Juda, fortifiée comme beaucoup
d’autres par Roboam, lors de la scission du royaume de Salomon (2 Chron. 11:
6). Josaphat avait jadis remporté la victoire sur Moab, Édom et les fils
d’Ammon, vers le désert de Thekoa,
et
ce souvenir pouvait se présenter à l’esprit du prophète, appelé à prononcer le
jugement de ces mêmes peuples (1: 11, 13; 2: 1). Thekoa est situé à 16
kilomètres de Jérusalem et à 8 kilomètres au sud de Bethléem, donc en plein
territoire de Juda et de Benjamin. On voit en Jérémie 6: 1, que Thekoa ou
plutôt Beth-Hakkérem, montagne qui domine cette localité, était un des postes
qui signalaient, par un feu, l’approche de l’ennemi. Amos se tient là, pour
ainsi dire, surveillant de tous côtés les ennemis qui ont empiété sur
l’héritage d’Abraham et assiègent les frontières d’Israël ; il annonce leur
sort, et c’est de là qu’il est ensuite envoyé à Béthel pour prophétiser contre
Ephraïm (7: 14, 15).
Amos était « d’entre les bergers
de Thekoa ». Nous trouvons à diverses reprises, dans sa prophétie, des
images empruntées à sa profession, à ses troupeaux, aux luttes du berger avec
les bêtes sauvages et à sa vie journalière (1: 2; 3, 4, 12; 4, 1; 6: 12, etc.).
La vocation d’Amos est mentionnée en deux mots, mais l’Esprit de Dieu montre sa
souveraineté dans ce choix. Comme il avait pris David d’auprès des parcs de
brebis pour l’établir comme Conducteur de son peuple, et plus tard de pauvres
pêcheurs qui devinrent ses apôtres, il fait du berger Amos le prophète d’Israël.
Cette distinction réduit à néant les prétentions humaines à occuper le service
de Dieu. Amos dira plus tard : « Je n’étais pas prophète, et je n’étais pas fils
de prophète » (7: 14). Il ne l’était ni de vocation, ni de naissance : Tout
ordre, établi de Dieu, ayant fait faillite en Israël et en Juda, l’Éternel
choisit lui-même son instrument et se plaît à prononcer des oracles par la
bouche d’un humble berger. Une telle manière d’agir convient à un temps de
ruine où des Amatsia (7: 10-17) prétendent en imposer au « voyant » de par leur
fausse autorité sacerdotale. Dieu revendique alors la libre action de son
Esprit. Les révélations de l’Éternel ont lieu par la bouche de cet homme
simple : ses « paroles », il les a « vues » ; et ses vraies visions, plus tard, il les
proclame.
Le sujet principal de la prophétie d’Amos est Israël.
Ce terme désigne en premier lieu
les dix tribus (2: 6), puis le peuple tout entier, y compris Juda (3: 1, 2),
enfin les dix tribus, représentant moralement
l’ensemble du peuple devant Dieu. Juda
lui-même, la tribu du prophète, est aussi mentionné à part comme objet du
jugement, car, possédant plus de privilèges qu’Ephraïm, il avait commis les
mêmes infidélités (2: 4) ; mais c’est pour les dix tribus que l’heure du
châtiment est proche ; elle avait sonné dans le prophète Osée, contemporain et
successeur d’Amos. En Amos le jugement se rapporte davantage à l’état moral
du peuple qu’à des transgressions
particulières ; mais, quand le jugement s’abat sur les nations, dans les deux
premiers chapitres, Juda et Israël y étant compris, leurs transgressions sont
mentionnées spécialement.
Le « tremblement de terre » est la date mémorable de la prophétie
d’Amos. Nous ne voyons pas que le prophète ait prédit
que ce séisme aurait lieu, mais il est pour lui le symbole
du jugement qui devait, sous peu, atteindre son peuple. Cet événement a donc un caractère moral,
aussi Amos
abonde-t-il en images relatives à ce phénomène. Il le représente comme un char
faisant craquer le sol sous le fardeau des gerbes, au moment de la moisson.
L’homme le plus agile ne réussit pas à l’éviter (2: 13-16). Les cornes de
l’autel tombent à terre, les maisons et les palais sont renversés, les
murailles fendues, et les hommes lancés à travers leurs brèches ; c’est une
subversion semblable à celle de Sodome et de Gomorrhe (3: 14, 15 ; 4: 3, 11; 6:
11). Dans ce bouleversement, les eaux de la mer sont versées sur la face de la
terre (5 : 8; 9 : 6). En un instant le pays tremble, comme les eaux
du Nil montent et s’abaissent en une saison (8: 8; 9: 5) (*) ; le linteau de la porte et ses bases sont
ébranlés et tombent sur la tête des hommes (9: 1). Mais un jour viendra où
toutes ces ruines seront réparées (9: 11).
(*) La crue du Nil atteint les neuf dixièmes du volume ordinaire de ce fleuve.
Le tremblement de terre du règne d’Ozias est mentionné en
Zacharie 14: 5 qui l’assimile au grand événement du dernier jour, quand la
montagne des Oliviers sera fendue sous les pieds du Seigneur pour mettre en
fuite les oppresseurs du Résidu captif à Jérusalem. La prophétie d’Amos n’a pas
cette portée future, car elle prédit les jugements prochains
qui atteindront le peuple. Il est cependant à remarquer
qu’en Zacharie comme en d’autres passages, la mention d’un tremblement de terre
ne signifie pas, comme en Amos, des jugements sans mélange, mais des jugements
dont peut sortir la délivrance. C’est ainsi qu’en Matthieu 27 le tremblement de
terre ouvre les sépulcres et délivre les saints ; c’est ainsi qu’en Actes 16: 26
il met en liberté Paul et Silas et produit la conversion du geôlier ; et nous
dirons que même en Amos, s’il remplit le livre de ses ruines, il est
l’avant-coureur d’une délivrance finale, présentée au dernier chapitre.
« Et il dit : L’Éternel rugit de Sion, et de Jérusalem il fait entendre sa voix ; et les pâturages des bergers mènent deuil, et le sommet du Carmel est séché » (v. 2).
Cette expression : « L’Éternel rugit de Sion » est d’une grande
importance et caractérise toute la prophétie d’Amos. L’Éternel y est représenté
comme le « lion de la tribu de Juda » rugissant parce qu’il a une proie (cf.
3 : 4) qu’il dévorera ; ce lion de Juda dominera sur Jérusalem, lieu où la
grâce royale sera reconnue à la fin. Joël, parlant du jour de l’Éternel dans la
vallée de Josaphat, se sert exactement des mêmes termes : « L’Éternel rugira de
Sion, et de Jérusalem il fera entendre sa voix, et les cieux et la terre
trembleront (Joël 3: 16) ; seulement Joël annonce les jugements futurs qui
introduiront le règne millénaire du Fils de David Amos, comme nous l’avons dit,
ne va pas si loin il annonce des jugements prochains ; le lion de Juda rugit au
jour même de sa prophétie. Amos commence et Joël finit ; les jugements qu’il
annonce sur les nations, puis sur Juda et Ephraïm sont près de s’exécuter et
ont un caractère gouvernemental. Seulement le juste gouvernement
de Dieu n’est pas la fin de ses voies envers les
nations : il reste encore son juste
jugement,
le jugement national
définitif
et c’est de ce dernier que Joël nous entretient comme tant
d’autres prophètes qui nous parlent du « jour de l’Éternel ». Au contraire, la
vision d’Amos s’arrête aux calamités qui fondront dans un avenir très rapproché
sur les nations et sur le
peuple d’Israël, et montre les causes spéciales qui les ont rendues
nécessaires. C’est ainsi qu’en Amos, le Pharaon, ]’Assyrien, Babylone, sont
successivement et à divers intervalles la verge de l’Éternel pour châtier tous
ces peuples (*), tandis que la dernière scène
de Joël ne présente rien de semblable, mais montre l’Éternel en personne,
exécutant le jugement final, et brisant définitivement l’Assyrien après s’être
servi de lui comme d’une verge contre Israël.
(*) Cela n’exclut nullement le fait qu’on verra renaître et jouer un rôle dans les scènes de la fin, toutes les nations qui environnent Israël. C’est ce que l’on voit en Joël où Tyr, Sidon, la Philistie, Édom reparaissent pour le jugement du grand jour dans la vallée de Josaphat. Amos ne va pas jusque-là.
Ce que nous venons de dire est d’une grande importance pour nous. Les jugements que nous voyons aujourd’hui s’abattre sur la terre ne sont pas les jugements de la fin. En Amos nous avons affaire à une prophétie maintenant accomplie ; tel est, sauf au dernier chapitre, le caractère très spécial de notre prophète. Nous y trouvons des avertissements dont l’accomplissement présage un jour futur et en affirme d’avance la terrible réalité. Il en est de même pour nous aujourd’hui ! Si « la fin n’est pas encore », que sera-t-elle pour l’injuste et le pécheur ?
En Joël les cieux et la terre trembleront quand l’Éternel fera
entendre sa voix ; en Amos le tremblement de terre du v. 1 caractérise seul,
comme nous l’avons déjà noté,
toutes les scènes qui se déroulent sous nos yeux. Ici les conséquences du
rugissement sont locales : « Les pâturages des bergers mènent deuil, et le sommet
du Carmel est séché ». Cette image correspond à ce que le berger Amos avait sous
les yeux. Quand les jugements de Dieu s’exécutent, plus d’occupations paisibles
où l’âme des simples se complaît ; adieu les pâturages du désert de Juda,
familiers aux bergers de Thekoa, et ceux du Carmel où les brebis paissent à
l’ombre des forêts. Le vent de la colère de l’Éternel a passé sur les uns, et
desséché même le Carmel ombreux. Nous rencontrons les mêmes images au chapitre
25 du prophète Jérémie. Après avoir annoncé (v. 15-29) le jugement prochain,
par Babylone, sur toutes les nations mentionnées par Amos et sur d’autres
encore, il parle du rugissement de l’Éternel, de sa demeure sainte, du cri et
des hurlements des pasteurs, dont les pâturages sont dévastés et les parcs
paisibles désolés devant l’ardeur de la colère de l’Éternel (v. 30-38). Ce
passage a donc beaucoup de rapport avec les versets que nous venons de
considérer.
Ces deux chapitres sont caractérisés par les mots : « Ainsi dit
l’Éternel ». Lorsque Dieu a parlé, le jugement doit
s’accomplir, quoique nous n’en sachions pas l’époque.
Peut-être la patience de Dieu attendra-t-elle longtemps encore, jusqu’à ce
qu’il soit exécuté, mais il n’en surviendra pas moins, car pour l’Éternel le
temps ne compte pas et ne modifie en rien la justice et la sainteté de ses
voies. De fait, ces prophéties d’Amos ne se sont accomplies, pour la plupart,
qu’environ une centaine d’années après avoir été prononcées.
Les paroles de l’Éternel s’adressent d’abord aux diverses
nations qui, de toute part, enserrent le peuple d’Israël : à l’occident la
Philistie, Tyr au nord, la Syrie au nord-est, Ammon et Moab à l’orient, Édom au
midi. Sauf Moab qui fait exception, toutes ces nations sont jugées ici selon la manière dont elles ont traité le
peuple de Dieu.
Nous en avons encore aujourd’hui des exemples. La justice
rétributive de Dieu s’exerce sur des nations qui persécutent son ancien peuple,
quelque coupable qu’il soit.
Il y a un juste gouvernement de Dieu, dans ce monde, à l’opposé de celui des hommes. Dieu voit tout et n’oublie rien (il n’oublie que les péchés de ceux qui ont cru). Toute injustice trouve tôt ou tard sa rétribution. Dieu attend peut-être patiemment pendant toute une vie d’homme (même à l’égard de ses enfants, car son jugement commence par sa maison) pour rétribuer, selon son gouvernement, un tort commis. Saül était mort depuis longtemps, que Dieu n’avait pas oublié l’iniquité dont il s’était rendu coupable en faisant mourir les Gabaonites (2 Sam. 21). Il fallut alors que sa maison de sang, sauf Méphiboseth épargné par la grâce, fût exterminée. David, homme de Dieu, avait oublié depuis longtemps son crime à l’égard d’Urie ; mais au moment voulu de Dieu les conséquences de ce péché commencèrent à se dérouler et poursuivirent le roi-prophète jusqu’à la fin de sa carrière. Il en fut de même lors du recensement du peuple, sauf que la grâce arrêta le jugement dans son cours (2 Sam. 24). Combien d’enfants de Dieu ont fait de semblables expériences ! Le silence a plané sur tel manquement dont personne, sauf le coupable, n’avait connaissance : tout à coup le rugissement du lion se fait entendre et la terre tremble. Jusque-là le ciel était d’une sérénité qui semblait exclure même l’idée d’un orage. En peu de temps tout est bouleversé, la paix perdue, l’abri du Carmel desséché.
Remarquez que, dans tous les cas cités au cours de ces deux
chapitres, le jugement ne tombe pas seulement sur l’autorité
qui a ordonné les massacres, mais sur la nation qui en
est tenue pour responsable. Sans doute l’autorité est jugée : les rois, ceux
qui tiennent le sceptre, les princes et les gouverneurs, sont frappés
personnellement, mais la nation tout entière l’est aussi, car loin de s’opposer
aux actes de l’autorité, elle les a soutenus de ses sympathies, de ses haines
et de ses violences. Dans le cas des Gabaonites, le peuple est même frappé en
premier lieu par trois ans de famine et le jugement de la famille de Saül ne
vient qu’ensuite, car le peuple aurait dû se purifier du mal commis par son
chef.
Lorsqu’une iniquité
nationale
est accomplie, comme nous le voyons dans ces chapitres, l’esprit
de l’homme a peine à concevoir qu’elle ne soit pas immédiatement réprimée, mais
il n’en est pas ainsi : les voies de Dieu ne sont pas nos voies. Dieu permet —
nous le voyons continuellement dans la prophétie — que l’iniquité porte tous les fruits
qu’espérait celui
qui l’a commise ; Dieu s’en sert pour accomplir ses desseins, mais la
rétribution n’en arrive pas moins — elle marche à pas lents, mais elle arrive.
L’Assyrien, dont l’action est plus d’une fois sous-entendue dans
ces chapitres, est un instrument inique, employé, d’abord contre l’iniquité
d’Israël, puis contre celle des nations qui avaient assouvi leur rage contre le
peuple de Dieu, mais la verge de la colère de Dieu ayant accompli son oeuvre,
est elle-même brisée, sa force renversée, et sa chute est plus profonde que
celle de toutes les nations qu’elle a frappées. Au reste, dans nos chapitres,
l’Assyrien qui n’est pas même nommé est loin d’être le seul agent dont Dieu se
serve pour exécuter ses jugements. D’autres agents nombreux y concourent à
diverses époques et leurs noms sont aussi passés sous silence par Amos. Nous
pouvons les trouver dans d’autres récits historiques ou prophétiques ; l’Esprit
de Dieu ne les mentionne pas ici parce qu’il s’agit dans notre prophète, comme
nous l’avons dit plus haut, de l’état moral qui nécessite l’intervention divine
et non des instruments dont Dieu se sert. Le prophète décrit cette intervention
sans intermédiaires, tels un feu, un rugissement, un tremblement de terre, pour
faire comprendre qu’elle émane directement de Dieu. Il n’en est pas de même
chez d’autres prophètes. Ainsi Ésaïe 14: 28 à 23 décrit le jugement de ces
mêmes nations par l’Assyrien,
à la
suite de leur conduite envers les dix tribus ; Jérémie 46 à 49 leur jugement par Nebucadnetsar,
à la suite de leur
conduite envers Juda.
En considérant l’ensemble de la prophétie, nous trouvons donc
des personnes diverses pour exécuter les jugements, mais aussi des répétitions
du même péché qui appellent de nouvelles vengeances de la part de Dieu par ces
mêmes agents. Toutefois, que ces instruments soient tour à tour l’Assyrien, ou
le Pharaon, ou les rois d’Orient, ou Babylone, ou Israël lui-même, les
jugements des nations ne sont encore dans Amos que les voies habituelles de
Dieu dans le gouvernement du monde et non pas les jugements de la fin. Il
faudra que toutes les nations dont parlent les deux premiers chapitres d’Amos
reparaissent à la fin des temps après s’être reconstituées, et subissent un
jugement national
bien plus sévère
que leurs infortunes passées, alors que toutes leurs oeuvres leur seront mises
en compte dans la vallée de Josaphat (Joël 3), après quoi l’on verra la
restauration partielle d’un Résidu de ces nations (sauf entre autres celle
d’Édom), comme nous le lisons en Jérémie. Ce jugement national ne doit pas être
confondu avec le jugement individuel et personnel des morts devant le grand
trône blanc (*).
(*) On ne peut, dans beaucoup de cas, déterminer l’époque où les nations mentionnées dans ces chapitres envahirent Israël et Juda. Leurs attaques étaient incessantes et se succédèrent à des intervalles plus ou moins rapprochés. Il en fut de même des instruments de leur propre chute. Pour ne pas en alourdir notre texte nous récapitulerons ici, au point de vue historique, leurs crimes contre Israël et les divers agents par lesquels leur jugement eut lieu :
Damas
, ou plutôt son roi Hazaël, s’empare de tous les confins
d’Israël et de Galaad à cause des péchés de Jéhu et sous son règne,
c’est-à-dire avant Jéroboam II (2) et Ozias (2 Rois 10: 33). Cette attaque a un
rapport historique avec la prophétie d’Amos (1: 4). Sous Achaz, plus de seize
ans après la mort d’Ozias, la prophétie d’Amos contre Damas fut accomplie. « Le
roi d’Assyrie monta à Damas, et la prit, et en transporta les habitants à Kir »
(2 Rois 16: 9; Ésaïe 17: 1-3). Cependant Amos est plus explicite et parle du
« peuple de Syrie ». Nous trouvons plus tard, aux derniers jours du royaume de
Juda, une prophétie semblable contre Damas et sa prise par Nébucadnetsar (Jér.
49: 23-27). Là aussi l’Éternel allume un feu dans les murs de Damas et il
dévore les palais de Ben-Hadad.
La Philistie
envahit Juda et occupe ses villes sous Achaz, bien des
années après Ozias (2 Chron. 28: 18). Ézéchias combat les Philistins (2 Rois
18: 8). Ils sont ensuite frappés par le Pharaon (Jér. 47), puis détruits par
Nébucadnetsar (Ézéch. 25: 15-17). À différentes reprises ils avaient vendu la
captivité tout entière (je serais tenté de croire que ce terme indique Juda et
les dix tribus) soit à la Grèce (Joël
3: 6), soit à Édom (Amos 1: 6). Evidemment ces choses avaient lieu souvent et
ne sont pas relatées dans des occasions historiques particulières. La destruction
de la Philistie est aussi mentionnée en Jér. 47; cette nation reparaît à la fin
des temps et son jugement a la même cause que par le passé (Joël 3: 4).
Tyr
agit envers Israël comme les Philistins. Plusieurs nations
coopéraient avec Tyr dans le trafic des esclaves, le plus lucratif d’alors
(Ézéch. 27: 13). Tyr qui avait livré la captivité tout entière à Édom, est
livré à l’Assyrie, puis à Nébucadnetsar, après là défaite des Philistins. Nous
retrouvons Tyr avec Sidon au jugement du dernier jour (Joël 3: 4).
Édom.
Sa cruelle vengeance sur Juda est relatée en Ézéch. 25:
12-14. Son désir de conquérir les deux nations, Israël et Juda, excite
l’indignation de l’Éternel (Ézéch. 35: 10). La montagne de Séhir est détruite ;
Nébucadnetsar est l’agent de cette destruction. Mais Édom reparaît dans
l’histoire prophétique de la fin ; on le retrouve à la vallée de Josaphat (Joël
3: 19). Il est à la tête de la confédération des nations de la fin, avec Moab,
Ammon, la Philistie, Tyr, confédération dont l’Assyrien fait partie. Tous
veulent s’emparer des habitations de Dieu
et en prendre possession (Ps. 83). C’est aussi le motif de sa défaite
finale, comme nous le voyons en Abdias et à la fin d’Ésaïe (63: 1). Le Seigneur
lui-même exerce sur Édom la vengeance de son peuple, et y fait coopérer Israël.
Ammon
attaque spécialement Galaad, territoire des dix tribus, mais
se jette aussi sur Juda, emmené captif (Ézéch. 25: 1-7). Son but est d’étendre
ses confins, aux dépens du peuple de Dieu, ambition mauvaise que nous voyons
s’exercer partout de nos jours aux dépens du voisin. Cela crie vengeance !
Les Ismaélites ou « fils de l’Orient » (Ézéch. 25: 4, 10), puis Nébucadnetsar
(Jér. 49: 2) sont les agents de la destruction d’Ammon.
Moab
est accusé en Amos d’un méfait autre que celui des nations
mentionnées précédemment. Il est détruit, puis, reparait à la fin des temps
pour être frappé par Nébucadnetsar (Jér. 48).
Nous revenons sur Moab dans notre texte(à propos du ch.2).
Dans tout ce que nous venons de voir,
Amos annonce le jugement prochain
de
ces peuples, selon le traitement qu’ils ont fait subir aux dix tribus, ainsi
qu’au royaume de Juda. Ce jugement ne dépasse pas les temps historiques comme
le font tant d’autres passages des prophètes, car le livre d’Amos est occupé
avant tout, comme nous l’avons fait remarquer, des caractères moraux du mal qui
nécessite le jugement et nous parle très peu des événements de la fin.
Les voies gouvernementales de Dieu en jugement ont tout d’abord
son peuple pour objet, car le jugement de Dieu commence par sa maison. Damas, Gaza,
Tyr, Édom, Ammon, sont les instruments de Dieu pour châtier son peuple qui
s’est livré à l’idolâtrie et a abandonné l’Éternel cri méprisant tous les
principes moraux de sa loi. Mais, nous allons le voir, il se trouve que ces
nations poursuivent leurs intérêts de lucre ou de conquête et leurs projets de
vengeance en commettant des atrocités. Dieu laisse faire. Iniquité s’accumule
sur iniquité jusqu’à ce que la mesure déborde : « À cause de trois
transgressions… et à cause de quatre
»,
dit l’Éternel, « je ne révoquerai pas mon arrêt ». Cette phrase se répète à
chaque nouvelle occasion. Il n’y a pas une
seule
d’entre ces nations, y compris Juda et Ephraïm, qui n’ait pas mis le
comble à ses transgressions. C’est à ce moment-là que Dieu les frappe. Il
s’occupera plus tard de son peuple pour le restaurer après l’avoir frappé, car,
sous tous ses jugements, on sent que le coeur miséricordieux de l’Éternel ne
change pas. Jamais son peuple, quelque coupable qu’il soit, ne sort de sa
mémoire. Ses conseils à son égard sont éternels, immuables ; tandis que
certaines d’entre ces nations seront anéanties et qu’un Résidu des autres sera
rétabli (Jér. 46: 26; 48:47; 49:6, 39). Maintenant il s’occupe de ceux qui ont
foulé Israël aux pieds.
Ce qui arriva autrefois à Israël peut se présenter aujourd’hui pour les chrétiens dans la bataille des peuples. Elle est une discipline nécessaire pour les enfants de Dieu, mais des populations entières qui portent le nom de Christ sont massacrées par les nations orientales. Dieu ne l’oublie pas : le tour de ces dernières viendra. De plus forts qu’elles entreront en scène et changeront leurs triomphes en deuils, leurs victoires en défaites.
*
« Ainsi dit l’Éternel : À cause de trois transgressions de Damas
, et à cause de quatre, je ne
révoquerai pas mon arrêt ; parce qu’ils ont foulé Galaad avec des traîneaux de
fer. Et j’enverrai un feu dans la maison de Hazaël, et il dévorera les palais
de Ben-Hadad ; et je briserai la barre de Damas, et, de la vallée d’Aven je
retrancherai l’habitant, et de Beth-Eden, celui qui tient le sceptre ; et le
peuple de la Syrie ira en captivité à Kir, dit l’Éternel » (1: 3-5).
On voit en 2 Sam. 10: 6-14 que, dans le passé, les Syriens s’étaient alliés avec les fils d’Ammon contre David, après que ces derniers eurent outragé les envoyés du roi. Les fils d’Ammon furent battus et frappés par David de cruelles représailles (2 Sam. 12: 31; 1 Chron. 20: 3). Cette vengeance était légitime, car elle était voulue de Dieu, par le moyen de son Roi. Ce qui nous en assure, c’est le récit donne de ce fait dans les Chroniques, où toutes les fautes de David, sauf deux exceptions, sont passées sous silence. Les Syriens avaient, dès le début, épousé la cause des Ammonites qui furent presque exterminés ; ils prirent leur revanche en foulant Galaad avec des traîneaux de fer. Le fait de cette alliance aggrave encore le jugement prononcé sur Damas, capitale des Syriens. Sans doute Dieu s’était servi d’eux comme d’une verge contre Israël et avait confié cette mission à Hazaël, leur roi, par le ministère d’Élisée (1 Rois 19: 15; 2 Rois 8: 7-15). Maintenant il brise la verge qui avait accompli ses desseins, car il n’y avait aucune crainte de Dieu dans le coeur d’Hazaël : il avait été impitoyable dans son attaque et Dieu qui l’employait, le jugeait pour sa cruauté envers son peuple. Élisée avait averti Hazaël de tout le mal qu’il ferait à Israël et en avait pleuré. Il l’avait même averti qu’il écraserait leurs petits enfants et fendrait le ventre de leurs femmes enceintes. Il semble que l’alliance des Syriens avec les Ammonites ait duré bien au-delà du temps de David, car ce qui est attribué en Amos 1: 13 à ces derniers, l’est aux Syriens en 2 Rois 8: 12. Dieu savait toutes ces choses ; en faisant oindre Hazaël pour châtier son peuple, il savait aussi que cet homme usurperait la royauté par le meurtre de Ben-Hadad, le roi légitime. Il le savait ; peut-on dire qu’Il le voulût ? Nullement, car, le moment venu, Il revendique les droits de sa sainteté et de sa justice vis-à-vis des transgressions de Damas.
« Je briserai la barre de Damas, et, de la vallée d’Aven je retrancherai l’habitant, et de Beth-Eden, celui qui tient le sceptre » (v. 5). Damas, avec les barres qui ferment ses portes, sera sans défense devant l’ennemi. Bikeah-Aven sera « la vallée de néant », comme, en Osée 4: 15; 5: 8; 10: 5, Béthel, la maison de Dieu, était devenue Beth-Aven, « la maison de néant ». En opposition avec elle, Beth-Eden était en Syrie la « maison de délices ». C’était ce que les hommes pécheurs voulaient faire du monde et qui réussit, hélas ! à captiver même les yeux d’un croyant comme Lot (Gen. 13: 10). Damas était un Beth-Eden aux yeux des hommes, toute cette contrée un Beth-Aven aux regards de Dieu (*). Le peuple de la Syrie, auquel Galaad avait offert une proie facile audelà du Jourdain, « ira en captivité à Kir, dit l’Éternel » (v. 5). L’Assyrien Tiglath-Piléser, peu d’années après la prophétie d’Amos, accomplit cette prédiction (2 Rois 16: 9; Jér. 49: 23-27).
(*) Beth-Aven et Beth-Eden n’ont pu être identifiées par les géographes.
« Ainsi dit l’Éternel : À cause de trois transgressions de Gaza
, et à cause de quatre, je ne le
révoquerai point, parce qu’ils ont emmené captive la captivité tout entière,
pour la livrer à Édom ; mais j’enverrai un feu dans les murs de Gaza, et il
dévorera ses palais ; et je retrancherai d’Asdod l’habitant, et d’Askalon celui
qui tient le sceptre ; et je tournerai ma main contre Ekron, et le reste des
Philistins périra, dit le Seigneur, l’Éternel » (v. 6-8).
Comme les autres nations, la Philistie était coupable de transgressions antérieures et toute l’histoire d’Israël nous montre combien grande était la haine des Philistins contre cette nation qui les avait combattus, puis asservis lors de l’établissement de la royauté sur le peuple de Dieu. Les villes principales de la Philistie, Gaza, Asdod, Askalon, Ekron, sont spécialement prises à partie. La quatrième transgression surpassait toutes les autres : les Philistins avaient vendu comme esclaves tous les captifs de Juda et d’Israël, en les livrant entre les mains d’Édom, leur plus cruel ennemi. Aussi le jugement tombe sur celui qui tient le sceptre, le gouverneur responsable ; les habitants d’Asdod sont massacrés, le reste des Philistins périt ; aucun n’échappe et l’on ne voit pas que leurs captifs soient rétablis aux derniers jours. En Jér. 47 le jugement tombe sur eux par le Pharaon, puis l’Assyrie et l’Égypte se disputent leurs villes, tantôt conquises par l’un, tantôt reprises par l’autre, jusqu’à ce qu’il n en reste plus que des ruines. On voit en 2 Chron. 28: 17-20 l’attaque des Philistins contre Juda, sous Achaz, ainsi que celle des Édomites, leurs alliés ; en Ésaïe 9: 11, 12 l’attaque des Syriens et des Philistins contre Israël ; en Ésaïe 14: 29-32 celle de l’Assyrien contre la Philistie.
« Ainsi dit l’Éternel : À cause de trois transgressions de Tyr,
et à cause de quatre, je ne le
révoquerai point, parce qu’ils ont livré la captivité tout entière à Édom, et
ne se sont pas souvenus de l’alliance fraternelle ; mais j’enverrai un feu dans
les murs de Tyr, et il dévorera ses palais » (v. 9, 10).
Jusqu’ici nous avons vu le jugement de deux nations, entièrement
étrangères au peuple de Dieu. Elles n’avaient jamais été qu’en hostilité
ouverte avec lui. Nous entrons maintenant sur un terrain nouveau, d’abord celui
des liens fraternels, ensuite, celui des relations consanguines avec Israël,
relations qui, même ne fussent-elles que selon la chair, créaient des
obligations à Édom, Ammon et Moab, et auraient dû mettre un frein à leur
antipathie et à leurs haines. Ici Tyr est en cause. Ce royaume avait connu des
temps favorables et particulièrement bénis, quand Hiram, reconnaissant le Dieu
de David et de Salomon, avait fait alliance avec ces deux rois et s’était
engagé à coopérer à l’édification du temple de l’Éternel. Comment cette
affection et cette alliance fraternelle avaient-elles, au cours des années,
fait place à la haine ? La grâce de David, la sagesse et la puissance de
Salomon, mais surtout leur foi, avaient captivé jadis le coeur de Hiram. Il
avait compris que l’Éternel était l’objet de toutes les pensées de ses amis ; il
avait vu que leur seul désir était de donner à Dieu, au milieu de son peuple,
une habitation digne de Lui. Si les choses faites par Hiram étaient inconnues à
ses successeurs, Dieu ne les oubliait pas et rendait responsables les héritiers
du roi de Tyr d’avoir eu jadis leur royaume en rapport avec les bénédictions de
l’alliance. Alors même que cette alliance n’avait été que passagère et
occasionnelle, Tyr en ayant joui était devenu responsable de la conserver, mais
les intérêts
de cette nation
commerçante l’avaient bien vite éloignée des bénédictions spirituelles ; elle
avait vu une source de gain dans l’alliance avec la Philistie pour faire la
guerre au peuple de Dieu et le réduire en captivité. Peu lui importait qu’il
fût vendu à Édom, ennemi acharné d’Israël ; la soif de l’or dominait toute autre
considération. Plus tard ces deux nations alliées avaient réitéré leur action
sacrilège en vendant à Javan les captifs d’Israël. Mais il y avait chez eux
autre chose encore que le gain : leur politique était d’éloigner Israël de ses
confins (Joël 3: 6), afin de s’emparer de territoires sur lesquels ils
élevaient des prétentions, oubliant que ces territoires appartenaient à
l’Éternel.
Ils oubliaient ou ignoraient que l’Éternel avait choisi pour lui-même un
héritage particulier au milieu de toutes les nations. Galaad était à lui,
Manassé était à lui, Ephraïm était la force de sa tête, Juda était son
législateur (Ps. 108: 8). Gaza et Tyr avaient eu la folie de toucher, l’audace
de s’approprier ce qui appartenait à Dieu : « mon argent
et mon
or », et de
porter dans leurs temples « mes
belles
choses désirables » (Joël 3: 5). S’il trouvait bon de châtier Israël par la main
de ces nations ennemies, il n’estimait pas qu’une nation quelconque eût le
droit d’en profiter pour son propre compte.
Les jours actuels n’offrent-ils pas des exemples pareils ? Les nations s’allient pour prendre possession de territoires qui ne leur appartiennent pas et s’agrandir aux dépens de leurs voisins, les déportent et s’emparent de leurs richesses, sans penser un instant que « à l’Éternel est la terre et tout ce qu’elle contient ! » (Ps. 24: 1).
« Ainsi dit l’Éternel : À cause de trois transgressions d’Édom,
et à cause de quatre, je ne le
révoquerai point, parce qu’il a poursuivi son frère avec l’épée, et a étouffé
la miséricorde, et que sa colère déchira sans fin, et qu’il garda sa fureur à
toujours. Et j’enverrai un feu sur Théman, et il dévorera les palais de Botsra »
(v. 11, 12).
Avec Édom nous passons aux peuples apparentés
à Israël. Leurs transgressions ne sont pas moindres que
celles des nations étrangères. Ésaü, Édom, est jugé pour sa haine meurtrière et
sans miséricorde, envers Jacob son frère. Les peuples précédents sont moins
sévèrement traités que ceux qui suivent. Le jugement d’Édom est sans aucune
miséricorde. Sa haine sauvage contre le peuple de l’Éternel (car plus les liens
sont étroits, et cela caractérise l’homme, plus la haine est intense) oblige
Dieu à dire, tout à la fin de son histoire : « J’ai haï Ésaü ». Aussi restera-t-il
sans postérité. (Voyez Abdias. Jér. 49: 7-22) : « Il n’est plus », dit Jérémie
(49: 10), tandis que, même Moab et Ammon, et ensuite Elam, voient leurs captifs
rétablis (48: 47; 49: 6, 39). Le cas d’Édom est sans rémission, sans pardon.
C’est la seule de ces nations qui soit exterminée, ou du moins asservie en
entier ; elle sera le théâtre du terrible carnage de la fin (És. 63: 1-6). Mais
ce n’est pas la haine seule qui caractérise Édom ; nous l’avons vu se servir de
la Philistie et de Tyr, nations avec lesquelles il n’avait aucune affinité
d’origine, pour asservir Israël, son frère selon la chair. Il prononçait ainsi,
non seulement sa colère invétérée contre Jacob qui lui avait ravi son droit
d’aînesse, mais son mépris de la sentence de Dieu : « Le plus grand sera asservi
au plus petit » (Gen. 25: 23). Ayant réduit son frère en esclavage, il s’empare
de tout le midi de la Palestine (l’Idumée) et l’annexe à son territoire,
contrairement à la volonté expresse de Dieu et aux principes de son
gouvernement, quand il établissait les limites des peuples selon le nombre des
fils d’Israël (Deut. 32: 8) (*).
(*) Le roi d’Édom n’est pas nommé ici. Édom n’avait pas de roi au temps de Josaphat (2 Chron. 20: 1), ni au temps d’Ozias (2 Chron. 25: 7).
« Ainsi dit l’Éternel : À cause de trois transgressions des fils d’Ammon,
et à cause de quatre, je
ne le révoquerai point, parce qu’ils ont fendu le ventre aux femmes enceintes
de Galaad, afin d’élargir leurs frontières ; et j’allumerai un feu dans les
murs de Rabba, et il dévorera ses palais, au milieu des cris au jour de la
bataille, au milieu de la tempête au jour du tourbillon ; et leur roi ira en
captivité, lui et ses princes ensemble, dit l’Éternel » (v. 13-15).
La parenté d’Édom avec Israël remontait à Isaac. celle d’Ammon et de Moab, par Lot, à Abraham. Quoique basée sur des faits honteux, elle était plus ancienne que la première. On trouve chez les fils d’Ammon une cruauté atroce envers les tribus situées au-delà du Jourdain, en vue d’exterminer leurs descendants mâles et de s’emparer définitivement du territoire de Galaad. En cela pareil à Édom, Ammon oublie que l’Éternel lui-même l’avait dépossédé afin de donner un héritage à son peuple. C’était le pays de l’Éternel et il ne pouvait être aliéné. Les plans de l’homme échouent devant le grand fait que la cause de l’Éternel, devant laquelle aucune des prétentions de l’homme ne réussira, finira par avoir le dessus. Ce royaume de proie, semblable à celui d’Édom, prendra fin « au milieu des cris au jour de la bataille, au milieu de la tempête au jour du tourbillon ». Sa ruine sera plus terrible que toutes les autres. L’orage s’abattra sur le peuple tout entier, mais ses conducteurs responsables iront en captivité, roi et princes ensemble, comme le peuple de la Syrie. Sur des forfaits pareils le prophète Élisée avait pleuré (2 Rois 8: 12. Voyez aussi Osée 13: 6). Comment donc l’Éternel les permet-il ? Est-il insensible à tant d’horreurs ? Sans doute il a connu d’avance ce qui sortirait du coeur de l’homme, devenu sa verge pour châtier son peuple, mais il montre, et c’est la première chose qu’il met en avant ici, qu’il va briser la verge dont il s’est servi.
« Ainsi dit l’Éternel : À cause de trois transgressions de Moab,
et à cause de quatre, je ne le
révoquerai point, parce qu’il a brûlé, réduit en chaux les os du roi d’Édom ; et
j’enverrai un feu sur Moab, et il dévorera les palais de Kerijoth, et Moab
mourra au milieu du tumulte, au milieu des cris, au son de la trompette, et je
retrancherai le juge du milieu de lui, et je tuerai tous ses princes avec lui,
dit l’Éternel » (2: 1-3).
Le caractère de Moab tranche sur ce que nous avons vu jusqu’ici.
Nous nous trouvons en présence d’un nouveau principe. Ce n’est pas seulement
que le gouvernement de Dieu enregistre scrupuleusement le tort fait à son
peuple coupable, par les nations, devenues ses instruments pour le châtier,
mais il enregistre aussi les torts commis par ces nations elles-mêmes entre elles.
Rempli d’un désir de
vengeance insatiable qui s’assouvit même sur les morts, Moab a violé la
sépulture du roi d’Édom. Nous ne savons à quelle occasion, mais il méprisait
par là l’autorité établie de Dieu, quelque coupable qu’elle pût être. Violer
les sépultures, en sortir les ossements, les brûler, était un acte de vengeance
n’appartenant qu’à Dieu seul. Dans le cas de Josias, cet acte avait pour but de
souiller les autels des faux dieux (2 Rois 23: 15-17), mais il n’appartenait
point aux hommes de prendre cette mesure, sauf pour obéir à Dieu. Un homme souillé
avait-il le droit de juger les morts,
d’autres
hommes souillés comme lui ? On a voulu voir cet acte dans le récit un peu
énigmatique qui nous est fait en 2 Rois 23: 15-17. Nous ne le pensons pas, et
nous voyons plutôt dans le fait relaté ici une vengeance furieuse de Moab
contre Édom qui l’avait jadis envahi et humilié, vengeance postérieure au récit
de 2 Rois 3 et qui, ne pouvant s’exercer sur le roi vivant, s’assouvit en
violant son sépulcre. Le fait rapporté dans notre passage est d’une grande importance
morale quant aux voies du gouvernement de Dieu. Alors même qu’il s’agit d’Édom
dont la fureur contre le peuple de Dieu et contre Dieu lui-même était sans
bornes, Dieu punit toute infraction aux règles qu’Il a établies, toute
atteinte, même après la mort, à l’autorité qu’il a instituée. Il en sera de
même devant le trône du jugement, mais souvent une iniquité pareille trouve sa
rétribution ici-bas. Dieu n’oublie rien. Quelle description de l’anéantissement
de Moab au milieu du tumulte de la bataille ! Avec le juge, tous ses
princes sont tués. Pourtant, à la fin des jours, Moab, comme les fils d’Ammon,
verra ses captifs rétablis (Jér. 48: 17; 49: 6), tandis que rien de pareil ne
nous est dit d’Édom (Jér. 49: 7-22).
Par qui eut lieu le jugement de Moab ? On voit en Ézéch. 25: 8-11 que ce fut par « les fils de l’Orient ». En Ésaïe 15 et 16, le sort de Moab est annoncé comme tout prochain : « dans trois ans, comme les années d’un mercenaire » (v. 14). Cette prophétie peut avoir été prononcée sous Ozias ou Ézéchias. En Jérémie, la destruction de Moab s’accomplit par le « dévastateur » qui semble être Nébucadnetsar. Mais Ésaïe 25: 10 nous apprend que le jugement de Moab sera consommé lorsque ce peuple, ayant été reconstitué à la fin des temps, le Seigneur établira son règne et que la mort sera engloutie en victoire. De même, en Soph. 2: 10, 11, le Résidu prophétique d’Israël pille Moab. On voit encore en Daniel 11: 41 qu’Édom, Moab et les fils d’Ammon échappent de la main de l’Assyrien futur (car ils n’avaient pas été préservés de l’Assyrien historique ou plutôt de Babylone) et sont comme mis à part et réservés pour un jugement spécial à la fin des temps.
Remarquons encore que, plus la relation de ces nations avec le peuple de Dieu était étroite, plus le jugement qui tombe sur elles est sévère.
« Ainsi dit l’Éternel : À cause de trois transgressions de Juda
, et à cause de quatre, je ne le
révoquerai point, parce qu’ils ont méprisé la loi de l’Éternel et n’ont pas
gardé ses statuts, et que leurs mensonges, après lesquels leurs pères ont
marché, les ont fait errer ; et j’enverrai un feu dans Juda, et il dévorera les
palais de Jérusalem » (v. 4, 5).
Si Dieu n’abandonne jamais ses promesses, il ne révoque jamais
non plus son arrêt, bien moins encore quand il s’agit de son peuple et non de
ceux qui l’oppriment. Vis-à-vis des nations, il est l’avocat de son peuple et
prend en main sa cause ; mais à l’égard des siens son jugement est d’autant plus
sévère que leur proximité de Dieu a été plus grande. La sévérité de ce jugement
se montre en ce que Dieu assimile complètement Israël aux nations, objets de
son châtiment irrévocable. Les « trois et quatre transgressions » sont aussi
comptées à Juda. Dieu ne lui donne, chose importante à remarquer, qu’une seule
raison de son jugement : ses rapports avec
l’Éternel
. Il
punit les nations
selon leur conduite envers son peuple ; il punit son peuple selon sa conduite
envers Lui. Tout est contenu dans cette simple question. Avait-il honoré ou
méprisé la parole de Dieu ? Avait-il gardé ses préceptes ? La
discipline de Dieu envers nous sur la terre (car il s’agit du gouvernement de
Dieu et non du jugement éternel), dépend avant tout de l’influence que la
Parole exerce sur notre vie et notre conduite. La négliger nous assimile au
monde. Pensons-nous assez que l’observation de sa Parole (Apoc. 3: 8) nous
acquiert l’approbation du Seigneur, et que le mépris de sa loi nous fait
encourir son jugement ? En quoi l’avaient-ils méprisée ? En ce qu’au
lieu de garder les statuts de l’Éternel ils avaient suivi les mensonges
idolâtres après lesquels leurs pères avaient marché. Du moment que nous
négligeons la parole de Dieu, il se fait un vide dans notre coeur, et le monde
ne tarde pas à le combler.
Aux versets 6 à 16 Israël,
c’est-à-dire les dix tribus, à part, comme Juda, au jugement des nations.
Nous l’avons dit : les dix tribus forment le sujet spécial de la prophétie
d’Amos ; aussi les causes de leur châtiment sont-elles beaucoup plus détaillées
que pour Juda. L’arrêt prononcé sur Israël est tout aussi inexorable que les
autres. Dieu avait enregistré toutes les transgressions d’Ephraïm. Sa conduite
était déterminée par une basse cupidité qui s’attaquait aux justes, aux
pauvres, aux chétifs, aux débonnaires, à ceux sur lesquels repose en tout temps
le bon plaisir de Dieu, à ceux qu’il avait envoyés sans défense dans ce monde,
comme des agneaux au milieu des loups, à ceux enfin que le Seigneur déclare
bienheureux, car ils, hériteront de la terre sur laquelle la méchanceté des
hommes ne leur accorde aucune place.
Si l’état de Juda est le mépris de la Parole, celui d’Israël
peut se résumer en un mot : l’absence
de crainte de Dieu
. Ils
avaient « vendu le juste pour de
l’argent ». Plus tard Juda suivit le même chemin en livrant, pour trente pièces
d’argent, le juste par excellence entre les mains des hommes. « Et le pauvre
pour une paire de sandales », objet commun et sans valeur, qu’on se procurerait
même sans bourse délier. C’est ainsi qu’ils estimaient ceux que Dieu prisait
au-dessus de tout. « Eux qui désirent ardemment de voir la poussière de la terre
sur la tête des chétifs » : Ils aspiraient à voir les misérables dans le deuil
pour que, dénués de tout, ils devinssent leur proie et qu’ils en profitassent
pour les réduire en esclavage. « Et qui pervertissent le chemin des débonnaires » : Les débonnaires joignent la douceur à la bonté dans leurs rapports avec les
hommes. Le Seigneur était débonnaire et humble de coeur ; il communique son
caractère à ses bien-aimés qui, par la connaissance de Christ, sont capables de
reproduire ses traits. « Pervertir leur chemin », c’est les accuser d’être en
contradiction, dans leur conduite, avec leur profession, afin de les arrêter
dans le chemin qu’ils désirent suivre à la gloire de Dieu, et pour le bien des
hommes. Ces accusations dénotent toujours une haine cachée contre Christ, dont
les siens, au milieu de beaucoup de faiblesses et d’infirmités avouées,
cherchent à reproduire le caractère. Les tendances hostiles du coeur des hommes
ne se montrent pas toujours à nu, et se déguisent souvent de manière à tromper
tout le monde sur les vrais ressorts de leur conduite, occupée tout entière au
soin de leurs propres intérêts. Tôt ou tard cependant les gains retirés par
eux, en prenant en gage le bien du pauvre et en mettant à l’amende le prochain
(v. 8), engendrent la corruption et servent à alimenter les moeurs les plus
éhontées. Même le respect dû à la famille, la crainte que les parents doivent
inspirer à leurs enfants, sont oubliés pour assouvir les plus basses
convoitises (v. 7). Dans cet état composé de lucre, de corruption, de mépris du
vrai peuple de Dieu, ces hommes « s’étendent à côté de chaque
autel », car la religion qu’ils professent n’est pas celle du
vrai, du seul
autel de Dieu, mais une
religion n’ayant de la vraie que l’apparence. Un tel tableau ne diffère pas,
moralement, de celui du monde chrétien.
Cependant, que n’avait pas fait l’Éternel pour ce peuple ? L’histoire passée d’Israël prouvait l’intérêt que Dieu lui portait : Il avait exterminé les Cananéens devant lui, avait anéanti la puissance de Satan s’opposant à ce qu’il possédât le pays de la promesse. Malgré leur taille aussi haute que les cèdres orgueilleux, malgré leur puissance aussi forte que les chênes, ils n’avaient pu tenir tête à Israël ; ils avaient été exterminés, racine et fruits (v. 9), et ne valaient pas mieux qu’un tronc d’arbre desséché, destiné au feu.
« Et moi, je vous ai fait monter du pays d’Égypte, et je vous ai
fait marcher dans le désert quarante ans, pour posséder le pays de l’Amoréen »
(v. 10). Dieu leur rappelle ici comment il leur avait finalement procuré la
victoire en accomplissant à leur égard l’oeuvre
du salut.
Cette oeuvre consiste en deux facteurs indispensables : 1° « Je
vous ai fait monter du pays d’Égypte ». C’est la rédemption
qui nous délivre du monde et de l’esclavage de Satan. 2°
« Je vous ai fait marcher dans le désert quarante ans ». C’est la discipline
sans laquelle nous ne
pourrions atteindre notre Canaan céleste. Sans doute, la rédemption est
suffisante pour donner au croyant l’accès immédiat du Paradis, mais, comme
racheté, il est ici-bas l’objet d’une action continuelle de la Parole, pour le
purifier et le sanctifier, car sans la sainteté, nul ne verra le Seigneur.
Ainsi, en Eph. 5, le Seigneur s’est livré lui-même pour l’Assemblée, notre
rédemption étant le fruit de son amour pour nous ; puis il sanctifie l’Assemblée
en la purifiant par le lavage d’eau, par la Parole, car il veut se la présenter
n’ayant ni tache, ni ride, sainte et irréprochable, dans la gloire. C’est là ce
qu’en type Israël aurait dû connaître, mais, devant tant de grâces et de soins,
il avait abandonné Dieu et sa loi. Cependant la patience de l’Éternel envers
eux ne s’était pas lassée : Il leur avait suscité des prophètes d’entre leurs
fils, et d’entre leurs jeunes gens des Nazaréens ; des prophètes, porteurs de
sa Parole, pour les ramener par la repentance, au Dieu dont ils s’étaient
détournés, et les rendre attentifs à ses jugements et à ses miséricordes — des
Nazaréens, dont l’exemple prêchait l’abstention des souillures du monde, le refus
de tout ce qui produit l’ivresse en satisfaisant les convoitises de la chair,
en un mot une vie sanctifiée. Mais, dit l’Éternel, « vous avez fait boire du vin
aux Nazaréens, ,et vous avez commandé aux prophètes, disant : Ne prophétisez
pas ». Eux, les « ivrognes d’Ephraïm », avaient écarté le témoignage gênant des
Nazaréens en les obligeant à faire comme eux ; ils avaient imposé silence aux
prophètes. Par inimitié contre Dieu, ils avaient séduit ou opprimé ses
serviteurs.
Cette absence de toute crainte
de Dieu
est la cause d’un jugement sur Israël, comparé (v. 13) à un char
chargé de gerbes au jour de la moisson, qui passe, ébranlant le sol sous le
poids des essieux. Quand la récolte sera engrangée, eux seront foulés sous les
roues. Image saisissante du jugement qui allait atteindre Israël et dont le
tremblement de terre, annoncé par Amos devait être l’avant-coureur ! Les
versets 14-16 montrent l’impossibilité d’échapper à ce cataclysme. Force pour
résister au jugement prochain, puissance pour le vaincre, armes pour le
combattre, agilité pour lui échapper, courage pour l’affronter — tout manquera
à l’homme en ce jour-là : devenu la proie du jugement, il s’enfuira tout nu
devant Dieu.
Tel est l’irrévocable arrêt contre les dix tribus moins de cent ans après, il fut exécuté.
Dans la première division, de notre prophète (chap. 1-2) nous avons vu que les mots : « Ainsi dit l’Éternel » annonçaient un jugement certain, déjà arrêté. Le décret ne pouvait être révoqué. Juda, puis les dix tribus, n’étaient pas séparés des nations environnantes. La seule différence est que, plus rapprochés de l’Éternel, donc plus coupables que les peuples idolâtres leurs voisins, les griefs formulés contre eux dépassent les premiers en nombre et en gravité. Israël surtout avait mis le comble à ses iniquités. Son état moral était pire encore que ses actes. Si Juda était taxé de désobéissance, du mépris de la parole divine et d’idolâtrie, Israël était caractérisé par l’absence absolue de crainte de Dieu : telle était leur condition spirituelle. Les nations sont jugées pour leur conduite envers le peuple de Dieu, Israël, en particulier, pour sa conduite envers l’Éternel, dans la personne de ceux qui Le représentent ici-bas, pauvre Résidu sur lequel Ses yeux reposent avec complaisance. Il en fut de même plus tard pour la tribu de Juda. Aux jours de Jésus, ceux qui confessaient leurs péchés, les « excellents de la terre » ; les pauvres, les débonnaires, les persécutés, étaient les objets spéciaux de sa sollicitude. L’Evangile était annoncé à ces pauvres du troupeau, les promesses leur étaient faites ; ils étaient déclarés bienheureux les consolations étaient pour eux, quand, semblables à leur Maître, ils étaient poursuivis, persécutés, mis à mort par les conducteurs de Juda. Dans cette seconde division une nouvelle interpellation, un suprême appel est adressé à Israël : « Écoutez cette parole ! »
N’oublions pas que, lorsque Amos prophétisait, le peuple d’Israël sous Ozias, et particulièrement sous Jéroboam 11, après avoir subi des jugements terribles, mais partiels, était parvenu de nouveau au comble d’une prospérité relative. La richesse, le luxe, le repos, l’adoucissement, disons plutôt l’amollissement des moeurs, une vie de bien-être sans précédent depuis Salomon, caractérisaient ce peuple. On peut dire que ces temps ont plus d’un point de contact avec les nôtres. Jamais le monde ne semble avoir été plus florissant quant à ses intérêts matériels, alors que son oubli de Dieu, sa corruption morale ont atteint leur comble. Soudain la longue patience de Dieu arrive à son terme, au moment où le monde s’y attendait le moins et semblait le plus prospère. L’Éternel rugit de Sion ; le tremblement e terre, annoncé par le prophète, s’abat sur Israël ; le cataclysme dont il est le centre l’atteint et s’étend à tous ses voisins !
Depuis ce troisième chapitre, l’Éternel s’adresse à l’ensemble
du peuple, sans perdre de vue
son objet principal, et le plus proche : le jugement terrible qui, sous peu
d’années, s’abattrait sur les dix tribus.
« Écoutez cette parole que l’Éternel prononce sur vous, fils
d’Israël, sur la famille entière
que
j’ai fait monter du pays d’Égypte, disant : Je vous ai connus, vous seuls, de
toutes les familles de la terre ; c’est pourquoi je visiterai sur vous toutes
vos iniquités » (v. 1, 2). Dieu ne sépare pas la famille entière, quand il parle
de ses miséricordes passées. La division des tribus était le fruit de leurs
péchés et Dieu l’avait permise comme jugement sur elles et non point par une
faveur spéciale. Le temps arriverait où le lien rompu entre Juda et Israël serait rétabli
et où ces frères ennemis
réunis par la grâce, habiteraient de nouveau bien unis ensemble. Pour le moment
Dieu les réunit dans le jugement ;
mais
c’était comme « famille entière » qu’Il les avait jadis rachetés d’Égypte. La
rédemption les avait considérés comme formant une unité, la régénération les
verra réunis en un. Il en est de même de l’Eglise. Jadis Christ l’a aimée et
s’est donné lui-même pour elle ; aujourd’hui elle est bien plus divisée que les
douze tribus ne l’ont jamais été. Dans l’avenir le Seigneur se la présentera
une, son Épouse purifiée, sans tache ni ride, dans la gloire. Aujourd’hui le
Seigneur lui dit : « Écoutez cette parole ». Israël étant mis à part de toutes les
nations qui l’entouraient, une responsabilité très grave en était pour lui la
conséquence : « C’est pourquoi
je
visiterai sur vous toutes vos iniquités ». Nous ne pouvons assez méditer cet
important principe. La grandeur de notre responsabilité se mesure à la grandeur
de notre privilège. Un Moïse, l’ami de Dieu, est jugé plus sévèrement pour un
seul manquement qu’un ignorant qui ne jouit pas de ce privilège, ou n’y a pas
de part. Il en est de même pour les peuples. Ceux qui ont été illuminés des
clartés de la Parole sont jugés plus sévèrement que ceux qui, en étant privés,
ont vécu dans la nuit de l’ignorance. Les plus privilégiées des nations
protestantes méprisent celles qui vivent dans les ténèbres du catholicisme,
oubliant que c’est sur elles-mêmes que tomberont les coups les plus sensibles.
Elles doivent avoir affaire à Dieu et non pas se vanter de leurs privilèges.
C’est avec Dieu
que l’homme est en
chemin. « Deux hommes peuvent-ils marcher ensemble s’ils ne sont pas
d’accord ? » (v. 3). Cette vérité s’applique aussi bien aux peuples qu’aux
individus. En Luc 12: 54-59, les hommes auraient dû discerner le temps du
Seigneur et comprendre que si la grâce était avec eux dans ce moment-là comme
une ondée, le jugement brûlant, le vent du midi, dont il est dit : « Il fera
chaud », était près de souffler. Les
choses en étant là, ne voyaient-ils pas qu’il s’agissait pour eux d’échapper au
jour de jugement ? « Quand tu vas avec ta partie adverse devant le
magistrat, efforce-toi en chemin d’en être délivré, de peur qu’elle ne te tire
devant le juge ; et le juge te livrera au sergent, et le sergent te jettera en
prison. Je te dis que tu ne sortiras point de là, que tu n’aies payé jusqu’à la
dernière pite. » Pour les individus comme pour les peuples, le seul moyen
d’échapper au pouvoir judiciaire est de s’efforcer d’en être délivré, tandis
qu’on est en chemin avec lui. Comment cela peut-il se faire ? En acceptant
d’avance comme juste le jugement mérité, en se reconnaissant coupable, et en
ayant recours à la grâce.
Dans notre passage, l’Esprit nous montre plutôt l’impossibilité de marcher avec Dieu si l’on n’est pas d’accord avec Lui. La prétention du monde à posséder la faveur de Dieu contredit absolument ce que la Parole nous présente ici. Le monde n’est nullement d’accord avec Dieu sur la nécessité de sa propre condamnation. Il parle de sa juste cause, prétend combattre pour la justice et pour le droit, et ne voit pas que Dieu le taxe d’iniquité et d’injustice, que Dieu est foncièrement en désaccord avec lui, et ne peut prendre en main sa cause, puisqu’il est perdu sans espoir. Oui, le jugement est à la porte : Israël ne s’en apercevait pas. Le lion rugissait dans la forêt, ayant déjà sa proie et prêt à la dévorer. Le lionceau, instrument de jugements moindres ou partiels, avait pris quelque chose. Le filet était tendu pour l’oiseau imprudent qui allait tomber dans le piège. Celui-ci allait se lever du sol, retenant captifs dans ses mailles ceux qu’il avait attirés. Déjà les avertissements s’étaient fait entendre, la trompette avait sonné dans la ville… le peuple avait-il tremblé ? Avait-il reconnu la main de l’Éternel quand le mal s’était abattu sur quelque région limitée du territoire d’Israël ? (v. 4-6). Dieu avait proclamé l’imminence des jugements ; les forêts, les champs, les villes d’Israël en étaient les témoins ; mais où se trouvaient des oreilles pour entendre ?
Et pourtant Dieu ne s’était pas contenté de parler par des
calamités ou des jugements partiels. Il n’avait rien exécuté sans avertissement
préalable : « Or le Seigneur, l’Éternel, ne fera rien, qu’il ne révèle son
secret à ses serviteurs les prophètes » (v. 7). Tel était le rôle des prophètes,
dont le nombre se multipliait d’autant plus en Israël que le jugement était
plus proche. Dieu leur avait révélé son secret : ce fait est d’une importance
capitale pour tous les temps. Les Ecritures remplacent maintenant le prophète,
car il était en Israël le messager de la parole de Dieu et annonçait le secret
du Seigneur. Pour connaître ce secret, nous pouvons aujourd’hui consulter la
Parole. Elle nous fait connaître comme le prophète en Israël, le jugement de
Dieu et la grâce qui s’élève au-dessus du jugement. Nous sommes aujourd’hui les
confidents de ce secret renfermé dans les Ecritures. Soyons-y attentifs.
Restons avec le prophète et non avec le monde qui ne veut pas écouter le secret
révélé au serviteur de l’Éternel quand le lion a rugi. Annonçons aux hommes le
seul moyen d’échapper au juge. Comme le prophète qui avait le secret de Dieu,
notre part est d’être absolument séparés d’un monde mûr pour le jugement. Hélas
1 comme Israël il nous commande aujourd’hui, disant : « Ne prophétisez
pas ! » (2: 12). Toutefois, que rien ne nous entrave : « Le lion a rugi : qui
n’aura peur ? Le Seigneur, l’Éternel, a parlé : qui ne prophétisera ? »
Les hommes ont beau chanter pour se donner du courage, exulter en proclamant
d’avance la victoire : Ils ont peur
!
Le nuage, sillonné d’éclairs, descend toujours plus bas sur leur tête, grandit
sur eux, les enveloppe ; ils ont peur en chantant des hymnes de triomphe. Ils
emploient toute leur énergie pour vaincre la tempête ; ils s’écrient : Je tiens
ferme, je réussis, mes forces viendront à bout de la furie des éléments — dans
le fond de leur âme ils ont peur. Jamais ils ne l’avoueront, mais qu’ils soient
dans un camp ou dans l’autre, ils ont peur. Peuvent-ils quelque chose contre le
lion qui a rugi, contre l’Éternel qui a parlé, contre le dominateur, déjà en
possession de sa proie ? La tâche du croyant est de prophétiser, parce
qu’il a le secret de Dieu. Chrétiens, ne manquons pas de le faire ; que notre
voix, que la parole de Dieu soit entendue distinctement au milieu des éléments
déchaînés, ne fût-ce que pour convaincre le monde de péché, de justice et de
jugement, ne fût-ce que pour sauver du piège de l’oiseleur quelque pauvre
oiseau fasciné par le miroir sur lequel un filet a été tendu !
Au v. 9 Dieu appelle la Philistie (Asdod) et l’Égypte à
s’assembler sur les montagnes de Samarie pour voir « la grande confusion qui est
au milieu d’elle, et les oppressions qui ont lieu dans son sein : et ils ne
savent pas faire ce qui est droit… eux qui amassent la violence et la rapine
dans leurs palais ». Ce n’est pas que Dieu disculpe ces nations, car la
Philistie a été signalée au premier chapitre comme un des objets du jugement, à
cause de l’oppression exercée sur les captifs des dix tribus, et Dieu prend ces
nations à témoin des iniquités d’Éphraïm, afin qu’elles comprennent que, s’il
juge Israël par leur moyen, ce n’est pas qu’il les tienne pour innocentes, mais
qu’Il revendique d’autant plus son caractère vis-a-vis de tout mal, là où Son
nom est invoqué. Combien peu cette vérité est comprise aujourd’hui ! Une
nation qui en asservit une autre croit que Dieu l’emploie et l’approuve parce
qu’elle est meilleure que son ennemi vaincu. Qu’elle médite ces versets !
Dieu se sert de la Philistie et de l’Égypte pour châtier et non comme preuve de
faveur sur ces nations. « Le reste
des
Philistins périra » (1 : 8), avait dit le Seigneur. Qu’ils prennent donc
garde ! Ils ne seront pas les objets de la grâce au milieu du renversement
opéré par eux, mais du sein du peuple, écrasé par le jugement, l’Éternel
sauvera un pauvre petit Résidu. « Comme le berger sauve de la gueule du lion
deux jambes ou un bout d’oreille, ainsi seront sauvés les fils d’Israël qui
sont assis à Samarie sur le coin d’un lit, et sur le damas d’un divan » (v. 12).
Il en restera des débris qui, tout mutilés qu’ils soient, pourront être
reconnus du berger auquel ils appartiennent. Le Résidu d’un peuple, voué à la
destruction, sera recueilli par le pasteur du troupeau. Un seul homme, Christ,
est sorti indemne de la gueule du lion sans être dévoré. En butte aux traits
des tireurs de l’arc, « sa force est restée en son entier » ; au sein même de la
mort Il a été « la puissance de Dieu ».
Ce petit Résidu est l’objet de la sollicitude de l’Éternel. On
le voit reparaître au chap. 5, vers. 15: « Peut-être l’Éternel, le Dieu des
armées, usera-t-il de grâce envers le reste
de Joseph », s’il revient au bien. Ce même Résidu est encore, au chap. 4,
vers. 11 comme « un tison sauvé d’un incendie ». De même, au chap. 9: 8, en
parlant des douze tribus il dit : « Seulement je ne détruirai pas entièrement la
maison de Jacob ». Puis vient l’annonce de ce que l’Éternel fera à la fin des
jours, quand il rétablira Israël (v. 11-15). Toutes les voies de Dieu envers
son peuple se terminent par un chant de triomphe. Ses jugements sont
invariablement suivis du résultat de sa fidélité à ses promesses, en un mot de
sa grâce !
« Écoutez », dit le Seigneur (v. 13). Les prophètes avaient fait
entendre aux ennemis le cri de rassemblement (v. 9). Ici, ces mêmes prophètes
rendent partout témoignage en Israël, car ils sont seuls
à écouter. Le tremblement de terre ne vous a-t-il pas servi
d’avertissement ? La destruction atteindra vos faux autels ; celui de
Béthel tombera à terre. Sous Jéroboam 1er, le vieux prophète avait
prophétisé contre ce même autel de Béthel. Séance tenante sa malédiction
S’était réalisée (1 Rois 13: 2, 5) comme signe
de ce qui allait arriver. Josias accomplit cette prophétie (2 Rois 23: 15)
cent ans environ après les paroles d’Amos, car, nous l’avons dit souvent, le
trait particulier de ce prophète est d’annoncer des jugements prochains.
Toute la prospérité et les richesses accumulées par les hommes efféminés de Samarie disparaîtront dans la tourmente : « Je frapperai la maison d’hiver avec la maison d’été, et les maisons d’ivoire périront, et beaucoup de maisons cesseront d’exister, dit l’Éternel » (v. 15).
L’opulence dont le monde se vante et qu’il recherche comme son but suprême est un des traits particuliers de ce prophète (voyez 3: 12, 15; 5: 11; 6 , 1: 4-6). Tout cela est jugé (*).
(*) Une seconde charge qui revient souvent dans ce livre est l’oppression des chétifs (voyez 2: 7-8; 3: 10; 4: 1; 5: 11; 8: 5-6).
Ici nous entendons pour la seconde fois (v. 1; voyez 3: 1) : « Écoutez cette parole ». Le prophète ne s’adresse plus à la famille entière d’Israël, comme au v. 1 du chap. 3, mais aux dix tribus et à la montagne de Samarie. Il descend, pour ainsi dire, de son observatoire élevé de Thekoa, entre sur le territoire d’Ephraïm et prophétise à Béthel :
« Écoutez cette parole, vaches de Basan, qui êtes sur la montagne de Samarie, qui opprimez les chétifs, qui écrasez les pauvres, qui dites à vos maîtres : Apporte, afin que nous buvions ! Le Seigneur, l’Éternel, a juré par sa sainteté, que, voici, des jours viennent sur vous, où il vous enlèvera avec des hameçons, et votre postérité avec des haims de pêche. Et vous sortirez par les brèches, chacune droit devant elle, et vous serez lancées vers Harmon, dit l’Éternel » (v. 1-3).
La première comparaison est tirée des images si fréquentes chez
Amos, suggérées par les troupeaux. Les « vaches de Basan » ne sont point, comme
quelques-uns ont pensé, les femmes de Samarie, en contraste avec les « taureaux
de Basan », image de la force brutale ; mais elles représentent ici un troupeau
de choix engraissé dans les plantureux pâturages du plateau de Basan, au-delà
du Jourdain. Leur nourriture est l’oppression des chétifs et l’écrasement des
pauvres. Les maîtres qui les paissent, leurs rois, leur fournissent de quoi
satisfaire leur soif de bien-être. Je crois que l’ivrognerie, si souvent
signalée comme une des plaies d’Ephraïm, n’est pas exclue de cette image (voyez
pour notre prophète 2: 8; 5: 11; 6 : 6). Tout ce passage se rapporte à la
prospérité matérielle de Samarie et aux excès qui l’accompagnent, mais ce
bien-être est acquis aux dépens des chétifs et des pauvres qu’elle opprime. En
petit, cette histoire d’Israël est une figure de l’histoire du monde à la
veille de sa ruine finale. De plus en plus l’ambition des hommes et de leurs
gouverneurs tend aujourd’hui vers la prospérité matérielle. Un gouvernement qui
satisfait à cette demande : « Apporte, afin que nous buvions » est le bienvenu de
son peuple. Les riches eux-mêmes forment des « trusts » pour acquérir des
milliards, ruinent toutes les petites industries et les empêchent de vivre. Les
Etats font des efforts immenses et soutenus pour acquérir la prépondérance
industrielle sur les autres nations et empêcher leur développement. Avec la
prospérité matérielle, les excès, l’immoralité augmentent et se multiplient. La
réforme morale
est, malgré les
apparences, entièrement étrangère à l’esprit des hommes, car « la crainte de
Dieu n’est pas devant leurs yeux ». L’Éternel rugit de Sion, et en un instant
toute cette prospérité est frappée de mort. La sainteté de Dieu n’a pu
supporter plus longtemps toute cette injustice. N’est-ce pas un exemple
frappant de ce qui nous arrive aujourd’hui ? Les jours sont venus :
l’épouvante tombe sur le troupeau affolé, qui sort en masse par les brèches,
dans une confusion inexprimable, ne sachant où son chemin le conduit. Ici
survient une autre image, fréquente dans les prophètes pour indiquer le
résultat des invasions de l’ennemi : les hameçons pour prendre chaque poisson et
l’amener à la mort, les haims de pêche (d’autres traduisent les crocs) pour les
réduire en captivité. « Harmon » n’a pas été identifié et a donné lieu à beaucoup
de commentaires ; je pense qu’il indique le lieu où la population de Samarie va
être transportée.
« Venez à Béthel, et péchez ! À Guilgal, multipliez la transgression ! Apportez le matin vos sacrifices, tous les trois jours vos dîmes ; et faites fumer du pain levé en sacrifice d’actions de grâces ; et publiez des offrandes volontaires, annoncez-les ! Car c’est ainsi que vous aimez à faire, fils d’Israël, dit le Seigneur, l’Éternel » (v. 4, 5).
Avec la satisfaction de leurs convoitises, un second trait les
caractérise : leur religion.
Ce qui la
rend plus odieuse, c’est qu’ils en ont gardé la forme extérieure. Béthel, où
Dieu s’était révélé à Jacob, où Jacob, près d’y retourner, avait enterré toutes
les idoles de sa famille (Gen. 35: 1-5) ; Béthel, lieu dont l’idolâtrie avait
été bannie, était devenue le lieu du veau associé par Jéroboam 1er,
au nom de l’Éternel ! Ce spectacle n’est-il pas, dans une mesure, celui
qu’offre la chrétienté ? Elle a gardé l’apparence extérieure du culte de
Dieu, en y introduisant ses idoles. Guilgal, où la chair avait été jugée et
retranchée, offrait le même culte hybride ; l’homme y apportait son impureté et
ses transgressions ! À jour fixe il venait offrir à Dieu des sacrifices et
des dîmes, et faisait fumer du pain levé, un culte dans la chair, au lieu des
pains sans levain d’une vie sainte, consacrée à l’Éternel. Il publiait
des offrandes volontaires, pour
s’acquérir devant le monde un renom de piété, car il n’avait aucune pensée de
les offrir à Dieu.
Les jugements de Dieu étaient la conséquence de cette fausse
religion ; la famine, la sécheresse, atteignaient un homme et épargnaient son
voisin, preuve évidente que ces plaies ne pouvaient être attribuées au hasard,
mais à Dieu lui-même qui les infligeait. La perte de leurs récoltes, une peste
pareille à la plaie d’Égypte qui était tombée jadis sur leurs ennemis, un
renversement comme la subversion de Sodome et de Gomorrhe, les avaient visités ;
un tison sauvé de l’incendie, misérable reste, déjà à moitié consumé, leur
restait encore (v. 4-11). « Et vous n’êtes pas revenus à moi, dit
l’Éternel ! » Cinq fois ce terme douloureux de reproche se répète. Rien
n’avait pu les amener à la repentance. Ils n’avaient pas entendu l’appel :
« Écoutez cette parole », n’avaient pas compris que Dieu leur parlait par ces
événements, et ne s’étaient pas convertis. Le monde d’aujourd’hui est-il
meilleur qu’Israël ? La chrétienté a-t-elle prêté l’oreille à tant
d’avertissements partiels qui se répétaient, au cours des années ? Il a
fallu, comme jadis, que « le lion rugît ». Si le berger arrache encore quelques
restes à l’ennemi, si le sauveteur retire encore quelque tison de l’incendie,
l’ensemble de la nation ne revient pas à Dieu. Que lui sera-t-il fait et quel
sera son sort ? il ne lui reste qu’une chose : « Prépare-toi à rencontrer ton Dieu.
Car voici, Celui qui forme les
montagnes et qui crée le vent, et qui déclare à l’homme quelle est sa pensée,
qui de l’aube fait des ténèbres, et qui marche sur les lieux hauts de la terre
— l’Éternel, le Dieu des armées, est son nom ! » (v. 12, 13). Quel sera,
dans ce moment-là, le sort des hommes> ? Israël avait-il pu supporter,
malgré toute sa préparation, la présence de Dieu assis sur le Sinaï ? (Ex.
19: 11, 15). Épouvantés et tout tremblants, ils auraient voulu que la parole ne
leur fût pas adressée ! Lorsqu’ils se préparent à le rencontrer, leur
sentence est déjà prononcée d’avance. Dieu les jugera non seulement d’après
leurs actes, mais d’après l’état de leur coeur, lui qui en connaît les
intentions et qui « déclare à l’homme quelle est sa pensée » ; et quand ce jour se
lèvera pour Israël, pour l’homme, ce sera l’aube des ténèbres éternelles (voyez
Joël 2: 2).
Le premier avertissement : « Écoutez cette parole » — était adressé à « la famille entière » d’Israël, à qui le Seigneur avait envoyé ses prophètes ; mais ils ne les avaient pas écoutés. Alors ces derniers avaient été appelés à assembler contre eux, et tout d’abord contre Samarie, la Philistie et l’Égypte, puis à rendre témoignage contre leur mondanité et leur idolâtrie (3: 13-15).
Le second avertissement : « Écoutez cette parole » ne s’adressait plus qu’à la montagne de Samarie, à sa recherche insatiable de prospérité matérielle et au mélange odieux du culte de l’Éternel avec celui des faux dieux. Tous les appels avaient été vains ; le jour allait venir où ils rencontreraient Dieu face à face.
Mais Dieu ne se lasse pas ; Il dit une troisième fois : « Écoutez
cette parole » (v. 1). Trois est le nombre divin ; ici la perfection dans l’avertissement.
Qu’il récompense, juge ou
avertisse, Dieu le fait selon la perfection de son caractère.
Cette parole est une complainte
sur la maison d’Israël qui n’est pas revenue, après tant d’avertissements
divers. Il ne reste pour elle que la guerre et ses défaites (v. 1-3) ; et
combien cette parole est appropriée aux jours que nous traversons ! La
vierge d’Israël « est tombée, elle ne se relèvera pas… elle est étendue sur sa
terre, il n’y a personne qui la relève » (v. 2). Elle a perdu presque tous ses
guerriers et ne peut plus se défendre contre ses ennemis : « La ville qui allait
en campagne avec mille, en aura cent de reste ; et celle qui allait en campagne
avec cent, en aura dix de reste, pour la maison d’Israël » (v. 3). « Ainsi dit le
Seigneur, l’Éternel » : son sort est fixé désormais.
Au v. 4, cette parole de l’Éternel : « Ainsi dit l’Éternel »
(comp. chap. 1 et 2), vient à Israël une
dernière fois.
Comme tout cela est à la fois solennel et touchant !
C’est une dernière porte ouverte sur la vie et sur le salut : « Ainsi dit
l’Éternel à la maison d’Israël : Cherchez-moi, et vous vivrez ». « Cherchez
l’Éternel, et vous vivrez ! » (v. 4, 6). La sentence de mort est déjà
prononcée, mais il suffit que vous me cherchiez, après avoir si obstinément
refusé de revenir à moi, pour que l’exécution de la sentence soit ajournée. Ne
cherchez pas Béthel, ni Guilgal, ni Beër-Sheba, car toute cette fausse religion
sera réduite à rien :
Béthel deviendra
Beth-Aven. Ce n’est pas d’une religion
que
vous avez besoin, mais de Dieu :
« L’Éternel
est son nom » (v. 8). Le sort d’Israël est arrêté pour sa ruine, mais le sort de
celui qui cherche l’Éternel au milieu de la ruine est aussi arrêté pour la vie
éternelle. Donc, il n’est pas trop tard, mais c’est la dernière heure ;
prenez-y garde ! L’ombre de la mort peut être changée en matin sur un seul
signe de l’Éternel ; mais aussi un seul signe de Lui peut transformer le jour en
ténèbres de la nuit. En un instant aussi il peut produire un bouleversement tel
que la mer se déverse sur la face de la terre (v. 8). Ces choses auront lieu
subitement, comme, deux ans après, eut lieu le tremblement de terre.
Ont-ils écouté ? Ont-ils cherché Dieu ? (v. 10-12.)
Hélas ! tous leurs caractères sont énumérés dans les quelques versets qui
suivent : leur haine
pour celui qui
les reprend à la porte, lieu où la justice est rendue et proclamée publiquement
devant les anciens ; leur abomination
de
celui qui dit la vérité avec une bonne conscience et un coeur pur ; leur oppression
du pauvre et les tributs
qu’ils lui réclament ; leur promptitude à se laisser corrompre
pour faire fléchir, devant les juges, le droit du pauvre :
tout cela en vue de nourrir leur luxe et de satisfaire leurs convoitises.
Quelle parole que celle-ci : « Ils oppriment le juste ! » Le monde n’a-t-il
pas inventé cette affreuse maxime : La force prime le droit ? « Ils
oppriment le juste ! » N’ont-ils pas agi de même envers Jésus ?
« C’est pourquoi, en ce temps-ci, le sage gardera le silence, car
c’est un temps mauvais » (v. 13). Cette vérité est importante pour le jour
actuel. Il ne s’agit pas pour le sage, pour celui qui connaît les pensées de Dieu,
de s’opposer au mal : il est si grand dans le monde que le jugement seul peut y
répondre. Le courant est trop fort pour le rompre, ou l’endiguer. Le sage garde le silence,
et se réfugie dans le
sanctuaire, loin de toute l’agitation qui l’entoure ; il ne proteste pas,
n’élève pas la voix, garde ses lèvres closes, se fiant à Dieu pour qu’il
intervienne, ne sachant souvent ce qu’il faut demander comme il convient, et se
bornant aux soupirs inexprimables de l’Esprit audedans de lui. Il attend le
moment où il pourra de nouveau ouvrir la bouche pour célébrer le triomphe, en
justice, du seul Seigneur auquel appartienne la victoire.
Si l’invitation à écouter s’est répétée trois fois (3: 1; 4: 1;
5: 1), celle à « chercher l’Éternel » pour vivre se répète trois fois aussi (v.
4, 6, 14). Quelle sollicitude de la part de Dieu ! Ce chiffre divin
exprime bien son ardent désir de voir l’homme échapper à la mort. L’Éternel lui
rend le chemin facile ! Un seul désir du coeur vers Lui et le pécheur
trouve la vie : « Cherchez-moi », « Cherchez l’Éternel ». « Recherchez le bien,
et non le mal, afin que vous viviez. » Vous me trouverez en le cherchant ; vous
le rechercherez en me trouvant ! La connaissance de Dieu fait toujours désirer
le bien et nous rend capables
de le faire, car, en cherchant
le Seigneur nous trouvons la vie, une vie capable de haïr le mal et d’aimer le
bien (v. 15). Le silence du juste n’est nullement l’indifférence au mal, qu’il
doit haïr, mais il lui faut avant tout rechercher une sphère d’amour qui élève
sa tête par-dessus les ennemis qui l’entourent (Ps. 27: 5, 6).
Ah ! si le monde pouvait écouter ! « Peut-être »,
est-il dit, « l’Éternel, le
Dieu des armées, usera-t-il de grâce envers le reste de Joseph » (v. 15).
Hélas ! hélas ! son état est sans remède ! Cependant il y a un reste de Joseph : les
opprimés que le
Seigneur chérit et dont il prend la cause ; un petit Résidu, car l’ensemble de
la nation est irrémédiablement perdu.
Remarquez encore trois : « Ainsi dit l’Éternel » dans ce chapitre
(v. 3, 4, 16) ; de nouveau le nombre de la perfection divine. Ce même mot se
répétait huit fois (Il X 4) dans les deux premiers chapitres, en rapport avec
le gouvernement de la terre ; ici trois fois, en rapport avec le peuple de Dieu.
À la troisième fois le jugement est prononcé définitivement et sans appel : « Je passerai au milieu de toi, dit
l’Éternel ».
Nous verrons aux chap. 7: 8 et 8: 2 qu’il n’y a plus pour ce
peuple de délivrance par l’agneau pascal, nous voyons ici qu’il ne reste plus
pour Israël que le jugement mémorable exécuté contre l’Égypte, la nuit où
l’agneau pascal fut égorgé : « Je sortirai au
milieu de l’Égypte »,
avait dit l’Éternel ; et encore : « Je passerai par le pays d’Égypte
cette nuit-là » (Ex. 11: 4 ;
12: 12).
« Malheur
à vous qui
désirez le jour de l’Éternel ! À quoi vous servira le jour de
l’Éternel ? Il sera ténèbres, et non lumière » (v. 18). Dans ces chapitres
l’Éternel prononce deux
« malheur » sur
Israël ; au chap. 23 de Matthieu il en prononce sept,
chiffre de la plénitude, parce que le peuple et ses
conducteurs avaient mis le comble à leur iniquité en rejetant définitivement
leur Messie, venu en grâce au milieu d’eux. Pauvre peuple ! il compte ici
sur une ère de prospérité,
accompagnant
ou plutôt suivant le jour où la vengeance de Dieu se serait exercée sur les
nations qui les opprimaient ! N’est-ce pas ce que l’on entend de toutes
parts dans les jours que nous traversons ?
Le jour de l’Éternel qu’ils espéraient était celui où la
vengeance de Dieu s’abattrait sur eux
.
Ici
le « malheur » s’adresse de nouveau
à tout Israël, à la « famille entière » (voyez 3: 1). Ils comptaient avoir Dieu pour eux,
et il était contre eux,
à la manière d’Égypte. Ils
s’appuyaient sur leur religion, mais qu’était-elle pour Dieu ? « Je hais,
je méprise vos fêtes, et je ne flairerai pas de bonne odeur dans vos assemblées
solennelles ; si vous m’offrez des holocaustes et vos offrandes de gâteau, je
ne les agréerai pas, et je ne regarderai pas le sacrifice de prospérités de vos
bêtes grasses. Ôte de devant moi le bruit de tes cantiques ; et la musique de
tes luths, je ne l’écouterai pas » (v. 21-23). N’est-ce pas ce que dit
Ésaïe ? (1: 10-15). Le Seigneur hait la religion de l’homme ; c’est le coeur
qu’Il recherche, et la conscience,
non pas les formes. Il en
est de même aujourd’hui. On peut se vanter d’avoir des formes de culte
correctes et scripturaires, penser qu’elles attirent sur les peuples
l’approbation de Dieu et le privilège d’avoir Dieu pour eux ; on crie : « Dieu est
avec nous », et l’on oublie ses jugements. Le jour de lumière attendu sera un
jour de ténèbres, celui de l’Éternel, le contraire d’un jour de délivrance (v.
18, 20; 5 : 8). On s’enfuit de devant le lion dévorant, mais un autre
jugement vous rencontre pour vous étouffer ; on croit avoir trouvé un refuge,
une maison, une muraille, sur laquelle on s’appuie et l’on met la main sur le
serpent qui vous mord, au lieu de trouver Dieu qui vous protège. Dieu hait
toutes les formes extérieures de culte ; les sacrifices et les cantiques ne trompent pas Dieu.
Le jugement est
là ; rien ne l’arrête. « Que le jugement roule comme des eaux, et la justice
comme un fleuve qui ne tarit pas ! » (v. 24). C’est là ce qui attend les
hommes. Ils veulent la paix et la lumière sans rechercher le bien au lieu du
mal — la protection de Dieu, sans la vie
qui
met à l’abri du jugement. N’est-ce pas toute leur histoire ? En avait-il
été autrement dès leur sortie d’Égypte, d’où ils avaient apporté leurs faux
dieux ? Etait-ce à Dieu qu’ils avaient offert pendant quarante ans des
sacrifices et des offrandes dans le désert ? Jadis Dieu les avait
supportés, car on ne voit pas trace de cette idolâtrie-là dans le récit de
l’Exode où Dieu est occupé à leur montrer en figure, dans les sacrifices de la
loi, l’expiation
de leurs péchés par
Christ, seul chemin pour qu’ils fussent réconciliés avec Lui. Mais Dieu avait
pris note de toutes ces abominations depuis le Kiun de leurs images et l’étoile
de leur Dieu, jusqu’au veau d’or, couronnement de leurs transgressions ; et
quand Lui les avait jugés, avaient-ils ensuite, pendant quarante ans, abandonné
leur idolâtrie ? Telle est la cause première
de son jugement final. Il était décrété, dans les voies de Dieu, qu’ils
seraient transportés au-delà de Damas
(v. 27). Depuis les jours d’autrefois leur révolte contre Dieu n’avait fait que
s’accroître, jusqu’au rejet définitif du Fils de Dieu. C’est ce que dit
Étienne, en leur annonçant que Juda serait transporté au-delà de Babylone
(Actes 7: 43). Telle est encore aujourd’hui la
condition de ce peuple. Le Dieu des armées (v. 27) n’était plus avec les armées
d’Israël, ni, ajoutons-le, avec aucune armée, sauf pour s’en servir comme
instrument de ses jugements.
Tout cela s’adresse à l’ensemble du peuple, bien que, dans Amos, les dix tribus soient toujours au premier plan.
Au chap. 6: 1, le second
« malheur »
tombe de nouveau sur l’ensemble du peuple et spécialement sur la
prospérité dont il jouissait. Les grands, que la maison d’Israël tenait pour
ses protecteurs, cherchaient à étendre leurs frontières. Jéroboam Il avait
éloigné le mauvais jour en s’emparant des villes de l’ennemi. Il avait
reconquis Hamath, importante frontière naturelle d’Israël (2
Rois 14: 28)
parce que Dieu l’avait suscité comme « Libérateur » de son
peuple, mais qu’étaient devenues Calné et Gath ? L’Assyrien les avait
reprises. Hamath resterait-elle à ceux qui se vantaient d’être « la première des
nations » ? Nous savons quel fut son sort (2 Rois 18:
34 ; 19: 13) et comment elle tomba aux mains de l’Assyrien.
Qu’est-ce que Jéroboam avait fait de ses conquêtes ? Une prospérité sans
exemple en était résultée pour Israël ; il avait profité de cet envahissement
de territoires par la violence, pour accroître son luxe, pour se coucher « sur
des lits d’ivoire », s’étendre mollement sur ses divans, manger « les agneaux du
troupeau et les veaux gras de l’étable » (v. 4). David, le doux chantre
d’Israël, avait inventé des instruments pour le chant, afin de célébrer
dignement l’Éternel ; eux, aussi experts que le roi prophète, en avaient
inventé, mais à leur usage
(v. 5). L’apparence
était la même que du temps
de David, les motifs
avaient
complètement changé. Leur but était de s’établir confortablement sur la terre,
et ne différait pas de celui de Jubal, « père de tous ceux qui manient la harpe
et la flûte » (Gen. 4: 21). Ils
étaient
retournés aux principes sur lesquels le monde s’était constitué après la chute,
mettant, en plus, sous la sauvegarde du nom de David, homme de Dieu, ce qui
alimentait leurs passions égoïstes et leurs convoitises. Ils buvaient le vin de
leur ivrognerie dans les coupes du sacrifice (voyez 1 Rois 7: 40) destinées à
l’Éternel. Dieu se laissait-il tromper par les coupes, en oubliant le vin dont
ils s’enivraient ? Ils s’oignaient « de la meilleure huile » destinée à la
consécration des sacrificateurs ; l’huile les rendait-elle agréables aux yeux de
l’Éternel ? Ils se vantaient d’être la race élue et ne s’affligeaient « pas
de la brèche de Joseph » (v. 6), ne menaient pas deuil sur la ruine d’Ephraïm
dont ils étaient la cause. La brèche de Joseph ! Ce nom du bien-aimé, sur
lequel, jusqu’aux collines d’éternité, reposaient les bénédictions de son père,
ils l’avaient exposé à la ruine et se vantaient de leur civilisation ! Ne
peut-on pas en dire autant de nos jours, au sujet du nom de Christ ?
« C’est pourquoi, maintenant ils iront en captivité à la tête de ceux qui vont en captivité,
et les cris de ceux qui sont
mollement couchés cesseront » (v. 7). Plus leur culture mondaine, couverte d’un
vernis religieux, avait été affichée, sans aucune conscience de leur ruine
morale, plus terrible serait leur jugement. Ephraïm serait à la tête et Juda
viendrait après lui.
Aux v. 8-10, le prophète revient à la maison de Jacob,
représentée par Juda. Dieu a « en horreur l’orgueil de Jacob » et hait ses palais
comme il avait haï et méprisé la religion d’Israël (5: 21). L’orgueil est aussi
abominable à ses yeux que les apparences de la piété. La ville
(je pense qu’il s’agit ici de Jérusalem) sera livrée à
Babylone avec tout ce qu’elle contient. Les maisons regorgeront de morts ; les
dix qui restaient (cf. 5: 3) périront aussi. Un parent des morts vient pour les
brûler, car ils manquent même de sépulture ; l’homme chargé de rechercher les
cadavres à l’intérieur de la maison ne trouve plus un seul survivant ; il ne
reste personne !
Alors il dit :
« Silence ! car nous ne pouvons faire mention du nom de l’Éternel » (v. 10).
Le jugement est consommé, exécuté jusqu’au dernier homme. Il n’est plus
question d’en appeler à Lui ! (Soph. 1: 7 ; voyez encore 8: 3). C’est
pourquoi le sage garde le silence en un temps mauvais (5: 13). Il ne s’agit
plus d’intercéder pour la nation, il faut laisser Dieu agir. « L’Éternel a
commandé » : le tremblement de terre renverse la grande et la petite maison.
« Les chevaux courront-ils sur un rocher, ou bien y labourera-t-on avec des boeufs ? Car vous avez changé le droit en poison, et en absinthe le fruit de la justice, vous qui vous réjouissez en ce qui n’est rien, vous qui dites : Avec notre force, ne nous soinmes-nous pas acquis la puissance ? » (v. 12, 13).
Quelle actualité dans ces lignes ! Le coeur des peuples est
un rocher sur lequel tous les soins de l’Éternel s’épuisent sans résultat. Que
parlent-ils de leur droit et de leur juste cause, qui ne sont au fond que
poison et absinthe ? Ils comptent pour soutenir ces mensonges sur la
puissance qu’ils se sont acquise. Nous sommes forts, disent-ils, et nous
remporterons la victoire. Dieu regarde d’en haut et dit : « Vous… vous
réjouissez en ce qui n’est rien !
»
Toutes les armées, toutes les
munitions, toutes les flottes du monde, sont aux yeux de Dieu moins qu’un grain
de poussière que le vent soulève. Tout ce que l’homme affirme n’est rien, tout
ce sur quoi il s’appuie est, si possible, moins encore. Le moment venu Dieu
intervient : « Voici, maison d’Israël, dit l’Éternel, le Dieu des armées, je
suscite contre vous une nation, et ils vous opprimeront depuis l’entrée de
Hamath jusqu’à la rivière de la plaine » (v. 14). Dieu suscite l’Assyrien, car
c’est de lui qu’il s’agit ici, et cette nation, après les avoir dépouillés de
ce dont ils s’étaient emparés par leur force et leur puissance, les opprimera
depuis l’entrée de Hamath dont ils s’étaient fait un boulevard contre les
incursions de l’ennemi du Nord, jusqu’au Jourdain (la rivière de la plaine)
leur frontière naturelle, et s’emparera du territoire qu’ils possédaient à
l’orient de cette limite. Tout ce qu’ils s’étaient vantés de conquérir par leur
force leur est ôté. C’est ainsi que les voies de Dieu se renouvellent
constamment depuis les jours d’Israël, et que dès lors l’histoire de toutes les
nations conquérantes offre le même spectacle.
Jusqu’ici nous ne voyons en Amos que de la prophétie en voie d’accomplissement et rien encore ne nous parle des temps de la fin. Aujourd’hui, comme autrefois, les événements se renouvellent, sinon avec les mêmes détails, du moins avec les mêmes caractères moraux qui portent les mêmes conséquences.
Nous avons vu plus haut le rôle que le nombre « trois », nombre de
la perfection divine, joue dans Amos depuis le chap. 31’. Nous y trouvons trois
fois : « Écoutez cette parole », trois fois : « Cherchez-moi », trois fois : « Ainsi
dit l’Éternel ». Les chap. 5 et 6 n’ont que deux
« Malheur », la série n’étant pas encore complète, comme elle le sera en
Apoc. 9-11 par les trois trompettes de
malheur.
Dans notre chap. 7: 1-9 nous trouvons tout d’abord trois visions
, correspondant, sans
doute, aux trois invasions de l’Assyrien : Pul, Tiglath-Piléser et Shalmanéser.
La première vision est celle des sauterelles, image bien connue
de l’Assyrien (*). On sait comment Ménahem,
roi d’Israël, sortit personnellement indemne de cette attaque en ruinant son
peuple, fait auquel font allusion les mots : « le regain après la fauche du roi »
(2 Rois 15: 19-21). Le jugement accompli, le prophète intercède et implore le pardon
de l’Éternel. Son intercession
seule (pour nous celle de Christ) est capable d’arrêter le fléau. Il plaide
pour tout Israël : « Comment Jacob se relèvera-t-il ? car il est petit ».
Il affirme le contraire de ce
que proclamaient les conducteurs du peuple, quand ils disaient : « Avec notre
force, ne nous sommes-nous pas acquis de la puissance ? » (6: 13). Avouer
devant Dieu sa petitesse, son incapacité de tenir tête au jugement, c’est
parler selon les pensées de Dieu, et cela seul amène l’Éternel à se repentir,
c’est-à-dire à changer de disposition envers son peuple : « Cela ne sera pas, dit
l’Éternel » (v. 3). La destruction est momentanément arrêtée.
(*) Voyez « Le livre du prophète Joël », par H. R.
La seconde vision est celle du feu qui, après avoir dévoré le grand abîme (en langage symbolique la mer, ou la masse confuse des peuples), s’attaque à l’héritage, c’est-à-dire au pays d’Israël. C’est Tiglath- Piléser (2 Rois 15: 27-29 ; 1 Chron. 5: 6, 26 ; 2 Chron. 28: 20). Le prophète plaide de la même manière et Dieu répond de nouveau : « Cela aussi ne sera pas » (v. 4-6).
Dans la troisième vision, « voici, le Seigneur se tenait sur un mur bâti d’aplomb, et il avait un plomb à sa main. Et l’Éternel me dit : Que vois-tu, Amos ? Et je dis : Un plomb. Et le Seigneur dit : Voici, je place un plomb au milieu de mon peuple Israël ; je ne passerai plus par-dessus lui. Et les hauts lieux d’Isaac seront désolés, et les sanctuaires d’Israël seront dévastés, et je me lèverai avec l’épée contre la maison de Jéroboam » (v. 7-9).
Cette fois Dieu agit directement et définitivement. Il est sur
un mur bâti d’aplomb ; rien ne peut l’ébranler, mais il montre aussi sa justice
et rien ne la fera dévier. Le plomb dans sa main marque le nivellement
définitif du pays coupable. Il n’est plus question d’intercession,
le jugement atteint son terme. Israël sera détruit.
C’est la transportation des dix tribus par Shalmanéser (2 Rois 17: 6). Quelle
parole que celle-ci : « Je ne passerai
plus par-dessus lui
». Cette nouvelle allusion à la Pâque fait suite à celle
du chap. 5: 17, où l’Éternel annonçait qu’il traiterait Israël comme il avait
traité l’Égypte ; mais elle est plus solennelle encore que la première. Il n’y a
plus pour le peuple ce qui, dans le passé, était le signe de sa rédemption, ce
qui, par l’effusion du sang de l’agneau porté sur le linteau des portes, avait
éloigné de lui le jugement de l’Éternel !
Les versets 10 à 17 de ce chapitre sont une espèce d’intermède,
formant parenthèse et séparant les trois premières visions, complètes en
elles-mêmes, des visions qui suivent au chap. 8. Amos est descendu à Béthel
pour y prophétiser. Amatsia, sacrificateur
de Béthel
(non pas sacrificateur de l’Éternel), s’oppose au prophète. C’est
le rôle que la sacrificature selon l’homme a toujours joué vis-à-vis des hommes
de Dieu qui, par l’Esprit, apportent la parole de Dieu. Amatsia veut chasser le
prophète du territoire des dix tribus, sur lequel il s’arroge des droits
spirituels et accuse Amos auprès de Jéroboam par un faux témoignage, afin de le
faire condamner par l’autorité séculière ; mais il a hâte de se débarrasser du
prophète, dont la présence, malgré tout, inquiète sa conscience : « Voyant,
va-t’en ; fuis au pays de Juda, et mange là du pain, et prophétise là, mais ne
prophétise plus à Béthel, car c’est le sanctuaire du roi et la maison du
royaume » (v. 12, 13). Il le renvoie à ses coreligionnaires, oubliant que Dieu
ne se laisse pas limiter par les sectes humaines et ne sanctionne pas une autre
autorité que la sienne ! Pour lui, la chose importante est qu’Amos, en
proclamant la vérité à Israël, ne réduise pas à néant tout le système religieux
inventé par Jéroboam, fils de Nébath. La vérité est méprisée, en tout premier
lieu par les chefs spirituels du peuple dont elle ébranle la position ; ils ne
reculent pas devant le mensonge pour la combattre et s’il le faut ils usent de
contrainte par la main de l’autorité. Il en est de même de toute vérité qui
condamne les royaumes des hommes. Plutôt chasser ceux qui la portent en les
accusant de conspirer contre le roi et d’être insupportables au pays.
Combien le coeur d’Ézéchias fut plus noble, lorsque Michée, le Morashtite, prophétisa contre Juda et Jérusalem (Jér. 25: 16-24). Le roi implora l’Éternel qui se repentit du mal prononcé. Plus tard, sous Jéhoïakim, la même scène se renouvela, par le moyen d’Urie, fils de Shemahia, et par le prophète Jérémie. Urie s’enfuit en Égypte et son manque de confiance en la protection de Dieu qui l’avait envoyé, fut cause de sa mort. Jérémie, sous le même roi, puis sous Sédécias (Jér. 27: 28), fut préservé, car il se confia dans la parole de l’Éternel qui lui avait dit : « Je te ferai être à l’égard de ce peuple une muraille d’airain bien forte ; ils combattront contre toi, mais ils ne prévaudront pas sur toi ; car je suis avec toi pour te sauver et pour te délivrer, dit l’Éternel ; et je te délivrerai de la main des iniques et te rachèterai de la main des violents » (Jér. 15: 20, 21).
Avec la même assurance, Amos répond à Amatsia : « Je n’étais pas
prophète, et je n’étais pas fils de prophète ; mais je gardais le bétail, et je
cueillais le fruit des sycomores ; et l’Éternel me prit quand je suivais le menu
bétail, et l’Éternel me dit : Va, prophétise à mon peuple Israël » (v. 14, 15).
De sa part, aucune prétention. Il n’avait pas, en Juda, de situation
officielle, et il reconnaît que son enseignement ne venait pas des écoles de
prophètes ; mais l’Éternel l’avait pris, lui avait parlé, l’avait envoyé. Cela
suffisait. C’est ainsi que Dieu parle en un temps de raine, mais de la même
manière il aime à choisir, en tout temps, les instruments qu’il envoie dans sa
moisson. Pour réduire à néant toute la sagesse des hommes, il choisit les
choses folles et méprisées du monde. Un simple berger peut devenir un prophète,
un simple pêcheur un apôtre. Cela dépend du Seigneur qui distribue ses dons
comme il lui plaît. Il en était autrement et d’une manière bien plus
merveilleuse de Christ. Il n’était pas seulement fils de Dieu, mais fils de
l’homme et, devenu tel, il fut envoyé dans ce monde pour être serviteur et
prophète, les deux missions qui lui sont confiées dans l’évangile de Marc.
Mais, quand les hommes disaient de lui : « Un grand prophète a été suscité parmi
nous » (Luc 7: 16), lui, préférant garder sa place d’esclave volontaire, dit : « Je
ne suis pas prophète » (Zach. 13: 5) ; non pas : Je n’ai pas droit de l’être ; mais
voici ce que j’ai choisi
: « Je
suis un homme qui laboure la terre ; car l’homme m’a acquis comme esclave dès ma
jeunesse » ; je suis venu porter ici-bas, pour sauver les hommes, la condition
d’abaissement dans laquelle le péché les a placés, et je me suis asservi à l’homme
pour accomplir mon oeuvre. Il
m’a acquis, dès ma jeunesse, comme esclave.
Je lui ai donné des droits
sur
moi, afin de pouvoir le délivrer ! C’est ce que ne pouvait faire Amos.
Dieu l’avait élevé de son humble position à la dignité de prophète. Jésus s’est
abaissé de sa gloire suprême à la basse condition de l’esclave. Il s’est
« anéanti lui-même, prenant la forme d’esclave » ; aussi Dieu l’a souverainement
élevé, après qu’il eut été obéissant jusqu’à la mort de la croix. Amos fut
élevé de sa condition de berger à celle de prophète ; Christ, de la position
d’esclave (quoiqu’il fût Messie, Roi, prophète, et souverain Berger, de son
propre droit divin) à la droite de la Majesté dans les hauts lieux, toutes
choses étant mises sous ses pieds. Mais il veut, ressuscité et revêtu de cet
honneur suprême, garder en amour son caractère de serviteur. La prophétie prend
fin, l’amour jamais, et c’est pourquoi il dit : « Je ne suis pas
prophète ».
Amos cueillait le fruit des sycomores, arbre qui croît dans les pâturages du désert, et dont le fruit, subissant au préalable une longue préparation pour pouvoir servir de nourriture, n’est utile qu’aux pauvres et aux chétifs qui vivent de peu. Dieu le préparait ainsi à sa vie de privations au milieu d’un peuple qui refusait son ministère. Il n’avait sur son chemin que ce que Dieu lui donnait ; de même Jean-Baptiste, le plus grand des prophètes, n’avait que les sauterelles et le miel sauvage, la nourriture du désert. Le Seigneur, lui, n’avait pas même de telles ressources. Le désert ne lui offrait après 40 jours de jeûne que des pierres au lieu de pain. Le Créateur de toutes choses avait faim et soif, et, mille fois plus que ces deux prophètes, dépendait entièrement de Dieu pour y pourvoir.
Au lieu de se laisser effrayer par les menaces d’Amatsia et le courroux de Jéroboam, Amos prophétise contre le sacrificateur qui voudrait se débarrasser de lui. Sa femme se prostitue, ses fils sont tués, son héritage lui est enlevé, lui-même meurt dans une terre impure. Tel est le sort de ceux qui « n’ont pas reçu l’amour de la vérité pour être sauvés ». Le jugement individuel sur Amatsia et sa famille n’arrête en rien le jugement général prononcé sur la nation : « Et Israël sera certainement transporté de dessus sa terre » (v. 17).
La parenthèse du chap. 7: 10-17 est suivie d’une nouvelle
vision, celle des fruits d’été,
qui
est comme la conclusion des trois premières (7: 1-9). Les fruits mûrs de l’été
sont assemblés dans un panier : la récolte est faite. C’est la fin.
« La fin est venue pour mon peuple Israël. » L’Éternel répète
la parole solennelle du chap. 7: 8: « Je ne passerai plus par-dessus lui ». En
vérité, il n’y a plus d’espoir ! Israël se trouve devant Dieu avec ses
iniquités, n’ayant plus le sang de l’agneau pascal qui les couvrait et mettait
le peuple à l’abri du jugement. « Et, en ce jour-là, les cantiques du palais
seront des hurlements, dit le Seigneur, l’Éternel. Les cadavres seront en grand
nombre ; en tout lieu on les jettera dehors… Silence ! » (v. 3). La joie
d’autrefois s’est éteinte, les cantiques, accompagnés des instruments de David,
ont cessé ; les hurlements leur succèdent. Quel contraste ! la joie de
vivre fait place à l’horreur, à une agonie de douleur et d’effroi. La mort
règne ; les cadavres ne sont plus même recherchés pieusement pour être brûlés,
comme au chap. 6: 10; ils sont jetés dehors. Silence ! mot terrible répété
dans ce jour de la fin. Dieu a parlé, a dit le dernier mot ; l’appel des
suppliants n’est plus entendu ; que personne désormais n’élève la voix !
Oh ! combien est angoissant le silence qui accompagne ou suit les
jugements de Dieu ! N’en faisons-nous pas l’expérience, dans une mesure
encore restreinte, aux jours de malheur que nous traversons ? Si la grâce
règne encore, nous invitant à l’intercéder en faveur de pauvres pécheurs
perdus, les événements actuels ont cependant un caractère tel que nous nous
taisons devant l’exécution des jugements de Dieu. Les cadavres sont en grand
nombre ; en tout lieu ils sont jetés dehors, et nous ne pouvons que garder le
silence, sachant que l’orgueil et l’incrédulité des hommes ont amené ces
désastres. La chose est décrétée ; mais n’oublions jamais que nous sommes encore
dans les temps de la grâce et que si nous ne faisons qu’assister au déploiement
des voies de Dieu, nous pouvons toujours prier du fond du coeur, pour le salut
des pécheurs.
« Écoutez ceci, vous qui êtes acharnés après les pauvres pour
faire disparaître les débonnaires du pays… » (v. 4). Dans le silence qui s’est
fait, la voix de Dieu doit
être
entendue. Il ne s’agit plus d’écouter afin d’apprendre comment on peut échapper
au jugement (5: 1-17), mais d’écouter la sentence prononcée. Toute l’iniquité
de ceux qui oppriment les débonnaires (ce même caractère se retrouvera dans les
derniers temps) est mise au jour : Leur amour du gain, leur indifférence pour le
sabbat, leur manque de pitié et de conscience, leur esprit de tromperie, leur
égoïsme mesquin. Ces mêmes traits sont déjà mentionnés en 2: 6, 7, car c’est
des dix tribus qu’il est spécialement question ici. L’Éternel n’oublie jamais
aucune de leurs oeuvres ; — il le jure par la gloire qu’il avait conférée à
Jacob, c’est-à-dire à l’ensemble de son peuple (v. 7). Quelle mémoire que celle
du Juge suprême ! Beaucoup de choses peuvent échapper à celle du meilleur
juge parmi les hommes ; il excusera ou ne condamnera pas certains actes dont il
ignore les motifs ; mais rien n’échappe à l’oeil scrutateur qui sonde les coeurs
et les reins. « Pour cela, le pays ne tremblera-t-il pas ? Et chacun de ses
habitants ne mènera-t-il pas deuil ? Et il montera tout entier comme le
Nil, et enflera ses flots, et s’abaissera comme le fleuve d’Égypte » (v. 8). La
subversion terrible qui doit accompagner le jugement avait atteint le peuple
lors du tremblement de terre qui suivit la prophétie d’Amos et dont il donne
une description graphique : Le pays tremblera, la terre s’enflera et s’abaissera
en un instant comme le Nil, image de la secousse finale qui ébranlera toute la
terre. Israël n’a pas écouté, aussi est-il réservé à une subversion plus
terrible que toutes ces calamités partielles.
Ce sera une subversion semblable au jour de l’Éternel dont
parlent les prophètes Joël et Zacharie et plus tard le Seigneur lui-même (Matt.
24). « Il arrivera en ce jour-là, dit le Seigneur, l’Éternel, que je ferai
coucher le soleil en plein midi, et que j’amènerai les ténèbres sur la terre en
plein jour… et je ferai que ce sera comme le deuil d’un fils unique, et la
fin sera comme un jour d’amertume » (v. 9, 10). Pour la première fois Amos, en
parlant d’événements prochains, considère par anticipation, ceux de la fin des
temps. Ce sera un jour de deuil général et de lamentations, comme la nuit du
jugement des premiers-nés en Égypte, car aux paroles : « Je ne passerai plus
par-dessus lui » des chap. 7:8 et 8:2, il ajoute maintenant (v. 10) « le deuil
d’un fils unique ». Il n’est pas question ici du jour de repentance du peuple
qu’on voit, en Zacharie 12: 10, se lamentant au sujet du Messie, « comme on se
lamente sur un fils unique ». Ce sera le jour d’amertume des premiers-nés
d’Égypte, pire même, car il pouvait rester aux Égyptiens l’espérance d’une
postérité. Ici il ne reste rien.
C’est
la fin
des dix tribus, le jour
d’amertume.
Alors le temps mauvais se lèvera sur Israël : « Voici, des jours
viennent, dit le Seigneur, l’Éternel, où j’enverrai une famine dans le pays ;
non une famine de pain, ni une soif d’eau, mais d’entendre les paroles de
l’Éternel. Et ils erreront d’une mer à l’autre, et du nord au levant ; ils
courront çà et là pour chercher la parole de l’Éternel, et ils ne la trouveront pas
» (v. 11, 12). Il n’y aura plus possibilité
dans le pays d’entendre les paroles de l’Éternel ; le peuple dispersé errera
d’une mer à l’autre et ne les trouvera pas, quelque désir qu’il en ait.
Silence ! Dieu ne leur parlera plus. Ah ! qu’ils voudraient alors
connaître sa pensée, mais elle leur sera cachée. Ce passage décrit la
dispersion d’Israël. Comme le riche en hadès, ils auront soif, sans moyen de la
satisfaire. La jeunesse, dans sa beauté et sa force, défaudra, car on ne peut
vivre que par la parole de l’Éternel. Il ne leur restera que leurs faux dieux
par lesquels ils ont juré. C’est, je n’en doute pas, la condition actuelle des
dix tribus.
Nous avons ici la dernière vision. Amos voit « le Seigneur se
tenant debout sur l’autel » (*). Cette attitude
est très remarquable. L’autel de Béthel a été ébranlé, est tombé à terre (3:
14), de même que jadis, lorsqu’il fut érigé, l’Éternel avait prononcé le
jugement contre lui, sous Jéroboam, fils de Nebath (1 Rois 13: 3). L’autel de
l’Éternel reste debout, seul fondement de sécurité, lieu du sacrifice, mais
aussi, lorsque le Seigneur a été méprisé et rejeté, lieu d’où partira le
jugement. Dieu avait déjà dit : Ils « ne se relèveront jamais » (8: 14).
Maintenant ce n’est plus l’annonce, mais l’exécution
de la sentence. On ne voit pas ici, comme en Ésaïe 6, le Seigneur assis sur
son trône, entre les chérubins, dans le temple, ni la manifestation de sa
gloire qui ne peut supporter le mal ou la souillure, ni le fondement des seuils
du temple ébranlé à la voix des séraphins. Cette scène-ci est tout autre. Là
nous voyons la personne du Seigneur de gloire, ayant, dans le feu de l’autel,
le moyen de purifier son prophète ; ici, la
personne du juge.
Il n’est pas dans le temple ; l’autel seul est en vue. Le
Seigneur se tient sur ce qui aurait été pour Israël la base de sa
réconciliation, mais est devenu celle de son jugement, car il avait méprisé
l’autel de Jérusalem et lui avait préféré ceux de Béthel, de Guilgal, de Dan et
de Beër-Sheba.
(*) Non pas « près de l’autel » comme plusieurs traduisent.
La scène qui se déroule ici n’est pas, avons-nous dit, celle du
temple, mais celle de la nuit d’Égypte : « Frappe le linteau,
afin que les seuils soient ébranlés, et brise-leur la
tête à tous » (v. 1). Elle correspond aux paroles solennelles des chap. 5: 17 ;
7: 9 ; 8: 2. Au jour de la Pâque, le sang de l’agneau avait été porté sur le
linteau et sur les deux poteaux de la porte ; Israël coupable avait négligé de
l’y porter, et n’avait plus le sang pascal pour détourner le courroux de Dieu.
L’ange exterminateur passe, le linteau est frappé, les seuils ébranlés, la
maison s’écroule et brise leurs têtes. Cette image d’Amos parle donc à la fois
de la destruction des premiers-nés et du tremblement de terre d’Ozias : « Le
Seigneur, l’Éternel des armées, c’est lui qui touche le pays, et il fond ; et
tous ceux qui y habitent mèneront deuil ; et il montera tout entier comme le
Nil, et il s’abaissera comme le fleuve d’Égypte. C’est lui qui bâtit dans les
cieux ses degrés, et qui a fondé sa voûte sur la terre ; qui appelle les eaux de
la mer, et les verse sur la face de la terre ; l’Éternel. est son nom » (v. 5, 6;
voyez 5:8; 9:5). S’il reste encore quelque âme après cette subversion, la
calamité l’atteindra : « Quand ils pénétreraient jusque dans le shéol, de là ma
main les prendra ; et quand ils monteraient dans les cieux, je les en ferai
descendre ; et quand ils se cacheraient au sommet du Carmel, je les y
chercherai, et de là je les prendrai ; et quand ils seraient cachés de devant
mes yeux, au fond de la mer, là je commanderai au serpent, et il les mordra ; et
quand ils iraient en captivité devant leurs ennemis, là, je commanderai à
l’épée, et elle les tuera ; et je mettrai mes yeux sur eux pour le mal et non
pour le bien » (v. 2-4). Comme cela rappelle le Psaume 139 ! Mais là,
l’homme trouve le salut
en faisant
l’expérience qu’il ne peut
échapper à
Dieu ; ici, voulant
lui échapper, il
rencontre le jugement.
Là, Dieu sonde
l’homme pour le bien et non pour le mal et le pécheur trouve que le Seigneur
l’a aimé « dès le ventre de sa mère », ici il le rencontre « pour le mal et non
pour le bien ». Il s’agit, en tout ceci, des voies gouvernementales de Dieu à
l’égard d’Israël, et non de son jugement final. Quand ils seront cachés « au
fond de la mer », au milieu de la confusion des peuples, ils deviendront la
proie de Satan.
« N’êtes-vous pas pour moi comme les fils des Ethiopiens, ô fils
d’Israël ? dit l’Éternel. N’ai-je pas fait monter Israël du pays d’Égypte,
et les Philistins de Caphtor, et les Syriens de Kir ? » (v. 7). C’est comme
si la pensée rejoignait ici celle qui est exprimée dans les deux premiers
chapitres du prophète. La providence de
Dieu
avait fait monter ces nations de Caphtor et de Kir (cf. 1: 5), afin
qu’elles pussent prospérer en des lieux plus favorables. Dieu en avait agi de
même envers Israël en le faisant monter d’Égypte pour l’introduire dans un pays
découlant de lait et de miel. Au lieu de reconnaître les soins de l’Éternel en
le servant avec crainte, ces peuples, Israël en tête, étaient devenus des
royaumes pécheurs. Aussi les yeux de Dieu étaient sur chacun d’entre eux pour
le détruire, à bien plus forte raison quand il s’agissait de son ancien peuple.
Cependant il reste un espoir pour Israël. Si l’Éternel est un juge, il est aussi le Dieu des promesses et ne reniera jamais son caractère : « Seulement je ne détruirai pas entièrement la maison de Jacob, dit l’Éternel. Car voici, je commande, et je secouerai la maison d’Israël parmi toutes les nations, comme on secoue dans un crible, mais pas un grain ne tombera à terre » (v. 8, 9). La dispersion du peuple parmi les nations est prédite ici, et nous l’avons aujourd’hui sous les yeux. Mais c’est Lui qui tient le van dans sa main ; la paille peut s’envoler, pas un grain de blé ne tombe en terre. Au moment voulu Dieu montrera qu’il a gardé tous ses élus et n’en a perdu aucun. Lorsque Satan demanda à avoir les disciples pour les cribler comme le blé, il ne réussit qu’à délivrer Pierre de sa confiance en lui-même. Il en sera ainsi de la tribulation future du peuple de Dieu. Pas un seul d’entre les siens ne périra dans ces jours d’épreuve où il semblera que nulle chair ne peut être sauvée. Tout autre sera le sort des pécheurs de ce peuple : « Par l’épée… mourront tous les pécheurs de mon peuple, qui disent : Le mal ne nous atteindra pas, et ne viendra pas jusqu’à nous » (v. 10).
La transition des événements prochains à ceux de la fin (v.
7-10) nous amène à la bénédiction millénaire, couronnement de la prophétie
d’Amos : « En ce jour-là,
je relèverai
le tabernacle de David, qui est tombé, et je fermerai ses brèches, et je
relèverai ses ruines, et je le bâtirai comme aux jours d’autrefois » (v. 11). La
maison (le tabernacle) de David, la royauté de Celui auquel Dieu avait assuré
ses grâces, sera rétablie, comme aux jours d’autrefois sous le règne de
Salomon, après avoir sombré, en apparence pour toujours, dans la secousse qui
avait ébranlé la terre. Plus de division en Israël ! Il possédera « le reste d’Édom »,
car Édom ne
verra pas, comme d’autres nations, le rétablissement de ses captifs (Jér. 48 -
49) ; mais Israël possédera aussi toutes les nations sur lesquelles le nom de
l’Éternel est réclamé (v. 12). Tel sera le dernier, le seul véritable royaume
universel, sous le sceptre du Messie, vrai chef de la maison de David. Jacques,
devant le concile de Jérusalem, cite ce passage altéré par la version des
Septante, mais uniquement
pour
prouver que les nations avaient droit aux bénédictions que les Juifs leur
contestaient, puisque le nom du Seigneur qui faisait toutes ces choses était
réclamé sur elles (Actes 15:16).
1 « Voici, les jours viennent, dit l’Éternel, où celui qui laboure atteindra celui qui moissonne, et celui qui foule les raisins, celui qui répand la semence ; et les montagnes ruisselleront de moût, et toutes les collines se fondront. Et je rétablirai les captifs de mon peuple Israël, et ils bâtiront les villes dévastées et y habiteront, et ils planteront des vignes et en boiront le vin, et ils feront des jardins et en mangeront le fruit. Et je les planterai sur leur terre, et ils ne seront plus arrachés de dessus leur terre que je leur ai donnée, dit l’Éternel, ton Dieu » (v. 13-15).
Ici nous entrons, à pleines voiles, dans le port désiré. Le
prophète Joël fait le même tableau de la prospérité matérielle sous le règne
millénaire : « Les aires seront pleines de blé, et les cuves regorgeront de moût
et d’huile ». « Les montagnes ruisselleront de moût, et les collines découleront
de lait, et tous les torrents de Juda découleront d’eau » (Joël 2: 24; 3: 18).
La description est, si possible, encore plus brillante ici, et plus générale,
celle de Joël ne s’appliquant qu’à Juda.
Ce
qui était promis conditionnellement en Lévit. 26: 5 : « Le temps du foulage
atteindra pour vous la vendange, et la vendange atteindra les semailles »
n’avait jamais été réalisé, à cause de l’infidélité du peuple. Maintenant tout
a changé : la bénédiction ne dépend plus de l’obéissance de l’homme, mais de la
fidélité de Dieu à ses promesses, appelée en 2 Pierre 1:1 « la justice
de notre Dieu et Sauveur Jésus
Christ ». Cela
ne peut jamais manquer.
Cette magnifique abondance de la création réjouit nos coeurs à l’avance, quand
nous pensons que maintenant elle soupire et est en travail tout entière, dans
l’espérance d’avoir part, elle aussi, à la liberté de la gloire des enfants de
Dieu.
Mais ce ne sera pas seulement la création (v. 14, 15) ; le peuple lui-même, bien plus cher au coeur de Dieu, sera restauré. La captivité sera rétablie, c’est-à-dire qu’il y sera mis fin pour amener la restauration finale. Alors le peuple rebâtira, habitera, plantera, jouira des fruits. Lui-même sera planté sur sa terre et ne pourra plus jamais en être arraché, « dit l’Éternel, ton Dieu ».
Quel contraste entre les premiers chapitres et celui-ci, entre
« Ainsi dit l’Éternel » pour le jugement et « Ainsi dit l’Éternel » pour la
bénédiction. C’est sur cette dernière que Dieu met pour toujours le cran
d’arrêt. Jamais les jugements ne sont pour Lui le dernier mot. Seule la gloire
éternelle est pleinement digne de Lui. Son bonheur, ô peuple de croyants, est
de te la donner, de t’en faire jouir, et de s’appeler « ton
Dieu !
» (v. 15).
Nous avons vu, dans le livre d’Amos, l’exposé des voies habituelles et invariables de Dieu,
envers son
peuple et envers les nations, et nous y avons constaté ce qui les rend
nécessaires. Sauf dans ses dernières paroles, Amos ne nous dévoile pas les
choses futures,
mais les choses prochaines.
C’est ce qui rend ce livre
si important pour le jour actuel. Les manifestations du péché, mentionnées ici,
sont de tous les temps et peuvent être constatées aussi bien chez les croyants
que chez les non-croyants ; Amos nous en fait connaître la rétribution dans les
deux cas. Mais, quelque amer que soit le châtiment, l’homme de foi, sous le
poids de jugements actuels, rentre en lui-même, se juge, s’humilie et se repent
— et la tribulation porte ses pensées vers la scène des bénédictions futures.
Arrivées là, elles se reposent dans l’espérance, comme nous le voyons au
dernier chapitre de notre prophète, et ne se laissent pas égarer dans le
labyrinthe des événements qui agitent les hommes. Le gouvernement de Dieu,
qu’il s’agisse de sa maison ou du monde, est toujours saint, juste et
invariable. Il est comme la locomotive dont on ne peut changer la direction.
L’intervention d’un seul qui tire le signal d’alarme peut arrêter subitement le
train dans sa course quand une catastrophe est prévue. Le conducteur serre les
freins. Il dit, comme en Amos : « Cela ne sera pas ». Mais, le résultat s’étant
produit, la locomotive reprend son invariable direction. Rien ne la fait dévier
de son but final ; mais, grâce à Dieu, si elle écrase tout obstacle sur son
passage, elle ne conduit pas aux abîmes, mais au but désiré, les voyageurs qui
s’y confient.