Lévitique 16:15-34
par H. Rossier
L’épître aux Hébreux fait évidemment allusion dans le dernier chapitre (13:11) au fait exprimé en Lév. 16:27, 28 : « On transportera hors du camp le taureau du sacrifice pour le péché et le bouc du sacrifice pour le péché, desquels le sang aura été porté dans le lieu saint pour faire propitiation, et on brûlera au feu leur peau, et leur chair, et leur fiente ».
Plus on considère cette épître aux Hébreux, plus on y voit de
rapports, rapports infiniment nombreux, entre elle et le grand jour des
expiations, ou plutôt des propitiations
pour nous servir de la
traduction exacte du terme de l’Écriture (*).
Il est dit, au chap. 13:11, que « les corps des animaux dont le sang est porté,
pour le péché, dans les lieux saints, par le souverain sacrificateur, sont
brûlés hors du camp » ; seulement, sous la loi, ce fait n’était pas unique,
c’est-à-dire borné au grand jour des propitiations, car il en était de même du
sacrifice pour le délit (Lév. 4:11, 12, 20, 21). En divers cas donc, les
animaux étaient brûlés hors du camp, mais cela avait toujours
lieu quand
leur sang avait été porté au-dedans du voile. C’est ainsi que nous trouvons en
Lév. 6:23 : « Nul sacrifice pour le péché dont le sang sera porté dans la tente
d’assignation pour faire propitiation dans le lieu saint, ne sera mangé ;
il sera brûlé au feu ».
(*) Le mot hébreu Kaphar
(couvrir
) est traduit 84
fois dans la version Pau-Vevey par : faire propitiation
; 3 fois
seulement par : faire expiation
(Nomb. 35:33 ; 2 Sam.
21:3 ; És. 27:9), sens particulier, suffisamment expliqué par ces trois
passages ; 10 fois par pardonner
(en note : faire
expiation) ; 2 fois par apaiser
; 1 fois par abolir
.
Dans le chapitre 16 du Lévitique nous ne trouvons tout du long
que le terme : « faire propitiation
», même quand il s’agit du bouc
Azazel, mais il est dit au sujet de ce dernier : « Le bouc sur lequel le
sort sera tombé pour Azazel, sera placé vivant devant l’Éternel, afin de faire
propitiation SUR LUI
» (v. 10) et c’est, dans ces deux
mots, que consiste la différence. Le Saint Esprit indiquant par là que les deux
boucs forment un seul personnage typique et que la mort du bouc de propitiation
immolé doit être aussi attribuée au bouc Azazel.
La grande pensée, pensée excessivement importante de tout ce
chapitre est donc la propitiation
: un sacrifice offert — le sang
porté au-dedans du voile, dans le lieu très saint, devant Dieu — placé sur le
propitiatoire, sous les yeux de Dieu — et, en vertu de ce sang que Dieu accepte
et regarde, chaque pécheur ayant le droit de s’approcher.
Ce fait s’adresse à tous les pécheurs
; l’on
retrouve en effet constamment cette vérité dans le Nouveau Testament :
Christ s’est donné pour tous
, et c’est en quoi consiste la propitiation.
On ne peut dire à tous les pécheurs : Christ a expié vos péchés. Jamais il
n’est dit qu’il a porté les péchés de tous, mais qu’il est apparu « pour porter
les péchés de plusieurs
» (Héb. 9:28), c’est-à-dire de ceux qui lui
appartiennent, tandis que d’autres passages nous disent qu’Il « est mort pour
tous
».
Le Nouveau Testament cite le mot « tous
» en contraste avec
le mot « plusieurs
». En Rom. 5:18 les mots : « Les conséquences de
cette justice furent envers tous les hommes
en justification de vie » ne
veulent pas dire qu’ils sont tous justifiés, mais que cette « justification de
vie » s’adresse à tous
. C’est là le fait de la propitiation : le
sacrifice satisfait pleinement Dieu et tous peuvent s’approcher. Au verset 19
de ce même chapitre nous trouvons par contre : « Comme par la désobéissance
d’un seul homme plusieurs
ont été constitués pécheurs, ainsi aussi par
l’obéissance d’un seul, plusieurs
seront constitués justes ». Plusieurs
,
non pas tous
, c’est-à-dire que tous ceux qui sont liés, par la nature,
avec le premier Adam sont constitués pécheurs et que tous ceux qui sont liés,
par la foi, avec le second Adam, sont constitués justes.
Ainsi, d’un côté, la propitiation est l’oeuvre qui s’adresse à
tous ; d’un autre côté l’expiation, ou mieux, la substitution
est
l’oeuvre par laquelle le Seigneur Jésus a porté sur lui les péchés « d’un
grand nombre »
et, comme le bouc Azazel, les a emportés dans une terre
inhabitée.
1 Tim. 2:3-5. « Cela est bon et agréable devant notre Dieu
Sauveur, qui veut que tous
les hommes soient sauvés et viennent à la
connaissance de la vérité ; car Dieu est un, et le médiateur entre Dieu et
les hommes est un, l’homme Christ Jésus, qui s’est donné Lui-même en rançon pour
tous
». Non pas qu’il ait payé la rançon de tous ; mais la rançon a été
payée ; Dieu en a accepté le paiement, et, en vertu de cela, tous peuvent
y avoir part, la dette étant entièrement couverte devant Dieu.
2 Cor. 5:14, 15. « L’amour du Christ nous étreint, en ce que nous
avons jugé ceci, que si un est mort pour
tous,
tous donc sont morts, et qu’il est mort pour tous,
afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes,
mais pour celui qui pour eux est mort et a été ressuscité ». Il est mort pour
tous ; provision est faite pour tous ; Dieu est satisfait ; tout
est en règle ; rien n’empêche désormais un pécheur d’entrer dans le
sanctuaire. Le souverain sacrificateur a porté le sang du bouc égorgé pour le
peuple au-dedans du voile, sur
le
propitiatoire, devant Dieu, et en a fait aspersion sept fois, c’est-à-dire
d’une manière complète, devant
le
propitiatoire, endroit où le pécheur peut s’approcher et avoir pleine communion
avec Dieu. Rien ne le sépare plus de Lui.
Héb. 9:24. « Le Christ n’est pas entré dans les lieux saints
faits de main, copies des vrais, mais dans le ciel même, afin de paraître
maintenant pour nous devant la face de Dieu ». C’est le premier acte du
souverain sacrificateur quand il entre devant Dieu pour se présenter à Lui avec
l’encens, et qu’il est reçu. Remarquez que le souverain sacrificateur, pris
d’entre les hommes pécheurs, sous la loi, s’entourait d’encens afin qu’il ne mourût pas
(Lév.
16:13) ; mais, comme type de Christ, il entre devant Dieu, entouré du
parfum de ses perfections qui monte en vertu du feu du jugement, pris sur
l’autel.
Héb. 9:25, 26. « Ni, non plus, afin de
s’offrir lui-même plusieurs fois, ainsi que le souverain sacrificateur entre
dans les lieux saints chaque année avec un sang autre que le sien (puisque,
dans ce cas, il aurait fallu qu’il souffrît plusieurs fois depuis la fondation
du monde) ; mais maintenant, en la consommation des siècles, il a été
manifesté une fois pour l’abolition du péché par son sacrifice ». C’est la
propitiation. La pensée de « l’abolition
du péché »
va plus loin que l’abolition de nos
péchés. C’est la purification du sanctuaire (Lév. 16:19, 20),
chose qui n’est pas encore entièrement accomplie, le péché
n’étant pas encore aboli. Il l’est quant
à nous,
chrétiens, mais le péché est
encore dans le monde et les lieux célestes sont encore souillés par la présence
de Satan. Ce ne sont pas les cieux des cieux, mais ce qui se trouve au-dessous
des pieds du Seigneur est souillé par le péché (Ézéch. 1:26).
Le souverain sacrificateur faisait donc propitiation pour le
sanctuaire : « Il a été manifesté une fois pour l’abolition du péché par
son sacrifice ». En vertu du sacrifice de Christ il ne sera plus jamais question
du péché devant Dieu, et la création attend ce jour. Il n’y a pas une chose
dans la création, sortie des mains de Dieu, qui ne soit souillée par le péché.
Si nous parlons de la magnificence des astres, de la pureté du ciel, ce sont
des choses que l’homme n’a pu toucher ; mais, le péché étant entré dans la
création, Dieu
le voit partout ;
il en apprécie les conséquences, et, quand il établira de nouveaux cieux et une
nouvelle terre, tout ce qui est de l’ancienne création passera ; toutes
choses seront faites nouvelles.
La « purification du sanctuaire » sera réalisée du moment que l’Épouse sera entrée dans la gloire ; il ne restera alors aucune trace de péché dans les lieux célestes. Satan, avec ses anges, sera jeté sur la terre dont ainsi la souillure s’accroîtra, si possible, pour peu de temps ; puis le Seigneur secouera la terre et le ciel (Héb. 12:26) et le fruit de l’oeuvre de Christ accomplie à la croix se montrera, pour la création, dans ses résultats merveilleux. Il faut un marchepied net, pour le placer sous les pieds de Christ (Héb. 1:13).
Héb. 9:27, 28. « Et comme il est réservé aux hommes de mourir une fois — et après cela le jugement, ainsi le Christ aussi, ayant été offert une fois pour porter les péchés de plusieurs, apparaîtra une seconde fois, sans péché, à salut à ceux qui l’attendent ».
« Pour porter les péchés de
plusieurs »
: Nous trouvons
ici le bouc Azazel. Chaque fois qu’il est question des plusieurs
, il s’agit
de la substitution
et non pas de la
propitiation pour tous.
Ce passage nous présente une nouvelle partie du grand jour des propitiations, avec ces mots : Il apparaîtra « sans péché, à salut à ceux qui l’attendent ». Le souverain sacrificateur, après avoir été dans le sanctuaire, en ressortait, donnant la preuve, par son apparition, que toutes choses étaient en règle avec Dieu, et le peuple pouvait être en repos, parce que, pour une année, la question du péché avait été réglée d’une manière aussi parfaite qu’elle pouvait l’être sous la loi.
Ces mots : « ceux qui
l’attendent »
ne signifient pas seulement ceux qui l’attendent de fait,
mais comprennent en pensée tous les croyants.
La différence pour
nous chrétiens, est que nous n’avons pas besoin, comme jadis Israël, ou comme
plus tard le Résidu croyant, que le souverain sacrificateur sorte du temple
pour nous assurer par sa présence que la question du péché est réglée, car le
Saint Esprit est sorti du sanctuaire et nous rend témoignage de la parfaite
acceptation de l’oeuvre de Christ. Israël, au contraire, devra attendre
l’apparition du Seigneur pour savoir que la question est réglée pour lui comme
elle est déjà réglée à jamais pour nous, chrétiens : « Ayant fait par
lui-même la purification des péchés, Il
s’est assis
à la droite de
la majesté dans les hauts lieux » (Héb. 1:3).
Phil. 3:20, 21. « Car notre bourgeoisie est dans les cieux, d’où
aussi nous attendons le Seigneur Jésus Christ comme Sauveur, qui transformera
le corps de notre abaissement en la conformité du corps de sa gloire, selon
l’opération de ce pouvoir qu’il a de s’assujettir même toutes choses ». Quand il
paraîtra à salut pour nous
, il ne sera plus question que de nos corps
: « Il transformera le corps de notre
abaissement en la conformité du corps de sa gloire ». Telle est notre part.
Quand il apparaîtra ce ne sera pas pour transformer les corps du Résidu
croyant, des sujets futurs de son royaume terrestre, quand même ils ont, comme
nous, le caractère de « ceux qui l’attendent ». Ce dernier terme est donc, comme
nous l’avons dit, une expression générale pour désigner les croyants, sans
qu’il y soit question de leur fidélité individuelle à l’attendre.
1 Jean 2:2. « Lui est la propitiation pour
nos péchés, et non pas seulement pour les nôtres, mais aussi pour le monde entier
». Admettons, comme plusieurs le
pensent, que « le monde entier » désigne les nations, il n’est en tout cas pas
dit : « pour les péchés du monde entier ». J’y vois, pour ma part, quelque
chose de semblable à la purification du sanctuaire, une réconciliation générale
de toutes choses.
Ces passages nous amènent à
Colossiens 1:19, 20, où nous trouvons les trois faits qui se rapportent au
chap. 16 du Lévitique : « En Lui, toute la plénitude s’est plu à habiter,
et, par lui, à réconcilier toutes choses
avec elle-même,
ayant fait la paix par le sang de sa croix par lui, soit
les choses qui sont sur la terre, soit celles qui sont dans les cieux ». C’est
la réconciliation de toutes choses, correspondant à la propitiation faite pour
le sanctuaire. Toutes choses seront introduites, vis-à-vis de Dieu, sur un pied
tout nouveau.
« Ayant fait la paix par le sang de sa croix » doit être mis en
parenthèse et répond à la propitiation
pour tous
de Lév. 16. Christ s’est présenté devant Dieu avec son
sang ; la paix est faite, et, sur cette base, Dieu peut recevoir le pauvre
pécheur. Ce dernier n’a plus affaire à un Dieu dont il doive subir la colère,
car une paix parfaite est établie par le sang de Christ, pour lui permettre de
s’approcher de Dieu.
Versets 21, 22. « Et… il vous
a… maintenant réconciliés
dans le corps de sa chair, par la mort, pour
vous présenter saints et irréprochables et irrépréhensibles devant Lui ». C’est notre
réconciliation, l’oeuvre de
l’expiation faite pour nous, la substitution opérée par le bouc Azazel, les
péchés confessés sur sa tête. Il les a pris sur lui ; c’est la
réconciliation « des plusieurs ».
Cette oeuvre nous est présentée dans le Lévitique sous deux
aspects différents, mais qui, dans le Nouveau Testament, sont beaucoup moins
séparés. Le souverain sacrificateur avait à prendre deux boucs pour un
sacrifice (Lév. 16:5) ; le mort et le vivant sont un
sacrifice aux
yeux de Dieu. Ce côté important de l’oeuvre de Christ caractérise en quelque
mesure notre prédication de l’évangile au monde.
La propitiation est l’oeuvre qui a été faite entre Christ et
Dieu ; la substitution, l’oeuvre faite entre Christ et nous. La
substitution n’est pas bornée au fait que Jésus a réalisé, dans son âme, en
Gethsémané, les conséquences du péché d’une manière absolue et terrible. Elle
va plus loin : elle est l’identification de Christ avec nous sur la croix.
Elle ne signifie pas seulement que Jésus est entré moralement
dans notre position pour nous en délivrer, mais que, sur
la croix, il a fait siennes nos iniquités ; qu’il a été fait ce que nous
étions : « péché
», sous le jugement de Dieu ; qu’il a
dit : « Mes
iniquités m’ont
atteint ; mes
péchés dépassent en nombre les cheveux de ma tête ».
Ainsi Il s’est substitué à nous : Il est venu se vêtir, pour ainsi dire,
de ce que nous étions ! Mais n’oublions pas, quand nous en parlons, de
nous déchausser et de nous prosterner en adoration devant lui !
En Gethsémané le Seigneur est entré, par anticipation
dans cette « agonie », dans l’angoisse du
combat ; il avait besoin d’un ange pour le fortifier, afin que sa chair,
d’où suaient des grumeaux de sang, pût résister ; toutefois il restait en
communion avec son Père ; mais à la croix, pendant les trois heures de ténèbres
la communion était rompue. En
Gethsémané, il ne portait pas dans son corps la malédiction du péché. La
substitution n’eut lieu que sur la croix.