par Henri Rossier ; 1° Ed. : 1927
Note Bibliquest : les sous-titres sont de Bibliquest
Table des matières :
2 - Obstacles opposés par l’Ennemi
3 - Ce qui attend celui qui suit le Seigneur
4 - Ceux qui suivent Jésus sans qu’il les aient appelés
4.2 - Luc 9:60 et Matthieu 8:22
5 - Laisser les liens naturels et porter sa croix — Luc 14:26, 27 et Matt. 10:38
Suis-moi ! deux mots, mais contenant à eux seuls tout un
monde, depuis la conversion jusqu’à l’entrée dans la gloire, et même au-delà
pour ceux qui « suivent l’Agneau où qu’il
aille
! » (Apoc. 14:4).
Ces deux mots ne nous demandent aucun sacrifice, car ils le produisent ;
ils ne nous promettent aucune récompense de notre obéissance, car la récompense
se trouve tout entière dans la personne que nous suivons. Quel est donc le
miracle qu’opèrent en nous ces deux mots ? Ce miracle est : La foi !
la foi qui peut déplacer
ici-bas les montagnes et les jeter dans la mer ; la foi, trouvant Dieu
lui-même dans l’Homme qui nous appelle à le suivre. Avec la foi, produite dans
l’âme par ces deux mots : « Suis-moi », tout obstacle terrestre à suivre le
Seigneur a donc disparu, et le coeur a trouvé une Personne dont l’éternité
elle-même n’épuisera pas l’amour.
Parlons un peu des obstacles que l’Ennemi nous oppose quand les
mots : « Suis-moi » ont atteint nos oreilles. Ils sont de diverses sortes,
depuis un prétexte futile, depuis les occupations journalières et les liens de
famille, jusqu’aux montagnes dont nous avons parlé. Quand le Seigneur
dit : « Suis-moi » à Simon et à André, à Jacques, fils de Zébédée et à Jean
son frère, ceux-ci s’occupaient de leur humble vocation de pêcheurs et
pouvaient laisser leur père aidé de ses hommes à gages ; aussi nul ne dira
que leur sacrifice fût bien grand et qu’il leur fallût une grande foi pour
l’accomplir. Il en était de même de Philippe (Jean 1:44). Sans doute, mais
c’était la foi
et cette foi provenait
de Son appel. La pensée qu’ils avaient tout quitté pour suivre Jésus ne vient à
Pierre que plus tard (Matt 19:27) et lui attire la réponse à la fois
encourageante et humiliante du Sauveur.
Il en fut autrement de Lévi, surnommé Matthieu (Matt. 9:9 ;
Luc 5:27). Jésus lui dit : « Suis-moi ». Cet homme était riche, comme tous
ceux de sa profession ; il avait sous lui un nombreux personnel ; sa
maison luxueuse était largement ouverte à tous et si son public était loin
d’être de choix, il ne s’y intéressait pas moins. À ces mots : « Suis-moi »,
Matthieu se lève
et suit
Jésus. Il ne nous est pas dit qu’il
le connût, ni que Jésus lui eût parlé auparavant ; mais il y avait dans
ces deux mots une puissance
à
laquelle la foi seule pouvait répondre. Il est dit dans Luc : « Quittant tout, il se leva
et le suivit ».
Matthieu ne calcule aucunement
les
conséquences de son acte. Celui qui l’a appelé a immédiatement acquis une
immense importance à ses yeux, car il est dit : « Lévi lui fit un grand festin dans sa maison ;
et
il y avait une grande ,foule de
publicains
et d’autres gens
qui
étaient avec eux à table ». Tout ce que Lévi possède est offert à Jésus ;
rien n’est réservé pour lui-même ; mais, bien plus il éprouve le besoin de
mettre les publicains, les pécheurs, et d’autres personnes encore, en contact
avec le Seigneur. Cela pouvait-il convenir au monde religieux d’alors ?
Nous avons vu et nous verrons encore que, pour suivre le
Seigneur, le croyant aura toujours quelque chose à abandonner, mais cette
privation de ressources temporelles amène avec elle des bénédictions sans fin.
« Venez après moi, et je vous ferai pêcheurs
d’hommes »
(Matt. 4:19). Ces disciples deviennent les porteurs de l’Évangile
pour le monde et les pécheurs convertis par leur moyen sont la joie et la
couronne dont se glorifieront dans les lieux célestes ceux qui les auront
amenés au Sauveur.
Le Seigneur dit encore : « Si quelqu’un me sert, qu’il me suive ;
et où je suis,
moi, là aussi sera mon serviteur : si quelqu’un me sert, le Père
l’honorera » (Jean 12:26). Cette bénédiction n’appartient-elle pas déjà
maintenant à ceux qui suivent Jésus ? Il y a une jouissance des choses
célestes qui illumine la voie des serviteurs pendant le temps de leur
témoignage, si imparfait soit-il, au milieu de ce monde. Ce n’est certes pas un
petit privilège que la conscience de partager, dès ici-bas, les joies de Christ
dans le ciel.
Mais nous voyons encore beaucoup d’autres choses qui attendent ceux qui suivent ou veulent suivre le Seigneur ici-bas, et je n’ai pas besoin de citations pour les montrer. Ce sont avant tout les souffrances, la haine, le mépris du monde, choses dans lesquelles le chrétien trouve sa joie, puisqu’il les partage avec son Maître et son Guide ; mais c’est aussi la communion avec Lui dans les consolations qui sont dispensées à ceux qui ont souffert.
Je pourrais clore ici ces quelques pages si la Parole se bornait
à nous décrire ceux qui, sur Son appel, suivent Jésus ; mais elle a soin,
dans une série d’exemples, de nous faire le portrait de ceux qui, n’y étant pas appelés par Lui, désirent le
suivre.
Leur nombre est grand, comme nous allons le voir.
Et un scribe s’approchant, lui dit : Maître, je te suivrai où que tu ailles. Et Jésus lui dit : Les
renards ont des tanières, et les oiseaux du ciel ont des demeures ; mais
le fils de l’homme n’a pas où
reposer sa tête. Et un autre de ses disciples lui dit : Seigneur,
permets-moi de m’en aller premièrement et d’ensevelir mon père. Mais Jésus lui
dit : Suis-moi, et laisse les morts ensevelir leurs morts
. — (v. 23). Et quand il fut monté dans la nacelle, ses
disciples le suivirent.
Voici des gens bien intentionnés et qui se comptent eux-mêmes
parmi ses disciples. Ceux-là voudraient le suivre sans que Lui les ait
positivement appelés. Nous en rencontrons deux ici, et le chap. 9 de Luc nous
en présentera un troisième. Au premier, le Seigneur répond : Où me
suivras-tu ? Sur la terre, dans les airs même, les créatures les plus
méprisables ou celles qui ont le moins de valeur peuvent trouver un lieu de
repos, mais à moi ce monde n’en offre aucun. Quel est donc le but auquel tu
comptes être conduit ? Or la Parole nous a appris que le seul but, le seul
repos, c’est Christ lui-même. Il faut marcher après Lui, dans une activité
entièrement dominée par sa personne. Le vers. 23 de ce passage nous montre le
seul secret pour le suivre : C’est simplement de le voir marcher devant
nous : « Quand il fut monté dans la
nacelle, ses disciples le suivirent ».
Le suivre : il n’y a pas, avons-nous déjà dit, d’autre
terme que celui-là. Que trouverons-nous au bout de notre course, sinon Lui,
Lui-même ? Cela ne suffit-il pas ? Quel bonheur ! notre moi
a enfin disparu ! Qu’en
reste-t-il ? Rien, car je l’ai
trouvé,
Lui ! N’ai-je pas tout
trouvé,
puisque cet homme est Dieu ? Il est vrai que Lui peut faire quelque usage
de ceux qu’Il appelle : « Venez après
moi, et je vous ferai pêcheurs d’hommes ». « Prêchez, disant : Le royaume
des cieux s’est approché ». « Toi, va et annonce le royaume de Dieu ».
Reprenons encore quelques détails du passage de Luc correspondant à celui de Matthieu (Luc 9:57-62).
Dans le premier cas, celui qui dit : « Je te suivrai où que
tu ailles » n’a aucun doute sur sa propre capacité de le faire, parce qu’il vit dans une ignorance complète de lui-même
.
Il est absolument aveuglé sur son propre état : « Maître, dit-il, je te suivrai
où que tu ailles ».
Dans le second cas, c’est un de ses disciples qui parle, comme
cela nous est montré en Matt.8:21, aussi trouve-t-on ici l’expression d’une
vraie dépendance : « Permets-moi
», dit-il. Certes, cette dépendance
est bonne, mais le mot qui suit : d’aller premièrement
ensevelir mon père est très mauvais. Il y avait donc
dans le coeur de ce disciple une chose qui primait
le fait de le suivre. Il ne voulait pas la faire sans Lui, mais donnait à
cette chose la primauté quand il se voyait dans l’obligation de suivre le
Seigneur. Il désirait honnêtement rompre, en enterrant son père, les derniers
liens qui l’attachaient encore à la terre. Un père mort ! Qu’y avait-il à
reprendre à ce désir ? Après cela, tout serait, lui semblait-il,
définitivement terminé. Était-il donc coupable de tenir compte qu’il y a de
saintes obligations qui dominent tout autre devoir, des liens d’affection
terrestre auxquels on ne doit pas se soustraire, et la Parole de Dieu elle-même
ne nous enseigne-t-elle pas ainsi ? Mais que sont aux yeux de Dieu, sans
la vie de Christ, les membres les plus estimés de nos familles ? Des morts. « Laisse les morts ensevelir leurs
morts ».
Valent-ils à ses yeux le lien éternel avec le Fils du Dieu
vivant ? Aussi, en Matt. 8:22, Jésus dit à cet homme : Suis-moi.
Et, en Luc 9:60 : « Mais toi, va et annonce le royaume de
Dieu ».
Ces deux appels se correspondent. Les hommes devaient apprendre
qu’il y avait désormais, dans ce monde, une sphère où Dieu pouvait être connu,
adoré et servi. Ce royaume s’était approché
;
il était déjà là dans la personne du Roi. Ceux qui suivaient Jésus le savaient
bien. L’annoncer, c’était annoncer Christ et pas autre chose, avant que le
royaume fût définitivement établi.
Luc 9, nous l’avons dit, nous présente encore, au v. 61, un troisième
cas qui n’est pas mentionné dans Matthieu. Ce disciple est au même niveau moral
que celui qui voudrait ensevelir son père et il exprime le même désir d’en
obtenir l’autorisation du Seigneur lui-même. Il est décidé à le suivre, mais
voudrait premièrement prendre congé de
ceux qui sont dans sa maison.
Mais lorsque Christ n’a pas pour notre âme
plus de valeur que toute autre chose,
rien
n’est achevé, rien même n’est commencé. La question importante est
celle-ci : As-tu mis la main à la charrue ? Es-tu engagé dans le
travail pour Christ et pour l’Évangile ? Comment le laisserais-tu, Lui,
pour retourner en arrière ? Ici tout le travail de l’Évangile est en
question. Ceux qui sont « dans la maison » pourraient peut-être interrompre mon
travail pour toujours et dans ce cas-là, Christ et ses intérêts seraient
oubliés et perdus de vue !
Nous avons vu, au commencement de cet écrit que la foi seule
nous qualifie pour suivre
Jésus. Nous avons remarqué plus tard que plusieurs prétendaient être de ses
disciples pour suivre ce même chemin. Il restait à leur montrer ce qui qualifie
un homme pour être le disciple de Christ. Luc 14:26, 27 (et aussi Matt. 10:38)
répond à cette question : « Si quelqu’un
vient à moi, et ne hait pas son père, et sa mère, et sa femme, et ses enfants,
et ses frères, et ses soeurs, et même aussi sa propre vie, il ne peut être mon
disciple. Et quiconque ne porte pas sa croix, et ne vient pas après moi, ne
peut être mon disciple
». Nous trouvons deux choses dans ce passage :
la première est négative : renier tout lien naturel en dehors de Lui, afin
de lui appartenir à Lui seul ; la seconde est positive : porter sa
croix, même au prix de sa propre vie. Or nous ne pouvons la porter qu’après
avoir éprouvé (et non pas
avant) le grandeur de son amour, pour nous sur la croix.
Quel rôle joueront donc les affections les plus légitimes ou les
obstacles les plus grands quand il s’agit de le suivre ? Pour la foi
, ils ne pèsent pas plus
qu’un fétu. C’est ainsi qu’ils n’avaient aucune valeur pour un Matthieu, dont
nous avons rapporté l’histoire. Tout ce qu’il possède, ainsi que sa propre
personne, appartient immédiatement à Celui qui l’appelle. Matthieu lui fait un
grand festin et invite à sa table, devenue celle de Jésus, tous ceux auxquels
il sait que le Seigneur s’intéresse.
Il n’en était pas ainsi du jeune homme dont il nous est dit que
Jésus l’aima
(Marc 10:21 ; Matt.
19:21 ; Luc 18:22). Avec toutes sortes de qualités aimables, les deux
principales lui manquaient : Il ne connaissait pas le Seigneur et se
connaissait tout aussi peu lui-même. Il s’agissait pour lui de faire
pour avoir la vie éternelle et
suivre le Seigneur, oeuvre humaine
qui
est l’opposé de la foi. Jésus lui dit de vendre tout ce qu’il a et de le donner
aux pauvres, puis de charger sa croix et de le suivre. C’était la condamnation
absolue et définitive de l’homme le plus aimable. Il se montre d’emblée
incapable de répondre à la première condition, et comment peut-il avec ses
richesses répondre à la seconde ? Répondre à la seconde en portant le
mépris, la haine du monde, souffrir dans sa réputation, dans son corps même,
pour l’amour de Christ, traverser ce monde n’y ayant rien, haïr même sa propre
vie s’il s’agit de le servir, voilà quelques-unes des choses que ce
terme : charger sa croix, comporte. Rien ne nous délivre plus complètement
de nous-mêmes que de suivre le Seigneur comme il veut être suivi.
Outre l’appel direct du Seigneur à le suivre avec les
mots : Suis-moi, rencontrés si souvent dans les évangiles, il est précieux
de penser qu’Il se sert souvent de ses serviteurs pour engager les âmes dans ce
chemin. Nous en trouvons un exemple dans les paroles de Jean Baptiste disant à
ses deux disciples : « Voilà l’Agneau
de Dieu ! Et les deux disciples l’entendirent parler, et ils suivirent
Jésus
», en quittant ainsi leur conducteur vénéré (Jean 1:35). L’un de ces
deux mène Pierre, son propre frère, à Jésus. Le lendemain, c’est Jésus lui-même
qui dit à Philippe : Suis-moi.
Ces
divers exemples montrent combien variées sont les voies du Seigneur pour
produire un tel résultat. Aussi ne pouvons-nous que blâmer les disciples qui
voulaient en empêcher d’autres d’entrer dans le service de l’Éternel parce
qu’ils faisaient des actes de puissance en chassant les démons sans suivre le Seigneur avec eux.
Certes,
la position de ces derniers était la bonne, mais ils étaient blâmables de
penser à eux-mêmes plus qu’au Seigneur et d’être égoïstement satisfaits de leur
manière à eux de le suivre au lieu de se réjouir de tout ce qui pouvait
glorifier leur Maître. Aussi le Seigneur répond-il : « Ne le lui défendez pas ; car il n’y a personne qui fasse un
miracle en mon nom, et qui puisse aussitôt mal parler de moi, car celui qui
n’est pas contre nous est pour nous
» (Marc 9:39).
Nous avons parlé des divers dangers que rencontrent ceux qui
suivent le Seigneur : Penser à soi, être content de soi, ou bien craindre
les conséquences. Dans ce cas notre témoignage est bien compromis. Mais, plutôt
encore, avec les meilleures intentions peut-être, se cacher et le suivre de
loin, quand cela pourrait attirer sur nous des dangers nouveaux et menaçants.
Tel fut le cas de Pierre en Matt. 26:58: « Pierre
le suivait de loin
». Il n’avait pas craint de tirer l’épée, hors de propos,
pour la défense de son Maître et s’était fait reprendre par Lui ;
maintenant, quand on emmène le Seigneur, il le suit de loin,
alors que Jean, moins entreprenant que Pierre, mais tout
rempli de l’amour de son Maître, assiste à son interrogatoire et le suit
jusqu’au pied de la croix. Cette attitude indécise commandée par la peur,
conduit le pauvre Pierre à
l’action la plus honteuse qui puisse être mise à la charge d’un disciple du
Seigneur !
Chers lecteurs, que ce mot : Suis-moi
, exerce
toute son influence sur nos coeurs et sur nos consciences ! Hélas !
en tout temps ceux qui le suivent de tout leur coeur sont en bien petit
nombre ! Jadis, sur douze hommes envoyés par Moïse pour reconnaître le
pays de Canaan, deux seuls, Caleb, fils de Jéphunné et Josué, fils de Nun,
reçurent le témoignage d’avoir pleinement
suivi l’Éternel
(Nomb. 32:12 ; Deut. 2:36), tandis que les dix autres
moururent de plaie devant Lui (Nomb. 14:37).
Comprenons aussi que nul autre que Lui
n’est qualifié pour dire : Suis-moi. Combien d’hommes nous
rencontrons qui ont la prétention d’être suivis tandis que, pareils à Élie,
ayant conscience d’être sous la discipline de Dieu, et parlant à Élisée qui lui
disait : « Je m’en irai après toi », ils devraient s’écrier : Ne le
fais pas ! «
Retourne
; car que t’ai-je fait ? » (1
Rois 19:20, 21). Suivons-le donc, Lui ! Lui seul est Amour
. Et
de plus, comment pourrions-nous le suivre si nous n’étions soutenus par Lui à
chaque pas ? « Mon âme s’attache à toi pour te suivre, ta
droite me soutient
» (Ps. 63:8).
Oui, suivons-le, Lui seul ! Rien ne peut Lui être plus
agréable que de voir ses bien-aimés le suivre, sans que rien, ni le désert, ni
aucun obstacle ne les arrête. N’a-t-il pas dit : « Je me souviens de toi, de la grâce de ta jeunesse, de l’amour de tes
fiançailles, quand tu marchais après moi dans le désert, dans un pays non
semé ? »
(Jér. 2:2).