Henri Rossier
Table des matières
2 - La conduite chrétienne et le royaume — 2 Pierre 1:3-18
3 - Le royaume et l’Étoile du matin — 2 Pierre 1:16-20 ; Apoc. 2:26-28 ; 22
4 - « Je viens bientôt » — Apoc. 22
5 - La conversion et la venue du Seigneur — 1 Thess. 1 et 2:13
6 - L’attente du Seigneur et la vie chrétienne — 1 Thess. 3:10-13
7 - La venue du Seigneur et la résurrection des saints — 1 Thess. 4:13-18
8 - La venue du Fils de l’homme — Matt. 24:32-44 ; 1 Thess. 5:1-11 ).
9 - La venue du Maître de maison — Matt. 24:45-51
10 - La venue de l’Époux — Matt. 25:1-13
11 - La venue de notre Maître et les récompenses — Matt. 25:14-30
12 - Le petit troupeau et le Seigneur revenant des noces — Luc 12:32-44
13 - Le jour de Dieu — 2 Pierre 3:11-14
On
pourrait considérer la venue du Seigneur au point de vue doctrinal, mais ce
n’est pas ce que je me propose de faire ici. Ce sujet est trop précieux pour le
coeur, il a une portée trop pratique, il apporte trop de fraîcheur à l’âme, pour
qu’on le fasse descendre sur le terrain plus ou moins desséchant d’un simple
enseignement. La venue du Seigneur est une espérance
, l’espérance
chrétienne elle-même
. Elle exerce une influence vivifiante sur l’âme qui la
possède, et sanctifie toute notre conduite. La description
de la venue
du Seigneur n’occupera donc que peu de place dans ces pages. Les lignes qui
suivent suffiront
pour éviter les malentendus que la lecture de ces articles pourraient faire
naître.
La venue
ou Parousie (parousia) du Seigneur est sa seconde
venue (Actes 1:11) (*), la première embrassant la vie de Jésus ici-bas.
Cette seconde venue est un des grands
sujets dont parle le Nouveau Testament. Elle se compose de deux actes
,
séparés par l’intervalle de temps plus ou moins long compris entre les
chapitres 4 et 19 de l’Apocalypse.
(*) Je me borne à citer un très petit nombre de passages que le lecteur, familier avec ce sujet, pourra compléter aisément.
Le premier acte est la venue
du Seigneur pour les siens
. À ce moment, tous les saints
endormis
depuis Adam seront ressuscités (*), et les
saints vivants appartenant à l’Église seront transmués, pour être enlevés tous
ensemble à la rencontre du Seigneur dans les nuées, en l’air. C’est ainsi que
le Seigneur les recevra pour les introduire avec lui dans sa gloire céleste (1
Thess. 1:10 ; 4:15-18 ; 1
Cor. 15:51-54 ; Jean 14:1-3 ; Héb. 9:28).
(*) C’est la résurrection d’entre les morts. La résurrection des morts pour le jugement n’aura lieu qu’après le règne de mille ans (Apoc. 20:7, 11-15).
Le second acte est la venue
du Seigneur avec les siens
. Ils seront alors manifestés avec lui en
gloire devant le monde qui l’a rejeté. Il continuera à les manifester dans son
royaume et durant l’éternité (Col. 3:4 ; 2 Thes.
1:10 ; 1 Jean 3:2 ; Apoc. 21).
Le premier acte n’a que les saints pour témoins et pour objets. C’est un acte de pure et entière grâce (Jean 14:1-3).
Le second acte, qui se lie
à l’exécution du jugement contre le monde
, a le monde pour témoin (Apoc. 1:7). Ce jugement est celui des vivants
, qui
précède le règne de mille ans. Il a un côté guerrier et un côté judiciaire (Apoc. 19:11-16 ; 2 Thess. 1:7-10 ; Apoc. 20:4 ; Matt. 25:31-46). Les saints y sont
toujours associés (1 Cor. 6:2). Le jugement des morts n’a pas de relation
directe (*) avec ce second
acte ; il suit le règne de mille ans après la révolte finale de « Gog et
Magog » et le jugement de Satan (Apoc. 20:7-15). C’est alors que seront introduits les
nouveaux cieux et la nouvelle terre, en un mot les temps éternels (Apoc. 20:11 ; 21:1).
(*) Il en a une indirecte en tant que « le jour du Seigneur » ne se conclut qu’à l’établissement des temps éternels (2 Pierre 3:10).
La résurrection des méchants
a lieu en vue du jugement des morts
, tandis que la « première
résurrection » commence à la résurrection de Christ, « les prémices », se continue
par la résurrection et la transmutation de « ceux qui sont du Christ » à sa
venue, et se termine par la résurrection des saints qui ont été mis à mort par
la « Bête », dans la période qui précède le millénium (1 Cor. 15:20-23 ; Apoc. 11:11-12 ; 20:4-6).
C’est encore au second acte
de la venue du Seigneur sans que le moment en soit spécifié, que se lie
l’importante question de la responsabilité
des saints dans leur conduite. Alors ils recevront la récompense de leur
service ; alors ils éprouveront la perte résultant de leur infidélité. En
un mot, c’est à ce second acte que se lie ce que j’appellerai, les
promotions célestes
(Matt. 25:14-30 ; 2 Cor. 5:9-10).
Le
premier acte est appelé plus spécialement la venue
, la Parousie (1
Thess. 4:15 ; Jacq. 5:7, 8 ; Apoc. 3:11 , 22:20), la bienheureuse espérance (Tite 2:13).
Le second
acte est appelé son apparition
, son Épiphanie
(2 Tim. 4:1, 8),
l’apparition de sa gloire (Tite 2:13), l’apparition de sa venue (2 Thess. 2:8),
la révélation du Seigneur Jésus (1 Cor. 1:7 ; 2 Thess. 1:7), sa
manifestation (Col. 3:4), la venue du Fils de l’homme (Marc 13:26), le jour de Christ (Phil. 1:10), enfin le jour du
Seigneur (1 Thess. 5:2). Le jour du Seigneur qui commence par la venue du Fils
de l’homme en jugement (Marc 13:26), et qui vient comme un voleur (2 Pierre
3:10), se termine après le règne de mille ans, quand Jésus aura remis le
royaume à Dieu le Père, par la destruction des cieux et de la terre actuels (2
Pierre 3:10). Ce jour fera place au jour de Dieu
avec de nouveaux cieux
et une nouvelle terre où la justice habite (2 Pierre 3:12-13).
Ces quelques mots, bien incomplets, sans doute, suffiront pour donner un aperçu doctrinal de notre sujet.
Au début
de ce chapitre, l’apôtre nous montre que la « divine puissance nous a donné tout
ce qui regarde la vie
et la piété
». L’activité de la vie
chrétienne consiste à joindre les uns aux autres ces dons infiniment précieux
que nous tenons de Dieu. Si nous désirons le glorifier, notre conduite doit
être la manifestation non interrompue des choses qui regardent la vie et la
piété. C’est une chaîne à laquelle aucun anneau ne peut manquer, sous peine de
voir notre course brisée avant que le but soit atteint.
Hélas ! cela n’est
arrivé que trop souvent dans la vie des hommes de Dieu. Plusieurs d’entre eux,
s’étant arrêtés avant la fin, ont cessé de joindre
ces choses l’une à
l’autre, et, au lieu de fournir toute leur carrière, n’en ont couru qu’une
partie. Un seul, « le Chef et le consommateur de la foi », l’a courue d’une
manière parfaite ; mais nous, pourquoi ne le suivrions-nous pas « sans
faillir jamais ? » N’avons-nous pas reçu « de sa divine puissance » la force
nécessaire pour l’accomplir ?
« Y apportant tout
empressement », nous avons à « joindre » ces choses : À la foi
envers
Dieu, la vertu
, ou l’énergie spirituelle qui nous sépare du mal, pour
atteindre le but coûte que coûte ; la connaissance
, ou l’intelligence des pensées
divines, quant au chemin à suivre ; la tempérance
quant à nous-mêmes, la patience
quant aux difficultés, la piété
— qui vit dans la communion de Dieu et
cherche en toutes choses sa gloire — quant à nos relations avec Dieu et à la
vie de nos âmes ; l’affection fraternelle
quant aux rapports avec
la famille de Dieu, l’amour
quant aux rapports d’intimité avec le Père
et le Fils.
J’ai dit que les hommes de foi, et souvent les plus éminents, ont vu leur carrière brisée pour n’avoir pas « joint » ces choses. Ainsi, le juste Lot manqua de vertu dès le début de sa carrière ; Noé, David, de tempérance ; Moïse, Élie, de patience ; Salomon, de piété. On pourrait en multiplier les exemples. Quel fut pour ces croyants le résultat du manque d’empressement à « joindre » ces choses ? Lot fut sauvé comme à travers le feu, Noé perdit son titre de chef de la création renouvelée, l’épée ne s’éloigna plus de la maison de David, et ses dernières paroles furent : « Quoique ma maison ne soit pas ainsi avec Dieu » (2 Sam. 23:5). Moïse n’entra pas dans la terre promise, Élie dut oindre Élisée comme prophète à sa place, et pour Salomon, ce fut la cause de la division et de la ruine de son royaume.
Est-ce donc que ces hommes de Dieu ne furent pas sauvés ? Certes, ils le furent, car on voit apparaître Moïse et Élie sur la sainte montagne, dans la même gloire que le fils de l’homme, mais tous ont failli. Quelques-uns d’entre eux ont, sans doute, été restaurés par la discipline, mais l’infidélité des autres les a privés de leur couronne.
En « joignant » fidèlement ces
choses, nous « affermissons notre vocation et notre élection », non pas dans le
coeur de Dieu, cela va sans dire,
mais d’abord dans notre propre coeur, puis aussi
dans celui de nos frères, comme on le voit en 1 Thes.
1:3-4 : « Nous souvenant sans cesse de votre oeuvre de foi, de votre
travail d’amour, et de votre patience d’espérance de notre Seigneur
Jésus-Christ, devant notre Dieu et Père, sachant,
frères aimés de Dieu, votre élection
». Quiconque « joint » ces choses,
marchera en avant avec la conscience bénie de la certitude de ses privilèges.
Ces réflexions nous amènent
au sujet spécial sur lequel je désire insister aujourd’hui. Les chrétiens
auxquels l’apôtre s’adresse, avaient à vivre en vue de
l’entrée dans le royaume
. Dieu leur avait donné une espérance
qui devait puissamment influer sur leur marche et les remplir d’empressement à
bien faire. « En faisant ces choses », dit l’apôtre, « vous ne faillirez
jamais ; car ainsi l’entrée dans le royaume éternel de notre
Seigneur et Sauveur Jésus-Christ
vous sera richement donnée ». Le royaume éternel était la fin de leur
course ; ils devaient le partager avec Christ. Lorsque le Nouveau
Testament nous parle de responsabilité
dans le service, il nous présente
toujours comme but de notre course, la venue du Seigneur avec
les siens
dans son royaume, et non sa venue pour
les saints.
Remarquons
cette parole : « L’entrée vous sera richement
donnée ». Telle est la fin
d’une marche fidèle. L’entrée est donnée à tous, mais non pas à tous
« richement ». Le chrétien peut avoir une riche
ou une pauvre
entrée. Cette dernière
expression dépeint bien ce que notre infidélité nous fait perdre. Avons-nous
l’espérance d’être sauvés comme à travers le feu, ou bien de trouver grande
ouverte, au bout de notre course, la porte qui donne accès dans la gloire du
royaume ?
Ces
choses avaient une très grande importance aux yeux de l’apôtre ; car il
dit : « C’est pourquoi je m’appliquerai à vous faire souvenir toujours de
ces choses, quoique vous les connaissiez, et que vous soyez affermis dans la
vérité présente ». Mais les chrétiens auxquels il s’adressait, comme nous
hélas ! étaient en danger de les oublier et de se laisser aller à
l’assoupissement spirituel. Leur activité avait perdu son premier élan et leur
espérance sa saveur. Aussi ajoute-t-il : « J’estime qu’il est juste, tant
que je suis dans cette tente, de vous réveiller en rappelant ces choses à
votre mémoire ».
Et plus loin : « Je m’étudierai à ce qu’après mon départ
vous puissiez aussi en tout
temps
vous
rappeler ces choses ». Puis il ajoute : Quant à moi, j’ai vu ce royaume de
mes propres yeux. J’ai assisté sur la sainte montagne à la puissance et à la
venue de notre Seigneur Jésus-Christ. J’ai contemplé d’avance sa majesté
future. Eh bien ! le Seigneur lui-même l’a eue, cette riche entrée !
Il reçut de Dieu le Père honneur et gloire, lorsqu’une telle voix lui fut
adressée par la gloire magnifique : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en
qui j’ai trouvé mon plaisir ! » Dieu l’a salué, moi l’entendant, du nom de
Bien-aimé, objet de ses délices.
Telle est
l’entrée du Seigneur Jésus dans son royaume. Toute puissance lui est donnée,
dans le ciel et sur la terre, en vertu de son obéissance. Le témoin fidèle, le
Chef et le consommateur de la foi, a « joint
ces choses » d’une manière
parfaite, et jusqu’au bout ; il sera acclamé avec les paroles du Psaume
24 : « Portes, élevez vos têtes ! et élevez-vous, portails éternels,
et le roi de gloire entrera. Qui est ce roi de gloire ? L’Éternel fort et
puissant, l’Éternel puissant dans la bataille. Portes, élevez vos têtes !
et élevez-vous, portails éternels, et le roi de gloire entrera. Qui est-il, ce
roi de gloire ? L’Éternel des armées, lui, est le roi de gloire ». C’est à
lui que s’adressent encore les paroles du Psaume 45 : « Ceins ton épée sur
ton côté, homme vaillant, dans ta majesté et ta magnificence ; et,
prospérant dans ta magnificence, mène en avant ton char, à
cause
de la vérité et de la débonnaireté
et de la justice
; et ta droite t’enseignera des
choses terribles… Ton trône, ô Dieu, est pour toujours et à perpétuité ;
c’est un sceptre de droiture que le sceptre de ton règne. Tu as aimé la justice
et tu as haï la
méchanceté ; c’est pourquoi Dieu, ton Dieu, t’a oint d’une huile de joie
au-dessus de tes compagnons ».
Quant à
nous, bien-aimés, nous ne pouvons entrer dans son royaume comme
lui,
mais nous pouvons y entrer avec
lui. Il n’y entrera pas seul. Pierre l’avait vu sur la sainte montagne tel
qu’il reviendra. Il l’avait vu avec Moïse et Élie pour compagnons, types des
saints ressuscités et des saints transmués, qui formeront son cortège au jour
de son royaume éternel. Si nous sommes fidèles, si nous « joignons ces choses »
en vue de son apparition, les portails éternels qui s’élèveront pour lui ne
s’abaisseront pas pour nous, et nous serons salués à notre arrivée par ces
mots : « Bien, bon et fidèle esclave,… entre dans la joie de ton
maître ! »
Sur la sainte montagne, Pierre avait eu la merveilleuse vision du « fils de l’homme venant dans son royaume » (Matt. 16:28). C’est là que les gloires qui devaient accompagner cette venue, lui avaient été révélées ; elles étaient restées gravées dans son coeur jusqu’au moment de déposer sa tente. D’abord il avait contemplé la majesté du fils de l’homme, déclaré Fils de Dieu par la « gloire magnifique ». Il avait vu son visage resplendissant comme le soleil et ses vêtements blancs comme la lumière. Ses regards s’étaient arrêtés ensuite sur les saints célestes qui l’accompagnaient. Il avait été témoin des entretiens que l’on a dans la gloire et s’était familiarisé avec eux. De ses propres oreilles il avait entendu la voix du Père lui parler du Fils de son amour. Ses compagnons et lui, représentant pour ainsi dire la scène inférieure et terrestre du royaume, avaient été illuminés des rayons du soleil de justice qui se levait sur la montagne.
Cette vision confirmait la
prophétie tout entière, car le sujet auquel aboutit toute prophétie c’est le
royaume du Christ et surtout dans sa partie terrestre
. En mentionnant la
parole prophétique, l’apôtre ajoute : « À laquelle vous faites bien
d’être attentifs
, comme à une lampe qui brille dans un lieu
obscur ». La prophétie, dans sa portée pour nos consciences, est une chose bien
importante et trop négligée. Tout en nous parlant du royaume, elle nous
renseigne sur la manière dont il sera établi. Il ne pourra l’être que par le
jugement
. Pourquoi ? Parce que le monde est entièrement corrompu, et
que ce n’est pas la corruption que le Seigneur prendra comme sphère de son
royaume dans ce monde. Le monde est un « lieu obscur » et ténébreux ; la
prophétie est une lampe qui nous permet de constater son état actuel et qui
projette sa lumière sur la condition finale
des hommes, quand le Seigneur viendra « et tous les saints avec lui ».
Les fidèles étaient en danger de se laisser gagner par le sommeil au milieu de ces ténèbres. La lampe prophétique leur en faisait voir l’horreur, et discerner les pièges cachés ; elle les séparait du monde par la crainte. Comment s’associer à ce qui allait être balayé par le jugement ? Comment faire des plans d’avenir dans un monde qui n’a pas d’avenir ? Comment s’établir dans un lieu où tout allait être ébranlé et détruit ? Oui, nous faisons bien d’y être attentifs, et je crois que la négligence actuelle des chrétiens au sujet de la prophétie, a porté ses tristes fruits en abaissant les barrières qui les séparaient autrefois du monde.
Mais déjà
maintenant nous avons mieux que la lampe. L’apôtre ajoute : « Jusqu’à ce
que le jour ait commencé à luire ». Nous sommes fils de la lumière, et fils du
jour. Enfants du royaume, nous sommes rendus capables
d’avoir part au
lot des saints dans la lumière. En attendant, nous sommes déjà
délivrés
du pouvoir des ténèbres et, si nous n’avons pas encore été transportés dans le
royaume du roi de justice, de paix et de gloire sur la terre, nous l’avons été
dans un royaume infiniment plus grand et plus glorieux, dans le royaume céleste
du Fils de son amour. Déjà nous jouissons en Christ des relations de fils et de
tout l’amour du Père qui repose sur lui. Le jour se lèvera bientôt ;
puissions-nous marcher comme des fils du jour !
La
prophétie éclaire la terre ruinée ; le soleil de justice éclairera la
terre renouvelée. Il n’a pas encore paru ; cependant nous en déjà connaissons
la splendeur, comme Pierre qui la contempla sur la sainte montagne. Mais
l’apôtre mentionne encore une autre lumière, celle de l’étoile du
matin
: « Et que l’étoile du matin se soit levée dans vos coeurs ». Si
le soleil éclaire la terre, l’étoile du matin a le ciel pour domaine. Elle
attire les yeux vers elle-même et vers ces espaces infinis où brille sa pure
lumière. L’étoile du matin est un astre gracieux et plein d’une fraîcheur
merveilleuse. Il est levé bien avant l’aube, et celui qui veille toute la nuit
a seul le privilège de le voir. L’étoile du matin, c’est le Christ céleste
quand il apparaîtra aux yeux des siens. Nous ne le voyons pas encore, mais nous
sommes au moment précis où il va paraître ; car « la nuit est fort avancée,
et le jour s’est approché » (Rom. 13:12). Déjà cette étoile s’est
levée dans nos coeurs, déjà l’espérance céleste occupe nos pensées et remplit
nos affections, et cette espérance c’est notre Sauveur en personne
.
Au chap.
2, v. 26-28 de l’Apocalypse, nous trouvons de nouveau le royaume et l’étoile du
matin réunis. Dans ce passage, le Saint-Esprit n’indique pas, comme en 2 Pierre
1, à ceux qui réalisent pratiquement ici-bas la vie qu’ils ont reçue de Dieu,
la porte d’entrée du royaume. Mais Jésus lui-même offre à celui qui vaincra, une
même part avec lui dans le gouvernement de son royaume
. « Et celui qui
vaincra, et celui qui gardera mes
oeuvres jusqu’à la fin — je lui
donnerai autorité sur les nations ; et il les paîtra avec une verge de fer, comme sont brisés les vases de
poterie, selon que moi aussi j’ai reçu de mon Père ». C’est au Seigneur
Jésus-Christ, au fils de l’homme, déclaré Fils de Dieu, que ces choses sont
données au Ps. 2 : « Demande-moi, et je te donnerai les nations pour
héritage, et, pour ta possession, les bouts de la terre ; tu les briseras
avec un sceptre de fer ; comme un vase de potier, tu les mettras en
pièces » (voyez Apoc. 19:15). Nous partagerons son
gouvernement ; nous paîtrons les nations avec lui. Pas un homme n’osera
s’élever contre le Christ, sans être immédiatement brisé par lui.
Le Seigneur ajoute : « Et
je lui donnerai l’étoile du matin ». C’est là bien plus que le royaume et le
gouvernement ; bien plus même qu’une espérance céleste, que l’étoile « dans
le coeur » : c’est l’astre, c’est l’étoile du matin, la personne
elle-même
,
qu’on possède ;
comme si nous l’entendions nous dire : Je me donnerai moi-même à vous dans
le ciel, avec le même caractère dans lequel je suis venu, pour vous revêtir de
ma grâce et de ma beauté célestes ; je serai votre part précieuse en haut,
avant que je sois manifesté au monde !
Pour obtenir une telle part, ne vaut-il pas la peine de lutter sans cesse et de vaincre ; de contredire, sans nous lasser, par toute notre vie, les principes sataniques qui régissent le monde ? Cette part nous est présentée ici comme récompense. À ceux qui vaincront il donnera le royaume, mais ils l’auront Lui, lui-même, comme leur part spéciale dans le repos et dans la béatitude des lieux célestes !
Nous retrouvons une troisième fois le royaume et l’étoile du matin en Apoc. 22:16. Ici, nous voyons les bénédictions s’étendre et s’élever encore, acquérir enfin une intimité qui n’est pas atteinte dans les passages qui précèdent. Un cri se fait entendre tout du long de ce chapitre : « Je viens bientôt ». Dans le passage qui nous occupe, le Seigneur se présente d’abord comme venant en sa dignité de roi. Il est « la racine et la postérité de David ». Il est la source, aussi bien que l’héritier de toutes les grâces assurées à l’Oint de l’Éternel ; ces grâces du royaume, il veut les donner aux siens comme récompense. Il déclare bienheureux ceux qui gardent les paroles de la prophétie de ce livre (v. 7). Il déclare encore bienheureux ceux qui lavent leurs robes, ceux qui ont eu recours au sang de l’Agneau, comme à l’unique source de leur purification (v. 14). Mais dans ce chapitre, il ne leur donne pas seulement, comme au chap. 2, le gouvernement de la terre et des nations ; il les introduit dans la région la plus élevée du royaume, il leur octroie la sphère céleste. Entrer dans la cité, avoir droit à l’arbre de vie du Paradis de Dieu, se nourrir de ses fruits, telle est leur part ; le fleuve d’eau vive sortant du trône de Dieu et de l’Agneau, les rafraîchit éternellement ; leur privilège est de servir le Seigneur dans sa gloire, de voir sa face ; de manifester publiquement et pleinement ses perfections, en portant son nom sur leurs fronts. Ils sont dans la pleine lumière du soleil d’éternité ; ils règnent aux siècles des siècles ! (22:1-5).
Cet avenir glorieux, nous allons l’atteindre ! Serions-nous donc tentés de suivre d’autres chemins que le seul chemin qui y conduit ? Comptons sur la grâce, soyons fidèles, combattons le bon combat, achevons la course, gardons la foi, et ces choses seront à nous pour toujours !
Jésus ajoute : « Je suis
l’étoile brillante
du matin ». Par
ce seul mot, il se dépeint lui-même à nous, comme lui seul peut se dépeindre.
Au chap. 2 de l’Apocalypse, il est notre part dans le ciel
avant d’être
manifesté au monde. Ici, il se présente devant nos yeux, dans sa splendeur
personnelle, comme celui qui vient. Comme jadis Isaac va au-devant de Rebecca,
il vient au-devant de son Épouse. Il n’envoie pas de messager pour nous
chercher, non, pas même le chef des anges ; il vient lui-même. Peut-il
nous donner une plus grande preuve de son amour ? Il n’est pas encore
présent, mais il vient. Et nous, disons-nous comme Rebecca :
« J’irai » ? Sommes-nous partis à sa rencontre ? Le Saint-Esprit, notre
Éliézer, nous parle de lui tout le long de la route,
faisant appel à nos affections pour notre Époux. Prêtons-nous une oreille
attentive à tout ce qu’il nous rapporte de lui ? S’il en est ainsi, nous
répondrons de tout notre coeur à ce cri, lointain d’abord, qui de plus en plus
se rapproche : Je viens bientôt, oui, je viens bientôt. Viens, dit
l’épouse, d’accord avec son Éliézer qui le connaît,
lui, si bien. Amen ; viens, Seigneur Jésus !
Un Christ venant dans son
royaume fait appel à notre conscience ; l’Étoile du matin s’adresse à
notre coeur. Ne négligeons ni l’un, ni l’autre. Dans les deux cas, il s’agit de
lui. Aimons à la fois,
son apparition
et sa venue
; il nous trouvera quand il viendra, tels qu’il désire nous avoir,
et son coeur en sera satisfait !
Si
l’Apocalypse est un livre de jugements, la venue du
Seigneur
qui
doit les exécuter, en est proprement le sujet principal. Une des premières
paroles du chapitre 1 est : « voici, il vient avec les nuées ». À divers
titres, les chapitres 2 et 3 sont remplis de sa venue. « Je viens à toi et
j’ôterai ta lampe de son lieu », dit-il à Éphèse. Et à Pergame : « Je viens
à toi promptement, et je combattrai contre eux par l’épée de ma bouche » (*). Il dit aux fidèles à Thyatire : « Ce que vous avez, tenez-le ferme jusqu’à
ce que je vienne ». À Sardes . « Je viendrai sur toi comme un voleur, et tu ne
sauras point à quelle heure je viendrai sur toi ». À Philadelphie enfin :
« Je viens bientôt ; tiens ferme ce que tu as, afin que personne ne prenne
ta couronne ».
(*) Les deux citations qui précèdent ont, il est vrai, un caractère très général.
Les chap. 4 à 11, nous décrivent les préparatifs de sa venue, jusqu’à ce que ces mots retentissent : « Le royaume du monde de notre Seigneur et de son Christ est venu », et : « Nous te rendons grâces, Seigneur… de ce que tu as pris ta grande puissance et de ce que tu es entré dans ton règne ». Au chap. 19, nous le voyons sortir du ciel, monté sur un cheval blanc, et venant pour juger et combattre en justice. Enfin, au chap. 22, nous entendons le cri qui va nous occuper : « Je viens bientôt ».
La lecture de ces nombreux
passages nous prouve que le Seigneur vient de deux manières absolument
distinctes : en grâce
ou en jugement
; or
l’Apocalypse nous entretient avant tout de la dernière. Pourquoi vient-il comme
juge ? Parce que l’Église responsable (ou la chrétienté), le monde (ou
ceux qui « habitent sur la terre »), et le peuple juif, sont dans une telle
condition, qu’il ne reste au Seigneur, après tant de longue patience, qu’à les
frapper dans sa colère. Nous trouvons donc dans le livre de l’Apocalypse, la
ruine complète de l’homme amenant le jugement de Dieu par la venue de Christ,
tandis que sa venue en grâce n’y comprend qu’un petit nombre de passages. Le
livre tout entier se résume, au chap. 22, par ce cri pressant répété trois fois :
« Je viens bientôt ».
Il vient, avons-nous dit, en grâce ou en jugement, pour le bonheur ou pour le malheur.
C’est pour le bonheur, au v.
7 : « Voici, je viens bientôt. Bienheureux
celui qui garde les paroles
de la prophétie de ce livre ».
Que signifient ces mots : « Garder les paroles de la prophétie » ? C’est mettre en pratique, c’est réaliser les deux grandes vérités dont nous venons de parler, la ruine de l’homme et le jugement de Dieu, les réaliser par une sainte séparation de ce qui doit être jugé. C’est aussi vivre en vue de la prochaine apparition de Celui auquel nous appartenons. Le premier cri : « Je viens bientôt », s’adresse proprement aux croyants qui traverseront les événements de l’Apocalypse, aux 144000 scellés d’entre les Juifs et à l’immense multitude sauvée d’entre les nations (chap. 7). Il vient bientôt pour eux, afin de les introduire dans la béatitude de son royaume. Mais l’Église aussi, peut s’appliquer cette promesse de Christ, elle aussi doit garder les paroles de la prophétie de ce livre ; elle aussi doit aimer l’apparition du Seigneur.
Au v. 10, l’ange parle au prophète : « Ne scelle point les paroles de la prophétie de ce livre ; le temps est proche ». Il n’en est plus aujourd’hui, il n’en sera plus désormais, comme au temps de Daniel auquel il fut dit : « Et toi, Daniel, cache les paroles et scelle le livre jusqu’au temps de la fin » (Dan. 12:4). Ici, le livre n’est point scellé, car le temps est proche. Dieu veut que l’écrit prophétique soit grand ouvert, que chacun puisse en prendre connaissance. Sans doute, le monde ne peut le comprendre, et quand on le lui présente en disant comme Ésaïe : « Lis ceci, je te prie », il répond : « Je ne puis, car il est scellé », ou bien : « Je ne sais pas lire ». Mais comment les chrétiens mêmes, disent-ils : « Ce livre est obscur, et je n’y comprends rien ? » Cependant ce livre n’est pas scellé. Pourquoi donc ne le comprennent-ils pas ? Cela vient de ce que nous ne gardons pas la prophétie, et c’est notre mondanité qui nous en empêche ; cela vient encore de ce que la venue du Seigneur n’occupe pas de place dans nos coeurs, et n’a que peu d’intérêt pour nous.
Frères, le temps est proche, si proche que le moment vient où il ne sera plus possible de rien changer à l’état moral et à la destinée des hommes. Ils sont déjà comme sur la plate-forme de l’échafaud ; un instant encore, et leur tête sera placée sous le couteau, attendant le coup fatal. Alors il sera trop tard pour s’amender. « Que celui qui est injuste, commette encore l’injustice ; et que celui qui est souillé, se souille encore ; et que celui qui est juste, pratique encore la justice ; et que celui qui est saint, soit sanctifié encore ».
Le Seigneur vient : il
est si proche, qu’il trouvera chacun de nous dans sa condition actuelle et
définitive. Alors pour les injustes et les souillés retentira cette
parole : « Il est trop tard ! » — Ah ! pour ceux-là, qu’il est
terrible ce mot : « Je viens bientôt
, et ma récompense est avec moi, pour rendre à chacun selon que
sera son oeuvre » (v. 12). Ce second : « Je viens bientôt », sonne comme le
glas de l’agonie des pécheurs !
Le troisième : « Je viens bientôt » (v. 20), s’adresse à l’Épouse qui veille en attendant son Époux. Elle est comme une sentinelle, les yeux fixés, non pas sur la terre encore ensevelie dans les ténèbres, mais sur le ciel, pour y voir paraître l’astre avant-coureur du jour.
Comment l’Épouse ne tressaillerait-elle pas à ce cri ? Hélas ! combien de chrétiens n’y ont pas même répondu ! Combien d’entre eux répondent à tout ce qui les sollicite sur la terre, tandis que la venue du Seigneur les laisse indifférents. Frères, entendez-vous ce cri : « Je viens bientôt » ? Que celui qui entend, dise : « Viens ». Âmes travaillées, âmes malheureuses, avez-vous soif de choses meilleures ? « Que celui qui a soif, vienne ». Vous tous auxquels s’adresse la Parole aujourd’hui, venez, achetez sans aucun prix : « Que celui qui veut, prenne gratuitement de l’eau de la vie ! »
À la voix de Jésus se déploie dans le coeur de l’Épouse, le cycle entier des saintes affections celles qui naissent de la conscience du lien qui l’unit à l’Epoux ; le besoin d’attirer à Christ le coeur de tous les saints ; enfin ses désirs pour les âmes altérées qui ne sont pas encore venues à la source rafraîchissante.
Bien-aimés, que ce soient aussi nos désirs et nos joies jusqu’à ce qu’il vienne !
On est
bien embarrassé de nos jours, lorsqu’on cherche à se rendre compte de l’état
réel des âmes. La chrétienté professante est remplie de personnes qui n’approuvent
pas le rationalisme et l’incrédulité modernes, qui disent accepter comme étant
la parole de Dieu, l’Écriture et les vérités qu’elle contient, qui professent
avoir reçu Christ et connaître la croix. Ces personnes vont chaque dimanche
écouter un prédicateur plus ou moins fidèle, plus ou moins persuasif et
éloquent, puis sortent de là plus ou moins édifiées ou satisfaites, habiles à
comparer les mérites respectifs de ceux qui leur ont parlé… Tout cela ne fait
pas que l’on soit un chrétien. Il y a une différence fondamentale entre l’état
de ces âmes et celui des Thessaloniciens. L’apôtre Paul dit à ceux-ci :
« Nous rendons sans cesse grâces à Dieu de ce que, ayant reçu de nous la parole
de la prédication qui est de Dieu, vous avez accepté, non la parole des hommes,
mais (ainsi
qu’elle
l’est véritablement
) la
parole de Dieu ».
La puissante parole de l’apôtre, l’excellence de sa prédication, le mérite de
celui qui leur parlait, et certes Paul avait à un haut degré toutes ces
qualités, n’était pas ce qui les avait attirés. En l’entendant ils avaient, par la foi
, reçu sa parole, comme la
véritable parole de Dieu. D’emblée, ils avaient affaire d’une manière vivante
avec Dieu et non avec l’homme.
L’évangile avait sans doute
été accompagné au milieu d’eux d’actes de puissance (1:5), de signes qui
caractérisaient alors l’action apostolique, mais l’autorité divine de cette
Parole avait été démontrée d’une tout autre et bien plus merveilleuse manière,
car l’apôtre ajoute : « Laquelle aussi opère
en vous qui croyez ». Cette
autorité avait été démontrée par les fruits que la Parole avait produits dans
leur coeur. Or cela manque et manquera toujours à un simple professant.
Le premier de ces fruits, c’est que la Parole les avait remplis de joie (*), non pas de la satisfaction passagère d’avoir entendu un discours édifiant, mais de la joie de l’Esprit Saint (1:6). Ainsi pour eux, la Parole était de Dieu, leur foi l’avait saisie comme telle, et l’Esprit Saint qui la leur apportait, les avait remplis de joie en l’entendant.
(*) Nous ne parlons ici que des vérités présentées dans ce chapitre, car l’Esprit de Dieu agissant dans le coeur des pécheurs y produit toujours la repentance.
Les
saints de Thessalonique n’en étaient pas restés là. Immédiatement cette Parole
avait opéré en eux un autre fruit, la conversion.
Ils s’étaient « tournés des idoles vers Dieu » ;
ils avaient abandonné leur religion, pour servir Celui qu’ils avaient appris à
connaître par sa Parole, le Dieu vivant et vrai (en contraste avec des idoles
qui n’étaient que mensonge), « et pour attendre des cieux son Fils qu’il a
ressuscité d’entre les morts, Jésus, qui nous délivre de la colère qui vient ».
Ainsi, le but de leur conversion était atteint. Serviteurs du vrai Dieu, ils s’étaient immédiatement mis à attendre des cieux le Seigneur Jésus ; non pas comme juge, remarquez-le bien, mais comme Sauveur, comme Celui dont le caractère est de nous délivrer de la colère à venir. Dès leur conversion, ces chrétiens, tout ignorants qu’ils fussent encore, avaient une espérance, celle de la venue prochaine de Christ. Ce qui était futur, c’était la colère qui ne pouvait nullement les atteindre, puisque la venue du Seigneur devait les en abriter.
Cher lecteur chrétien, le but
de ta conversion, de ce qui constitue le premier pas
de ta carrière
chrétienne, ce but est-il atteint ? As-tu abandonné tes idoles
d’autrefois, quand tu étais dans la chair, pour servir le vrai Dieu et pour
attendre du ciel son Fils ressuscité ? Et si tu ne l’as pas fait, si tu
n’attends pas Jésus du ciel, quel nom faut-il donner à ton christianisme ?
Remarque bien, lecteur, que
ces Thessaloniciens n’étaient pas des chrétiens avancés, très versés dans la
doctrine. C’étaient de petits enfants en Christ, fort ignorants même quant aux
détails de la venue du Seigneur. Cette épître nous le prouve, car l’apôtre leur
écrit pour les éclairer à ce sujet. Ils en savaient beaucoup moins que nous,
qui avons sur la venue de Christ l’enseignement complet de la Parole. Ils
n’auraient pu dire comment Il viendrait, comment nous serions enlevés à sa
rencontre, ce qui arriverait à leurs frères endormis dans le Seigneur. Mais
nous qui savons toutes ces choses, attendons-nous Jésus comme eux ?
Remarquons encore que leur espérance n’avait pas été un enthousiasme de la
première heure. À travers mille difficultés, ils avaient persévéré dans cette
attente. Le monde haïssait, méprisait, persécutait ces chrétiens, mais leur
rendait témoignage. Le monde disait qu’ils avaient abandonné leur ancienne
religion pour en suivre une nouvelle, dont le trait principal était d’attendre
du ciel celui qu’ils appelaient leur Sauveur. Leur marque distinctive
dans le monde entier était cette espérance, cette chose folle et ridicule aux
yeux des hommes. Et comment le monde savait-il que les Thessaloniciens servaient
Dieu et attendaient le Seigneur ? Non par ce qu’ils disaient
, mais par ce qu’ils faisaient.
Leur vie était
caractérisée par un ensemble d’actes qui provenaient manifestement de la foi
,
par un travail incessant qui avait l’amour
pour motif, et par une patience
remarquable au milieu de dures persécutions, patience qui avait pour cause
cette bienheureuse espérance
de notre Seigneur Jésus-Christ (1:3).
Tout était réalité dans la vie des Thessaloniciens. Ils ne pouvaient rencontrer que souffrance, dans un monde dont tout ce qu’ils possédaient par la grâce les avait séparés désormais, mais ils le traversaient pleins de joie, servant Dieu, attendant à chaque instant des cieux leur Sauveur, remplis de foi, d’amour, de patience ; glorifiant ainsi chaque jour le Dieu et Père auquel le Sauveur les avait amenés. Et maintenant, je le demande encore, ce tableau est-il un portrait ressemblant de ce que nous sommes ?
Nous avons déjà montré que l’attente du Seigneur ne caractérisait pas les Thessaloniciens seulement à leur conversion. La persécution qui suivit leur fournit l’occasion de manifester la patience de leur espérance. Paul lui-même, quoique vieilli dans la carrière, et bien qu’il fût un père, et non pas un petit enfant dans la foi, avait toujours marché, comme eux, dans l’activité du « premier amour », et les années n’avaient pas affaibli la fraîcheur de sa vie chrétienne. Le chap. 2 nous présente l’apôtre dans son « oeuvre de foi », dans son « travail d’amour » (nous y reviendrons), enfin dans sa « patience d’espérance », car lorsque Satan cherchait à entraver son ministère (v. 17-20), il avait devant les yeux la venue du Seigneur et savait qu’il trouverait alors, et alors seulement, la rémunération de son service. « Quelle est », leur dit-il, « notre espérance, ou notre joie, ou la couronne dont nous nous glorifions ? N’est-ce pas bien vous, devant notre Seigneur Jésus, à sa venue ? » (2:19). Ainsi la venue du Seigneur, qui réglait toute la conduite de ces petits enfants dans la foi, exerçait de même son influence bénie sur tout le ministère du grand apôtre des gentils. Étant ensemble de la même famille, et en ayant les caractères, ils possédaient, malgré des mesures de connaissance bien diverses, le même secret de la vie chrétienne. Leur christianisme était fort simple : connaissant et aimant personnellement le Seigneur, ils vivaient dans son attente journalière.
Le
passage qui fait le sujet principal de cette méditation (3:10-13), nous montre
que la foi des Thessaloniciens courait quelques dangers. Ici, « la foi
»
n’est pas seulement l’acceptation du témoignage de Dieu quant à l’oeuvre de
Christ, car reçue dans le coeur, cette foi est complète ; mais la foi est
aussi l’ensemble de la doctrine chrétienne reçue par la foi, et à ce point de
vue, il y manquait quelque chose (voyez v. 10). Toute l’instruction de cette
épître prouve que les détails de leur espérance leur faisaient encore défaut.
Satan cherchait à mettre cette lacune à profit. On voit, au chap. 4, qu’ils étaient
en danger d’être « affligés comme les autres qui n’ont pas d’espérance » et, dans
la 2° épître, que l’Ennemi avait réussi en quelque mesure à leur enlever leur
attente. Il leur insinuait que « le jour du Seigneur était là » (2:2)
(c’est-à-dire le jour du jugement), puisqu’ils traversaient des
tribulations ; qu’ils pouvaient donc s’être trompés en attendant Jésus,
venant du ciel pour les délivrer de la colère à venir.
Le fait est que les chrétiens qui ne sont pas familiers avec la venue du Seigneur, courent le risque de tomber dans les pièges du tentateur, et ainsi de rendre vain tout le travail de l’Esprit de Dieu pour eux (1 Thess. 3:5). Si nous perdons la connaissance de l’espérance chrétienne, notre âme est en danger de perdre aussi d’autres vérités élémentaires qui sont à la base de la foi. La question : « Où est la promesse de sa venue ? » sert de fondement au matérialisme des moqueurs de la fin (2 Pierre 3:4). Mais cette attente de Christ qui influe sur notre service et importe à notre foi, agit encore sur d’autres éléments de notre vie chrétienne. On peut même affirmer qu’elle n’est étrangère à aucun des éléments de cette vie. C’est ainsi qu’au chap. 3 de notre épître, l’apôtre ne peut parler de la sainteté sans introduire la venue du Seigneur :
« Quant à vous, que le
Seigneur vous fasse abonder et surabonder en amour les uns envers les autres et
envers tous, comme nous aussi envers vous, pour affermir vos coeurs sans
reproche en sainteté
devant notre Dieu et Père en la venue de notre
Seigneur Jésus avec tous ses saints ».
Arrêtons un peu notre attention sur ce passage. Nous y voyons que Paul désirait pour les saints de Thessalonique un exercice surabondant de l’amour fraternel et cela, non seulement dans le cercle restreint de leurs relations chrétiennes, mais « envers tous » (*). Que ne rencontre-t-on aujourd’hui cet amour qui déborde envers tous les membres de Christ ! Combien souvent l’on traite en étrangers (comme s’ils n’étaient pas des frères), les enfants de Dieu avec lesquels on ne marche pas ! Combien souvent l’amour est remplacé par une sorte de camaraderie, joignant ensemble les membres de chacune des sectes diverses qui divisent la pauvre Église du Seigneur !
(*) Il n’est pas dit ici : « Envers tous les hommes », quoique cela aussi soit vrai (voir 5:15).
L’apôtre avait été, sous les yeux des Thessaloniciens, un modèle de cet amour dont il parle. Il pouvait leur dire en toute vérité : « Comme nous aussi envers vous », car il le leur avait prouvé. « Comme une nourrice chérit ses propres enfants, ainsi, vous étant tendrement affectionnés, nous aurions été tout disposés à vous communiquer non seulement l’évangile de Dieu, mais aussi nos propres vies, parce que vous nous étiez devenus fort chers ». Son travail au milieu d’eux avait été le vrai « travail d’amour » : « Car vous vous souvenez, frères, de notre peine et de notre labeur ; c’est en travaillant nuit et jour pour n’être à charge à aucun de vous, que nous vous avons prêché l’évangile de Dieu » (2:7-9).
L’exercice
de l’amour fraternel a des conséquences infiniment précieuses pour l’état de
nos âmes ; on le voit dans ces paroles de l’apôtre : « Pour affermir
vos coeurs sans reproche
en sainteté
, devant notre Dieu et Père ». Ces deux
choses, avec l’amour qui en est la source, caractérisent la personne de Christ :
Il est amour
; il est le Saint
; il est irréprochable
, lui
qui n’a jamais
« rien fait qui ne se dût faire ».
Ces choses dépeignent aussi
notre position actuelle en Christ. Dieu qui nous voit en lui, nous voit
nécessairement tels que lui : « Il nous a élus en lui avant la fondation du
monde, pour que nous fussions saints
et irréprochables
devant lui
en amour
» (Éph.
1:4).
Elles dépeignent encore notre
condition future : « Pour vous présenter saints
et irréprochables
et irrépréhensibles
devant lui » (Col. 1:22). « Le Christ a aimé
l’assemblée…
afin que lui se présentât l’assemblée à lui-même, glorieuse, n’ayant ni tache,
ni ride, ni rien de semblable, mais afin qu’elle fût sainte
et irréprochable
» (Éph. 5:27).
Mais un chrétien ne peut se
borner à savoir qu’il est parfait en Christ, et qu’il sera parfait dans la
gloire. Ayant la vie divine, il cherchera à réaliser ici-bas les caractères
qu’il possède. C’est pourquoi, nous retrouvons encore ces mots, quand il est
question de notre marche
ici-bas. Telle fut avant tout la marche de
l’apôtre : « Vous-mêmes, vous êtes témoins, et Dieu aussi, combien nous
nous sommes conduits saintement
, et justement
, et irréprochablement
envers vous qui croyez, ainsi que
vous savez comment nous avons exhorté chacun de vous, comme un père ses propres
enfants » (1 Thess. 2:10). Son amour pour eux avait été la source de sa conduite
envers eux. Telle devait être aussi la marche des Philippiens. L’apôtre leur
écrit : « Je demande ceci dans mes prières, que votre amour abonde encore
de plus en plus… afin que vous soyez purs
et que vous ne bronchiez pas
jusqu’au
jour de Christ » (Phil. 1:9, 10).
Cette vérité quant à notre
marche chrétienne est de toute importance. Souvenons-nous que notre
sainteté pratique découle de notre amour
, et que la première n’existe pas où le second est absent. L’amour
fraternel nous lie à la famille de Dieu et nous sanctifie, en nous séparant
moralement de ce qui n’est pas né de lui. Dés lors nous ne pourrons aimer ou
cultiver ce que le monde recherche, et nous trouverons notre plaisir aux choses
célestes avec ceux qui les connaissent et les aiment. Lorsque l’amour fraternel
s’affaiblit et que le chrétien n’y abonde plus, un certain vide se produit dans
le cœur : le monde y trouvant une place à occuper, se hâte d’en profiter ;
il s’introduit d’abord tout doucement,
secrètement pour ainsi dire, mais bientôt il règne en maître, et la sainteté,
la séparation pratique pour Dieu, finit par n’être plus qu’un mot vide de sens.
Revenons
maintenant à notre passage : « Pour affermir vos coeurs sans reproche en
sainteté devant notre Dieu et Père ». Ici, il ne s’agit pas proprement de notre
marche, comme en Phil. 1:9, 10, mais de l’état de nos
coeurs
. L’exercice de l’amour fraternel
affermit les coeurs des fidèles dans un état irréprochable et dans la sainteté
devant Dieu, en leur donnant l’heureuse conscience de ces choses. Mais comment
pourraient-ils se contenter de la manière dont ils représentent Christ
ici-bas ? Ce serait arriver en fin de compte à être satisfaits
d’eux-mêmes, et se livrer à la dangereuse illusion qu’il est possible
d’atteindre la perfection pratique dans ce monde. C’est pourquoi l’apôtre
ajoute : « en la venue de notre Seigneur, Jésus
avec tous
ses saints ». Nous ne trouverons la perfection de ces choses qu’à la venue du
Seigneur, mais soutenus par cette espérance, nous les réalisons plus
complètement en attendant d’un moment à l’autre leur pleine réalité. Les yeux
fixés sur Jésus, nous nous efforçons d’être déjà trouvés par lui tels que nous
serons quand il viendra avec tous ses saints.
Je ne puis, je ne dois pas avoir une mesure de sainteté inférieure à celle-ci. Comment ne pas marcher dans l’amour, quand je pense que le Seigneur Jésus va nous introduire tous ensemble avec lui devant Dieu le Père ? Alors l’échange d’amour entre Christ et nous, entre nous et Dieu, sera complet et remplira éternellement la maison du Père de son parfum ! Comment ne pas vivre dans la sainteté, si nous attendons d’un moment à l’autre sa venue, où le caractère de « tous les saints » répondra parfaitement au sien !
Je ne
pense pas que la venue du Seigneur soit ici la manifestation de Jésus-Christ
avec tous ses saints devant le monde
. Ce passage nous les présente dans l’acte de venir, mais comme
manifestés « devant notre Dieu et Père ». La première étape de notre voyage
céleste est notre rencontre avec lui, « sur les nuées en l’air » ; la
seconde, son arrivée avec nous dans la maison du Père et en sa présence. C’est
là que nous serons ce que nous resterons toujours, saints
, irréprochables
en amour
, comme
lui ; que nous serons non plus seulement en
Christ, mais avec
Christ et semblables à lui. C’est dans ce caractère qu’il présentera
l’assemblée à son Père, comme il se la présentera à lui-même. C’est de là que
nous sortirons avec lui pour être manifestés devant le monde.
L’attente
du Seigneur est donc le ressort, la force, l’encouragement de la sainteté quant
à l’état de nos coeurs et à notre marche. Aussi, pouvons-nous répéter avec
l’apôtre les précieuses paroles qui terminent cette épître : « Or le Dieu
de paix lui-même vous sanctifie
entièrement ;
et que votre esprit, et votre âme, et votre corps tout entiers, soient
conservés sans reproche
en la venue de notre Seigneur Jésus-Christ. Celui qui vous
appelle est fidèle, qui aussi le fera ». Amen.
Nous avons montré que la sainteté ne peut être séparée de l’amour qui en est le point de départ ; ni de la venue du Seigneur qui en est le point d’arrivée. Cette venue influe de même sur toutes les autres qualités chrétiennes, la pureté, la sobriété, la justice, la piété (1 Jean 3:3 ; Tite 2:11-13). Telle sera notre conduite, si nous attendons « la bienheureuse espérance ».
Disons
encore quelques mots de l’influence que la venue du Seigneur exerce sur nos sentiments
. Je ne parle pas de nos affections
et de notre joie
, qui sont pour ainsi dire inhérentes à l’attente du
Sauveur. Le connaître, c’est l’aimer ; l’aimer, c’est le désirer et se
réjouir de sa venue. Mais je fais allusion à ce qui nous est dit en Phil.
4:5 : « Que votre douceur
soit
connue de
tous les hommes ; le Seigneur est proche ». Ici, la douceur
est
« le caractère d’un homme qui n’insiste pas sur ses droits ». Moralement, nul
n’est autorisé à violer mes droits, à s’emparer, par exemple, de ce qui est
mien, à me chasser de chez moi, à me priver de ma famille, de ma liberté, etc.
Le Seigneur lui-même avait des droits ici-bas ; il était roi et né pour
cela ; il pouvait réclamer comme étant à lui le pouvoir, la possession de
toutes choses, les plus hautes dignités, l’hommage de tous. Mais a-t-il revendiqué
ses droits ? Non ! il s’est laissé accuser à tort, juger d’une
manière inique, et il n’a pas protesté. Il s’est vu ravir sa royauté, son
héritage, sa dignité, sa liberté, sa vie — et il n’a pas ouvert la bouche. Il a
été comme une brebis muette devant celui qui la tond.
Et nous, chrétiens, agissons-nous de même ? La moindre atteinte à nos droits nous exaspère. On nous fait tort, et cela nous parait si peu supportable que nous en appelons au monde lui-même pour nous venger de notre adversaire. Nous oublions ce précepte : « Que votre douceur soit connue de tous les hommes ». Ou plutôt, nous oublions le moyen de le réaliser. « Le Seigneur est proche ! » Comment insister sur mes droits, lorsque j’attends la venue prochaine, immédiate, du Seigneur ? Je puis les abandonner aux mains des hommes qui me les arrachent ; j’ai mieux à attendre, car je vais partager sa gloire céleste avec lui. Quelle folie ce serait, de vouloir établir mes droits et les faire reconnaître au milieu d’un monde que je vais quitter dans un instant ! Le Seigneur revendiquera plus tard mes droits dans son royaume terrestre, comme les siens propres ; mais en attendant je les abandonne ; l’Ennemi ne me les aura pas ravis pour longtemps.
L’apôtre ajoute : « Ne vous inquiétez de rien ». C’est comme si les mots : « le Seigneur est proche », reliaient ce qui précède à ce qui suit. L’attente du Seigneur me fait aussi bien abandonner mes droits, que déposer tout souci. M’inquiéterai-je d’aujourd’hui, de demain, des circonstances difficiles, des obstacles suscités par Satan, de l’état de l’Église, de la ruine du témoignage ? L’Esprit répond : « De rien ». À quoi bon s’inquiéter ? le Seigneur vient mettre fin à toutes ces difficultés. N’allez pas croire que ce soit de l’indifférence ; le chrétien ne peut être indifférent au mal : « mais, en toutes choses, exposez vos requêtes à Dieu, par des prières et des supplications avec des actions de grâces ». Les difficultés, les soucis, les angoisses poussent l’âme à la dépendance, à la prière, à la confiance ; elle remet tout à Dieu dont la paix garde notre coeur.
D’autres
passages nous montrent la consolation
que la venue du Seigneur apporte aux âmes en deuil
(1 Thess. 4:13-18), l’encouragement
dont elle comble les coeurs troublés
et craintifs (Jean 14:1-3), la patience
qu’elle communique dans les
difficultés : Et nous aussi, usons de patience, affermissons nos coeurs,
car la venue du Seigneur est proche ! (Jacq.
5:7, 8).
Les
Thessaloniciens, bien qu’ils fussent de petits enfants dans la foi, avaient
néanmoins reçu dès l’origine un grand nombre de vérités importantes. Cette
première épître fait continuellement allusion aux choses qu’ils connaissaient
déjà. « Vous savez », ce mot typique de toutes les lettres apostoliques pour
désigner la connaissance chrétienne, revient souvent dans ces chapitres. Ainsi,
pour ne pas sortir de notre sujet, les Thessaloniciens savaient
eux-mêmes « parfaitement que le jour du Seigneur vient comme un voleur dans la
nuit » (5:2). Très au fait des temps et des saisons dont la prophétie nous
entretient, ils n’avaient pas besoin qu’on leur écrivit ces choses, mais sur un point particulier, ils étaient
« dans l’ignorance » ; ils ne savaient pas ce que deviendraient, à la venue
du Seigneur, ceux des leurs qui s’étaient endormis. Quand un de leurs frères
était enlevé par la mort, ils étaient profondément affligés et semblaient ne
pas conserver pour les saints endormis, l’espérance qu’ils avaient pour
eux-mêmes (5:13).
Nous n’avons pas lieu de supposer qu’ils eussent le moindre doute sur le bonheur des âmes de ceux qui s’étaient endormis au Seigneur. Certes, ils n’auraient pas été chrétiens s’ils avaient mis ce bonheur en question ; mais eux, qui se réjouissaient à chaque instant d’être enlevés auprès du Seigneur sans passer par la mort, estimaient que les saints endormis éprouvaient une perte du fait de leur départ. Ils pouvaient penser, qu’eux Thessaloniciens, qui allaient être enlevés auprès du Seigneur, à sa venue, devanceraient avec des corps transmués et incorruptibles, ceux qui étaient morts en Christ, et que ces derniers ne les rejoindraient peut-être que plus lard, à la résurrection des justes. L’état de l’âme après la mort n’étant pas dans leur pensée l’état définitif, ils estimaient que leurs frères endormis seraient privés d’un avantage, alors qu’eux auraient, depuis longtemps peut-être, atteint la perfection (*). Au reste, leurs craintes, fruit de leur ignorance, montraient combien le premier amour était vivant dans leur coeur, car ils étaient plus affectés de la prétendue perte éprouvée par leurs frères, qu’occupés de leur propre gain.
(*) Ce sont du moins les conclusions que l’on peut tirer de la lecture attentive de ce passage.
Sur tous
ces points, l’apôtre leur donne l’enseignement clair et précis de la parole de
Dieu. Il commence par leur montrer que le sort des saints endormis ne peut se
séparer de celui de Christ. « Si nous croyons que Jésus mourut et qu’il est
ressuscité, de même aussi, avec lui, Dieu amènera ceux qui se sont endormis par
Jésus » (v. 14). Jésus-Christ est entré dans le domaine de la mort, mais pour la
vaincre ; il est sorti en résurrection de ce lieu dont il a brisé les
portes. Il a fait cela pour nous, et l’a fait si complètement, que désormais
notre passé, notre présent et notre avenir sont liés aux siens. Nous sommes
morts avec lui, ressuscités avec lui, quant à l’état de nos âmes ; il
reste encore, si nous nous endormons, la résurrection de nos corps. À quel
moment aura-t-elle lieu ? C’est ce que les Thessaloniciens devaient
apprendre. L’apôtre leur montre d’abord que les saints endormis, Dieu les
amènerait avec Christ, qu’ils ne pouvaient pas plus être séparés de lui à sa
venue qu’ils ne l’étaient dans sa mort et sa résurrection. Ensuite, par la
parole du Seigneur, il leur dévoile un mystère qui ne leur avait pas encore été
révélé, c’est qu’à la venue du Seigneur, eux les vivants ne devanceraient aucunement
ceux qui s’étaient endormis. La résurrection de ces
derniers prendrait place alors, et aurait lieu premièrement, puis
viendrait la
transmutation des saints vivants. La première résurrection se
lie donc à la venue du Seigneur pour enlever les saints.
C’est à ce moment-là que la
victoire de Christ sur la mort est confirmée, et qu’il en récolte pleinement les
fruits
. Par la résurrection de Christ, la
mort était vaincue et annulée
(2
Tim. 1:10). Par
la résurrection de « ceux qui sont du Christ, à sa venue », la mort sera « engloutie en victoire
». Il sera prouvé, d’une manière
éclatante, qu’en vertu de l’oeuvre du Sauveur elle n’a conservé aucun pouvoir,
même sur le moindre atome de la poussière des saints. Sa proie lui échappe,
sans qu’elle en puisse rien retenir. Toutefois la mort elle-même, ce dernier
ennemi, ne sera abolie
(1 Cor. 15:26) qu’au moment où
toutes choses ayant été assujetties sous ses pieds, Christ remettra le royaume
à Dieu le Père. Alors, au seuil des temps éternels, la mort et le hadès seront jetés dans l’étang de feu (Apoc.
20:14).
L’apôtre leur révèle ensuite,
que le Seigneur lui-même, descendant du ciel, donnerait le signal du rassemblement des siens et de leur départ,
signal transmis par l’archange, et proclamé par la trompette. Le départ
s’effectuerait quand tous seraient réunis, les morts en Christ ressuscités
étant les premiers au rendez-vous ; alors, tous ensemble partiraient à la
rencontre du Seigneur sur les nuées, et « ainsi
», dit l’apôtre, « nous
serons toujours avec le Seigneur ». Quelle consolation dut remplir le coeur des
Thessaloniciens à l’ouïe de ces choses !
Ce qu’ils
avaient jadis encore à apprendre, nous
le savons maintenant par la
parole de Dieu. Il pourrait sembler que, devant une révélation aussi claire,
les chrétiens de nos jours devraient attendre journellement le Seigneur.
Hélas ! il n’en est rien. L’attente du Seigneur ne peut être une chose
actuelle, si sa personne
elle-même n’a pas de
réalité pour l’âme. Les chrétiens pourraient-ils dire aujourd’hui comme l’apôtre : « Nous, les vivants, qui demeu
rons
jusqu’à
la venue du Seigneur » (4:15, 17). Il ne dit pas « demeurerons », car cette venue
est pour lui une chose présente, dont le moment peut n’être pas retardé au delà
d’une vie humaine. Le chrétien qui réalise son espérance ne s’attend pas à
mourir : « Non pas », dit-il, « que nous désirions d’être dépouillés, mais…
d’être revêtus » (2 Cor. 5:4). Il fallait à Pierre une révélation spéciale pour
savoir qu’il mourrait (2 Pierre 1:14).
Ayant oublié la venue actuelle du Seigneur, on perd aussi de vue l’immense importance de la résurrection. On s’habitue, sinon doctrinalement, du moins (ce qui est plus grave) en pensée, à considérer l’état de l’âme après la mort, comme l’état de perfection définitive pour les chrétiens. On dit d’une âme délogée : « Elle nous a devancés auprès du Seigneur », et l’on n’a pas d’autre espérance que celle d’aller la rejoindre après la mort.
Les
Thessaloniciens n’étaient pas proprement affligés de la perte qu’ils
éprouvaient par le départ des leurs ; ils croyaient que ceux qui s’étaient
endormis avaient fait eux-mêmes une perte, puisqu’ils ne se trouveraient pas
avec eux quand le Seigneur viendrait. Ils étaient affligés à la pensée qu’eux
devanceraient les saints endormis et seraient, avant eux, rendus semblables à
Christ. Ils apprennent ici, non pas que leurs frères les avaient devancés, mais
les devanceraient
à la venue du Seigneur. La mort n’était pas pour eux la fin de la vie
chrétienne, et le seul chemin pour entrer dans la béatitude céleste, tandis
que, pour beaucoup de chrétiens qui placent la perfection dans l’état de l’âme
séparée du corps, la venue du Seigneur c’est la mort, et le : « Viens,
Seigneur », signifie : être sur le point de mourir. « Ils nous ont devancés
dans le ciel où nous les
rejoindrons… », pensée dans le fond étrangère à la révélation chrétienne,
quoique bien appropriée à la connaissance d’un saint de l’Ancien Testament (2
Sam. 12:23). Or l’Écriture nous montre ici que nous ne nous rejoindrons pas
dans le ciel, mais que nous, qui demeurons en vie ici-bas, serons enlevés avec
les saints premièrement ressuscités, pour nous rendre ensemble auprès du
Seigneur. Que, dans cet heureux moment, nous nous reconnaissions les uns les
autres, je n’en doute pas (les disciples reconnurent bien sur la sainte
montagne, Moïse et Élie qu’ils n’avaient jamais vus) ; mais la
« consolation » n’est nullement dans ce fait qui préoccupe si souvent les
chrétiens. Elle est dans le fait que nous irons ensemble à la
rencontre
du Seigneur
, et que nous serons ainsi toujours
avec le
Seigneur
. Perdre la venue du Seigneur comme espérance de l’âme,
c’est donc perdre beaucoup plus qu’on ne pense. C’est perdre de vue sa
personne ; c’est envisager la mort comme fin du croyant ; c’est
considérer l’état de l’âme après la mort comme l’état définitif du
chrétien ; c’est oublier la résurrection d’entre les morts
, ou plutôt la renvoyer au jour de la résurrection des morts
et du jugement dernier ! Que de trésors perdus ! Et quand on cherche
à réveiller les chrétiens à ce sujet, il ne manque pas d’âmes qui traitent la
venue du Seigneur de chose secondaire. Secondaire ! quand c’est une vérité
à laquelle tout se rattache, et sans laquelle il n’y a ni espérance, ni
consolation véritable, ni assurance, tandis que, pour qui attend le Seigneur,
sa venue est le signal de la résurrection, du rassemblement des saints, d’une
victoire entière sur la mort, d’une conformité éternelle avec lui !
Ces
passages nous présentent un aspect nouveau de la venue du Seigneur : son
apparition comme « fils de l’homme », pour juger les vivants
sur la terre. Apparu autrefois
en grâce, pour souffrir, pour être rejeté des Juifs et des nations, puis
crucifié, le fils de l’homme, auquel Dieu a « donné tout le jugement »,
reviendra, et la vengeance qu’il tirera de ses ennemis sera terrible. Matt.
24:1-31, décrit les signes prophétiques qui précéderont et accompagneront la
venue du Messie, en rapport avec le peuple juif qui l’a rejeté. Ayant déjà
montré dans un article précédent l’application pratique de la prophétie à nos
consciences, je puis me dispenser d’aborder de nouveau ce sujet. Qu’il suffise
de mentionner ici que les « signes
» de Matt. 24 n’ont aucun rapport
avec le lever de l’étoile du matin, c’est-à-dire avec la venue du Seigneur en
grâce, mais qu’ils précèdent l’apparition du Soleil de justice. Il y aura sur
la terre, au temps de la fin, un corps de témoins juifs, le vrai Israël, le
« résidu » de la prophétie, qui sera averti par des signes du jugement imminent de ses
persécuteurs, et de sa prochaine délivrance. En ce même temps, une innombrable
multitude d’entre les nations (non pas hélas ! de la chrétienté apostate),
sera convertie par « l’Évangile du règne ». Ces croyants accepteront pour
Seigneur celui qui sera sur le point de paraître comme fils de l’homme, juge et
roi, et se soumettront à lui. Ils seront bénis pour avoir écouté et secouru le
résidu d’Israël, au temps de sa tribulation (Matt. 25:31-46).
Les v.
32-34 du chap. 24, se rapportent aux disciples juifs de la fin. Le Seigneur
leur dit : « Quand vous verrez toutes ces choses, sachez que cela est
proche, à la porte » (v. 33) et : « Cette génération (juive) ne passera
point que toutes ces choses ne soient arrivées » (v. 34). Cependant les vérités
contenues dans ces versets dépassent de beaucoup la sphère du peuple d’Israël.
Quand le fils de l’homme viendra, il ne trouvera le monde changé ni dans son caractère,
ni dans ses occupations. Les hommes seront les mêmes qu’aux jours de Noé. « Dans
les jours avant le déluge, on mangeait et on buvait, on se mariait et on
donnait en mariage,… et ils ne connurent rien, jusqu’à ce que le déluge vint
et les emporta tous
». Un seul, Noé, le huitième homme de foi, entra dans
l’arche avec sa maison et fut « laissé », pour devenir la souche d’une race
nouvelle dans un monde purifié par le jugement. Il en sera de même à la fin des
temps. Le jugement, distinguera les justes des méchants. Ces derniers seront
« pris », comme autrefois les hommes iniques, tandis que, pareils au juste Noé,
les autres seront laissés.
Mais il importait tout
particulièrement au Seigneur, de faire connaître aux disciples qui l’entouraient,
l’attitude qu’ils avaient à prendre à l’égard du retour du « fils de l’homme ».
Ce serait un retour inopiné
. Nul ne pouvait en savoir, ni le
jour ni l’heure, pas même les anges des cieux. Cette connaissance était réservée
au Père seul (v. 36). La proximité
de ce jour se révélerait par des
signes (v. 33), mais tous en ignoraient la date. Ce qu’ils devaient savoir,
c’est que le fils de l’homme viendrait subitement comme un voleur
(v.
43). Vous avez donc à veiller, dit le Seigneur, car le voleur vient dans la
nuit, et « vous ne savez pas à quelle heure votre Seigneur
vient ». Le
fils de l’homme, dont la venue allait surprendre les hommes comme un voleur,
n’a pas ce caractère pour les disciples : il est leur Seigneur
, et
c’est lui qu’ils doivent attendre dans une continuelle vigilance.
Ces choses
n’intéressent-elles que les disciples juifs ? 1 Thess. 5, nous montre
qu’elles s’appliquent aussi aux chrétiens. « Mais pour ce qui est des temps et
des saisons, frères, vous n’avez pas besoin qu’on vous en écrive ». Les
Thessaloniciens connaissaient par la prophétie les signes de la venue du Fils
de l’homme
, en opposition avec la bienheureuse venue du Fils de Dieu
,
dont le chap. 4 les avait entretenus. « Car vous savez vous-mêmes, parfaitement
que le jour du Seigneur vient comme un voleur dans la nuit
». Les hommes seront atteints par une subite destruction.
« Mais vous, frères, vous n’êtes pas dans les ténèbres, en sorte que le jour
vous surprenne comme un voleur ; car vous êtes
tous des fils de la lumière et des fils du jour
; nous ne sommes
pas de la nuit ni des ténèbres ».
La raison
pour laquelle le jugement ne peut nous atteindre, c’est que nous appartenons
déjà à ce jour qui est encore à venir, ayant été délivrés du pouvoir des
ténèbres et engendrés pour être des fils de lumière. En quoi donc le jour du
Seigneur touche-t-il nos consciences ? L’Esprit Saint ajoute : « Ainsi
donc ne dormons pas comme les autres, mais veillons et soyons sobres ; car
ceux qui dorment, dorment la nuit, et ceux qui s’enivrent, s’enivrent la
nuit ; mais nous qui sommes du jour, soyons sobres ». Dormir et nous
enivrer serait renier notre caractère de fils du jour
. Nous n’avons que ce motif, mais
combien puissant pour veiller et pour refuser toutes les boissons capiteuses
par lesquelles le monde et Satan cherchent à endormir nos âmes. Nous
appartenons à une autre sphère, à celle de la lumière éternelle !
Nos
veilles seront-elles remplies de la crainte que la colère ne nous atteigne
nous-mêmes ? Nullement, car nous n’avons pas à nous défendre du jugement,
mais du monde qui sera jugé : « Revêtant la cuirasse de la foi et de
l’amour, et, pour casque, l’espérance du salut
; car Dieu ne nous a
pas destinés à la colère
, mais à l’acquisition du salut
par
notre Seigneur Jésus-Christ ».
La foi et
l’amour nous rendent invulnérables aux coups de Satan et du monde, en nous
attachant à Dieu, à Christ, à tout ce qui est né de lui. Quand je jouis de ces
choses excellentes, celles d’ici-bas ont perdu le pouvoir de m’atteindre.
L’espérance du salut nous remplit d’assurance en face de cette colère future
qui ne nous est pas destinée. C’est ainsi que le chrétien fidèle attend le jour
du Seigneur. Ce jour ne le touche pas personnellement ; mais il atteint sa conscience
,
et c’est une chose infiniment salutaire au milieu des dangers de toute sorte
qui menacent notre vie chrétienne.
Mais
peut-être la chrétienté professante se croira-t-elle à l’abri de ce jour ?
Elle s’en crée l’illusion, car elle se vante de porter le nom de Christ.
Qu’elle se détrompe. Sardes, qui représente la chrétienté sous sa forme la plus
éclairée, le protestantisme, reçoit cet avertissement du Seigneur :
« Souviens-toi comment tu as reçu et entendu, et garde, et repens-toi. Si donc
tu ne veilles pas, je viendrai sur toi comme un voleur
, et tu ne sauras
point à quelle heure je viendrai sur toi
» (Apoc.
3:3). La
religion la plus orthodoxe, ne sauve pas ceux qui la professent du terrible
jour du Fils de l’homme. Ils seront complètement assimilés au monde. Étant sans
la repentance qui accompagne la foi, leur sort ne différera pas de celui des
impies. Mais quant à nous, « exhortons-nous l’un l’autre » à veiller et à être
sobres !
Après la venue du Fils de l’homme, voici celle du Maître de maison. Ce passage ne nous parle ni du monde proprement dit, ni d’Israël, mais de la maison de Dieu, comme elle fut établie et organisée après le départ du Seigneur. Composée de tous ceux qui lui appartenaient par la foi, elle aurait dû être le modèle de « l’administration de Dieu » (1 Tim. 1:4) dans ce monde. Cette maison devait contenir la profession chrétienne dans sa réalité, et non la profession sans vie, fruit de l’infidélité de l’Église. Cependant, telle qu’elle est aujourd’hui, la chrétienté reconnaît encore le Seigneur pour son Maître, aussi la traite-t-il selon sa profession.
La maison
de Dieu abrite des esclaves responsables, établis par le Maître lui-même pour y
accomplir leur ministère. Comment ont-ils répondu à la confiance que le Maître
avait mise en eux ? La parole de Dieu nous l’apprend : « Le méchant
esclave (*) dit en
son coeur
: Mon maître tarde à venir ». Il commence par abandonner
l’attente du Maître. Son intelligence
accepte
peut-être encore la vérité de sa prochaine venue, tandis que son coeur
la renie. Combien cela est sérieux à considérer ! Le premier pas
du déclin est l’abandon de la venue actuelle
du Seigneur. L’esclave ne
dit point : Mon maître ne viendra pas, mais simplement : Il tarde
à venir, ce qui prouve que la venue du Seigneur n’a plus de réalité pour ses
affections.
(*) Il est utile de remarquer que, dans cette parabole, l’esclave est un être collectif.
La conséquence de son
infidélité est qu’il « se met à battre ceux qui sont esclaves avec lui »,
usurpant dans la maison du Maître des fonctions que ce dernier ne lui a
nullement conférées. Il domine sur ses compagnons de service et les traite
durement selon sa fantaisie, comme s’il était d’une autre classe qu’eux.
N’est-ce pas l’image de ceux qui s’arrogent une autorité dans la maison de Dieu
où le Seigneur seul a le droit de dominer ? — Ensuite, il se met « à manger
et à boire avec les ivrognes », c’est-à-dire qu’il s’allie avec un monde enivré
des convoitises que Satan lui présente (1 Thess. 5:7). Il n’est pas dit, comme
en Luc 12:45, que cet homme s’enivre, bien que ce relâchement y conduise tôt ou
tard ; mais il s’associe
à ce que Dieu hait et perd son caractère
de serviteur, alors même qu’il le maintiendrait peut-être encore
extérieurement.
Mais il y a dans la maison du
Maître un esclave fidèle et prudent. Il sait que son Seigneur l’a établi sur
les domestiques de sa maison, non pour qu’il
s’élève, mais afin de servir les autres, et de leur donner « leur nourriture au
temps convenable ». Cet esclave a un but en s’acquittant de sa mission, c’est
que « le maître, lorsqu’il viendra, le trouve faisant ainsi ». Heureuse espérance
qui lui suffit, car ce qui importe au Seigneur, c’est la manière dont ses
esclaves se conduisent dans sa maison en
rapport avec sa venue
. Oui,
bienheureux l’esclave fidèle : sa constance à servir les autres,
tout en servant son Maître et en l’attendant, lui fait obtenir une rémunération
à laquelle sans doute il ne songeait pas : le Maître l’établit sur tous ses biens
.
Le serviteur infidèle verra paraître son Seigneur « en un jour qu’il n’attend
pas, et à une heure qu’il ne sait pas ». Son manque de vigilance et son oubli de
la venue du Maître seront la cause même de son jugement. Il sera détruit, coupé
en deux, lui qui avait estimé qu’on pouvait séparer la profession de la vie. Il
aura « sa part avec les hypocrites », car un hypocrite est, comme lui, un homme
qui se pare d’un caractère religieux dont il n’a pas la réalité. « Là seront les
pleurs », les signes d’une douleur sans fin, « et les grincements de dents », une
éternelle et impuissante rage d’avoir perdu l’occasion, rage qui ne sera
tempérée par aucun sentiment de tendresse, car, ayant méprisé l’amour, les
réprouvés ne le comprendront jamais !
Ces
versets nous présentent le Seigneur sous l’aspect d’un Époux qui vient. Les dix
vierges sortent à sa rencontre ; elles ne forment en apparence qu’une
troupe homogène, mais composée, en réalité, de deux partis, avec des caractères
moraux entièrement opposés. « Cinq d’entre elles étaient prudentes, et cinq folles ».
Ces vierges sortent
. Dans cet acte, il n’est pas
proprement question de sa venue pour nous prendre auprès de lui, mais de notre
responsabilité, car notre devoir est d’aller à sa rencontre. Pour sortir, il
faut quitter comme Abraham l’endroit que l’on habite, son pays et sa
parenté ; oublier, comme l’épouse du Ps. 45, son peuple et la maison de
son père ; mais ce que nous quittons aurait-il quelque valeur, quelque
pouvoir de nous retenir, quand il s’agit d’aller au-devant de l’Époux ?
Les vierges sont appelées à former
son cortège
quand il
entrera aux noces. Aussi se munissent-elles de lampes, ou plus exactement de
flambeaux (voir Jean 18:3) qui doivent être alimentés
d’huile, et portent-elles dans des vases cette indispensable provision. À quoi
servirait, en effet, un cortège de nuit sans flambeaux ? Ferait-il honneur
à Celui qu’on escorte ? La personne de l’Époux ne doit-elle pas être mise
en lumière aux yeux de la foule, par ceux qui l’accompagnent ?
Les
vierges folles, en prenant leurs lampes, avaient oublié de se munir d’huile.
Personne ne s’en serait douté jusqu’à l’heure de la formation du cortège. Au
moment de les allumer, leurs lampes pouvaient même donner un semblant de
lumière ; car on les entend dire aux prudentes : « Donnez-nous de
votre huile, car nos lampes s’éteignent
», mais cette lumière ne pouvait
durer que le temps de consumer la mèche de leurs flambeaux.
Ce récit
nous présente une grande vérité : c’est que, si la profession
chrétienne appartient à tous, car les vierges folles ont les mêmes lampes que
les prudentes, la profession ne suffit nullement pour mettre en lumière la
personne de l’Époux. Sa venue démontrera que la profession seule ne vaut pas
mieux que les ténèbres les plus profondes. Ce qui donne sa valeur à la
profession, c’est la vie
qui l’accompagne. L’huile est ordinairement
dans la Parole l’emblème du Saint-Esprit, et l’Esprit et la vie sont
inséparables l’un de l’autre. La profession et
la vie forment ensemble
le témoignage
. Nous avons à rendre témoignage à l’Époux au-devant duquel
nous sommes sortis. Les vierges qui ne le font pas sont « folles ». Funeste
pensée, folie insigne, en effet, que de s’imaginer pouvoir escorter l’Époux, au
jour des noces, avec des apparences et sans la réalité du témoignage ! La
seule chose qui donne à l’escorte le droit d’entrer aux noces, c’est la lampe
avec son huile.
Cette
parabole constate encore un fait affligeant : « Comme l’Époux tardait,
elles s’assoupirent toutes
et s’endormirent ». Leur sommeil dura
longtemps… il a duré des siècles. Les vierges entrèrent, sans doute, en
quelque endroit pareil à celui dont elles étaient sorties au commencement, car
« au milieu de la nuit il se fit un cri : Voici l’époux ; sortez
à sa rencontre ». Elles avaient retrouvé un lieu favorable à leur sommeil. Au
début, le peuple chrétien avait brisé tout ce qui tendait à l’enchaîner, pour
aller à la rencontre de Jésus ; mais le monde, l’amour du bien-être, les
mille attractions du « lieu obscur », eurent bientôt amorti ce premier zèle. Or à
un moment donné, dans les siècles passés, ce cri : « Voici l’Époux », a
retenti au milieu du christianisme professant. Cependant l’Époux n’a pas encore
paru. Il s’écoule un certain temps
entre le cri et sa venue. Cet intervalle, ne l’oublions pas, suffit pour
éprouver la condition morale de chacun de nous. Les lampes des vierges folles
ont le temps de s’éteindre et de prouver, hélas ! qu’elles sont inutiles
au cortège ; les vierges prudentes ont le temps de « se préparer » et d’être
à leurs places quand l’Époux viendra. Souvenons-nous que si nos lampes ne
brillent pas avant
qu’il vienne, nous ne pourrons pas entrer aux noces
avec lui.
Je désire être bref, mais les
questions se pressent sous ma plume. Nous avons tous entendu le cri de minuit.
Nous a-t-il laissés indifférents ? Avons-nous mis à profit l’intervalle
qui nous sépare du moment de sa venue ? Serions-nous tentés peut-être de
nous assoupir et de nous endormir une seconde fois ? Souvenons-nous bien
qu’il n’y
aura pas de nouveau cri
. Le temps est court, l’instant arrive.
L’Époux va-t-il nous trouver veillant ? Serons-nous surpris par son
arrivée ? Que de questions sérieuses ! Puissions-nous y répondre par
les faits, ou plutôt par le seul fait d’être trouvés par lui comme ses témoins
.
« Celles qui étaient prêtes
entrèrent avec lui aux noces ».
Et les autres ? « Allez plutôt vers ceux qui en vendent, et achetez-en pour vous-mêmes ! » Il est trop tard ; elles ont manqué l’occasion offerte à toutes de s’en procurer sans aucun prix. « Comme elles s’en allaient pour en acheter, l’Époux vint ». Elles se hâtent maintenant, elles arrivent avec leurs flambeaux éteints ; la porte est fermée. Elles heurtent : « Seigneur, Seigneur, ouvre-nous ! » Il est trop tard ! Elles sont laissées dans les ténèbres du dehors, avec leurs lampes inutiles, séparées à toujours de Celui qui leur a dit : « Je ne vous connais pas ! »
Veillons donc ! car nous ne savons ni le jour, ni l’heure.
Toutes
les paraboles que nous venons de méditer s’occupent de l’attitude des fidèles
et des simples professants, en l’absence du Seigneur. Celle-ci insiste d’une
manière encore plus particulière sur son absence : « C’est comme un homme
qui, s’en allant hors du pays… Et aussitôt il s’en alla hors du pays ». Le
Maître s’en étant allé, qu’avons-nous à faire jusqu’à son retour ? Telle
est la question qui se pose ici. Il ne s’agit pas, comme dans la parabole du
maître de maison, d’un ministère à l’intérieur
et de « donner aux esclaves
leur nourriture au temps convenable » ; mais de trafiquer au dehors
avec les talents qu’il confie à chacun. C’est le service individuel au
milieu de ce monde. Un serviteur est autre chose qu’un témoin. Les dix vierges
devaient être les témoins de l’Époux à sa venue, mais notre service
consiste à administrer ce qu’il nous a confié, en le faisant fructifier pour lui
pendant son absence. Le Maître remet ses biens
à chacun de ceux qui ont la prétention
vraie ou fausse de le servir. Ce que sont les talents, je ne saurais
l’énumérer, car c’est tout ce qui est à lui, tout ce qu’il nous confie, tout ce
que nous pouvons employer à son service, dons, facultés, fortune, choses
matérielles ou spirituelles, peu importe leur caractère ou leur qualité. Il
remet donc les talents « à chacun selon sa propre capacité ». Lui seul en est
juge et nous mesure selon cette dernière ; c’est son affaire et non pas la
nôtre. Notre affaire est de trafiquer fidèlement de ce qu’il nous confie.
Remarquez que le Maître ne donne à ses esclaves aucun commandement, aucune direction spéciale sur la manière dont ils devront agir. Quand il leur remet les talents, il ne leur dit pas ce qu’ils doivent en faire, mais, les ayant donnés, il s’en va aussitôt hors du pays. Il en est encore de même aujourd’hui ; le Seigneur est absent dans le ciel, nous laissant ici-bas avec la responsabilité de le servir.
L’état des coeurs se manifeste bientôt. Les esclaves fidèles connaissent leur Seigneur et lui sont soumis. S’il ne les aimait pas, pourrait-il leur montrer une telle confiance en leur remettant ses biens ? Comment, après cela, douter un instant de son amour ? Aussi font-ils tout pour y répondre. Il ne leur vient point à la pensée de considérer les talents comme leur appartenant, car ils savent qu’ils ont en mains les biens de leur Maître. Pourquoi donc les leur remettre, sinon pour les faire fructifier ? Aussi désirent-ils que, lorsqu’il viendra, il soit satisfait du résultat de leur activité. Cette dernière découle évidemment pour les serviteurs fidèles, de ces quatre faits : le Seigneur est notre Maître ; il nous aime ; nous avons confiance en lui, et nous l’attendons. Son absence se prolongera « longtemps » peut-être (v. 19), mais ses esclaves l’attendent en le servant.
Ayons de tels motifs pour le
servir, et nous travaillerons pour lui ; et quand il viendra régler compte
avec nous, nous en aurons la récompense. Toutefois les esclaves fidèles ne
travaillent nullement en vue de cette
récompense
; ils ne désirent qu’une chose : c’est que le Maître reçoive
l’intérêt de ses talents et qu’il en soit satisfait.
Le méchant esclave dit :
« Maître, je te connaissais
», lui qui, avec la prétention de le
connaître, est le seul auquel le Maître soit complètement étranger ! Il le
juge « un homme dur, moissonnant où il n’a pas semé et recueillant où il n’a pas
répandu », un Maître exigeant. Certes il a le droit d’exiger, mais est-ce là son
caractère ? Ah ! comme les autres esclaves étaient mieux
instruits ! Ne le connaissant pas, celui-ci ne peut avoir ni confiance en
lui, ni intelligence de son but et de ses pensées. Il est complètement étranger
à la grâce. Sa vie étant restée stérile pour celui qu’il a si outrageusement
méconnu, il est jeté dans les ténèbres du dehors où seront les pleurs et les
grincements de dents.
Voyons maintenant quelle est la récompense des bons serviteurs ? D’abord, ayant été fidèles en ce qui leur avait été confié, ils reçoivent davantage. « Ôtez-lui donc le talent, et donnez-le à celui qui a les dix talents ; car à chacun qui a, il sera donné, et il sera dans l’abondance ». Résultat immédiat de notre fidélité, nos richesses spirituelles s’accroissent par l’usage. Dieu veuille que chacun de nous en fasse l’expérience !
Ensuite, le Maître adresse ces paroles à ses serviteurs : « Bien, bon et fidèle esclave ; tu as été fidèle en peu de chose, je t’établirai sur beaucoup : entre dans la joie de ton maître ». Il nous donne la précieuse assurance de cette approbation pour laquelle nous avons travaillé ; mais il ne veut pas rester notre débiteur. C’est « peu de chose » que notre service, il le sait bien, et nous aussi, mais il nous offre en échange une part dans son glorieux royaume. À nous pauvres esclaves, il veut octroyer encore de plus grandes bénédictions, en nous faisant partager sa propre joie. Ce qui fait ses délices à lui, deviendra nos délices pour l’éternité !
Le
Seigneur allait quitter les siens ; car définitivement le monde le
rejetait. Un complot qui devait aboutir à la croix, s’était déjà formé contre
lui (11:53-54). Sans doute les apparences contredisaient encore ce que Satan
tramait dans les ténèbres, car jamais sa « popularité » n’avait brillé d’un tel
lustre : Les foules se rassemblaient par milliers autour de Jésus, de
sorte qu’ils se foulaient les uns les autres (12:1). Mais lui voyait et connaissait
ce que recouvrait l’hypocrisie du coeur humain. C’est à ce moment, qu’en
présence de la multitude, il se met à parler à ses disciples. Il s’isole avec
ce pauvre résidu angoissé, sur lequel son départ projette déjà son ombre, et,
ouvrant tout son cœur à ses bien-aimés, les exhorte, les encourage, leur
adresse consolation sur consolation. Un volume ne suffirait pas pour méditer ce
chapitre divin ; mais une
parole y domine : « Ne
craignez pas ». Devant tout ce qui pourrait abattre ce faible troupeau, que son
Berger allait laisser comme à la merci des loups, il leur répète : « Ne
craignez pas ». La puissance et la haine des hommes qui va jusqu’à tuer le
corps, votre propre insignifiance, ne doivent pas vous inquiéter ; Dieu a
soin de vous et vous aime. Vous courrez des dangers en me confessant, mais je
vous confesserai devant les anges de Dieu. On vous traînera devant les
synagogues et devant les juges ; ne craignez pas, car la puissance du
Saint-Esprit vous enseignera. Les hommes sont contre vous : Dieu
lui-même,
et le Fils
, et le Saint-Esprit
sont pour vous. Ne soyez pas
en souci pour la vie, ne soyez pas en peine de ce que vous mangerez et de ce
que vous boirez et comment vous serez vêtus ; vous avez un Père
qui
sait que vous avez besoin de ces choses !
Il les
exhorte aussi : « Tenez-vous en garde
, dit-il, contre le levain des
pharisiens qui est l’hypocrisie ». « Voyez, et gardez-vous
de toute avarice » ; et certes, nous avons besoin
de ces tendres exhortations, mais il veut avant tout remplir de confiance ces
coeurs troublés et craintifs : « Ne craignez pas ; ne craignez
pas ! »
Puis il
introduit le passage de ce chapitre que nous désirons méditer :
« Recherchez son royaume » (v. 31 ). Le royaume de qui ? Du Père
! Ce royaume du Père n’est pas celui du fils de l’homme.
Il n’a pas, comme ce dernier, une sphère terrestre où resplendira sa gloire.
C’est le royaume céleste où le Père a son domicile. Ce nom de Père, comme il
parle au coeur d’êtres craintifs, faibles, sans défense et sans
connaissance ! Ne renferme-t-il pas sa protection, ses soins journaliers,
son amour, tout son amour pour ceux qu’il a engendrés, qu’il appelle ses
enfants ? — C’est aux lieux où ces choses se trouvent, que le Seigneur
veut élever l’âme de ses disciples.
Oh ! comme nous serons portés au-dessus des craintes, des soucis desséchants de cette vie, si nous cherchons le royaume du Père ! Toutes les choses terrestres dont nous avons besoin « nous seront données par-dessus », car nous aurons le Père ; elles nous seront données à titre de supplément, pour parfaire le poids des choses éternelles que nous trouverons dans son royaume !
Le Seigneur résume encore une fois toutes les exhortations qui précèdent, par un mot : « Ne crains pas, petit troupeau ». Après avoir détaillé tous nos sujets de crainte, il dit : « Ne crains pas ! » Vous êtes le petit troupeau au milieu de cette multitude hostile. Cela convient bien à son amour que les enfants de Dieu ne soient que cela. Nous ne pouvons nous confier dans notre nombre, dans notre force ou notre intelligence, mais nous pouvons nous confier en lui. Et voyez quelles grandes choses le Père a faites pour le petit troupeau ! « Il a plu » — entièrement en dehors de nous, qui sommes sans mérite pour l’obtenir — il a plu « au Père » — qui nous a mis en relation avec lui-même comme ses bien-aimés — « de nous donner » — non pas de nous prêter pour un temps, en nous accordant une jouissance passagère, mais — « de nous donner », de nous donner en propre « le royaume », — le royaume du Père, le ciel ! Comme cette libre et pure grâce de Dieu, comme cet intérêt et cet amour du Père, sont faits pour remplir de confiance les coeurs du petit troupeau !
Le royaume est à nous, nous le possédons, nous pouvons y entrer aujourd’hui et demain et chaque jour.
Mais, pour en jouir, j’ai quelque chose à faire. Pour entrer dans ma maison, il me faut en avoir la clef. Le Seigneur place cette clef dans la main de ses disciples ; il leur révèle le secret par lequel ils peuvent prendre aujourd’hui possession de ce qu’ils auront à jamais.
« Vendez ce que vous avez, et donnez l’aumône ; faites-vous des bourses qui ne vieillissent pas, un trésor qui ne défaille pas, dans les cieux, d’où le voleur n’approche pas, et où la teigne ne détruit pas ; car là où est votre trésor, là aussi sera votre coeur ». Le secret qu’il me confie est de n’avoir ici-bas rien que je possède en propre, de rompre tous les liens qui me rattachent aux choses terrestres en les considérant comme des entraves, et d’employer ces choses, dont il laisse l’administration entre mes mains, à donner l’aumône, — à faire du bien aux pauvres et aux déshérités, devenant ainsi comme la main du Père qui sait qu’ils ont besoin de ces choses. Alors nous nous faisons un trésor dans les cieux ; nous montrons par nos actes que les biens incorruptibles ont seuls de la valeur, et quand nous avons, pour ainsi dire, constitué notre trésor, nos coeurs le suivent. Ces trois choses se lient : le renoncement, l’acquisition du trésor, et le coeur suivant le trésor. Si je me fais « des bourses qui vieillissent », mon coeur s’y attachera nécessairement. Un beau jour, elles périssent et me sont dérobées. Alors, pauvre coeur misérable, que deviens-tu, quand ton trésor a disparu ?
Mais, notre coeur ayant suivi
notre trésor, nous avons encore une chose à faire. « Que vos reins soient
ceints, et vos lampes allumées ; et soyez vous-mêmes semblables à des
hommes qui attendent leur maître, à quelque moment qu’il revienne des noces,
afin que, quand il viendra, et qu’il heurtera, ils lui ouvrent aussitôt ». Nous
avons à prendre ici-bas une certaine attitude en attendant celui qui nous a
quittés, mais qui est sur le point de revenir. On peut avoir les reins ceints
pour le service
, pour la marche
, pour le combat
et pour le
culte
. Dans ce passage, ils doivent être ceints pour l’attente
.
Nous avons à veiller sur nos pensées, sur nos affections, sur tout ce qui
pourrait nous distraire et nous empêcher d’entendre les pas de l’époux qui
s’approche. C’est bien l’attitude d’un serviteur, mais d’un serviteur qui se
tient près de la porte, attentif au moindre bruit, pour ouvrir aussitôt que la
main du maître heurtera. Les lampes allumées ne sont pas ici le témoignage,
mais la vigilance qui combat contre le sommeil. Que nos reins soient donc
ceints et nos lampes allumées, en sorte qu’il nous trouve veillant, car avec
ces deux choses nous attendrons le Seigneur.
Cette expression est bien frappante : « À quelque moment qu’il revienne des noces ». Sans doute, la relation de l’Époux avec son Église ne fut révélée qu’à la suite de l’exaltation du Seigneur et de la descente du Saint-Esprit, et cela peut en quelque mesure expliquer le vague intentionnel de cette parole. Mais ne pouvons-nous pas y voir encore autre chose ?
L’événement capital de la maison, c’est le mariage du maître et le moment où il vient, ramenant son épouse. Cela introduit et établit un tout nouvel état de choses, en contraste avec ce qui a précédé. Le gouvernement et l’ordre de la maison sont désormais complets et définitifs. C’est aussi le moment de la joie du maître, son coeur satisfait ayant obtenu ce qu’il désire et se reposant enfin sur celle qu’il possède comme l’objet de ses affections. Il amène son épouse dans le lieu où elle habitera désormais, lieu orné par lui et préparé pour elle. Ce jour est aussi celui de la joie des serviteurs qui voient leur maître répandant sur tous ceux qui lui appartiennent l’expression de son bonheur et de sa satisfaction.
Voilà ce qui occupe le coeur
d’un esclave fidèle. Comment penser à autre chose ? Fera-t-il attendre à
la porte ce maître chéri et respecté ? Il tient à lui prouver que tout est
prêt pour le recevoir en ce jour de fête joyeuse et solennelle. Aussi
espère-t-il son arrivée de moment en moment. Le temps s’écoule et ne lui paraît
pas long ; son affection donne des ailes à la marche des heures. Que son
Seigneur vienne à la seconde ou à la troisième veille, « bienheureux sont ces
esclaves, que le maître, quand il viendra, trouvera veillant. En vérité, je
vous dis qu’il se ceindra et les fera mettre à table, et s’avançant, il les
servira ». Il leur donne plus que le royaume, plus que ses biens, plus même que
la joie de leur Seigneur. Ce qu’il fait pour eux dépasserait la mesure, s’il y
avait une mesure à l’amour. Nous le verrons, revêtant, lui, le Maître, les
insignes du serviteur, de ce qu’il a toujours été, de ce qu’il veut toujours
rester pour nous ; nous le verrons s’abaissant, aimant
à s’abaisser
dans la gloire ! Pourquoi ? Pour servir lui-même ses esclaves. Et
comment nous servira-t-il ? Comme lui, le serviteur par excellence, sait
servir. Ce ne sera plus la rédemption, ni le lavage de nos pieds (Marc
10:45 ; Jean 13:4) ; il nous aura devant lui, parfaits nous-mêmes
dans l’amour. Nous comprendrons cet amour sans limite et nous le laisserons
faire. Nous ne dirons pas comme Pierre : Tu ne t’abaisseras jamais à de
telles fonctions. Nous ne nous étonnerons pas de l’entendre nous dire :
Mon service est la réponse au tien : La réponse à mon service !…
Une telle parole ne peut que m’humilier profondément aujourd’hui, mais dans la
gloire je comprendrai, en l’adorant, que son service glorifie éternellement son
amour, et je le laisserai m’aimer avec délices, lui donnant en échange tous les
mouvements d’un coeur capable de sonder l’amour parfait de mon Seigneur et de
mon Sauveur.
Cette dernière parole sert d’épilogue à nos méditations. Elle nous parle de l’établissement des temps éternels. Nous en avons besoin au milieu de ce monde révolté contre Dieu, et qui court à sa dissolution. L’apôtre Pierre saisit la lampe prophétique pour nous éclairer sur l’état moral des hommes de la fin, en nous rappelant « les paroles dites à l’avance à leur sujet par les saints prophètes », qui nous ont annoncé que les impies se moqueraient de « la promesse de sa venue ». Cette venue est pour eux une fable de vieilles femmes. Ils disent que « toutes choses demeurent dans le même état depuis le commencement de la création ». Ils professent l’immutabilité de la matière, et ignorent volontairement que l’existence et la destruction du monde dépendent d’une parole de Dieu. Le monde fut créé (Hébr. 11:3), subsiste et sera détruit par cette parole (2 Pierre 3:5-7). Déjà le déluge l’a submergé une fois. Ces hommes ne veulent pas le croire, et ne voient pas que « les cieux et la terre de maintenant sont réservés par sa parole pour le feu, gardés pour le jour du jugement et de la destruction des hommes impies ». « Or le jour du Seigneur viendra comme un voleur ; et, dans ce jour-là, les cieux passeront avec un bruit sifflant, et les éléments embrasés seront dissous, et la terre et les oeuvres qui sont en elles seront brûlées entièrement ».
Cette vérité est un motif puissant pour notre conduite chrétienne : « Toutes ces choses devant donc se dissoudre, quelles gens devriez-vous être en sainte conduite et en piété ? » Attachés à cette parole, nous ne pourrons vivre avec le monde et comme lui, ni conserver des liens avec ce que nous savons devoir être entièrement brûlé.
Mais la crainte de nous
trouver liés à cet état de choses ne peut être notre seul, ni même notre
principal motif. Le jour du Seigneur sera suivi d’un autre jour, le jour de
Dieu
. C’est à cause de
lui
que « les cieux en feu seront
dissous et que les éléments embrasés se fondront ». Ce sera le jour de la pleine
et définitive stabilité de toutes choses. Nous l’attendons, car le jour du
jugement ne peut être l’objet de notre espérance. Le jour du Seigneur
introduira
le règne
de la justice
sur la terre purifiée par le jugement ; après ce
règne, quand il aura détruit « le premier ciel et la première terre », il
introduira le jour de Dieu, qui resplendira dans de nouveaux cieux et sur une
nouvelle terre dans lesquels la justice habite
.
Nous attendons ce jour, mais
nous sommes exhortés à hâter sa venue
.
Comment donc pouvons-nous le
hâter ? En manifestant dès maintenant dans toute notre conduite les caractères
stables de justice et de sainteté qui appartiennent à ce jour.
Quelles gens devrions-nous donc
être ? « C’est pourquoi, bien-aimés, en attendant ces choses, étudiez-vous
à être trouvés sans tache et irréprochables devant lui, en paix ; et
estimez que la patience de notre Seigneur est salut ».
Frères bien-aimés ! le
Seigneur vient. Nous allons le voir comme Étoile du matin, comme Sauveur, comme
Maître, comme Seigneur, comme Époux ; nous reviendrons avec lui en gloire
pour régner avec lui comme Roi, puis le jour de Dieu
apparaîtra. En
attendant, le mal règne dans le monde et nous en souffrons, si nous ne
souffrons aussi de nos propres et humiliantes expériences. Ne craignons pas et
ne perdons pas courage. Estimons que la patience de notre Dieu est salut :
que cette pensée nous soutienne. N’avons-nous pas, au milieu du bouleversement
de toutes choses, les plus puissants motifs pour « renier l’impiété et les convoitises
mondaines
,
et vivre dans le présent
siècle, sobrement
, et justement
, et pieusement
, attendant la bienheureuse espérance
et l’apparition de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur
Jésus-Christ » ?