Monard Jacques-André
ME 2000 p. 321-329
Table des matières :
2 - L’édification de l’assemblée
2.2 - La réunion de l’assemblée
3 - L’édification dans la vie de tous les jours
3.1 - L’édification par nos paroles
3.2 - L’édification par notre conduite
3.2.1 - Principes en relation avec Dieu
3.2.2 - Principes en relation avec nous-mêmes
3.2.3 - Principes en relation avec notre prochain
Deux
fois, l’apôtre Paul rappelle aux Corinthiens que le Seigneur lui a donné une
autorité « pour l’édification
et
non pas pour la destruction
» (2
Cor. 10:8 ; 13:10). Et si même, dans ses épîtres, il doit leur parler de
« verge » et de « sévérité », et leur dire qu’il
« n’épargnera pas » (1 Cor. 4:21 ; 2 Cor. 13:2, 10), il souligne
que ce n’est pas là le caractère général de son service. Au contraire, il s’emploie
de toutes ses forces à l’édification
,
et il y encourage les croyants dans la plupart de ses lettres.
Dans le sens premier du mot, l’édification, c’est la construction. Édifier, c’est bâtir, construire. Il y a « un temple saint » qui se construit au cours des siècles (Éph. 2:20-22). C’est la maison de Dieu, « l’édifice de Dieu », auquel les croyants ont à apporter leur contribution. Comme un sage architecte, l’apôtre Paul a posé le fondement, « et un autre édifie dessus ; mais que chacun considère comment il édifie dessus » (1 Cor. 3:10).
Cependant
les mots édifier
et édification
ont le plus souvent, sous la
plume de l’apôtre, un sens un peu plus large que ce qui a rapport avec la
construction de cet édifice. Il s’agit d’édifier des croyants, des assemblées,
c’est-à-dire de contribuer à leur progrès spirituel, à leur croissance dans la
foi, à leur affermissement dans la vérité. Comme quand il s’agit d’un bâtiment,
le mot édification garde toujours l’idée d’un travail progressif, effectué avec
patience. Et il s’oppose toujours à l’idée de destruction.
Les épîtres aux Éphésiens et aux Corinthiens, particulièrement, nous présentent les dons que Christ a faits à son assemblée.
Dans
la première, nous lisons : « Il a donné les uns comme apôtres, les
autres comme prophètes, les autres comme évangélistes, les autres comme
pasteurs et docteurs ; en vue du perfectionnement des saints, pour l’œuvre
du service, pour l’édification du corps
de Christ
; jusqu’à ce que nous parvenions tous à l’unité de la foi et
de la connaissance du Fils de Dieu, à l’état d’homme fait, à la mesure de la
stature de la plénitude du Christ » (Éph. 4:11-13). Ce passage nous
présente d’abord les instruments du ministère — apôtres, prophètes, évangélistes,
pasteurs et docteurs — puis le but du ministère : une croissance jusqu’à
la mesure de Christ. C’est un but qui ne sera évidemment jamais atteint sur la
terre, mais que nous devons poursuivre. Nous n’avons pas le droit d’en fixer un
autre, plus bas, qui nous paraisse plus accessible. D’ailleurs, la mesure du
but que Dieu lui-même a fixé témoigne des ressources qu’il a données pour
l’atteindre.
Le
même chapitre, un peu plus loin, nous présente l’activité des parties moins en
vue dans le corps, et en particulier « des jointures ». Grâce à
« l’opération de chaque partie dans sa mesure », il y a
« l’accroissement du corps pour l’édification
de lui-même en amour » (Éph. 4:16). Ici tous les membres du corps sont
concernés, même ceux auxquels nous ne saurions donner un nom particulier.
Conduits par le Seigneur, la tête dont tout découle, ils apportent leur
contribution à l’édification du corps. Combien sont importantes les
« jointures », alors que Satan fait tous ses efforts pour désunir !
Les Corinthiens, qui ne manquaient pas de dons de grâce (1 Cor. 1:7), se servaient, hélas ! de ce qu’ils avaient reçu pour se faire valoir. C’est un danger auquel nous sommes toujours exposés.
L’apôtre
consacre tout le chapitre 14 de la première épître à leur faire comprendre que
ce qu’ils doivent rechercher avant tout, c’est l’édification de l’assemblée.
Deux dons sont mis en relief dans ce chapitre, le don des langues
et la prophétie
.
Le premier était un signe glorieux de la puissance de Dieu qui avait fait
proclamer l’évangile de la grâce à toutes les nations. Il mettait
particulièrement en évidence celui qui l’exerçait, à cause de son caractère
miraculeux. Mais il n’apportait pas d’édification à l’assemblée, lorsqu’il s’y
déployait, à moins qu’un don d’interprète n’intervienne (v. 5). « Celui
qui parle en langue s’édifie lui-même ; mais celui qui prophétise édifie l’assemblée
» (v. 4). Le don
de prophétie avait une beaucoup plus grande valeur et devait être
particulièrement recherché. « Poursuivez l’amour, et désirez avec ardeur
les dons spirituels, mais surtout de prophétiser » (v. 1).
Le
don de prophétie est la capacité d’apporter aux hommes un message de la part de
Dieu en rapport avec leurs besoins. « Celui qui prophétise parle aux
hommes pour l’édification, et l’exhortation, et la consolation » (v. 3).
Les uns ont besoin d’être consolés, les autres d’être exhortés ou repris, les
autres encore d’être instruits ou affermis. Quelle bénédiction si tout découle
de Celui qui connaît tous les cœurs, et qui donne, par le moyen de l’un ou de
l’autre, ce qui répond aux besoins ! « Quand vous vous réunissez,
chacun de vous a un psaume, a un enseignement… : que tout se fasse pour l’édification
! » (v. 26).
« Ainsi vous aussi, puisque vous désirez avec ardeur des dons de l’Esprit,
cherchez à en être abondamment doués pour l’édification
de l’assemblée » (v. 12).
Dans
la réunion d’assemblée, l’édification ne doit pas seulement résulter de
l’exercice des dons, mais de toute action. Une prière
doit apporter de l’édification. Même si son but premier est
d’adresser à Dieu une demande, ou une louange, ou la reconnaissance, elle doit
avoir pour effet l’édification de ceux qui peuvent en dire
« l’amen ». Cela ressort du verset 17, où l’apôtre fait remarquer à celui
qui rend grâces « en langue » que son frère qui ne le comprend pas
« n’est pas édifié ». Une prière n’a pas pour but
l’enseignement, l’exhortation ou l’édification de ses
frères et sœurs, car alors on s’adresse à Dieu et non pas à eux, mais son effet
normal est l’édification.
Que
Dieu nous accorde de mieux comprendre et de mieux réaliser sa pensée quant à la
pratique de notre vie d’assemblée ! Avec confusion, méditons sur le
tableau que nous donne le livre des Actes : « Les assemblées donc,
par toute la Judée et la Galilée et la Samarie, étaient en paix, étant édifiées
, et marchant dans la crainte du
Seigneur ; et elles croissaient par la consolation du Saint Esprit »
(Act. 9:31). N’aurions-nous donc plus les ressources qu’elles avaient ?
« Qu’aucune
parole déshonnête ne sorte de votre bouche, mais celle-là qui est bonne, propre
à l’édification
selon le besoin, afin
qu’elle communique la grâce à ceux qui l’entendent » (Éph. 4:29). Les
versets qui précèdent et qui suivent montrent que l’apôtre a ici en vue notre
vie journalière, nos rapports avec les hommes, avec nos frères et sœurs ou avec
les membres de nos familles. Ce n’est donc pas seulement dans la vie de
l’assemblée que nous avons à rechercher l’édification, mais toujours.
Comme il a été souvent remarqué, les enseignements pratiques de ce chapitre 4 ne sont pas simplement des mises en garde contre le mal, mais des encouragements au bien, et cela en contraste avec la loi, dont les commandements avaient presque tous une forme négative. Dieu attend des siens, non seulement qu’ils s’abstiennent du mal, mais qu’ils fassent le bien — et qu’ils suivent ainsi les traces de leur Sauveur. Qu’aucune mauvaise parole ne sorte de notre bouche, c’est déjà quelque chose ! Mais Dieu nous demande davantage. Il désire que notre bouche dise de bonnes paroles, des paroles qui édifient, des paroles qui rendent témoignage à sa grâce et qui en sont le reflet. « Des pommes d’or incrustées d’argent, c’est la parole dite à propos » (Prov. 25:11). Nos paroles communiquent-elles la grâce à ceux qui les entendent ? Sont-elles, en quelque mesure, l’écho des « paroles de grâce » qui sortaient de la bouche de notre Seigneur ? (cf. Luc 4:22).
Il
est question de paroles propres à l’édification « selon le besoin
». Il nous faut être attentifs aux besoins de
ceux avec lesquels nous avons contact, afin que nos paroles puissent leur
apporter, de la part de Dieu, ce qui peut contribuer à leur croissance.
Nous
pouvons aussi nous édifier mutuellement par le moyen des cantiques
que nous chantons. Deux passages des épîtres nous
encouragent à chanter des psaumes
,
des hymnes
et des cantiques spirituels
, et à chanter de nos cœurs à Dieu
(Éph.
5:19 ; Col. 3:16). De cette façon, nous pouvons nous entretenir
, nous enseigner
et nous exhorter
l’un l’autre — en
d’autres termes, nous édifier mutuellement. N’y a-t-il pas lieu de regretter
que le chant des cantiques tende à être confiné aux réunions de l’assemblée, ou
à des occasions spéciales ?
« C’est
pourquoi, exhortez-vous l’un l’autre et édifiez-vous
l’un l’autre, chacun en particulier, comme aussi vous le faites » (1
Thess. 5:11).
L’épître aux Romains, au chapitre 14, et la première épître aux Corinthiens, aux chapitres 8 et 10, abordent un sujet qui a suscité des difficultés dans les assemblées du début, celui des viandes que certains croyaient pouvoir manger et dont d’autres croyaient devoir s’abstenir — qu’il s’agisse des animaux que la loi de Moïse déclarait impurs, ou d’animaux qui avaient été sacrifiés à des idoles. C’étaient des questions délicates, sur lesquelles chacun devait avoir égard à la conscience de son frère, l’un évitant de juger l’autre, et l’autre évitant de mépriser l’un (Rom. 14:3, 10).
Or
il est bien remarquable que les trois passages qui traitent de ce sujet
introduisent la pensée de l’édification mutuelle. Nous devons prendre garde à
ne pas « détruire » par notre comportement le travail de Dieu dans le
cœur de nos frères. « Poursuivons les choses qui tendent à la paix et
celles qui tendent à l’édification
mutuelle
. À cause d’une viande, ne détruis pas l’œuvre de Dieu » (Rom.
14:19, 20).
Ce serait certainement faire un mauvais usage de ces chapitres que de s’en servir pour s’octroyer la liberté de faire n’importe quoi, et pour fermer la bouche à ceux qui pourraient nous blâmer. L’ensemble de la Parole nous instruit quant à ce qui plaît au Seigneur, et notre liberté chrétienne ne doit pas être « une occasion pour la chair » (Gal. 5:13). Cela dit, il demeure qu’il y a des détails de notre vie pratique pour lesquels nous n’avons pas d’instructions spécifiques dans les Écritures, et dans lesquels nous pouvons avoir des appréciations différentes.
Pour aborder les questions de ce genre, l’apôtre nous donne des principes de trois ordres : en relation avec Dieu, avec nous-mêmes et avec notre prochain.
Toutes
nos actions doivent être faites « à
cause du Seigneur
» et en rendant
grâces à Dieu
(Rom. 14:6). « Soit donc que vous mangiez, soit que vous
buviez, ou quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu
» (1 Cor. 10:31). L’apôtre dit
ailleurs : « Et quelque chose que vous fassiez, en parole ou en
œuvre, faites tout au nom du Seigneur
Jésus
» (Col. 3:17). Ces principes de conduite sont ceux de quelqu’un
qui vit près de Dieu, et qui le fait intervenir dans toutes ses circonstances.
De plus, nous avons à nous souvenir que « nous comparaîtrons tous devant
le tribunal de Dieu » et que « chacun de nous rendra compte pour
lui-même à Dieu » (Rom. 14:10-12).
Nous avons à écouter la voix de notre conscience, qu’il ne faut jamais faire taire, et à agir sur un principe de foi.
« Que chacun soit pleinement persuadé dans son propre esprit ! » (Rom. 14:5). « Celui qui hésite » doit s’abstenir, parce que « tout ce qui n’est pas sur le principe de la foi est péché » (v. 23).
C’est
ici que s’introduit la pensée de l’édification. Tout d’abord, nous devons être
en garde contre l’esprit de jugement. Mon frère est « le domestique
d’autrui » (c’est-à-dire le serviteur du Seigneur et non le mien) et
« il se tient debout ou il tombe pour son propre maître » (Rom.
14:4). De plus, nous avons à tenir compte de l’impact de notre conduite sur
ceux qui nous observent. « Jugez plutôt ceci, de ne pas mettre une pierre
d’achoppement ou une occasion de chute devant votre frère » (v. 13).
« Si, à cause d’une viande, ton frère est attristé, tu ne marches plus
selon l’amour » (v. 15). Concernant la pierre d’achoppement et l’occasion
de chute, voir aussi 1 Corinthiens 8:9-13 et 10:28-32. Ainsi, nous devons avoir
en vue le bien de ceux qui nous entourent et chercher à leur être en aide
plutôt qu’en piège, à faire un travail constructif et non destructif.
« Que chacun de nous cherche à plaire à son prochain, en vue du bien, pour
l’édification
» (Rom. 15:1, 2).
Les
deux passages de la première épître aux Corinthiens qui traitent du même sujet
font aussi mention de l’édification. Celui du chapitre 8 nous rappelle que ce
qui règle ces questions délicates, ce n’est pas la connaissance. « La
connaissance enfle, mais l’amour édifie
»
(v. 1). Elle a sa place, et l’apôtre le dit bien clairement ailleurs, mais le
vrai moteur de l’édification, c’est l’amour. Que notre service soit toujours un
« travail d’amour », amour pour le Seigneur, amour pour les
siens !
Au
chapitre 10, l’apôtre revient sur le sujet et dit : « Toutes choses
sont permises, mais toutes choses ne sont pas avantageuses ; toutes choses
sont permises, mais toutes choses n’édifient
pas
. Que personne ne cherche son propre intérêt, mais celui
d’autrui ! » (1 Cor. 10:23, 24). Soulignons combien tout cet
enseignement fait contraste avec l’esprit légal. Ce n’est pas un ensemble de
prescriptions et d’interdictions, mais la liberté chrétienne. C’est la
manifestation de la vie de Dieu dans ceux qui la possèdent.
« Mais
vous, bien-aimés, vous édifiant
vous-mêmes sur votre très sainte foi, priant par le Saint Esprit,
conservez-vous dans l’amour de Dieu, attendant la miséricorde de notre Seigneur
Jésus Christ pour la vie éternelle » (Jude 21). Quel que puisse être
l’état de ruine de l’Église — dont Jude a brossé le sombre tableau dans son
épître — les ressources divines sont immuables. Notre foi, qui s’attache à la
parole de Dieu, est comme le fondement sur lequel nous pouvons toujours nous
édifier, afin de croître et de progresser, en attendant le jour de la
délivrance finale. Ce verset nous montre comment nous pouvons travailler à
notre propre édification, base de toute autre forme d’édification.
L’apôtre
Paul, envisageant la décadence générale qui allait suivre son départ, attire
notre attention sur les suprêmes ressources de la grâce de Dieu. Il dit aux
anciens d’Éphèse : « Et maintenant je vous recommande à Dieu, et à la
parole de sa grâce, qui a la puissance d’édifier
et de vous donner un héritage avec tous les sanctifiés » (Act. 20:32).