Monard Jacques-André
ME 1998 p. 124-128
Que veut-on dire quand on parle d’assemblées
réunies sur le terrain (ou sur la base…, sur le principe…) de l’unité du
corps
?
Rappelons d’abord que le Saint Esprit, présent sur la terre depuis le jour de la Pentecôte, lie les croyants avec Christ dans la gloire. Ce lien est double :
1°
Individuellement
, le croyant vit de
la vie de Christ ressuscité. Il est en Christ, Christ est en lui. Il est un
membre du corps de Christ (Jean 14:19, 20 ; 1 Cor. 6:17 ; 12:27).
C’est ce qui détermine son caractère céleste, et par conséquent d’étranger sur
la terre. Toute sa vie pratique devrait être un témoignage à ces grands faits.
2°
Collectivement
, les croyants
constituent le corps de Christ, dont lui-même est la Tête. La Parole souligne l’unité
de ce corps : « Nous
avons tous été baptisés d’un seul Esprit pour être un seul corps
» (1 Cor. 12:13) ; « Il y a un seul corps
et un seul Esprit »
(Éph. 4:4). Elle nous décrit les soins dont il est l’objet de la part de Christ
(Éph. 5:22-33), et nous le montre dans son fonctionnement harmonieux, sous
l’action de l’Esprit, pour sa croissance spirituelle et pour la gloire de son
Chef (Éph. 4:10-16 ; 1 Cor. 12:4-31 ; Rom. 12:3-8). Ce corps peut
être considéré dans son ensemble, ou dans son existence sur la terre à un
moment donné, ou encore dans une localité.
Sur
le plan pratique, les croyants sont exhortés « à marcher d’une manière
digne de l’appel dont ils ont été appelés », et à s’appliquer « à
garder l’unité de l’Esprit par le lien de la paix » (Éph. 4:3). Garder l’unité de l’Esprit
, c’est vivre
collectivement en conformité avec l’unité du corps de Christ. C’est traduire
dans la pratique la réalité inaltérable de cette unité. Voilà un point
essentiel du témoignage que l’assemblée est appelée à rendre sur la terre.
C’est au début du christianisme, avant que l’Ennemi ait réussi à semer la division, que nous pouvons voir l’assemblée — et en particulier l’assemblée locale — selon les pensées de Dieu. Les assemblées « étaient en paix, étant édifiées, et marchant dans la crainte du Seigneur » (Act. 9:31). Elles réalisaient une pleine communion entre elles. L’unité du corps de Christ se manifestait concrètement de diverses manières : les dons que le Seigneur avait faits pouvaient s’exercer en faveur de tous les croyants partout, et les décisions d’une assemblée locale étaient valables et reconnues en tout lieu. Au-dessus de tout, le témoignage à cette unité était rendu à la table du Seigneur : « Car nous qui sommes plusieurs, sommes un seul pain, un seul corps, car nous participons tous à un seul et même pain » (1 Cor. 10:17).
Mais des divisions sont intervenues dans ce qui aurait dû toujours manifester l’unité. Les fausses doctrines ont pullulé. L’ordre divin a été remplacé par des arrangements humains. Des organisations religieuses ont divisé les croyants tout en les mélangeant avec des incrédules. Il devint impossible de reconnaître l’une quelconque de ces organisations comme étant l’assemblée de Dieu. La nécessité de « sortir vers Christ hors du camp » s’est alors imposée (selon Héb. 13:13).
Pour
essayer de caractériser en quelques mots ce qui a eu lieu lors du réveil du
siècle passé, disons que des croyants ont été conduits à chercher à vivre la vie d’assemblée et à manifester l’unité du corps
de Christ selon les enseignements de la Parole, en dépit du fait qu’il était
impossible de le faire avec tous les croyants
.
Un
tel chemin implique notamment de « se retirer de l’iniquité » et de
« poursuivre la justice, la foi, l’amour, la paix, avec ceux qui invoquent
le Seigneur d’un cœur pur » (2 Tim. 2:19, 22). C’est ainsi seulement que
l’on peut compter sur la promesse du Seigneur : « Là où deux ou trois
sont assemblés en mon nom, je suis là au milieu d’eux » (Matt. 18:20).
Sans prétendre être l’assemblée — puisqu’on sait que beaucoup de ceux qui la
composent ne sont pas là — on se réunit comme expression de l’assemblée, en
saisissant par la foi les promesses et les ressources du Seigneur pour elle, et
en reconnaissant son autorité sur elle. Il s’agit de marcher à la lumière de la
vérité concernant l’assemblée, aussi bien sur le plan des rapports entre les
assemblées locales que sur celui du fonctionnement de l’assemblée en un lieu.
Voilà ce qu’on appelle se rassembler sur
le terrain de l’unité du corps
.
Les assemblées de chrétiens réunies de cette manière, depuis près de deux siècles, malgré l’extrême faiblesse et les nombreux manquements qui les caractérisent, cherchent à réaliser, dans la fidélité, dans l’humilité et dans la dépendance du Seigneur, ce qui aurait dû l’être de façon générale par tous les chrétiens sur la terre.
Les
assemblées réunies sur le terrain de l’unité du corps doivent naturellement se
connaître mutuellement (du moins dans un pays ou dans une région), afin de
pouvoir se reconnaître
l’une l’autre
comme étant sur ce terrain. Elles peuvent ainsi profiter en commun des dons que
le Seigneur fait pour l’édification de son assemblée, et s’adresser l’une à
l’autre des lettres de recommandation.
Ceux
qui se rassemblent ainsi portent le deuil de la ruine de l’Église, éprouvant le
déshonneur porté sur le nom du Seigneur par la division. Ils embrassent dans
leurs pensées et dans leurs cœurs les vrais croyants partout — et en
particulier dans leur localité —, se souvenant qu’ils font partie de
l’assemblée aussi bien qu’eux. Tous ces croyants ont
leur place à la table du Seigneur, même s’ils ne l’ont jamais
demandée ou si leur état et leurs associations ne permettent pas de les
recevoir.
Quant
au fait que quelques-uns puissent être réunis comme expression d’un tout, et
être ainsi reconnus de Dieu, on a en Esdras un enseignement remarquable. Des
Juifs, « tous ceux dont Dieu avait réveillé l’esprit » (1:5),
répondent à l’invitation providentielle que Cyrus avait adressée à tous ceux
qui faisaient partie du peuple de Dieu, et remontent à Jérusalem. Bien qu’ils
ne soient que quarante-deux mille, entre les centaines de mille qui demeurent
parmi les nations, ils sont considérés par Dieu comme étant
« Israël ». En effet, l’Écriture dit : « Tout Israël
se trouva dans ses
villes » (Esd. 2:70). Dans les
pensées de Dieu, le résidu représente l’ensemble du peuple, parce qu’il est là
où Dieu le veut
. Au chapitre 6, ils agissent conformément à cette
position : ils offrent « comme sacrifice pour le péché, pour tout
Israël, douze boucs, selon le nombre des tribus d’Israël » (v. 17), bien
qu’ils ne soient vraisemblablement que des ressortissants de Juda, Benjamin et
Lévi.