par J.N. Darby
Table des matières :
Pour bien comprendre la pensée de l’Esprit Saint touchant l’évangile de Marc, il nous faut examiner brièvement ce que cet Esprit nous enseigne dans les quatre évangiles. Ils nous présentent Christ, mais Christ rejeté, et, en même temps, placent devant nous le Sauveur sous quatre aspects différents. Il y a de plus une différence marquée entre les trois premiers et le dernier. Les uns nous montrent Christ comme Celui que le monde aurait dû recevoir, mais qu’il a mis à mort. Dans le quatrième, nous voyons le Seigneur Jésus déjà rejeté dès le premier chapitre ; de plus, les Juifs y sont aussi considérés comme mis de côté : ceux qui sont nés de Dieu sont les seuls qui reçoivent le Seigneur. Il suit de là que, dans cet évangile, les principes de la grâce se déroulent d’une manière plus profonde. « Nul ne peut venir à moi », y lisons-nous, « à moins que le Père qui m’a envoyé ne le tire », et les brebis y sont distinctes du monde, avant qu’elles n’aient été appelées. Les trois premiers évangiles nous montrent Christ présenté aux hommes, pour en être reçu, puis ils nous donnent l’historique de l’inimitié croissante de l’homme contre lui, et enfin son rejet et sa mort.
Quant au caractère de chaque évangile, dans celui de Matthieu, le Seigneur est envisagé comme Emmanuel, le Messie promis, Jéhovah qui sauve son peuple de leurs péchés. Jésus signifie « Jéhovah le Sauveur ». Il en résulte que la généalogie de Jésus Christ commence en présentant sa relation avec Abraham et David, les deux chefs et vases des promesses, desquels devait descendre le Messie. Dans ce premier évangile, lorsque Christ est manifesté dans son vrai caractère et dans l’esprit de sa mission, il est moralement rejeté, et les Juifs, comme nation, sont mis de côté. Le Seigneur ne cherche plus de fruits dans sa vigne, mais il montre qu’il est réellement le Semeur. Il révèle le royaume, mais en mystère (c’est-à-dire comme il devait exister durant son absence) ; il révèle l’Église que lui-même bâtirait et le royaume dans son état de gloire, choses qui seraient substituées à sa présence sur la terre, et enfin nous avons, dans cet évangile, les derniers événements et les derniers discours de sa vie.
Marc place devant nous le serviteur prophète, et c’est pourquoi nous ne trouvons pas dans son récit l’histoire de la naissance du Sauveur ; l’évangile commence avec son ministère. Nous parlerons plus loin de son contenu. Dans l’évangile de Luc, le Seigneur nous est présenté comme le Fils de l’homme ; nous y trouvons un tableau de la grâce et de l’oeuvre qui se poursuit maintenant. La généalogie y remonte jusqu’à Adam. Les deux premiers chapitres nous révèlent cependant l’état du pieux et faible résidu qui se trouvait parmi les Juifs : tableau exquis de l’opération du Saint Esprit au milieu d’un peuple méchant et corrompu. Ces âmes fidèles se connaissaient bien l’une l’autre : elle attendaient la rédemption d’Israël, et la pieuse Anne qui, dans son âge avancé, venait de voir le Sauveur présenté dans le temple, selon la loi, annonçait à tous ceux qui l’attendaient, la venue du Messie si longtemps désiré. Dans le reste de cet évangile, Christ est envisagé comme le Fils de l’homme pour les gentils.
On ne trouve point du tout de généalogie dans l’évangile de Jean. La Parole, qui est aussi Dieu, apparaît en chair sur la terre. Il est le Créateur, le Fils de Dieu, le monde ne le connaît point. Les siens (les Juifs) ne l’ont point reçu, mais ceux qui le reçoivent ont le droit de prendre la place d’enfants de Dieu, étant réellement nés de lui. Christ étant présenté ici comme la manifestation de Dieu, nous le voyons, pour cette raison même, immédiatement rejeté. Cet évangile nous présente sa propre personne, ce qu’il est en lui-même. On le voit, ensuite, mettant dehors ses propres brebis et rassemblant celles d’entre les gentils ; il leur donne la vie éternelle et elles ne périront jamais. Puis, à la fin de cet évangile, nous est exposée la venue du Saint Esprit.
Mais occupons-nous maintenant de l’évangile de Marc.
J’ai déjà dit que l’évangile de Marc commence avec le ministère du Sauveur, précédé seulement du témoignage de Jean. Celui-ci prépare le chemin du Seigneur, prêche le baptême de repentance pour la rémission des péchés, et annonce un serviteur de Dieu plus glorieux que lui-même. Celui duquel il n’est pas digne de délier la courroie des sandales et qui baptisera du Saint Esprit. Le baptême de feu n’est pas mentionné ici, parce que le sujet de cet évangile est le service du Seigneur en bénédiction, et non l’exercice de son pouvoir en jugement. Le feu signifie toujours le jugement.
Le Seigneur se soumet au baptême de Jean : fait plein
d’importance et de bénédiction pour l’homme. Dans ce baptême, il prend la place
de son peuple devant Dieu. Je n’ai pas besoin de dire que le Seigneur n’avait
aucun besoin de repentance, mais il veut s’associer à son peuple dans le
premier pas que celui-ci fait dans le bien, c’est-à-dire dans le premier pas
fait sous l’influence de la Parole. Pour lui, c’était accomplir toute justice.
Partout où le péché nous avait amenés, l’amour et l’obéissance l’ont conduit
pour notre délivrance. Seulement ici
il vient avec les siens ; dans la mort
,
il a pris notre place, il a porté la malédiction, il a été fait péché. Ici
, il prend sa place comme homme
parfait, en relation avec Dieu — avec le Père, cette place qu’il a acquise pour
nous par la rédemption qui nous introduit auprès de Dieu comme fils.
Les cieux sont ouverts, le Saint Esprit descend sur l’homme, le
Père nous reconnaît pour ses enfants. Jésus fut oint et scellé du Saint Esprit,
de même que nous le sommes ; Lui
,
parce qu’il en était digne personnellement ; nous
, parce qu’il nous en a faits dignes par son oeuvre et par son
sang. Pour nous, le ciel est ouvert, le voile est déchiré, et nous crions
« Abba, Père ! » Merveilleuse grâce, amour infini Le Fils de Dieu est devenu
un homme, afin que nous devinssions fils de Dieu, ainsi qu’il le dit après sa résurrection :
« Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu ». Dessein
de Dieu glorieux et ineffable que celui de nous placer dans la même gloire et
la même relation que son propre Fils ; dans la gloire à laquelle il a droit
à cause de sa propre perfection comme Fils de Dieu ! C’est afin de montrer
« dans les siècles à venir les immenses richesses de sa grâce, dans sa bonté
envers nous dans le Christ Jésus ». Cela aura son plein accomplissement quand
sera arrivé ce que le Seigneur Jésus a dit : « Et la gloire que tu m’a
donnée, moi, je la leur ai donnée » afin que « le monde connaisse que toi tu m’as
envoyé, et que tu les as aimés comme tu m’as aimé ». Oh !, quel devrait
être l’amour des chrétiens pour le Sauveur qui, par ses souffrances jusqu’à la
mort, nous a acquis une telle position et l’assurance précieuse d’être avec lui
et semblables à lui pendant toute l’éternité !
Il est important aussi de remarquer qu’au baptême du Seigneur, la Trinité est pleinement révélée pour la première fois. Il est parlé du Fils et du Saint Esprit dans l’Ancien Testament, mais ici, où nous avons la position du second homme selon la grâce, la Trinité est pleinement révélée. En même temps, la révélation est claire ; les trois personnes apparaissent ensemble : le Fils est révélé comme homme, le Saint Esprit descend comme une colombe, et la voix du Père reconnaît Jésus comme celui en qui il prend son plaisir. Remarquons ici la différence entre la responsabilité de l’homme et le dessein de la grâce. Le dessein de Dieu était arrêté avant la création du monde, mais il l’était dans le dernier Adam, le Seigneur Jésus Christ. Au livre des Proverbes (chap. 8), nous voyons que Christ, la Sagesse, était avec Dieu, l’objet de ses délices, et que lui-même trouvait son plaisir dans les fils des hommes. Mais avant de révéler ses conseils, ou d’accomplir l’oeuvre qui devait produire tous les effets de cet amour, Dieu créa l’homme responsable, le premier Adam. Mais Adam tomba, et tous les moyens que Dieu employa à l’égard de l’homme ne firent que mettre au jour sa méchanceté jusqu’à ce que vînt le second homme, Celui dans lequel le bon plaisir de Dieu en l’homme a été manifesté.
Néanmoins l’homme n’a pas voulu le recevoir ; Christ restait seul l’objet personnel de la parfaite satisfaction de Dieu, et ainsi, dans sa personne, il a pris une position que nous trouvons révélée dans ce passage, celle de Fils de Dieu, avec les cieux ouverts sur lui, et lui-même scellé du Saint Esprit. Mais il était seul. Sur la croix, il a accompli tout ce qui était nécessaire à l’égard de notre responsabilité ; il a fait plus : il a pleinement glorifié Dieu dans son amour, sa majesté et sa vérité, et nous a acquis la participation à sa propre position, comme homme, dans la gloire de Dieu ; non pas celle à laquelle il a droit comme propre Fils de Dieu, mais nous lui serons semblables, afin qu’il soit premier-né entre plusieurs frères. Tel est le dessein de Dieu, qui a été manifesté après que l’oeuvre de Christ eut été accomplie. Quant à son accomplissement en nous sur la terre, nous en avons un exemple dans le passage que nous considérons (comp. 2 Tim. 1:9 ; Tite 1:2, 3).
Mais ce n’est pas tout. Dès que Jésus eut pris sa place comme homme devant Dieu, et qu’il eut été manifesté comme Fils de Dieu dans la nature humaine, il est conduit par la puissance du Saint Esprit dans le désert, et là, entreprend contre le diable cette lutte dans laquelle le premier Adam avait été vaincu. Il était nécessaire qu’il vainquît pour pouvoir nous délivrer. Mais, remarquez aussi que les circonstances sont, pour Jésus, très différentes de celles dans lesquelles se trouvait le premier Adam. Celui-ci était entouré de toutes les bénédictions de Dieu dont il avait la pleine jouissance. Elles étaient pour Adam un témoignage évident et présent de la faveur de Dieu. Christ, au contraire, était dans le désert avec la conscience que Satan régnait maintenant sur l’homme ; tout ce qui fait le bien-être extérieur de la vie manquait ; extérieurement, il n’y avait aucun témoignage de la bonté de Dieu, loin de là.
Marc ne donne pas les détails de la tentation ; le fait seul (fait précieux pour nous) que le Seigneur a passé à travers cette épreuve, est rapporté. Il se présentait lui-même selon la volonté de Dieu, conduit par l’Esprit de Dieu pour rencontrer le puissant ennemi des hommes : quelle grâce immense ! Il avait montré d’abord notre place devant Dieu, l’ayant prise dans sa propre personne, puis il entre en lutte avec le diable qui nous tenait captifs. Le troisième fait à observer est que les anges sont devenus les serviteurs de ceux qui doivent hériter du salut. Voici donc les témoignages en rapport avec la manifestation de Jésus comme homme dans la chair : notre position comme fils de Dieu, Satan vaincu, les anges nos serviteurs.
Le Sauveur (v. 14), ayant pris sa place dans le monde, commence l’exercice de son ministère, mais non pas avant l’emprisonnement de Jean. C’est après que le précurseur eut été jeté en prison, que le Sauveur commença à prêcher l’évangile du royaume. Le témoignage de Jean était très important pour attirer l’attention du peuple sur Jésus, mais il n’aurait pas été convenable qu’il eût rendu témoignage au Seigneur, après que le Seigneur avait commencé à se rendre à lui-même témoignage. « Moi, je ne reçois pas témoignage de l’homme », dit le Seigneur en parlant de Jean (Jean 5:34). Il rendait témoignage à Jean ! Mais pour lui, il était la vérité dans sa propre personne, et ses paroles et ses oeuvres étaient le témoignage de Dieu dans le monde. « Quel miracle fais-tu ? » disait le peuple, « nos pères ont mangé la manne au désert ». Et le Seigneur répond : « Je suis le pain descendu du ciel ».
Jésus, dans sa prédication, annonçait le royaume, montrait que le temps était accompli, que le royaume de Dieu s’était approché, que le peuple devait se repentir et croire à l’évangile. Il nous faut distinguer entre l’évangile du royaume et l’évangile de notre salut. Christ est le centre des deux ; mais il y a une grande différence entre la prédication d’un royaume qui s’approche et celle de l’éternelle rédemption accomplie sur la croix. Il est tout à fait possible que les deux vérités soient annoncées en même temps. Nous voyons, en effet, l’apôtre Paul prêcher le royaume, mais il proclamait certainement aussi une rédemption éternelle accomplie pour nous sur la croix. Christ annonçait d’avance sa mort ; il disait que le Fils de l’homme donnerait sa vie en rançon pour plusieurs ; mais il ne pouvait pas annoncer, durant sa vie, une rédemption accomplie. Les hommes devaient le recevoir et non le mettre à mort, c’est pourquoi son témoignage a trait au royaume qui était proche.
La venue de ce royaume dans sa puissance publique a été différée, parce que Christ a été rejeté (voyez Apoc. 11:17), et ce retard dure tout le temps que Christ est assis à la droite de Dieu et jusqu’à ce qu’il se lève du trône de son Père pour venir exercer le jugement. Dieu a dit : « Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que je mette tes ennemis pour le marchepied de tes pieds » (Ps. 110). Il est néanmoins vrai que le royaume était déjà venu en mystère, selon le chapitre 13 de Matthieu, et cela continue durant le temps où Jésus est assis à la droite de Dieu. Mais quand le moment fixé de Dieu viendra, le Seigneur se lèvera, établira le royaume, et, avec sa propre puissance, jugera les vivants. Alors la paix et le bonheur seront établis sur la terre. Mais nous, qui l’avons reçu, tandis que le monde le rejetait, nous irons à sa rencontre en l’air ; nous viendrons avec lui dans sa gloire quand il apparaîtra au monde, et nous régnerons avec lui. Mais, ce qui est bien meilleur encore, nous lui serons semblables et serons toujours avec lui dans les lieux célestes, dans la maison du Père.
Le développement de ces vérités et de ces événements ne se trouve dans la parole de Dieu qu’après l’ascension du Seigneur, après que le fondement nécessaire à l’accomplissement du conseil de Dieu a été posé dans la mort du Sauveur. Ici, il annonce seulement l’approche du royaume, car les hommes auraient dû le recevoir. Comme Jésus enseignait dans toutes les synagogues, il y avait non seulement des personnes qui l’entendaient ou qui croyaient ce qu’il enseignait, mais quelques-unes aussi qui le suivaient. Et il est de la plus grande importance de remarquer ce fait. Plusieurs, dans le temps présent, professent avoir reçu l’évangile, mais combien petit est le nombre de ceux qui suivent le Seigneur dans le sentier de la foi, dans celui de l’humilité et de l’obéissance, qui caractérisaient la marche du Seigneur dans ce monde ! Efforçons-nous de le suivre ; peut-être ne pouvons-nous pas littéralement abandonner tout, comme le firent les premiers disciples, mais nous pouvons marcher dans le même esprit qu’eux, et apprécier Christ comme le tout de nos âmes, de sorte que toutes les autres choses ne soient estimées que comme des ordures afin de gagner Christ dans la gloire. Le Seigneur appelle ici des hommes à devenir pêcheurs d’hommes ; nous aussi, cherchons des âmes, afin qu’elle soient rendues capables de jouir du bonheur glorieux et ineffable que donne le Saint Esprit. Nous ne serons peut-être pas des apôtres, mais celui qui est rempli de Christ rendra témoignage à Christ : de l’abondance du coeur la bouche parle. Des fleuves d’eau vive couleront de celui qui s’abreuve de Christ.
L’évangile de Marc ne présente pas la personne d’Emmanuel et la grâce de sa mission, comme le fait Matthieu, mais retrace rapidement son ministère dans son application aux hommes. Le ministère est bien le même, mais le développement en est différent. Sa parole et ses oeuvres témoignent également de l’autorité avec laquelle il enseigne le peuple. Tandis qu’il parle, l’auditoire de la synagogue est étonné, car ses discours n’étaient pas comme ceux des scribes qui insistaient sur des opinions. Il annonçait la vérité comme quelqu’un qui la connaît et peut la présenter dans ses fondements mêmes. Les esprits malins, eux-mêmes étaient effrayés de sa présence et le conjuraient de ne pas les détruire. Ils étaient forcés néanmoins de laisser les misérables qu’ils retenaient comme une proie sous leur puissance, de sorte que le peuple disait : « Qu’est ceci ? Quelle doctrine nouvelle est celle-ci ? » Témoignage était rendu que Dieu était intervenu pour délivrer l’homme et pour lui communiquer la vérité dans sa perfection. La grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ.
Sa renommée se répand dans toute la Galilée. Laissant la synagogue, il entre dans la maison de Simon et d’André. L’apôtre Pierre était marié et sa belle-mère était malade de la fièvre. Le Seigneur la prend par la main, la fièvre disparaît, et la femme, parfaitement guérie, commence à les servir. Dès que le sabbat est passé, toute la ville se rassemble à la porte de la maison ; le Seigneur guérit les malades et chasse les démons : ceux-ci le reconnaissent, bien que les hommes ne l’aient pas fait. Mais il reste toujours le Serviteur de Dieu, et avant le lever du soleil il se retire dans un lieu solitaire afin d’y prier. Pierre le suit et, l’ayant trouvé, lui dit : « Tous te cherchent », mais Jésus, toujours serviteur, ne cherche pas les multitudes et la renommée pour lui-même ; il va ailleurs prêcher et affranchir du joug de Satan.
Il est important de remarquer que les miracles du Seigneur ne sont pas seulement un signe et une preuve de puissance, mais de la bonté agissant en puissance divine. C’est là ce qui donne leur vrai caractère divin aux miracles de Jésus. Toutes ses oeuvres étaient le fruit de l’amour, et rendaient témoignage au Dieu d’amour sur la terre. Il y a à cela une seule exception apparente, qui, après tout, est une preuve de la vérité que nous faisons remarquer. Cette exception est la malédiction prononcée sur le figuier ; mais le figuier était une figure du peuple d’Israël et, l’on peut dire, de la nature de l’homme sous la culture de Dieu ; il n’y avait point de fruits produits, mais des feuilles seulement, c’est-à-dire l’hypocrisie. C’est pourquoi il est jugé et condamné, et ne portera plus jamais de fruit. Le jardinier avait creusé autour et y avait mis du fumier, mais tout avait été vain, et il fut abandonné de Dieu. L’homme doit naître de nouveau ; il doit être créé de nouveau en Jésus Christ.
Nous avons dans ce qui suit une preuve touchante de l’amour manifesté dans les oeuvres du Seigneur Jésus. Un lépreux vient à lui bien persuadé de sa puissance, ayant vu ses miracles, ou ayant entendu parler de ses oeuvres puissantes ; mais il n’avait pas la certitude de trouver en lui la volonté de le guérir. Le lépreux dit à Jésus : « Si tu veux, tu peux ». Le Seigneur, non content de vouloir et de faire, touche le lépreux. Or la lèpre — terrible maladie ! — était une figure du péché ; celui qui en était atteint était exclu du camp comme impur, et si quelqu’un l’avait touché, il était aussi exclu, parce que ce contact l’avait souillé. Nul remède ne pouvait guérir le lépreux, l’Éternel seul en avait le pouvoir ; puis lorsqu’il avait été guéri par l’Éternel, le sacrificateur le déclarait pur, et il pouvait, après certaines cérémonies, participer de nouveau au culte divin. Ici, le Seigneur s’avance avec la puissance et l’amour de Dieu. « Je veux, sois net », dit-il. Le bon vouloir et la puissance de Dieu étaient là et s’exercent en faveur de ce pauvre homme excommunié. Mais il y a quelque chose de plus — Jésus touche le malade. Dieu est présent, Jésus ne peut être souillé, mais il est venu assez près de l’homme impur pour pouvoir le toucher — vrai Homme parmi les hommes, Dieu manifesté en chair. Dieu, mais Dieu dans un homme, l’amour même, la puissance qui peut accomplir tout ce qui est nécessaire pour délivrer l’homme de l’effet de la puissance de Satan. Une pureté que rien ne peut souiller se trouve sur la terre, mais l’amour en même temps ; c’est Dieu même qui est là, mais l’Homme aussi, agissant pour la bénédiction de l’homme. Le lépreux est guéri aussitôt, la lèpre a disparu.
Mais, bien que Dieu soit manifesté dans son oeuvre de puissance et d’amour, il ne quitte pas la position de serviteur, maintenant qu’il l’a prise. Il renvoie l’homme guéri, disant : « Prends garde de n’en rien dire à personne ; mais va, montre-toi au sacrificateur, et offre pour ta purification ce que Moïse a ordonné ». Nous pouvons encore remarquer une autre circonstance dans cette histoire : c’est la compassion dont le Seigneur fut ému quand il vit le lépreux. Dieu, dans son amour, et l’Homme touché de pitié en son coeur à cause du misérable état où il trouve l’homme : c’est ce que nous voyons souvent dans les évangiles. Le lépreux nettoyé de sa lèpre répand partout autour de lui la renommée de Jésus, de sorte que le témoignage de la puissance de Dieu, présente au milieu de son peuple, se fait sentir et est rendu manifeste aux esprits des hommes. Jésus ne cherchait pas la gloire de la part des hommes ; il était venu pour accomplir la volonté de Dieu et l’oeuvre que Dieu lui avait donné à faire. Suivi et entouré de tous, il ne peut entrer dans la ville où la foule étonnée se serait assemblée autour de lui.
Après quelques jours, quand la curiosité s’est un peu calmée, le Seigneur rentre dans la ville. Le bruit se répand aussitôt qu’il est dans la maison, et une si grande quantité de personnes s’y assemblent qu’il n’y avait plus de place pour les contenir, même dans l’espace devant la porte. Jésus leur annonce la parole, car ce service était toujours son premier objet. Il était la Parole, il était la Vérité, il était lui-même ce que sa parole annonçait et ce dont l’homme avait besoin. Sa parole aussi était confirmée par ses oeuvres, et le peuple savait qu’il possédait le pouvoir capable de les délivrer de tout mal.
On lui amène un paralytique porté par quatre personnes ; mais ne pouvant le faire arriver jusqu’à Jésus, empêchés qu’ils étaient par la foule, ils découvrent le toit — chose aisée à faire en Orient — et descendent le paralytique à la place où Jésus se trouvait. C’était une preuve évidente de leur foi ; il y avait là un profond sentiment de leur besoin, et, en même temps, la confiance en Jésus, en son amour, en sa puissance. Sans un ardent désir d’être guéri, sans une pleine confiance en la puissance et l’amour de Jésus, ils auraient été découragés par la difficulté de percer la foule et s’en seraient retournés, disant peut-être : « Nous reviendrons ; une autre fois nous arriverons jusqu’à lui ». Mais il n’y a point de difficultés pour la foi ; ses principes sont ceux-ci : le besoin de trouver un Sauveur, le sentiment de notre misère, et celui que Jésus seul peut nous guérir, que son amour est assez grand pour regarder vers nous dans notre misérable condition. C’est l’action de l’Esprit qui nous révèle Jésus ; il produit en nous un tel sentiment de notre misère, que nous sommes forcés de chercher le Seigneur, et les difficultés ne nous rebutent point, parce que nous savons que Jésus seul peut nous guérir, que son amour est suffisant ; non point, il est vrai, que nous soyons déjà sûrs d’être guéris, mais il y a assez pour nous attirer vers lui dans l’assurance qu’il le fera. Et si nous sommes déjà venus à lui, la foi produit toujours le besoin dans l’âme et l’assurance que le Sauveur répondra à notre besoin. Christ ne manque jamais d’y répondre ; il peut permettre que des difficultés surgissent afin d’éprouver notre foi, mais la foi qui persévère trouve toujours la réponse, et ce qui produit cette persévérance est le sentiment de notre besoin, si nous connaissons la pleine confiance du Seigneur. La source de tout est l’opération du Saint Esprit dans notre coeur.
Le Seigneur prend occasion du triste état du paralytique pour faire ressortir la vraie racine de tous les maux — le péché. Christ était venu, parce que le péché était dans le monde, et dans quel but sinon afin que ce péché put être pardonné ? Il est vrai que, Dieu étant juste, il fallait qu’une parfaite expiation fût faite pour que les péchés pussent être pardonnés. Mais l’Éternel, qui connaît toutes choses, pouvait administrer le pardon par le moyen du Fils de l’homme, de la manière dont il fait maintenant participer tous les croyants à un parfait pardon par le moyen de l’évangile. Quant à son gouvernement aussi, il pouvait pardonner ou laisser sous les effets de son châtiment, et les individus et la nation entière. Or, celui qui était là avait le droit et le pouvoir de pardonner les péchés sur la terre, et il en donne la preuve. Dans le Psaume 103, il est célébré comme Celui qui pardonne à Israël toutes ses iniquités et qui guérit toutes ses infirmités.
Le grand besoin d’Israël coupable était ce pardon. Christ le proclame. En rapport avec le gouvernement même de Dieu, Israël, sans le pardon de Dieu, ne pouvait être rétabli, comme peuple, dans la bénédiction. « Tes péchés te sont pardonnés », dit le Seigneur. Les scribes crient au blasphème. Mais Dieu, l’Éternel du Psaume 103, était là présent dans la personne du Fils de l’homme ; et il donne la preuve que le droit de pardonner les péchés lui appartenait, en accomplissant ce qui est dit dans ce Psaume : « C’est lui qui… guérit toutes tes infirmités ». Mais, afin que vous sachiez que le Fils de l’homme a le pouvoir sur la terre de pardonner les péchés, il dit au paralytique : « Je te dis, lève-toi, prends ton petit lit, et va dans ta maison ». Le malade guéri se lève, prend son lit et s’en va. Le pardon et la puissance de guérir étaient venus sur la terre dans la personne du Fils de l’homme, de Celui qui, ayant la puissance et les droits divins, était descendu ici-bas dans l’humiliation pour apporter l’amour et la puissance de Dieu à l’homme pécheur, aux misères fatales de l’âme, et le démontrait en délivrant le corps des souffrances que le péché avait introduites.
Dieu était présent en amour. Le pouvoir de guérir était là, mais l’importante vérité, c’est que le pardon des péchés se trouvait sur la terre. C’est la première grande vérité de l’évangile. Ce qui est annoncé par Christ dans notre chapitre est maintenant proclamé dans l’évangile qui présente le moyen de réconcilier la justice de Dieu avec le pardon gratuit, le pardon des péchés complet et permanent, manifesté clairement devant les hommes dans les paroles du Seigneur. La rémission des péchés est annoncée, fondée sur l’oeuvre du Sauveur. Mais si tel est l’esprit de l’évangile, si telle est l’oeuvre de Jésus, il doit venir appeler les pécheurs, il doit se faire leur ami, afin qu’ils aient confiance et croient dans cette grâce, et afin que le monde connaisse le vrai caractère du Sauveur.
Ce qui suit, dans notre histoire, nous fait comprendre clairement la mission et le ministère de Jésus. Il appelle Matthieu qui était assis au bureau de recette. Les Juifs haïssaient ces impôts, non seulement parce qu’ils devaient les payer contre leur volonté, mais bien plus encore, parce que c’était la preuve de leur assujettissement aux Gentils. Ils avaient perdu leur privilège de peuple libre comme peuple de Dieu, et quand quelqu’un de leurs concitoyens acceptait une place de collecteur des impôts, sous l’autorité des chevaliers romains, ils en ressentaient une grande irritation, et cet homme devenait un objet de haine comme perfide et traître à la nation et à la religion. Ainsi, ces publicains étaient méprisés et détestés.
Or Matthieu invite le Seigneur à manger chez lui, et beaucoup de publicains se trouvent à table avec Jésus et ses disciples. Alors les scribes et les pharisiens soulèvent cette question : Comment est-il possible qu’un docteur juste puisse être assis et manger avec des hommes impurs et des pécheurs ? Jésus les entend et leur répond avec une sagesse divine. La simplicité de sa réponse est égale à sa force : « Ceux qui sont en bonne santé n’ont pas besoin de médecin, mais ceux qui se portent mal ; je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs ». Ici, c’est la grâce qui est en activité ; l’oeuvre de Jésus présente avec la loi un contraste parfait. La loi demandait de l’homme une justice humaine Christ et l’évangile annoncent la divine grâce qui règne par la justice et qui révèle la justice de Dieu. Ici, nous avons la grâce ; quant à la justice divine, elle devait être pleinement révélée, quand Christ aurait accompli son oeuvre sur la croix, vérité aussi importante que précieuse !
Christ, le Sauveur, est venu pour chercher les pécheurs et non les justes ; en supposant même qu’il y en eût de tels, il n’y aurait aucun besoin de les chercher, mais, dans sa souveraine grâce et sa parfaite bonté, il est venu pour chercher les pécheurs ; il ne les renvoie pas, mais il les cherche, et il peut être assis et manger avec eux tout en étant lui-même parfaitement saint. C’est la manifestation de l’amour de Dieu en amour au milieu des pécheurs, afin de gagner le coeur des hommes, afin d’y produire la confiance envers Dieu, de lier toutes les facultés de l’âme à la puissance d’un objet parfait, et de la former selon l’image de ce qui la conduit et qu’elle contemple. Le bien était venu au milieu du mal, et s’était approché de la misère dans laquelle gisait l’homme déchu et, pour lui inspirer la confiance, cette bonté divine ne repoussait pas le pécheur à cause de ses péchés, mais l’invitait à venir.
La ruine de l’homme commença lorsqu’il perdit confiance en Dieu. Le diable avait réussi à persuader Ève que, si Dieu n’avait pas permis à l’homme de manger du fruit de l’arbre de la science du bien et du mal, c’est qu’Il savait qu’en le faisant l’homme serait comme Dieu, connaissant le bien et le mal ; que c’était par jalousie que Dieu lui avait défendu d’y toucher, et que si Dieu ne veut pas que nous soyons heureux, nous devons nous rendre heureux nous-mêmes. C’est là ce qu’Ève chercha, et c’est ce que cherchent tous ceux qui font leur propre volonté. Ainsi l’homme tomba et se trouve maintenant dans toute la misère qu’amène le péché, attendant le jugement de Dieu sur le péché. Mais avant d’exécuter le jugement, Dieu est venu en amour comme Sauveur, afin de montrer que son amour est plus grand que le péché et que le pire des pécheurs peut avoir confiance en cet amour qui cherche les pécheurs et s’adapte à leurs besoins, qui ne demande point la justice de la part de l’homme, mais qui lui apporte le salut et la grâce, pour le présenter finalement à Dieu comme sa justice par l’oeuvre de Christ. Il vient en amour vers les hommes pécheurs pour les réconcilier avec lui-même. Au lieu de les punir pour leurs péchés, il prend occasion de manifester l’immensité de son amour en venant à ceux qui gisaient dans le péché, et en s’offrant lui-même en sacrifice pour ôter le péché.
Dans sa vie, Christ présente cet amour de Dieu ; il est Dieu lui-même manifesté en amour aux hommes ; dans sa mort, il est un homme devant Dieu, fait péché pour nous, afin que nous devinssions justice de Dieu en lui, et que le Dieu juste, le Dieu d’amour, ne se souvînt plus jamais de nos péchés. Dans l’histoire qui est sous nos yeux, il manifeste l’amour de Dieu envers l’homme. La loi était la règle parfaite de ce que l’homme devait être comme enfant d’Adam ; elle exigeait que l’homme fût tel et prononçait la malédiction sur l’homme qui n’accomplirait pas ce qu’elle demandait. Elle mettait la sanction de Dieu sur ce qui convenait aux relations dans lesquelles l’homme se trouvait et lui donnait une règle parfaite pour se conduire dans ces relations ; règle aisément oubliée ou violée dans l’état de chute de l’homme. Elle ne donnait ni la vie, ni la force, ni non plus aucun objet pour attirer et gouverner le coeur ; elle établissait seulement la relation de l’homme avec Dieu et avec son prochain, et maudissait tous ceux qui n’observaient pas ce qu’elle prescrivait, c’est-à-dire tous ceux qui étaient sous son autorité.
La chair ne se soumet pas et ne peut se soumettre à la loi de Dieu ; ainsi, tout en établissant l’autorité de la loi et la malédiction même, puisque Christ, le Sauveur, a porté celle-ci, la grâce doit nécessairement apporter un entier changement dans les voies de Dieu. Le pardon n’est pas la même chose que la malédiction, acquitter une dette est tout autre chose que d’en exiger le paiement. Il est tout à fait juste de demander celui-ci, mais si le débiteur n’a pas de quoi payer, il est mis en prison, tandis que s’il paie, il est mis en liberté. Christ a fait plus : non seulement il a payé la dette, mais il acquis la gloire pour ceux qui croient. Non seulement il libère le débiteur, mais il lui donne une fortune immense en la présence de Dieu.
Le changement est donc complet et parfait, et les paroles du Seigneur nous le montrent (v. 18-22). Les disciples de Jean et les pharisiens jeûnaient, et le Seigneur donne les raisons pour lesquelles ses disciples ne pouvaient pas le faire. L’Époux était là, ce n’était donc pas le temps de jeûner, mais les jours allaient venir où l’Époux leur serait ôté ; alors ils jeûneraient. La joie de sa présence se changerait en douleur lorsqu’il serait absent, par le besoin que cette absence créerait dans le coeur. Il y avait une autre raison. Il était impossible de faire un mélange des deux systèmes ; le vin nouveau, c’est-à-dire la vérité, et la puissance spirituelle du christianisme, ne pouvait pas être mis dans les vieux vaisseaux, dans les vieilles institutions et les cérémonies du judaïsme. Si on le faisait, le vin nouveau ferait rompre les vaisseaux et tout serait gâté ; le vin serait perdu et les vaisseaux rompus. De même, un morceau de drap neuf ne convient pas pour raccommoder un vieux vêtement ; la pièce emporte une partie du vêtement et la déchirure n’en devient que plus grande. Ainsi, il n’est pas possible de rattacher la puissance spirituelle du christianisme aux cérémonies extérieures que la nature humaine aime, parce qu’elle peut en faire une religion sans vie nouvelle et sans que la conscience soit touchée. L’homme inconverti peut ainsi, s’il le désire, faire autant de bien qu’un homme converti. Non, le vin nouveau doit être mis dans des vaisseaux neufs ; il est important de se le rappeler. La dispensation était changée ; un nouvel ordre de choses était introduit, tout était différent. La nature des choses n’était pas du tout la même dans les deux systèmes — ils ne pouvaient exister en même temps. Les cérémonies charnelles et la puissance du Saint Esprit ne pourront jamais aller ensemble. Que les chrétiens y pensent ! Le christianisme a essayé de s’embellir par ces cérémonies, et souvent même avec des formes païennes, et qu’en est-il résulté ? Il s’est adapté au monde dont ces formes étaient les rudiments, et est devenu réellement païen, de sorte qu’à peine peut-on trouver sa vraie spiritualité.
Il y avait une institution établie de Dieu, signe de son alliance avec Israël — le sabbat, — signe aussi du repos de Dieu dans la première création. Or, en Israël, l’homme était mis à l’épreuve, afin d’essayer si, avec une règle parfaite et les moyens donnés par la loi (Dieu, lui-même, étant présent dans le tabernacle ou dans le temple), il pouvait servir Dieu et accomplir la justice comme enfant d’Adam dans la chair. Le sabbat n’était pas « un septième jour », mais « le septième jour », auquel, après que tout fut achevé, Dieu cessa de créer et se reposa. La question était : l’homme peut-il partager le repos de Dieu ? La réponse est qu’il a péché et ainsi ne peut avoir aucune part dans ce repos. Sous la loi, il fut de nouveau mis à l’épreuve, et il érigea le veau d’or avant même que Moïse fût descendu de la montagne. Dieu alors usa de patience envers le peuple jusqu’à ce que celui-ci eût rejeté Christ. Mais il était ainsi devenu évident qu’une alliance entre Dieu et l’homme selon la chair était impossible ; l’homme ne pouvait donc, sur ce pied, jouir du repos de Dieu. Mais il y avait plus encore ; le sabbat de la première création était pour l’homme, et Celui qui jouissait de tous les droits de l’homme, selon les conseils le Dieu, était seigneur du sabbat : voici comment ces deux principes sont développés.
Premièrement, lorsque David, l’oint de l’Éternel, eut été rejeté, tout devint commun et profane ; de même, lorsque Christ, dont la venue constituait la dernière pierre de touche, pour éprouver l’homme dans la chair, eut été rejeté, il n’y eut plus rien de saint pour l’homme ; le sceau de la première alliance avait perdu toute sa signification. En second lieu, lorsque Christ renonce, pour un temps, à sa position en Israël comme Messie, il devient le Fils de l’homme (c’est ce que l’on voit souvent dans les évangiles, Luc 9:21, 22, etc.). Ainsi il est le seigneur du sabbat qui fut fait pour l’homme ; ainsi le signe de l’ancienne alliance disparaît par le péché de l’homme et le fait qu’il a rejeté Christ.
La résurrection de Christ est le commencement de la nouvelle création, le fondement de la nouvelle alliance basée sur son sang. C’est le signe du repos de Dieu pour nous. Satisfait, glorifié par la mort de Jésus, Dieu l’a ressuscité d’entre les morts et a trouvé en lui un lieu de repos pour son amour et pour sa justice, et nous, les objets de cet amour, nous sommes faits la justice de Dieu en Christ.
Ainsi, le premier jour de la semaine, le jour du Seigneur, celui de la résurrection, est un très précieux don de la part de Dieu, et le vrai chrétien en jouit de tout son coeur. S’il est fidèle, il se trouve dans l’Esprit pour jouir de Dieu, heureux d’être libre du travail matériel pour adorer Dieu comme son Père, et de jouir de la communion du Seigneur. C’est toujours un mauvais signe, lorsqu’un chrétien parle de sa liberté et en fait usage pour négliger le Seigneur, afin de se livrer aux travaux matériels du monde. Quelque libre qu’un chrétien soit, il n’est affranchi du monde et de la loi que pour servir le Seigneur. Que de bien ne peut-il pas faire le jour du Seigneur ! Et c’est là un troisième principe que nous trouvons dans le chapitre suivant.
La grâce était venue (Jean 1:17), Dieu lui-même était présent en grâce, et cette grâce était libre de faire le bien le jour du sabbat. Le vrai repos du Seigneur est l’exercice de l’amour au milieu du mal. Les pharisiens trouvaient que ce n’était rien de faire du mal, pourvu que leurs traditions fussent observées. Dieu garde sa liberté de faire le bien, et c’est pourquoi le Seigneur guérit l’homme qui avait une main sèche, appelant ainsi, d’une manière formelle, l’attention des Juifs sur ce grand principe.
Les pharisiens consultent avec les hérodiens (qui étaient leurs ennemis) afin de trouver un moyen de faire mourir Jésus, et le Seigneur se retire. Ainsi la dispensation de la loi est mise de côté par le christianisme qui ne peut être introduit sous les formes juives, et, en même temps, les droits de l’amour divin, c’est-à-dire de Dieu lui-même, sont maintenus. Le vrai caractère du service du Seigneur se trouve ainsi mis en évidence.
Mais ici cesse le déploiement direct de ce ministère du Seigneur. Ce qui va suivre consiste en paraboles et en faits qui le développent et montrent clairement dans quels rapports le Seigneur se trouve avec les Juifs. Il se retire loin de la haine des chefs du peuple pour poursuivre son service d’amour.
Une grande multitude, venue de toutes les parties du pays, le suit, ayant entendu parler des choses merveilleuses qu’il faisait, et en cela nous avons un tableau vivant des effets de son ministère. Le Seigneur se trouve obligé d’avoir à sa disposition une petite nacelle sur le lac, si grande était la foule qui le pressait, car tous ceux qui étaient malades voulaient le toucher pour être guéris. Les esprits immondes aussi, quand ils le voyaient, tombaient à ses pieds, disant : « Tu es le Fils de Dieu ». Remarquez ici ce que nous trouvons souvent dans les évangiles ; c’est que les esprits immondes possédaient si complètement les personnes, que les actes de celles-ci sont attribués aux esprits, et que les démoniaques disent ce que les esprits les poussent à proférer, comme s’ils le faisaient d’eux-mêmes. L’âme et le corps étaient si entièrement possédés par l’esprit immonde, que la personne possédée regardait comme étant ses propres pensées ce qui lui était inspiré par cet esprit. La possession était complète. Es-tu venu pour nous tourmenter avant le temps ?… « Je te connais, tu es le Saint de Dieu » ; voilà ce que disaient souvent les esprits immondes. Mais le Seigneur ne voulait pas recevoir le témoignage des démons, ni leur permettre de le faire connaître.
Le Seigneur monte sur une montagne, afin d’être pour un peu de temps seul, loin de la foule ; il appelle à lui ceux qu’il voulait et ils viennent. Dans l’évangile de Luc, nous lisons qu’il passa toute la nuit en prières avant de nommer les apôtres. Luc présente davantage le Seigneur sous son côté humain, ce qui est très important à sa place. Jésus priait quand les cieux lui furent ouverts ; il priait quand il fut transfiguré ; et lorsqu’il était dans l’angoisse du combat en Gethsémané, il priait plus instamment. Dans l’évangile de Marc, nous avons plutôt la suite de son ministère ; il s’associe d’autres serviteurs pour continuer et étendre son oeuvre. Ils devaient être avec lui, et ensuite ils sont envoyés pour prêcher l’évangile avec puissance, guérir les malades et chasser les démons. Remarquez que non seulement Christ faisait des miracles, mais qu’il pouvait donner à d’autres le pouvoir d’en accomplir. Les apôtres, plus tard, pouvaient imposer les mains à un homme, afin qu’il reçût le Saint Esprit, mais ils ne pouvaient donner à d’autres la puissance d’accomplir des miracles et de chasser les démons. Cela est beaucoup plus que de faire des miracles ; c’est la puissance et l’autorité de Dieu. Le Seigneur donne aussi des noms à quelques-uns de ses disciples — c’est une marque d’autorité suprême — et il le fait selon la connaissance qu’il avait de leur caractère, avant même d’en avoir fait l’expérience.
Nous voyons, en même temps, de quelle manière était reçu le témoignage du Seigneur. Ses proches le croient hors de sens, et les chefs du peuple attribuent ses oeuvres merveilleuses à la puissance de Satan. Oh ! quel monde que celui où nous vivons ! Dans l’activité de la bonté divine, l’homme ne voit autre chose que folie et oeuvre du diable ! Mais assurément Satan ne peut chasser Satan ; c’est là ce qui serait une folie réelle. Si les biens d’un homme fort lui sont enlevés, il est clair que c’est parce qu’un plus fort que lui l’a réduit à l’impuissance. Dieu en soit loué ! Mais ce péché — le blasphème contre le Saint Esprit — ne peut être pardonné. Aussi longtemps qu’ils disaient « Nous ne croyons pas ; cet homme ne garde pas le sabbat ; il nous trompe », bien que ce fût très mal, cependant cela pouvait être pardonné ; mais les scribes reconnaissaient en Jésus l’exercice d’une puissance plus grande que celle des démons, et, au lieu d’y voir le doigt de Dieu, ils l’attribuaient au prince des démons — ils appelaient l’Esprit Saint un démon. C’était la fin de toute espérance pour Israël, quant à sa responsabilité. La grâce pouvait pardonner à la nation, et c’est ce qui aura lieu lorsque le Seigneur reviendra en gloire, mais maintenant l’histoire d’Israël, comme peuple responsable, a pris fin.
C’est pour cette raison que le Seigneur renonce à toute relation selon la chair avec le peuple. Sa mère et ses frères viennent pour le voir, mais le Seigneur ne veut pas les reconnaître. Il introduit la parole pour former de nouveaux liens avec les âmes, mais tout lien avec Israël est rompu. Sa mère n’a pas de droit sur lui ; il refuse de répondre à son appel. « Qui est ma mère, ou qui sont mes frères ? » dit-il, et regardant autour de lui ceux qui l’entouraient, il ajoute : « Voici ma mère et mes frères ; car quiconque fera la volonté de Dieu, celui-là est mon frère, et ma soeur, et ma mère ». Ici se trouve formulée l’interruption des rapports du Seigneur avec le peuple comme tel. La patience du Seigneur continua à déployer la bonté de Dieu jusqu’à la dernière Pâque ; mais tout était réellement fini pour le peuple ; sa condamnation ne pouvait manquer d’être prononcée ; le Seigneur ne chercha pas plus longtemps du fruit dans sa vigne.
Assis dans une nacelle, près du bord de la mer, le Seigneur présente la parabole du Semeur qui sort pour semer ce qui, reçu dans le coeur, portera, par grâce, le fruit que Dieu demande. Il n’avait pas été trouvé de fruit dans la vigne, lorsque l’homme, tel qu’il était dans la chair, avait été éprouvé, sous l’ancienne alliance, la loi étant écrite sur des tables de pierre. C’est pour cela que le Seigneur maudit le figuier qui ne portait que des feuilles et point de fruit. Le jardinier l’avait déchaussé et y avait mis du fumier ; le Seigneur avait fait tout ce qu’il était possible de faire, mais en vain ; c’est pourquoi l’arbre devait être coupé. Vérité solennelle ! La grâce s’élève au-dessus du péché, mais en lui-même l’homme est perdu quant à sa responsabilité. Le Seigneur commence à enseigner le peuple par des paraboles, disant : « Un semeur sortit pour semer ». Comme nous l’avons dit, il ne cherche plus du fruit en l’homme sur la terre, ni chez son peuple, mais il sème ce qui portera du fruit.
Pendant que le semeur jette la semence, quelques grains tombent sur le chemin, quelques-uns dans un terrain pierreux, d’autres parmi des épines, et enfin d’autres dans une bonne terre. Il n’est pas question ici de doctrine, mais des faits qui résultent de ce que la parole du royaume est semée et qui se présentent d’eux-mêmes. Il est question de faits extérieurs. Trois parties de la semence ne portent pas de fruit. Quand la Parole est semée dans le coeur, dans le premier exemple, elle reste à la surface du sol, elle ne pénètre pas dans le coeur ; le diable alors l’enlève et il n’y a point de fruit qui soit porté. Dans le second exemple, la Parole est reçue avec joie ; les auditeurs sont contents d’entendre le doux son de la grâce, qui annonce le pardon et le royaume ; mais quand la Parole apporte avec elle l’affliction ou la persécution, ils l’abandonnent. L’auditeur l’avait reçue avec joie ; il l’abandonne quand l’affliction survient ; c’est que la conscience n’a pas été amenée en la présence de Dieu ; elle ne s’est pas sentie troublée devant lui. C’est dans la conscience que la parole de Dieu jette ses racines, parce qu’elle révèle la présence de Dieu et qu’ainsi la conscience est éveillée. Dieu lui-même est révélé au coeur qui se trouve en sa présence avec le sentiment d’y être. Le jugement de soi-même s’ensuit, les ténèbres se dissipent, et la lumière de Dieu luit dans le coeur. Lorsque la conscience a été ainsi exercée, l’évangile apporte la joie, car il donne la réponse de Dieu aux besoins de l’âme. Quels que soient l’amour et la grâce de Dieu, lorsqu’ils sont révélés, ils ne produisent pas d’abord la joie, parce que la conscience est atteinte ; la lumière pénètre dans l’âme, parce que Dieu est lumière. L’amour — car Dieu est amour — inspire la confiance, le coeur est attiré et s’abandonne, comme il arriva à la femme pécheresse qui arrosait de ses larmes les pieds du Seigneur ; mais la conscience, n’étant pas purifiée, n’éprouve point de joie. Si la seule proclamation du pardon produit de la joie, il est à craindre que la conscience n’ait pas été réveillée. L’intelligence — peut-être un sentiment naturel d’affection — a compris la merveilleuse histoire de l’amour et du pardon rapportée dans l’évangile, mais l’oeuvre n’est qu’à la surface et disparaît.
Une troisième partie de la semence tombe parmi les épines, et les épines en croissant l’étouffent, et elle ne porte aucun fruit. Enfin, ce qui tombe dans une bonne terre porte du fruit en différentes proportions. L’objet de ce discours n’est pas de montrer comment la chose a lieu ; il est question seulement de l’effet produit. Sans doute, c’est la grâce qui a agi, mais le fait seul est rapporté. Dans ce dernier cas, nous voyons l’activité de la grâce dans le coeur, en ce que la semence croît et porte du fruit, et continue de croître.
Celui qui a vraiment reçu la Parole dans le coeur est propre à la communiquer à d’autres. Il peut n’être pas doué pour la prédication, mais il aime la vérité, il aime les âmes, il a à coeur la gloire du Sauveur, et la lumière qui a été allumée en lui doit éclairer tout ce qui l’entoure. Lui aussi sème selon son pouvoir, et il est responsable de le faire. Tout sera manifesté, fidélité et infidélité, par rapport à cela, comme en toute autre chose. Dieu envoie la lumière dans le coeur, afin qu’elle soit communiquée à d’autres, et non afin qu’on la cache. Nous recevrons davantage, si nous sommes fidèles à communiquer ce que nous possédons, et, s’il y a de l’amour en nous, nous ne manquerons pas de le faire. La vérité et l’amour sont venus par Christ, et à moins que le coeur ne soit rempli de Christ, la vérité ne sera pas manifestée ; si on a le coeur rempli de soi-même ou d’autres choses, Christ ne peut être manifesté. Si Christ — amour et vérité — est dans le coeur, la vérité brillera au-dehors pour la bénédiction d’autres ; nous-mêmes nous serons bénis, et il nous sera donné davantage. Il y aura dans l’âme de la liberté et de la joie. Mais à l’homme qui ne fait pas profiter les autres de la lumière qu’il a, ce qu’il possède déjà lui sera ôté.
Nous voyons encore ici que le ministère du Seigneur parmi les Juifs a pris fin. « À vous il est donné », dit-il à ses disciples, « de connaître le mystère du royaume de Dieu ; mais pour ceux qui sont dehors, toutes choses se traitent par des paraboles, afin qu’en voyant ils voient et n’aperçoivent pas, et qu’en entendant ils entendent et ne comprennent pas : de peur qu’ils ne se convertissent et que leurs péchés ne leur soient pardonnés ». Ils sont sous le jugement de Dieu. Le Seigneur ne veut pas dire qu’une âme, individuellement, ne puisse pas croire en lui, et ainsi être pardonnée ; mais que la nation, ayant rejeté le témoignage de Jésus, était maintenant abandonnée de Dieu, laissée dehors et exposée à son jugement. Il reprend ses disciples de ce qu’ils ne comprenaient pas cette parabole, mais, dans sa grâce, il la leur explique.
Après cette explication et les divers avertissements dont nous avons parlé, le Seigneur prononce une autre parabole qui présente ses voies d’une manière très claire. Le royaume est semblable à un homme qui a jeté la semence en terre, puis il se lève et dort de jour et de nuit, et laisse croître la semence sans s’en inquiéter. La terre, d’elle-même, produit du fruit, d’abord l’herbe, ensuite l’épi, et enfin le plein froment dans l’épi. Maintenant, quand le fruit est mûr, on y met aussitôt la faucille, parce que la moisson est arrivée. Ainsi le Seigneur travaillait personnellement, semant la parole de Dieu sur la terre, et, à la fin, il reviendra et agira en personne, quand sera venu le temps du jugement pour ce monde ; mais, maintenant, dans l’intervalle, il reste assis à la droite de Dieu, comme s’il ne s’occupait pas de son champ, quoiqu’en secret, il agisse par la grâce et produise toute chose. Mais cela n’est pas manifeste. Sans être vu, il travaille pour faire croître la semence d’une manière divine, par sa grâce, tandis qu’en apparence, il laisse l’évangile croître sans avoir rien à faire avec lui jusqu’à la moisson. Alors il apparaîtra et agira lui-même ouvertement.
Il enseigne de nouveau le peuple par une autre parabole. Nous ne trouvons pas ici, comme dans le chapitre 13 de Matthieu, l’histoire complète du royaume, mais seulement ses grands principes et l’oeuvre du Seigneur, en contraste avec sa manifestation et l’établissement du royaume par sa propre présence. Il croît durant son absence, nul ne sait comment, au moins pour ce qui regarde la connaissance humaine. Le royaume donc est semblable à un grain de semence de moutarde, la plus petite de toutes les semences ; mais une fois semé, il croît et devient une grande plante, même un arbre assez grand pour abriter, dans ses branches, les oiseaux du ciel. Ainsi, la chrétienté, une petite semence, à l’origine — un homme méprisé par le monde — est devenue une grande puissance sur la terre, et étend ses rameaux de tous côtés. Ici, l’évangéliste répète que le Seigneur parlait aux foules en paraboles, qu’il ne s’adressait pas à elles d’une autre manière, mais qu’il expliquait ensuite tout à ses disciples, lorsqu’il était seul avec eux.
Dans ce qui suit, je pense que nous avons un tableau du départ de Jésus et de sa puissance ; la sécurité qui entourait les siens, même quand il semblait oublier leurs difficultés, et ensuite la relation dans laquelle il se trouvait vis-à-vis des Juifs.
Jésus, ayant renvoyé la foule, entre dans une nacelle et
s’endort. Pendant ce temps, une tempête s’élève et les vagues, se jetant dans
la nacelle, la remplissaient déjà. Saisis de crainte, les disciples réveillent
Jésus. Il se lève, reprend le vent, et dit à la mer : « Fais silence,
tais-toi ! » et tout s’apaise. Mais ensuite, il fait des reproches à ses
disciples à cause de leur crainte et de leur incrédulité. Et, en effet,
lecteur, pensez-vous que la puissance du Fils de Dieu, que les conseils de
Dieu, pussent manquer, à cause d’un coup de vent inattendu sur le lac de
Génésareth ? Impossible ! Les disciples étaient dans la même nacelle
que Jésus. Il y a là une leçon pour nous. Dans toutes les difficultés et les
dangers de la vie chrétienne, durant tout le voyage sur les vagues souvent
agitées de la mer orageuse de la vie et du service chrétien, nous sommes
toujours dans la même nacelle que Jésus, si nous faisons sa volonté. Il peut
nous sembler qu’il dort ; néanmoins, s’il permet à la tempête de s’élever,
afin d’éprouver notre foi, nous ne périrons pas, puisque nous sommes avec lui
dans l’orage. Il est évident
que ni lui, ni nous, ne saurions périr. Il peut parfois paraître indifférent à
notre sort, mais, je le répète, nous sommes avec
lui
: sa sécurité est la nôtre.
En calmant les vents et la mer, le Seigneur a montré sa
puissance sur la création ; ce qui suit va nous faire voir son pouvoir sur
les démons. Il chasse, par sa parole, une légion de démons. Mais nous voyons
ici l’effet que produit sur le monde la manifestation de sa puissance, même
lorsque cette puissance agit pour la délivrance des hommes. Les Gadaréniens le
prient de s’en aller de leur territoire, et il s’en va. Pauvre monde ! La
secrète influence de Satan s’exerçant sans bruit est plus désastreuse que son
pouvoir extérieur et visible. Celui-ci est bien triste, sans doute, mais la
puissance du Seigneur est tout à fait suffisante pour le chasser, tandis que,
d’un autre côté, la secrète influence de Satan sur le coeur chasse Jésus
lui-même. Et remarquez ceci : quand la présence de Dieu est sentie, elle
est plus terrible pour l’homme que celle de Satan ; l’homme aimerait être
délivré de celle-ci, mais il ne le peut ; mais la présence de Dieu est insupportable,
lorsqu’elle se fait
sentir ; et, en réalité, l’homme a chassé Dieu de ce monde, dans la
personne de Christ. Jésus s’est donné lui-même pour nous, cela est vrai ;
mais pour ce qui est de l’homme, dans sa responsabilité, il n’a pas voulu du
Seigneur et l’a chassé de ce monde. Je ne doute pas que toute cette scène ne
représente la fin de l’histoire du Seigneur, et que les pourceaux ne nous
présentent la fin des Juifs qui, à la fin de leur histoire, se sont précipités
dans la perdition, comme possédés du diable. Le monde n’a pas voulu recevoir
Jésus, et les Juifs sont livrés à une ruine sans espérance.
L’homme guéri est maintenant paisible ; il désire aller avec Jésus qui s’éloigne, mais cela ne lui est pas accordé. Il doit aller proclamer à d’autres ce que Dieu a fait pour lui. Nous voyons là la position des disciples et de tous les chrétien, après que le Seigneur a quitté ce monde. Ils voudraient aussi le quitter pour être auprès de lui, mais ils sont envoyés dans le monde pour annoncer l’oeuvre bénie que le Seigneur a opérée dans leurs propres personnes ; ils peuvent dire, d’après leur expérience, quelle est la grâce et la puissance de Jésus. Mais combien déplorable est l’état du monde et de l’homme ! Pour le monde, la présence de Satan est plus tolérable que celle de Dieu. Il voudrait bien réprimer les manifestations violentes de la puissance de Satan, mais il ne le peut — les liens par lesquels il pensait la réfréner sont brisés, et l’homme est aussi mauvais que jamais. Dieu n’est pas un tyran comme Satan, il est bon, rempli de grâce et, par Christ, il délivre les hommes du pouvoir de Satan ; mais comme la présence et la puissance de Dieu sont ainsi manifestées, l’homme montre que cette présence lui est insupportable, même lorsque Dieu agit pour le délivrer de tous les maux que le péché et le pouvoir de Satan ont introduits.
L’histoire qui suit révèle les vrais rapports entre Jésus et Israël. Jésus venait pour guérir Israël, mais, de fait, Israël était mort au point de vue spirituel. Lorsque Jésus arrive, il fallait qu’il le ressuscitât, si C’était la volonté de Dieu qu’il vécût ; le Seigneur le pouvait, et il le fera aux derniers jours. Mais, tandis qu’il est en chemin avec le peuple, la foule d’Israël l’entoure, et si quelqu’un, ayant individuellement la foi, vient le toucher, cette personne est guérie. C’est ce qui arrive à la pauvre femme affligée d’une cruelle maladie.
Relevons quelques détails de cette histoire. Le Seigneur distingue entre la vraie foi et l’empressement de la foule qui était attirée par ses miracles et les bienfaits qu’elle recevait de lui. La sincérité ne manquait pas à ceux qui composaient la multitude ; le peuple voyait les miracles et jouissait de leurs effets, seulement il n’avait pas la foi en la personne de Jésus. Mais il y avait dans la femme, par grâce, ce qui se trouve toujours avec la foi, le sentiment de son besoin et la perception de l’excellence de la personne de Christ et de la divine puissance qui était en lui ; en même temps, il s’y joignait une vraie humilité quant à elle-même. La pauvre malade est sûre que, si seulement elle touche le bord du vêtement de Jésus, elle sera guérie, et c’est ce qui a lieu. Dès que la guérison a été effectuée, Jésus s’aperçoit que la puissance qui est en lui et qui était sortie de lui vers la femme, a agi avec efficace. Il en est toujours ainsi ; plusieurs peuvent entendre l’évangile et y trouver du plaisir, mais la foi est autre chose que cela, et elle reçoit toujours du Seigneur la réponse au besoin qu’elle lui a présenté. Il peut faire attendre, s’il trouve bon d’exercer la foi, mais il répond toujours avec amour ; la femme est parfaitement guérie. La foi rend humble celui qui la possède, humble à l’égard de sa misère. La femme aurait voulu rester cachée, mais le Seigneur encourage le croyant, disant, dans l’exemple dont nous nous occupons : « Ma fille, ta foi t’a guérie ; va en paix ». Quelque timide et craintive que soit l’âme en la présence du Seigneur dans les choses spirituelles, et quelque profond que soit le sentiment de sa misère, quand l’appel est vrai, elle s’ouvre et confesse la grâce du Seigneur, et non pas la misère qui a rendu nécessaire l’exercice de cette grâce. C’est alors que le Seigneur encourage et parle de paix au coeur. La foi personnelle est ici clairement distinguée de l’empressement de la foule qui suivait Jésus, soit par curiosité, soit à cause du bien qu’elle recevait de lui. Mais la puissance de la résurrection était en lui et par lui. Israël, quoique mort, dormait seulement ; la voix du Seigneur l’appellera en son temps pour lui donner la vie.
Mais quelque grand que fût son pouvoir divin, Jésus était venu sous une apparence qui ne flattait en rien l’orgueil et la vanité de la nature humaine. L’homme était responsable de le recevoir, parce qu’Il manifestait le caractère de la divinité ; mais il ne voulait ni flatter, ni soutenir les passions du coeur humain, ni les sentiments des Juifs comme nation. Si l’homme doit recevoir Dieu, il doit recevoir ce que Dieu est ; mais c’est là précisément ce que la nature déchue ne veut pas faire. Le caractère divin était beaucoup plus pleinement manifesté dans l’humiliation de Jésus, que s’il était venu dans sa gloire comme Roi ; mais il n’était pas ce que le coeur de l’homme désirait. Il était le fils du charpentier, et c’était assez pour qu’on le rejetât. Les Juifs jugeaient selon la chair ; la parenté de Jésus était au milieu d’eux, et ils ne regardaient pas plus loin. Etonné de leur incrédulité, ils les laisse après avoir fait ce que demandaient les besoins de quelques-uns d’entre eux, car sa grâce ne manque jamais. Un prophète n’est pas sans honneur, excepté dans son propre pays, car c’est là qu’il est connu selon la chair. Il en était ainsi de Jésus, non seulement à Nazareth, mais en Israël. Remarquez quel obstacle présente l’incrédulité à l’exercice de la puissance de Dieu. La foi de la femme malade qui touche le bord du vêtement de Jésus fait que la puissance sort de lui, mais l’incrédulité des habitants de son pays en arrête l’exercice : « Il ne put faire là aucun miracle ». Que Dieu nous accorde de ne mettre aucun obstacle à l’activité de sa grâce, qui est toujours prête à agir ; puissions-nous, au contraire, connaître tout le bien que procure sa puissance lorsqu’on la fait agir par la foi (v. 1-6).
Maintenant, le Seigneur envoie ses disciples prêcher, et il
donne en même temps une preuve de sa puissance plus remarquable que ne
l’étaient ses propres miracles. Il confère aux douze le pouvoir de faire
eux-mêmes des miracles, le pouvoir de chasser les démons. C’est évidemment une
puissance divine. Dieu peut rendre un homme capable d’accomplir des signes et
des miracles, mais quel homme
peut
communiquer ce pouvoir à un autre ? Christ le faisait, et ses disciples,
ayant reçu de lui l’autorité, chassaient en réalité les démons. Christ était
Dieu manifesté en grâce sur la terre. Nous avons déjà appelé l’attention sur le
fait que tous les miracles du Seigneur, ainsi que ceux de ses disciples, ne
sont pas seulement des signes de puissance, mais des fruits de la divine bonté.
On peut en excepter la malédiction prononcée contre le figuier stérile, mais,
après tout, c’est une preuve de la même chose. Le témoignage du Seigneur,
portant le cachet de l’amour, et confirmé par ses oeuvres miraculeuses, avait
été rejeté, et Israël — en qui nous voyons le coeur de l’homme — sous
l’influence de cette bonté, de la manifestation de Dieu, de tous les soins que
Dieu lui avait prodigués, Israël n’avait produit aucun fruit. En conséquence,
le mauvais arbre est jugé pour toujours, de sorte qu’il ne portera plus de
fruit désormais. Ainsi l’homme, ayant montré qu’il n’était rien que coupable,
et si coupable que tous les moyens employés de Dieu, même le don de son Fils
unique, avaient été trouvés impuissants pour réveiller en lui un seul bon
sentiment envers Dieu, l’homme, quant à son état dans la chair, est finalement
rejeté de Dieu. Dieu peut le sauver en lui donnant une nouvelle nature par le
Saint Esprit, mais en lui-même il est sans espérance. Qui pourra faire plus que
Dieu n’a fait ?
Le Seigneur n’avait pas seulement le pouvoir de donner à ses disciples autorité sur les esprits malins ; il fait plus : il dispose des coeurs des hommes. Les disciples devaient se mettre en route sans rien prendre pour leur voyage, et cependant, ainsi que nous le lisons dans l’évangile de Luc, de retour, et en réponse à la demande du Seigneur, ils rendent témoignage de n’avoir manqué de rien. Soutenus par la puissance d’Emmanuel, laquelle s’étendait partout, et armés de son autorité, ils devaient demeurer dans la maison où ils étaient entrés, jusqu’à ce qu’ils partissent de l’endroit où ils s’étaient arrêtés. Ils avaient à se conformer à cette mission ; possédant l’autorité du Seigneur pour leur message, ils avaient à agir en conséquence. Et si quelque part leur message n’était pas reçu, ils devaient secouer la poussière de leurs pieds, comme témoignage contre cette ville-là, dont le sort serait pire, au jour du jugement, que celui de Sodome et de Gomorrhe. Il est vrai que le Seigneur, rempli de bonté et de patience, envoya encore devant sa face, pour prêcher l’évangile, soixante-dix disciples, lorsqu’à la fin de sa carrière il montait à Jérusalem. Mais quant au principe de la mission, ce que nous trouvons dans Marc était le dernier témoignage donné à Israël avant le jugement de la nation. Ce devait être le dernier appel adressé à la conscience et au coeur du peuple, afin qu’il reçût le Sauveur, qu’il se repentît et se tournât vers Dieu, pour échapper au terrible jugement qui l’attendait, et afin qu’il y eût au moins un résidu qui, saisi par la puissante parole de Dieu, se retournât vers Dieu pour jouir de sa bonté dans le Sauveur et d’une espérance meilleure que celle que pouvait donner le judaïsme.
Les disciples partirent, et annoncèrent qu’on eût à se repentir. Quelle grâce dans cette diffusion de l’évangile ! Non seulement Dieu nous donne de jouir du salut et de son amour, mais il emploie des hommes comme instruments de l’activité de cet amour. Oh ! combien nous devrions bénir Dieu de ce qu’il condescend à nous employer pour porter le témoignage de son ineffable amour et de sa vérité aux coeurs des hommes — tout au moins à leurs oreilles — afin de s’en servir lui-même, dans sa grâce, pour atteindre les coeurs ! Puissions-nous au moins connaître ce que c’est que d’avoir le coeur rempli d’amour, soit que nous prêchions ou non, afin qu’il soit la vraie expression de la grâce qui cherche les hommes. Ainsi la puissance de Dieu accompagnait les disciples ; ils chassaient les démons et guérissaient les malades.
Vers ce temps, le bruit des oeuvres et de la puissance du Seigneur parvint aux oreilles du roi Hérode. Sa conscience en fut troublée, parce qu’il avait fait mettre à mort Jean le baptiseur. Ici commence le récit des faits qui montrent pratiquement l’opposition du coeur de l’homme au témoignage de Dieu. L’inimitié contre la vérité et la lumière, qui fut pleinement manifestée par la mort de Jésus, se montre déjà par celle de son précurseur. La conscience naturelle d’Hérode l’avait porté à écouter Jean ; la fidélité qu’avait montrée ce saint homme en le reprenant, lui inspirait une crainte qui le portait à avoir des égards pour sa personne et à le défendre contre l’inimitié d’Hérodias ; mais ce qui est de la nature n’est pas assez puissant pour opposer une barrière à la chair. L’excitation d’un banquet et l’orgueil royal suffirent pour causer la mort du prophète. Triste exemple de la manière dont l’homme se déçoit lui-même ! Et quand il s’imagine être assez fort pour déployer sa puissance, tout ce qu’il peut faire, c’est de révéler sa faiblesse et son asservissement à ses passions. Mais tout concourt à accomplir le dessein de Dieu ; cette inimitié du coeur de l’homme doit se montrer et introduire, par le rejet de Jean le baptiseur et de Jésus lui-même, des choses infiniment meilleures, par la souveraine grâce de Dieu.
Les disciples reviennent et racontent à Jésus tout ce qu’ils ont fait et enseigné ; il était naturel qu’ils en fussent remplis. Mais le Sauveur n’en dit rien ; pour lui, la puissance était une chose naturelle ; seulement il invite les disciples à venir à l’écart, dans un lieu désert, pour se reposer un peu dans la solitude. Pour nous, pauvres créatures, qui sommes si incapables de supporter l’effet de la puissance quand l’oeuvre s’accomplit par notre moyen, et qui sommes si prêts à nous l’attribuer à nous-mêmes sans nous en apercevoir, c’est une bonne chose et même une chose nécessaire, si grande que soit la bénédiction, et d’autant plus qu’elle est grande, de nous retirer en la présence de Dieu, et là de découvrir ce que nous sommes en réalité pour jouir avec sécurité de son amour parfait, pour être occupés de lui et non de nous-mêmes. C’est ce que le Seigneur faisait dans ses tendres soins pour les siens.
Mais l’amour de Dieu ne trouve pas de repos dans ce monde ; et l’homme, ne trouvant que peu d’amour dans le coeur de ses semblables, craint de fatiguer le Seigneur lorsqu’il est présent ; mais l’amour divin ne refuse jamais de subvenir aux besoins des hommes.
Le peuple reconnut Jésus comme il s’en allait, et tous sortirent de leurs villes et accoururent pour se rassembler autour du Seigneur. Lui, voyant cette grande multitude, fut ému de compassion, parce qu’ils étaient comme des brebis qui n’ont pas de berger. Il commence par les enseigner ; c’est le premier et vrai besoin du peuple abandonné par ses conducteurs humains ; mais le Seigneur pense à tous les besoins de son peuple affamé. Les disciples auraient voulu qu’il renvoyât les foules, mais lui veut les nourrir. Ce miracle a en lui-même une grande portée, d’après la place qu’il occupe dans cet évangile. L’Éternel était le vrai Berger d’Israël, et il était présent dans la personne de Christ qui, de fait, était rejeté. Néanmoins, sa compassion et son amour n’étaient en rien affaiblis par l’ingratitude du peuple.
Pour montrer qu’il est vraiment l’Éternel, il agit selon ce qui est écrit dans le Psaume 132:15 : « Je rassasierai de pain ses pauvres ». Ce psaume prédit le temps du Messie, et sera pleinement accompli dans les derniers jours, mais Celui qui l’accomplira était présent, et, bien que rejeté, il donne la preuve que l’Éternel avait visité son peuple — il rassasie de pain ses pauvres. Son amour était infiniment supérieur à la méchanceté de son peuple. Il avait déjà annoncé que le Fils de l’homme serait mis à mort, et que le peuple ne recevrait pas son Dieu Sauveur. Avec tout cela, l’Éternel ne renonce pas à son amour. Si le peuple ne désire pas l’Éternel, lui recherche le peuple. Christ donne le précieux témoignage que l’amour de l’Éternel ne se lasse point, mais reste supérieur à toute la folie de l’homme. Que son nom en soit loué et adoré ! Nous pouvons tous compter sur son immuable bonté, non pour nous laisser aller à la négligence, mais pour être soutenus dans notre faiblesse, car son amour est plus grand que tous nos manquements, de sorte que nous pouvons adorer sa patience.
Mais nous trouvons ici une autre vérité importante. Le Seigneur ne dit pas : « Je leur donnerai à manger », mais : « Vous, donnez-leur à manger ». Le Seigneur veut que les disciples sachent ce que c’est que d’user de sa puissance pour le bien des autres, et comment en user par la foi. Oh ! qu’il est grand de penser que la vraie foi se sert de la puissance de l’Éternel, et cela dans les circonstances mêmes qui montrent que son amour est au-dessus de notre infidélité et de nos manquements ! Combien est importante pour nous cette vérité, que Christ est l’expression de cet amour, de la grâce de Dieu s’élevant au-dessus de tous nos péchés ; car « Dieu constate son amour à lui envers nous, en ce que, lorsque nous étions encore pécheurs, Christ est mort pour nous ». C’était la preuve de son amour, mais ce qui a été manifesté dans sa mort est toujours vrai pour nous dans sa vie. « Beaucoup plutôt, ayant été réconciliés », dit l’apôtre, « serons-nous sauvés par sa vie ». La foi compte donc sur l’immuable fidélité de cet amour, et se sert de la force qui s’accomplit dans l’infirmité. La chair, dans les disciples, ne voit que des moyens charnels, et regarde, non à l’amour et à la puissance de Dieu, mais à ce qui peut être vu et touché. Mais le Seigneur donne, en abondance, la nourriture à la multitude affamée, et se montre à la fois le Dieu et le Sauveur d’Israël.
Le récit qui suit est le tableau de la séparation amenée par le rejet du Seigneur, et l’accueil de bienvenue qui lui sera fait à la fin de l’histoire de ce monde qui l’a rejeté. Il ne parle pas du jugement de ses adversaires, mais du changement du monde lui-même. Le Seigneur contraint les disciples à partir seuls, tandis qu’il renvoie la multitude, et lorsqu’ils sont partis, il monte sur une montagne pour prier. C’est précisément ce que le Seigneur fait maintenant : les disciples sont ballottés sur la mer orageuse du monde ; Jésus a renvoyé Israël, et il est monté au ciel où il intercède pour nous. En attendant, le vent est contraire, et nous ramons péniblement au milieu des troubles et des difficultés, étant en apparence laissés par le Seigneur, mais il intercède toujours pour nous, et par lui nous recevons miséricorde et nous trouvons grâce pour avoir du secours au moment opportun. Israël a été renvoyé.
Plus exactement, les disciples sur la mer représentent le résidu juif, qui, en fait, est devenu l’Église, mais qui est ici considéré sous son caractère de résidu juif. Jésus atteint la nacelle en marchant sur les eaux, car il peut marcher avec calme au-dessus des circonstances qui nous causent un grand trouble. Les disciples sont effrayés, mais Jésus les rassure en leur disant que c’est lui-même, leur ami bien connu et leur Sauveur. Il en sera ainsi à la fin des temps. Jésus apparaîtra dominant toutes les circonstances qui troubleront son peuple, et il sera pour lui le même qui, humble et débonnaire, marchait sur la terre avec ses disciples « dans les jours de sa chair ».
« Et il monta vers eux dans la nacelle, et le vent tomba ». Je le répète : le jugement de ses adversaires n’est pas mentionné ici mais seulement ce qui arrivera à son peuple parmi les Juifs, quand il reviendra. Alors, le monde sera de nouveau plein de joie. Les habitants du pays de Génésareth, qui avaient renvoyé le Sauveur après qu’il eut guéri le démoniaque, le reçoivent maintenant et le reconnaissent, et les gens de toutes parts jouissent avec bonheur de sa présence.
Ce chapitre est rempli des enseignements les plus intéressants. En premier lieu, nous y voyons le jugement que porte le Seigneur sur la piété extérieure des chefs du judaïsme, piété toute de formes, pure hypocrisie, qui mettaient de côté la loi de Dieu. Toutes ces ablutions, Dieu les méprise ; les pharisiens avaient annulé le commandement de Dieu par leurs traditions. En second lieu, le Seigneur montre que ce qui sort de la bouche de l’homme, et non ce qui y entre, est ce qui le souille, parce que cela vient du coeur. Ayant ainsi jugé Israël et l’homme, le Seigneur déploie de la manière la plus touchante la grâce souveraine de Dieu qui s’élève au-dessus de toutes les barrières pour atteindre l’homme dans ses besoins, qui va le chercher en dehors de tous les droits fondés sur les promesses, demandant seulement que le cœur la reconnaisse, afin que ce soit entièrement la pure grâce de Dieu en amour qui fasse le bien ; se révélant elle-même comme amour, quand l’homme est mauvais et qu’il n’a point d’espérance en dehors de cette grâce souveraine.
Les choses extérieures sont aisées à accomplir l’homme aime à en faire sa religion, car elles ne demandent pas un coeur pur. L’homme aime à les accomplir, et ainsi à s’exalter lui-même et à se distinguer des autres. L’observation de ces formes religieuses fait que l’on se glorifie devant les autres hommes d’avoir une grande piété et l’on acquiert ainsi de la réputation. Mais, en même temps, on peut être mauvais ; les actes extérieurs n’amènent pas l’homme en la présence de Dieu qui sonde le coeur. On est religieux sans posséder la sainteté, et cela convient au coeur naturel de l’homme. Les pharisiens n’étaient pas seulement du temps du Seigneur ; on en trouve dans tous les temps. Ce système (le pharisaïsme) se rattache toujours à l’influence qu’un homme exerce sur un autre par le moyen d’une position sainte extérieurement. Ce n’est pas la foi possédant la grâce et la vérité, — lesquelles sont venues par Jésus Christ et produisent la sainteté et la communion avec Dieu qui se révèle en elles, — mais c’est l’influence officielle dont un homme se sert pour son propre avantage, laissant de côté, avec insouciance, la volonté et les commandements de Dieu. Il en était ainsi parmi les Juifs. Ils lavaient leurs mains, mais non leurs coeurs ; ils étaient très scrupuleux quant à ce qui entrait dans leur bouche, et ne se souciaient pas de ce qui sortait de leur coeur.
Telle est toujours la religion de l’homme ; il peut observer une religion comme celle-là et s’en faire un manteau de gloire. Mais il ne peut, par ce moyen, atteindre à une sainteté réelle, et cela est évident aux yeux de Dieu qui voit tout ce qui se passe dans le coeur. La vraie sainteté se montre dans la marche pratique ; on peut manquer, mais l’âme soutenue par la grâce cherche uniquement l’approbation de Dieu ; elle a bien la conscience de son manquement, toutefois elle se réjouit en Dieu, car c’est lui qui habite dans l’âme et la garde dans l’humilité. Mais les pharisiens et les sadducéens, parmi les Juifs, profitaient de leur réputation et de leur position pour engager les personnes pieuses à faire des dons à Dieu qu’ils représentaient, et par ce moyen ils gagnaient de l’argent. Ainsi les devoirs envers les parents étaient négligés, et la loi de Dieu était annulée. Ils honoraient Dieu de leurs lèvres, mais leur coeur était éloigné de lui. Ils s’approchaient de lui de bouche, et non de leur coeur, qui était rempli de convoitise et d’iniquité. Dieu rejette absolument ce genre d’honneur qu’on voudrait lui rendre : « Ils m’honorent en vain », disait le prophète Ésaïe, dont le Seigneur cite les paroles. Dieu demande un coeur pur, sanctifié par le Saint Esprit et par la vérité ; et il veut un culte rendu en esprit et en vérité. Le Père cherche de tels adorateurs. Il veut la grâce, mais pour s’approcher de Dieu il faut la vérité, il faut un coeur dans lequel la vie divine existe. Toute cette religion humaine, extérieure, pharisaïque, sacerdotale, est jugée par le Seigneur une fois pour toutes et pour toujours. Dieu demande un coeur pur et une vraie obéissance. Les hommes révèrent ce genre de religion dont nous venons de parler ; ils la révèrent à cause de son antiquité et des traditions de leurs ancêtres, choses auxquelles l’imagination attache une grande valeur. Tout ce qui est vu à travers le voile de l’antiquité parait assez imposant, mais avec Dieu il s’agit du coeur, et cela maintenant comme alors : nous sommes devant Dieu, et il nous voit exactement tels que nous sommes. L’état réel du coeur de l’homme, telle est la question.
Mais que sont ces pauvres coeurs dans leur état naturel ? Telle est la seconde question que soulève le Seigneur. Il avait déchiré le voile d’hypocrisie derrière lequel les pharisiens et les sacrificateurs cherchaient à cacher l’impureté de leurs coeurs, et à faire servir à leur profit la piété de formes qu’ils enseignaient. Les motifs de leurs coeurs sont manifestés, et les efforts qu’ils faisaient pour couvrir leur impureté et leur avarice apparaissent au grand jour : leur hypocrisie est rendue évidente. Le Seigneur ne déchire pas seulement le voile de l’hypocrisie, mais il fait connaître aussi ce que le coeur produit. C’est ce que Dieu fait ; il sonde nos coeurs et les manifeste, et ensuite il révèle le sien. Le Seigneur dévoile non seulement le coeur des pharisiens, mais celui de tous les hommes ; ce qui sort de la bouche souille l’homme, parce que cela vient du coeur. Quel tableau ! Le coeur produit la méchanceté, la corruption, l’envie… en un mot, il n’en sort que des vices.
Le Seigneur manquait-il de bienveillance ou d’amour envers l’homme ? Sa venue sur la terre est la preuve de l’amour de Dieu. Voulait-il cacher le bien qui pouvait se trouver en l’homme ? N’était-il capable que de découvrir le mal ? Pouvait-il désirer calomnier l’être qu’il était venu bénir et sauver, et auquel il voulait donner une place auprès de lui ? Non ; cela ne se pouvait pas. Mais connaissant le coeur de l’homme, il était obligé de dire la vérité. C’était l’amour qui découvrait l’absolue perversité du coeur de l’homme, afin que l’homme ne restât point dans cet état. Il vaut certes mieux que cet état soit découvert maintenant, en présence de la grâce, qu’au jour du jugement, quand tout ce qui sera manifesté devra subir le châtiment, et où l’homme sera condamné.
Remarquez aussi cette vérité importante : quand la sainteté pratique et l’obéissance n’existent plus dans la vie des conducteurs religieux, une religion, même fondée par Dieu, devient la puissance du péché et de l’hypocrisie, et tend toujours à pervertir l’esprit et à détruire en tout la conscience et la droiture. La raison en est que ce qui est regardé comme l’autorité établie de Dieu, encourage l’hypocrisie et l’iniquité, et tend ainsi à produire l’incrédulité, parce que les hommes voient que la religion s’attache à ce que même la conscience naturelle condamne. Quelle triste histoire que celle du coeur humain et celle de l’Église de Dieu, telle que l’homme l’a faite ! Remarquez encore l’influence qu’a l’autorité religieuse corrompue, pour aveugler les hommes et détruire l’intelligence spirituelle. Que peut-il y avoir de plus clair que ce que le Seigneur dit ? Mais la conscience naturelle ne reconnaît pas cette vérité, que ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui souille l’homme, mais bien ce qui en sort, parce que cela procède du coeur. La chose est assez simple.
Les disciples ne comprennent pas les paroles du Seigneur et en demandent l’explication. Leur intelligence naturelle avait été aveuglée par la tradition des anciens. La manière de raisonner que ceux-ci leur avaient inculquée, avait obscurci leur compréhension. Et, en effet, ne trouvons-nous pas encore maintenant des personnes qui croient que ce qui entre dans la bouche d’un homme le souille ? Et cependant, ce sont des âmes sincères ; mais non seulement cela, elles croient aussi que manger d’un certain mets un jour les souillera, et qu’en manger un autre jour ne les souillera pas ; c’est la tradition des anciens qui le leur dit. C’est, au fond, ce que pensaient les disciples, et le Seigneur les reprend en leur disant : « Vous aussi, êtes-vous ainsi sans intelligence ? » Nous voyons donc ici le jugement du Seigneur contre plusieurs choses qui tiennent bien des âmes dans la servitude, et des âmes sincères comme celles des disciples.
Mais occupons-nous de la précieuse manifestation de l’amour de Dieu, telle que nous la voyons dans les paroles du Seigneur à la pauvre femme syrophénicienne. Tous les privilèges des Juifs sont reconnus d’abord, mais ensuite, nous trouvons aussi la vérité de Dieu qui s’élève infiniment au-dessus de ces privilèges, pour déployer la grâce et l’amour là où existe un besoin dans le coeur ; et cela, non pas envers quelqu’un qui aurait un droit quelconque aux promesses, mais envers une race maudite, envers une pauvre femme appartenant à un pays connu par son état d’endurcissement. Dieu se manifeste lui-même, s’élevant au-dessus de toutes les barrières que l’iniquité de l’homme et le système exclusif du judaïsme avaient élevées, système que lui-même d’ailleurs avait établi et que le rejet de Christ a aboli.
Le Seigneur se dirige vers les frontières de Tyr et de Sidon. Il désire être tranquille, mais la bonté jointe à la puissance sont trop rares dans ce monde pour rester inaperçues ; le besoin senti réveille l’âme et la rend clairvoyante. Une pauvre femme avait une fille assujettie à la puissance d’un esprit immonde. Sentant sa misère et croyant en la puissance de Jésus, elle se rend auprès de lui. Le poids de douleur qui l’oppressait la fait espérer en sa bonté. Le Seigneur maintient les promesses que Dieu a faites aux Juifs, et, dans sa réponse, met en avant les droits du peuple de Dieu. Il ne peut pas prendre le pain des enfants et le donner aux chiens. Remarquons que la femme était d’une race maudite ; si nous regardons aux voies de Dieu au milieu d’Israël, il n’y avait pas une seule promesse pour elle ; elle n’avait aucun droit qui lui fût commun avec le peuple de Dieu. Selon les Juifs et l’économie de la loi, elle n’était rien de plus qu’un chien ; mais elle avait de grands besoins, et la puissance de Dieu, toujours employée comme elle l’est pour l’accomplissement de ses desseins de bonté, cette puissance était là aussi, et c’est ce qui inspire de la confiance à cette femme.
Il en est toujours ainsi ; le besoin senti dans l’âme et la foi en la bonté et la puissance du Seigneur, donnent de la persévérance. C’est ce que nous voyons, d’une manière frappante, dans le cas de ceux qui apportaient le paralytique et que la foule entourant Jésus empêchait d’approcher. Mais, outre la confiance que la grâce a produite dans le coeur de la femme, il y a quelque chose de plus. Elle reconnaît les droits des Juifs comme peuple de Dieu ; elle avoue n’être qu’un chien par rapport à eux ; mais elle insiste sur sa demande, parce qu’elle sent que tout en n’étant qu’un chien, la grâce de Dieu est suffisante, même pour ceux qui n’ont aucun droit. « Même les chiens, sous la table », dit-elle, « mangent des miettes des enfants » ; elle reconnaît donc ce qu’elle est, mais en même temps aussi, ce que Dieu est. Elle croit à son amour envers ceux qui n’ont ni droits ni promesses ; elle croit à la manifestation de Dieu en Jésus en dehors et au-dessus de toutes les dispensations. Dieu est bon, et le fait que l’on est dans la misère donne un droit sur lui. Christ aurait-il pu dire : « Non ; Dieu n’est pas aussi bon que tu le supposes » ? Il n’aurait pu le dire ; ce n’aurait pas été la vérité.
C’était une grande foi que celle de cette femme la foi qui reconnaît que nous sommes misérables et n’avons droit à rien ; mais la foi qui croit à l’amour de Dieu clairement révélé en Jésus, sans promesse, mais pleinement révélé. Dieu ne saurait se renier lui-même et dire : « Non, je ne suis pas amour ». Nous n’avons nul droit à attendre l’exercice de cet amour envers nous, mais nous pouvons être sûrs que, si nous venons à Christ, poussés par nos besoins, nous trouverons la bonté parfaite, l’amour qui nous guérit, la guérison elle-même. Rappelons-nous que le vrai besoin persévère, parce qu’il ne peut rien sans l’aide de cette puissance qui a été manifestée en Christ, ni en dehors du salut qu’il a opéré. Il n’y a point de salut en dehors de l’aide qui se trouve en lui pour notre faiblesse. Et ce qui est en Dieu est la source de notre espérance et de notre foi ; et si l’on nous demandait comment nous savons ce qui est dans le coeur de Dieu, nous pouvons répondre : « Cela est parfaitement révélé en Christ ». Qui a mis au coeur de Dieu d’envoyer son propre Fils pour nous sauver ? Qui a mis au coeur du Fils de venir et de souffrir tout pour nous ? Ce n’est pas l’homme. Le coeur de Dieu en est la source. Nous croyons dans ce, amour, et à la valeur de ce que Christ a fait et accompli sur la croix, pour abolir le péché par le sacrifice de lui-même. De plus, il fait toutes choses bien ; il fait entendre les sourds et parler les muets.
La grâce de Dieu s’était pleinement déployée envers la pauvre femme qui n’avait nul droit à aucune bénédiction, et qui ne pouvait se réclamer d’aucune promesse. Elle était une des filles de la race maudite de Canaan, mais la foi atteint jusqu’au coeur même de Dieu manifesté en Jésus, et de la même manière le regard de Dieu descend jusqu’au fond du coeur de l’homme. Ainsi se rencontrent le coeur de Dieu et le coeur de l’homme ; l’homme ayant la conscience qu’il est entièrement mauvais, qu’il n’a pas le moindre droit, mais en reconnaissant vraiment cet état, s’abandonne à la parfaite bonté de Dieu. Mais le peuple juif, avec sa prétention de posséder la justice et un droit aux promesses, est mis de côté ; relativement à l’ancienne alliance, il est exclu de la faveur de Dieu. Toutefois, Jésus ouvre les yeux et les oreilles du résidu qui lui est amené par la foi. Ce n’est pas seulement le peuple juif qui devait être ainsi mis de côté (quant à l’ancienne alliance, c’est pour toujours), mais l’homme lui-même l’est aussi sur le terrain de la justice qui est le principe de l’ancienne alliance.
Le Seigneur quitte les confins de Tyr et de Sidon et revient en Galilée, où il se retrouve au milieu d’Israël. Mais, ainsi que nous l’avons dit, il était virtuellement rejeté par le peuple. Jésus a la conscience que la nation bien-aimée est perdue, et il n’attend que sa ruine. On lui amène un homme sourd qui avait la parole empêchée, et on le prie de lui imposer les mains pour le guérir. Jésus conduit cet homme à l’écart, hors de la foule ; il lui met ses doigts dans les oreilles, et, ayant craché, il lui touche la langue. Ensuite, il regarde vers le ciel et soupire : la puissance est toujours présente en lui, mais la douleur oppresse son coeur, parce qu’en réalité le peuple était sourd à la voix du bon Berger. Leur langue était liée et incapable de louer Dieu. Les soupirs du Seigneur sont l’expression de ces sentiments, pour autant que l’état du pauvre homme représentait l’état du peuple bien-aimé. Néanmoins, ils étaient heureux en ce que l’amour de Celui dont les conseils ne changent pas, restait sur eux en dépit de tout. Et, en effet, le Seigneur était là et opérait selon cet amour et ses soupirs. Il regardait vers le ciel, la source de l’amour et de la puissance, et il ne se lassa point jusqu’au moment où le peuple, en faveur duquel il exerçait, sa puissance, ne voulut plus supporter sa présence. Il est vrai qu’il n’aurait pu être mis à mort, s’il ne s’était livré volontairement, mais le temps allait venir où il se donnerait, en effet, pour accomplir la rédemption, et jusqu’à ce que ce moment fût arrivé, il se montra toujours comme le Dieu de bonté envers les affligés, et prêt à tous les besoins du peuple.
Au verset 33, nous voyons que Jésus se sépare de la masse du peuple pour guérir l’homme sourd. Nous pouvons remarquer la même chose dans le chap. 8:23. Il conduit l’homme aveugle hors de la ville et là, le guérit ; dans ce cas, c’est l’état des disciples qui est en vue. Il est touchant de voir ce regard du Seigneur vers le ciel, et le soupir de son coeur en contemplant le peuple sourd à la voix de son Dieu et incapable de bénir son nom. Cela nous montre le coeur du Seigneur envers des hommes endurcis, et en même temps l’harmonie de ce coeur avec le ciel, harmonie qu’il manifestait toujours. Là, dans le ciel, il trouvait la certitude de cet amour que l’homme rejetait, et il trouvait son repos dans les sentiments qui règnent au ciel, et dont lui-même était l’expression sur cette terre ingrate. La puissance du Seigneur se montre en cet instant même ; les oreilles du sourd sont ouvertes et sa langue déliée. La foule ne peut se taire ; elle publie partout ce que Jésus a fait, disant : « Il fait toutes choses bien ; il fait entendre les sourds et parler les muets ». L’oeuvre du Seigneur ouvre les oreilles et donne occasion aux coeurs humbles de louer Dieu et de reconnaître son amour. Mais, hélas ! combien il y en a qui restent sourds à la voix de l’amour de Dieu ! Ils sont « comme l’aspic sourd qui se bouche l’oreille, qui n’entend pas la voix des charmeurs, du sorcier expert en sorcelleries ».
Le Seigneur continue à manifester la bonté divine. C’est la principale chose à remarquer dans cette partie de l’évangile. Il avait déjà nourri une première fois la multitude affamée, signe manifeste de la présence de l’Éternel, comme nous l’avons fait remarquer auparavant. C’était le signe qui devait accompagner sa présence au milieu de son peuple. Dans le cas que nous présente ce chapitre, il s’agit plus simplement de la puissance divine, sans qu’il soit fait allusion au royaume à venir. C’est ce qu’indique le nombre de corbeilles renfermant les morceaux qui étaient de reste ; le nombre sept étant l’expression de la perfection dans les choses spirituelles. La compassion du Seigneur le fait penser aux besoins des pauvres, tandis que les disciples ne pensent qu’aux moyens visibles et humains de se satisfaire eux-mêmes. Ce n’est que trop souvent le cas des vrais croyants.
Le Seigneur laisse les foules et va aux quartiers de Dalmanutha. Là les pharisiens lui demandent un signe du ciel. Ils en avaient déjà vu suffisamment, mais l’incrédulité n’est jamais satisfaite. Or le temps de l’épreuve était passé ; il était trop tard ; le Seigneur les laisse. Remarquez le sentiment du Seigneur envers cette génération perverse ; il soupire profondément en lui-même, disant : « Pourquoi cette génération demande-t-elle un signe ? En vérité, je vous dis : il ne sera point donné de signe à cette génération ». Moralement, la fin était venue ; il était inutile de donner des preuves à des coeurs résolus à ne pas croire. La parfaite patience, l’amour, une profonde pitié, et la douleur en pensant à l’incrédulité des conducteurs du peuple, tout cela, le Seigneur l’éprouvait et le manifestait d’autant plus clairement que les coeurs étaient endurcis. Mais les signes étaient inutiles pour des coeurs qui ne voulaient pas croire, et il ne convenait pas non plus à la majesté de Dieu d’en donner à des hommes qui ne voulaient pas le recevoir. C’eût été jeter des perles devant des pourceaux.
Nous trouvons maintenant que les disciples eux-mêmes étaient réellement aveugles, non pas volontairement, mais de fait. Le Seigneur les avertit de se garder du levain des pharisiens et d’Hérode. Ils avaient oublié de prendre des pains avec eux, et hélas ! ils avaient aussi oublié la puissance de Jésus, dont il venait de donner une preuve en nourrissant des milliers de gens avec quelques pains. Le Seigneur les reprend, en leur disant : « N’entendez-vous pas encore, et ne comprenez-vous pas ? Avez-vous encore votre coeur endurci ? » Ils étaient, pour ainsi dire, endurcis ou rendus indifférents par la vue de tant de miracles, et n’avaient rien compris à celui de la multiplication des pains.
Mais le récit qui suit est une figure du contraste existant entre l’état des disciples et celui du peuple. Ce dernier ne voyait pas du tout et ne voulait pas recevoir la lumière ; les disciples voyaient indistinctement, comme l’aveugle auquel les hommes semblaient des arbres qui marchent. Ils aimaient réellement le Seigneur, mais leurs habitudes juives les empêchaient de saisir pleinement sa gloire. Ils croyaient bien qu’il était le Messie, mais, pour leurs coeurs, le Messie était autre chose que le Christ de Dieu, le Sauveur du monde. Ils s’étaient attachés, par grâce, à la personne du Seigneur, mais ils ne comprenaient pas la gloire divine qui était, pour ainsi dire, cachée dans cette personne, et qui se révélait par ses paroles et par ses oeuvres. Ils avaient tout quitté pour suivre le Seigneur ; l’intelligence leur manquait et non la foi, quelque faible qu’elle pût être. L’esprit était prompt, mais la chair était faible, comme nous avons déjà pu le remarquer. Le Seigneur conduit hors de la ville l’homme aveugle qu’on lui avait amené ; il le sépare d’Israël. D’abord, cet homme ne voit qu’en partie ; les hommes lui semblent comme des arbres qui marchent. Le Seigneur nous présente, dans l’aveugle, un tableau de l’état du coeur des disciples ainsi que de son infatigable bonté. Sa patience est aussi grande que sa puissance, et sa bonté ne laisse pas l’homme aveugle avant qu’il n’ait vu clairement. C’est ainsi qu’il agit avec ses disciples. Lorsqu’il eut été exalté dans le ciel, et qu’il se fut assis à la droite de Dieu, il envoya le Saint Esprit pour conduire les disciples dans toute la vérité ; alors ils virent clairement.
Le Seigneur défend à l’aveugle d’entrer dans la ville, et de dire sa guérison à personne de la ville. Ce n’est pas uniquement parce que Jésus ne cherchait pas la vaine gloire qui vient des hommes, mais aussi parce qu’il désirait éviter un grand concours de personnes curieuses de le voir, et qui n’étaient qu’un obstacle à son oeuvre réelle dans les consciences et dans les coeurs. Il voulait, en même temps, montrer que le temps du témoignage en Israël avait pris fin. Rejeté par le monde, il commande à l’homme délivré de la puissance des démons de retourner dans sa maison, afin d’y proclamer ce que Dieu avait fait pour lui. Les disciples devaient faire ainsi — annoncer son oeuvre — après qu’il aurait quitté ce monde ; mais ici, il s’agit d’Israël qui avait rejeté le Seigneur ; le témoignage de Dieu n’avait plus de place au milieu de ce peuple.
Le discours que le Seigneur tient ensuite est amené par la question qu’il adresse à ses disciples : « Qui disent les hommes que je suis ? Et ils répondirent Jean le baptiseur ; et d’autres : Élie ; et d’autres L’un des prophètes » ; des opinions diverses, mais point de foi. Alors il leur demande : « Et vous, qui dites-vous que je suis ? » Pierre répond : « Tu es le Christ », et le Seigneur défend aux disciples, de la manière la plus positive, de dire cela de lui à qui que ce soit. C’était la preuve la plus claire que le témoignage au milieu du peuple avait entièrement pris fin. Jésus n’en était pas moins le Christ, mais il était rejeté par le peuple qui, en rejetant la grâce merveilleuse de Dieu, se montrait être son propre ennemi. Il commence donc à enseigner ouvertement à ses disciples qu’il doit souffrir comme Fils de l’homme, position et titre plus grands que ceux de Messie, par rapport soit à l’étendue de son pouvoir, soit à la grandeur de la domination qui lui appartient, car toutes choses seront assujetties à l’autorité du Fils de l’homme. Mais afin que le Fils de l’homme puisse prendre sa place en gloire, il doit d’abord souffrir, être mis à mort et ressusciter ; il fallait que la rédemption fût accomplie, et que l’homme entrât dans une position nouvelle, dans un état entièrement nouveau, dans lequel il n’avait jamais été lorsqu’il était innocent. La position de Christ comme Messie était mise de côté pour un temps, et il entre dans une autre position plus grande où les vieilles choses sont laissées en deçà de la mort, et où tout est fondé sur l’oeuvre de Christ, sur sa mort — il entre dans un état tout à fait nouveau et éternel.
Ici, le sujet est plutôt traité en rapport avec ses souffrances. Il place la croix devant ses disciples, mais il parle toujours de mort et de résurrection. « Et il tenait ce discours ouvertement ». C’était une pierre d’achoppement pour Pierre, qui ne voulait pas que son Maître fût méprisé aux yeux de la multitude ; mais la croix est la portion de ceux qui veulent suivre le Sauveur. Pierre, en parlant comme il le faisait, mettait aussi une pierre d’achoppement dans le sentier des disciples ; le Seigneur y pense ; aussi, se retournant et regardant les disciples, il reprend Pierre, qui, par la grâce de Dieu, venait cependant de confesser son nom, et il lui dit : « Va arrière de moi, Satan, car tes pensées ne sont pas aux choses de Dieu, mais à celles des hommes ». Nous avons là une leçon importante, et plus qu’une leçon. En premier lieu, le chrétien a besoin de bien comprendre que le chemin du salut, le chemin qui conduit à la gloire et au ciel, le chemin où Christ lui-même a marché et où il veut que nous le suivions, est un chemin où nous avons à nous renoncer nous-mêmes, à souffrir et à vaincre. Secondement, un chrétien peut avoir une foi vraie et être enseigné de Dieu, comme c’est ici le cas pour Pierre, sans que la chair en lui soit jugée, de manière à le rendre capable de marcher dans le chemin où la vérité l’amène. Il est important de nous rappeler cela : la sincérité peut exister sans la connaissance de soi-même. La nouvelle position de Christ, celle de Fils de l’homme, qui embrasse la gloire céleste de l’homme en lui et la suprématie sur toutes choses, rendait la croix absolument nécessaire. Mais le coeur de Pierre n’était pas prêt pour la croix ; quand le Seigneur en annonce l’effet pratique, Pierre ne peut le supporter.
Combien de coeurs sont dans cet état ! Sincères, ils le sont, sans nul doute, mais ils n’ont pas le courage spirituel nécessaire pour accepter les conséquences de la vérité qu’ils croient. Voyez la différence avec Paul, rendu fort par la présence du Saint Esprit et par la foi. En présence de la mort, il dit : « Pour le connaître, lui (Christ), et la puissance de sa résurrection, et la communion de ses souffrances, étant rendu conforme à sa mort » (Phil. 3:10). Mais il y avait en lui la puissance du Saint Esprit, et il portait toujours dans son corps la mort de Jésus, afin que la vie aussi de Jésus fût manifestée dans son corps. Heureux homme ! Toujours prêt à souffrir volontiers toutes choses, plutôt que de ne pas suivre pleinement le Seigneur Jésus, prêt à confesser son nom, quelles qu’en pussent être les conséquences, et enfin, après avoir marché fidèlement, obtenant, par grâce, le prix de son appel céleste.
Mais le Seigneur ne cache point et ne veut pas cacher les conséquences qui résultent de ce qu’on le suit. Il avertit les foules et il nous avertit aussi que, si nous désirons être avec lui, si nous voulons le suivre, il faut nous renoncer nous-mêmes et prendre notre croix. Recevons les paroles du Seigneur. Si nous voulons être avec lui pour toujours, nous devons le suivre, mais en le suivant, nous rencontrerons sur notre route ce qu’il y a trouvé. Sans doute qu’il n’est pas question pour nous de souffrances expiatoires, de ce que lui a souffert de la part de Dieu pour le péché, mais bien des souffrances qu’il a endurées de la part de l’homme, la contradiction des pécheurs, l’opposition des hommes, les outrages et même la mort. Nous savons peu ce que c’est que de souffrir pour le nom de Jésus ; mais rappelons-nous, chrétiens, ce que le Seigneur dit d’abord à qui veut le suivre : « Qu’il se renonce soi-même », cela, vous pouvez toujours le faire par grâce. C’est en le faisant que nous apprendrons à souffrir avec lui, si Dieu nous y appelle. Et que donnerions-nous en échange de notre âme ? Cela nous conduit à une troisième leçon qui demande un peu plus de développement.
Ce qui nourrit la chair et l’amour de soi, c’est le grand système appelé le monde. L’homme désire être quelque chose à ses propres yeux ; il aimerait oublier Dieu, et, si possible, se rendre heureux sans lui. Ainsi Caïn, chassé loin de la présence de Dieu, après le meurtre d’Abel, s’en va de devant sa face, jugé par Dieu de telle manière qu’il ne peut espérer être de nouveau admis en sa présence pour jouir de sa communion, car Dieu le condamne à être errant et vagabond sur la terre. Type frappant des Juifs de ce temps, lesquels ont mis à mort le Seigneur Jésus, devenu, pour ainsi dire, leur frère ! Mais Caïn ne voulait pas rester un pauvre vagabond ; tout au moins ne voulait-il pas laisser sa famille dans cet état. Il cherche à échapper à son sort, et, dans ce but, il bâtit une ville dans le pays de Nod, mot hébreu, qui, plus haut, est rendu par l’expression de vagabond. Il désirait que sa famille fût établie et fixée dans la contrée où Dieu le faisait être vagabond. Il donne à la ville le nom de son fils, comme le font les puissants de ce monde. Là se trouvent le père ou l’inventeur de la musique, et le père de ceux qui travaillent l’airain et le fer ; là s’accumulent les richesses de ce temps-là, beaucoup de bétail.
Tel est le monde ! Le coeur de l’homme, séparé de son Créateur, cherche à se rendre aussi agréable que possible la terre où il est éloigné de lui, et, pour y parvenir, il se sert des dons et des créatures de Dieu afin de pouvoir se passer de lui. On allègue qu’il n’y a pas de mal dans ces choses. C’est vrai ; elles sont bonnes comme créées de Dieu : mais là n’est point la question. On dit qu’il y aura de la musique (en figure) dans le ciel ; je le veux bien, mais dans le ciel, elle ne sera pas employée à distraire l’esprit en dehors de Dieu. La question consiste dans l’usage que nous faisons des choses. Ainsi, il n’y a point de mal dans la force, mais il peut y en avoir dans la manière dont nous nous en servons, par exemple, si on l’emploie à nuire à son prochain. N’est-il pas vrai que le monde qui ne connaît pas Dieu, recherche tous les plaisirs possibles pour en jouir sans lui ? Le coeur qui ne possède pas Dieu s’efforce de se divertir et, pour cela, emploie tout ce qui peut être vu, entendu et inventé, comme le théâtre, la musique, etc., parce qu’il est vide et triste, et ne peut en lui-même trouver de vraie satisfaction. Puis, après quelques années d’excitation, après avoir tout essayé, il se sent fatigué, lassé, plus vide que jamais, et il dit avec Salomon : Tout n’est que vanité et tourment d’esprit, poursuite du vent. Dieu a été négligé, et l’âme est perdue.
Pour le chrétien aussi, les amusements ne font que l’éloigner de Dieu et détruisent sa communion avec lui. « Tout ce qui est dans monde, la convoitise de la chair et la convoitise des yeux, et l’orgueil de la vie, n’est pas du Père, mais est du monde ; et le monde s’en va et sa convoitise, mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement ». Le prince de ce monde est Satan qui séduisit Ève par ces choses, après avoir tout d’abord détruit en elle la confiance en Dieu. C’est par ces choses aussi qu’il essaya de séduire le Seigneur, mais en vain, grâces à Dieu. Mais avec peu de peine il ne réussit que trop souvent à séduire les coeurs des hommes et des chrétiens, et à faire que les plaisirs du monde ont plus de pouvoir sur l’âme que Christ lui-même, que l’amour du Sauveur mort pour nous.
Il en était ainsi du pauvre Pierre. Il est vrai qu’il n’avait pas encore reçu le Saint Esprit, mais cela ne change pas la nature de ses désirs. Il voulait la gloire de ce monde, sous prétexte d’amour pour le Sauveur. Remarquez aussi, dans cette occasion, l’amour du Seigneur pour ses disciples et ses tendres soins à leur égard. Il les regarde et, voyant quelle pierre d’achoppement pouvaient être pour les autres les paroles de Pierre, il le reprend aussi sévèrement qu’elles le méritaient. Puis le Seigneur pose devant ses disciples deux principes : d’abord, celui-ci, que l’âme a une plus grande valeur que toute autre chose, et qu’il n’est rien qu’un homme puisse donner en échange de son âme. Ensuite, il leur déclare que lui, le Seigneur, est près de venir dans sa gloire, et que quiconque aura eu honte de lui dans ce monde corrompu où il est rejeté, le Fils de l’homme aura honte de lui quand il viendra dans la gloire de son Père, avec les saints anges.
Le Seigneur trouve maintenant l’occasion de manifester cette gloire personnelle qui lui appartient, afin d’affermir la foi des disciples. Il veut aussi montrer que bientôt il cesserait d’être présent en grâce comme Messie, au milieu l’Israël, et que la nouvelle gloire du Fils de l’homme avec les siens était sur le point d’être inaugurée, bien qu’il fût nécessaire d’attendre le temps où tous les cohéritiers seraient rassemblés. « En vérité, je vous dis », ainsi parle le Seigneur, « que de ceux qui sont ici présents, il y en a quelques-uns qui ne goûteront point la mort jusqu’à ce qu’ils aient vu le royaume de Dieu venu avec puissance ». Six jours après, le Seigneur monta sur une montagne avec Pierre, Jacques et Jean, et fut transfiguré devant eux. Ses vêtements devinrent brillants et d’une extrême blancheur, comme de la neige. Élie et Moïse apparurent avec lui, glorifiés de la même manière, et parlant avec lui. Nous savons que cette apparition était la manifestation du règne glorieux de Christ sur la terre.
Nous lisons dans la seconde épître de Pierre, chap. 1:16-18 : « Car ce n’est pas en suivant des fables ingénieusement imaginées, que nous vous avons fait connaître la puissance et la venue de notre Seigneur Jésus Christ, mais comme ayant été témoins oculaires de sa majesté. Car il reçut de Dieu le Père honneur et gloire, lorsqu’une telle voix lui fut adressée par la gloire magnifique : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir. Et nous, nous entendîmes cette voix, venue du ciel, étant avec lui sur la sainte montagne ». Telles sont les paroles de l’apôtre Pierre, rapportant ce qui lui était arrivé quand il vit cette scène merveilleuse sur la montagne de la transfiguration. Nous apprenons, d’après cela, que le royaume était vu dans sa manifestation sur la terre, car c’est sur la terre qu’ils se trouvaient. La nuée lumineuse, qui couvrit les trois disciples, était l’habitation du Père, c’est de là que venait la voix, et c’est là qu’ils étaient entrés (voyez Luc 9).
Quel privilège pour de pauvres mortels, pour des pécheurs, d’avoir été capables de contempler le Fils de Dieu en gloire, et d’avoir été manifestés avec lui dans la même gloire sur la terre ; d’être ses compagnons, de converser avec lui ; de posséder le témoignage qu’ils ont été aimés comme lui a été aimé (Jean 17:23) ; d’être avec lui et semblables à lui en toutes choses comme Homme, pour sa propre gloire ! Preuve merveilleuse de la valeur de la rédemption qu’il a accomplie ! Et, plus près nous serons de lui, plus nous l’adorerons, étant avec lui, comme cela aura lieu dans la maison du Père. Ici, notre évangéliste ne parle pas du royaume ; mais, en comparant ce passage avec Luc 9, nous trouvons néanmoins vrai qu’ils entrèrent dans la nuée d’où sortit la voix du Père.
Il était selon le conseil de Dieu que nous fussions avec Christ, le second homme, le dernier Adam, et que nous fussions dans la même gloire que lui. Nous sommes prédestinés à être conformes à l’image de son Fils, afin qu’il soit le premier-né entre plusieurs frères. C’est pour cela qu’il est devenu un homme ; celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés sont tous d’un, et c’est pourquoi il n’a pas honte de nous appeler frères. Que serait un rédempteur sans ses rachetés ? Très assurément, c’est une chose beaucoup plus excellente d’être les compagnons de Jésus dans la maison du Père, plutôt que cohéritiers de sa gloire dans le monde ; toutefois, l’une et l’autre de ces deux choses sont merveilleuses pour de pauvres créatures telles que nous. Élie et Moïse sont dans la même gloire que Jésus, et nous lui serons semblables lorsqu’il apparaîtra.
Mais la gloire personnelle du Seigneur est toujours maintenue. Pierre aurait voulu faire trois tentes, l’une pour Christ, l’autre pour Moïse, et la troisième pour Élie ; il plaçait ainsi le Seigneur sur le même pied que ces deux serviteurs de Dieu — les considérant comme les trois grands caractères de l’histoire d’Israël. Mais aussitôt Moïse et Élie disparaissent, la voix du Père reconnaît Jésus comme son Fils bien-aimé, et c’est le témoignage de Jésus qu’il faut écouter. Tout ce qu’avaient dit Moïse et Élie était la vérité, la parole de Dieu, et, par leur moyen, nous apprenons à connaître les pensées de Dieu, mais ils rendent témoignage à Christ et non avec lui. C’est de lui seul que nous apprenons pleinement la volonté de Dieu et que sa vérité nous est entièrement révélée. Jésus est la vérité ; la grâce et la vérité sont venues par lui. La mort de Christ, sa résurrection et une rédemption parfaite, ont placé toutes choses sur un nouveau pied pour les hommes.
Les fidèles qui vivaient avant la venue du Seigneur, croyaient aux promesses et aux prophéties qui annonçaient sa venue, et par la foi ils étaient agréables à Dieu. Leurs péchés, commis durant le temps de la patience de Dieu, et que Dieu supportait parce qu’il savait ce qu’il ferait plus tard, leurs péchés sont pardonnés, et la justice de Dieu en les pardonnant est manifestée, maintenant que Christ est mort. Mais maintenant aussi, la justice de Dieu est manifestée, et la puissance de la vie divine est mise en évidence dans la résurrection de Jésus Christ. Tout est nouveau dans nos relations avec Dieu ; le voile est déchiré et nous entrons librement dans le lieu très saint. « Sans loi, la justice de Dieu est manifestée, témoignage lui étant rendu par la loi et par les prophètes ». Voici Moïse et Élie ; mais la gloire dans laquelle ils apparaissent est le fruit, non de la loi ni des prophètes, mais de l’oeuvre de Jésus Christ, et l’on ne peut la posséder que dans l’état de résurrection. La résurrection du Seigneur était aussi absolument nécessaire, comme étant la puissance de la vie au-delà de la mort ; de plus, elle était la preuve que Dieu avait accepté la mort de Christ comme réglant la question du péché. La gloire appartenait à un autre monde acquis par le sacrifice de Christ, le Fils de Dieu, pour ceux qui croient, bien que ce sacrifice ait dû s’accomplir dans ce monde-ci. Elle appartient donc à l’état dans lequel Christ, le second Adam, est entré par la résurrection, et qui est basé sur une rédemption accomplie.
Ainsi, bien que tout à fait propre à fortifier la foi et à accroître l’intelligence de ces trois colonnes de l’Église future, il ne fallait pas qu’il fût parlé de la transfiguration avant la résurrection du Seigneur, et Jésus défendit à ses disciples de dire à personne les choses qu’ils avaient vues, avant que le Fils de l’homme eût été ressuscité d’entre les morts. Remarquez ce qui est dit à ce propos : « Ils gardèrent cette parole, s’entre-demandant ce que c’était que ressusciter d’entre les morts ». Cette expression « ressusciter d’entre les morts » jette une lumière toute nouvelle sur la résurrection. Christ ressuscita seul d’entre les morts et laissa tous les autres dans le sépulcre ; sa résurrection est la preuve que le Dieu de justice a accepté son oeuvre — son sacrifice — comme une pleine et entière satisfaction donnée à sa justice et à sa sainteté, et l’homme qui croit en lui est accepté de Dieu selon la valeur du sacrifice de Christ.
La résurrection des croyants a lieu aussi, parce que Dieu est pleinement satisfait à leur égard en vertu de l’oeuvre de Christ. Eux seuls ressusciteront à la venue du Seigneur, afin d’être avec lui pour toujours. Tous les disciples croyaient à la résurrection des morts, ayant été ainsi enseignés par les pharisiens ; ils n’étaient pas comme les sadducéens qui niaient la résurrection, mais ils croyaient que tous les Juifs ressusciteraient en même temps, de sorte qu’ils ne comprenaient pas ce que signifiait une résurrection qui séparerait les bons d’avec les méchants, et laisserait ces derniers dans le sépulcre pendant un certain temps. Christ est les prémices de la résurrection des saints et non des méchants. Ceux qui sont de Christ ressusciteront à sa venue, et leurs corps d’infirmité seront changés en la ressemblance du corps glorieux du Seigneur. Il y a encore maintenant des chrétiens qui, de même que les disciples, ne comprennent pas les paroles du Seigneur. Ils ont une foi semblable à celle des pharisiens ; ils croient, à la vérité, qu’il y aura une résurrection, mais comme Marthe, ils pensent que tous ressusciteront au dernier jour. La seule différence est que Marthe et ses compatriotes croyaient que les Juifs seuls ressusciteraient, tandis que les chrétiens dont je parle croient que les bons et les méchants seront ressuscités ensemble.
Il est tout à fait vrai que tous ressusciteront, mais la vraie foi en Christ (remarquez-le, cher lecteur), la vraie foi établit déjà une différence pour ceux qui la possèdent. Celui qui n’a pas cru reste dans ses péchés et ressuscitera pour le jugement ; le vrai croyant ressuscitera pour la résurrection de vie. Ainsi que l’apôtre le dit aux Corinthiens (1 Cor. 15), il ressuscitera en gloire. Lorsque le Seigneur viendra, il transformera notre corps d’abaissement en la conformité du corps de sa gloire. Christ est les prémices de la résurrection, mais assurément pas de celle des méchants. Nulle part dans l’Écriture, nous ne trouvons une résurrection commune aux bons et aux méchants. En Luc 14:14, il est question de la résurrection des justes, et plus loin (chap. 20:35), le Seigneur parle de « ceux qui seront estimés dignes d’avoir part à ce siècle-là et à la résurrection d’entre les morts ». En écrivant aux Corinthiens, l’apôtre dit aussi, en parlant de la résurrection : « Chacun dans son propre rang : les prémices, Christ ; puis ceux qui sont du Christ, à sa venue » (1 Cor. 15:23).
La même vérité est enseignée aux Thessaloniciens : « Les morts en Christ ressusciteront premièrement » (1 Thess. 4:16) ; et nous la retrouvons partout. Pour appuyer le fait d’une résurrection générale, on cite souvent le chap. 25 de Matthieu (v. 31, etc.), mais, dans ce passage, il n’est pas question de résurrection, ni de corps ressuscités ; ce n’est pas un jugement universel, mais celui des nations sur la terre ; le jugement de ceux à qui l’évangile éternel aura été annoncé à la fin du siècle (Apoc. 14). Il ne s’y trouve pas deux classes de personnes seulement, mais trois : les brebis, les chèvres et les frères du Juge. Ici , le principe du jugement n’est pas celui du jugement universel. On est jugé selon la manière dont on a reçu et estimé les frères du Juge, c’est-à-dire les messagers de l’évangile éternel, nommé, au chap. 24, « l’évangile du royaume ».
Les principes du jugement général des nations sont expliqués dans les chapitres 1 et 2 de l’épître aux Romains, et ils sont tout à fait différents. Je parle de Matt. 25, parce que c’est le seul passage que l’on cite contre le témoignage uniforme des saintes Écritures, établissant une résurrection distincte des croyants selon la déclaration du Seigneur : « En vérité, en vérité, je vous dis que celui qui entend ma parole, et qui croit celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle et ne vient pas en jugement ; mais il est passé de la mort à la vie » (Jean 5:24). Nous paraîtrons devant le tribunal du Christ, cela est certain, et chacun de nous rendra compte pour lui-même à Dieu. Mais quand les croyants se trouveront devant le tribunal de Christ, ils auront déjà été glorifiés, ressuscités en gloire, et faits semblables à Christ glorifié comme homme. « Quand il sera manifesté, nous lui serons semblables », — c’est pour cela que « quiconque a cette espérance en lui se purifie, comme lui est pur ».
À sa première venue, Christ a ôté le péché par rapport au jugement ; pour les croyants, il apparaîtra une seconde fois pour leur parfait salut, afin de les prendre auprès de lui, et de les glorifier. Leurs esprits sont avec lui dans le ciel, en attendant cette heure où la résurrection de leurs corps aura lieu quand il reviendra, et alors nous serons toujours avec le Seigneur. Cependant, quand nous serons glorifiés, nous nous rendrons compte de toutes choses ; nous connaîtrons, comme nous avons été connus. Ainsi, il y aura une résurrection d’entre les morts.
La difficulté dont les scribes parlaient — c’est-à-dire qu’Élie devait venir avant le Messie — se présente aux disciples. Or les scribes exerçaient une grande influence sur eux. On trouve, en effet, cette prophétie dans Malachie ; elle sera certainement accomplie, avant que le Seigneur vienne en gloire, quel que soit d’ailleurs le mode de son accomplissement. Mais il est d’abord venu en humiliation, et caché, pour ainsi dire, quant à sa gloire extérieure. Il est entré par la porte comme le Berger des brebis, afin que la foi, perçant à travers l’obscurité de sa position et de sa vie journalière, pût discerner non seulement un Messie venu pour Israël selon les promesses, mais l’amour et la puissance de Dieu lui-même, et pût se trouver en présence de sa sainteté.
Les Juifs auraient reçu avec joie un Messie qui les aurait délivrés du joug des Romains ; mais la présence de Dieu est insupportable aux hommes, même lorsqu’il se montre au milieu d’eux en bonté. Le Seigneur fait allusion à sa venue encore à venir, lorsqu’il dit : Car je vous dis que « vous n’aurez point achevé de parcourir les villes d’Israël, que le Fils de l’homme ne soit venu » (Matt. 10:23). Mais maintenant, il paraît dans l’humiliation, fait un peu moindre que les anges à cause de la passion de la mort ; c’est-à-dire afin d’être capable de souffrir. De même aussi, Jean le baptiseur vint dans l’esprit et la puissance d’Élie, selon Ésaïe 40, et Mal. 3, afin de préparer le chemin du Seigneur. Ainsi, le Seigneur répond : Élie doit venir, les scribes ont raison ; Élie viendra et rétablira toutes choses. Mais comme il était nécessaire aussi que le Fils de l’homme souffrît et qu’il fût entièrement méprisé, il en est de même de son précurseur ; c’est pourquoi Jésus ajoute, en parlant de Jean : Mais je vous dis qu’Élie est déjà venu, « et ils lui ont fait tout ce qu’ils ont voulu ».
Le Seigneur avait été manifesté dans sa gloire, devant les yeux de ses disciples, sur la montagne de la transfiguration ; maintenant il redescend et s’occupe des misères des hommes sur la terre ; et ce qui se passe quand il vient vers ses disciples montre, d’une manière remarquable, sa patience et les voies de Dieu. Il trouve une grande foule et les scribes disputant avec les disciples. Il est précieux de remarquer que, si le Seigneur est reconnu comme Fils de Dieu, et sera bientôt manifesté en gloire et nous avec lui, il descend néanmoins dans ce monde — et c’est ce qu’il fait encore par son Esprit — et rencontre la foule et, pour nous, la puissance de Satan. — Notons aussi qu’il parle avec ses disciples aussi intimement qu’avec Moïse et Élie. Combien grande est sa grâce ! Mais l’exercice de cette grâce fait ressortir la position et l’état de l’homme et des disciples.
Un pauvre père a recours au Seigneur pour son fils possédé d’un mauvais esprit, qui le rend muet et sourd et lui cause de grandes souffrances. Cet homme dit au Seigneur qu’il a amené l’enfant aux disciples, et qu’ils n’ont pu chasser l’esprit immonde. Telle est leur position : non seulement le Seigneur rencontre l’incrédulité, mais, bien que la puissance divine soit sur la terre, les croyants mêmes ne savent pas comment s’en servir. C’était donc en vain que le Seigneur était présent dans le monde ; il opérait des miracles, mais l’homme ne savait en tirer aucun profit, ni en user par la foi. C’était une génération incrédule, et il ne pouvait demeurer ici-bas. Ce n’était pas la présence ni la puissance des démons qui le chassaient, car c’était au contraire ce qui l’avait fait descendre sur la terre ; mais, lorsque ses disciples ne savaient pas profiter de la puissance et de la bénédiction qu’il avait apportées dans le monde et placées au milieu d’eux, la dispensation caractérisée par ces dons tendait à sa fin. Ce n’était pas à cause de l’incrédulité qui se trouvait dans le monde, mais parce que ses propres disciples ne pouvaient pas réaliser la puissance mise à leur disposition, et qu’en conséquence le témoignage de Dieu tombait par terre, était détruit, au lieu d’être établi. Puisque ses disciples, ceux à qui appartenait ce témoignage, ne pouvaient rien en face de la puissance de l’ennemi, l’ennemi était donc trop fort pour eux.
« Ô génération incrédule », dit le Seigneur, « jusques à quand serai-je avec vous ? jusques à quand vous supporterai-je ? » Son service sur la terre était achevé. Mais voyez la patience et la bonté du Seigneur ; il ne peut se renier lui-même. Aussi longtemps qu’il est sur la terre, il agit selon sa puissance et sa grâce, et cela malgré l’incrédulité des siens. Il achève les paroles par lesquelles il réprouve leur manque de foi en disant : « Amenez-le-moi ». La foi, si petite soit-elle, n’est jamais laissée sans réponse de la part du Seigneur. Quelle consolation ! Quelle que soit l’incrédulité, non seulement du monde, mais des chrétiens, s’il se trouve une seule personne ayant foi dans la bonté et la puissance du Seigneur Jésus, elle ne peut venir à lui avec un vrai besoin et une foi simple, sans rencontrer son coeur prêt à la recevoir, et sa puissance suffisante pour la secourir.
L’Église peut être en ruines, comme l’était Israël, mais son Chef suffit à tout ; il connaît l’état des siens, et ne manquera pas de suppléer à leurs besoins. L’état de l’enfant était très dangereux ; le mauvais esprit l’avait possédé dès son bas âge. La foi du père était faible, mais sincère ; il dit au Seigneur : « Si tu peux quelque chose, assiste-nous, étant ému de compassion envers nous ». La réponse du Seigneur est remarquable . « Le « Si tu peux », c’est : Crois ! toutes choses sont possibles à celui qui croit ». La puissance est en rapport avec la foi ; la difficulté n’est pas dans la puissance de Christ, mais dans la foi de l’homme : toutes choses sont possibles à celui qui croit. C’est un principe important. La puissance de Christ ne manque jamais pour accomplir tout ce qui est bon pour l’homme ; mais, hélas ! la foi peut manquer en nous pour en profiter. Cependant le Seigneur est plein de bonté ; le pauvre père s’écrie avec larmes : « Je crois, viens en aide à mon incrédulité », paroles sincères, venant d’un coeur ému dans lequel le Seigneur a déjà réveillé la foi. Ce qui l’affaiblissait était l’anxiété pour son fils.
Le Seigneur, voulant éviter la vaine curiosité de la foule, et pensant plutôt aux besoins du père et du fils, commande avec autorité à l’esprit immonde de sortir de l’enfant et de ne plus y rentrer. L’esprit sort, en montrant son pouvoir, car il déchire l’enfant et le laisse comme mort, mais en même temps, il témoigne de son absolu assujettissement à l’autorité du Seigneur. Il est très beau de voir que le Seigneur, après avoir quitté la gloire, va rencontrer l’incrédulité du monde et de ses disciples, ainsi que la faiblesse de la foi de ceux qui en ont besoin, et cela en présence de la grande puissance de l’ennemi. Le Seigneur ne nous tient pas à distance de lui ; il prend part à nos douleurs, il encourage notre faible foi, et, d’un seul mot, chasse loin toute la puissance de l’ennemi. Ni sa gloire, ni l’incrédulité du monde qui le rejetait, ne l’empêchaient d’être le refuge et le remède pour la plus pauvre foi. Il s’intéresse à nous, pense à nous, et nous aide.
Quoique le Seigneur soit placé dans la gloire selon ses droits, cela n’affaiblit pas son amour pour la pauvre humanité. Mais nous trouvons encore une leçon importante à la fin de cette histoire. La foi énergique qui opère, soit les miracles qui arrivaient en ce temps, soit les grandes choses du royaume de Dieu, est soutenue par une intime communion avec Dieu, par la prière et le jeûne. L’âme sort d’auprès de Dieu pour chasser la puissance de l’ennemi. Mais quelle que soit la grâce du Seigneur et sa puissance, une plus grande oeuvre restait encore à faire, oeuvre grande pour le Seigneur lui-même, oeuvre que lui seul pouvait accomplir — difficile, sans doute, à apprendre pour le coeur de l’homme, mais absolument nécessaire pour la gloire de Dieu ainsi que pour notre rédemption et notre salut ; c’était aussi une leçon que chacun doit apprendre, afin de pouvoir marcher dans les voies du Seigneur. L’oeuvre était celle de la croix, et la salutaire leçon qu’elle nous enseigne, c’est que nous devons porter notre propre croix.
Maintenant que la gloire future, la gloire du royaume, a été révélée ; maintenant que le Seigneur a manifesté sa puissance et sa parfaite bonté en dépit de l’incrédulité du monde qu’il allait quitter après en avoir été rejeté, il prend ses disciples à part, traversant avec eux la Galilée, sans vouloir qu’on le sût, et il leur fait entendre que le Fils de l’homme devait être livré entre les mains des hommes qui le mettraient à mort. Il prend cd titre de Fils de l’homme, parce qu’il ne pouvait plus rester sur la terre comme le Messie promis, mais devait accomplir l’oeuvre de la rédemption. Mais, après avoir été mis à mort, il devait ressusciter le troisième jour. Voici donc la rédemption accomplie, et toutes choses faites nouvelles ; l’homme, tout au moins le croyant en Jésus, est mis sur un pied entièrement nouveau.
L’homme ressuscité ne se trouve point du tout dans la même condition qu’Adam dans son innocence — je ne parle pas maintenant des hommes perdus ; bien que ce soit vrai pour eux, c’est cependant une chose toute différente. Adam jouissait de la bénédiction naturelle qui appartient à une créature ; mais sa fidélité devait être mise à l’épreuve, et il succomba. Il est tout à fait vrai que le pécheur n’est pas dans la condition du racheté ; mais dans le cas d’Adam, tout dépendait de sa responsabilité. En Christ ressuscité, nous voyons l’homme pleinement éprouvé et démontré parfait ; éprouvé jusqu’à la mort, dans laquelle il a glorifié Dieu lui-même. De plus, il a porté nos péchés et les a ôtés pour toujours ; il s’est soumis à la mort, mais il l’a vaincue et en est sorti ; il a subi le coup du jugement de Dieu contre le péché. Comme prince de ce monde, Satan avait déjà employé toute sa puissance dans la mort de Jésus ; mais il n’était pas possible que le Seigneur fût retenu dans la mort, de sorte qu’au lieu de demeurer sous l’épreuve où il s’était placé par amour pour nous et afin de glorifier son Père, Jésus ressuscité est en dehors de toutes ces choses, et nous y sommes en lui par la foi et l’espérance qu’inspire le Saint Esprit qui nous unit au Sauveur.
La mort, à laquelle Adam avait été assujetti à cause du péché, est vaincue ; nos péchés sont abolis devant Dieu ; nous sommes parfaits pour toujours quant à la conscience ; une nouvelle condition de vie a commencé pour nous, vie entièrement nouvelle et céleste, avec la gloire pour terme, gloire déjà réalisée pour Christ là où il était avec le Père avant la fondation du monde. « Comme il est, lui, nous sommes, nous aussi, dans ce monde » (c’est-à-dire en assurance devant le jugement de Dieu — et nous attendons la résurrection de nos corps. Mais la position de Christ comme homme glorifié est le fruit provenant de ce qu’il a pleinement glorifié Dieu, et nous, qui avons part à sa vie par l’opération du Saint Esprit, nous participons déjà maintenant au fruit de son oeuvre, quant à notre position devant Dieu, et plus tard nous lui serons parfaitement semblables. Adam innocent était heureux, mais son état dépendait de son obéissance. L’état de Christ comme homme est le résultat d’une obéissance parfaite et complète, l’épreuve ayant été jusqu’à boire la coupe de la mort et de la malédiction, lorsqu’il fut fait péché pour nous.
Le premier état, celui d’Adam, était exposé au changement, et une ruine entière y fut amenée par la chute ; le second demeure immuable, étant établi sur une oeuvre qui ne peut jamais perdre sa valeur. En participant à la vie de Jésus, nous sommes déjà introduits dans les relations où il nous place auprès du Père : « Je monte », dit-il après sa résurrection, « vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu ». Mais afin d’accomplir toutes ces choses, il fallait qu’il passât par la mort, et qu’il subît la croix, afin de boire la coupe que son Père lui avait donnée. Il engage donc, pour ainsi dire, ses disciples avec la croix, et leur enseigne à l’attendre. Mais qu’est-ce que l’homme ? Ce qui suit nous l’apprend.
Le Seigneur, ayant la conscience de la gloire qui lui appartenait et dans laquelle le Père l’avait reconnu, peu de temps auparavant, comme son Fils bien-aimé, et sachant en même temps que, pour amener plusieurs fils avec lui dans cette gloire, la croix était absolument nécessaire, parle de la croix à ses disciples et insiste sur la nécessité, pour eux, de la porter. C’était le sentier pour arriver à la gloire dont sa propre mort était le fondement. Le coeur du Seigneur était rempli de la pensée des souffrances qui devaient l’accompagner, de la coupe qu’il devait boire, et de la nécessité pour ses disciples de comprendre ce sentier et de prendre leur croix. Mais de quoi le coeur des disciples était-il rempli ? Ils se demandaient entre eux lequel d’eux serait le plus grand ? Hélas ! combien notre coeur est incapable de recevoir les pensées de Dieu, de penser à un Sauveur humilié, pour nous, jusqu’à la mort ! Il est vrai que l’Esprit de Dieu met ici en contraste le règne du Messie que les Juifs attendaient, et le règne céleste et glorieux que le Seigneur établissait et pour lequel sa mort était nécessaire ; mais le contraste se montre ainsi fortement dans le coeur de l’homme. Il aimerait à être grand dans un royaume établi selon la gloire et la puissance de l’homme ; il estimerait bon que Dieu condescendît à cela ; mais que la gloire de Dieu soit exaltée et établie moralement, et la vaine gloire de l’homme mise à néant, manifestant ainsi ce que l’homme est ; que l’amour, la sainteté et la justice de Dieu soient mis en lumière — tout cela, l’homme ne le cherche ni ne le désire. Et lorsque le Seigneur, rempli de ces solennelles vérités et de la pensée des souffrances par lesquelles il lui fallait passer pour les réaliser, en parle à ses disciples, ceux-ci disputent entre eux pour savoir lequel serait le plus grand. Combien le coeur de l’homme est une pauvre et misérable chose !
Quelle incapacité de comprendre les pensées de Dieu, de sentir la tendresse et la fidélité du coeur de Jésus et les sentiments qui s’y pressaient ! C’était l’amour divin se manifestant dans le coeur d’un homme ; Dieu, comme homme, au milieu des hommes en qui se trouvait une incapacité morale d’entrer dans ses pensées. Ainsi se montre le contraste, l’entier contraste entre nos pensées naturelles et celles de Jésus. Dieu veuille, dans sa grâce, nous accorder de tenir la chair si entièrement soumise, que le Saint Esprit puisse être la source de toutes nos pensées et de tous les mouvements de nos coeurs ! Néanmoins, la conscience ne se tait point quand la parole du Seigneur nous a atteints ; nous savons bien que le désir de la vaine gloire est une chose mauvaise, qui ne convient pas à Christ ; et lorsqu’il nous parle, nous sommes rendus honteux d’avoir nourri de telles pensées. Les disciples se taisent, parce que leur conscience parle.
Alors le Seigneur, dans son patient amour, se met à les enseigner. Il s’assied et appelle les douze. Il pense toujours à nous. Il place devant eux plusieurs principes, dans lesquels nous voyons les conséquences de l’opposition du monde à Christ, et l’introduction d’une nouvelle relation avec Dieu en Christ ressuscité. Ces principes demandent quelques explications. Le point important ici, le fondement de toutes les exhortations du Seigneur et de tout ce qu’il dit, est ceci : que la gloire du royaume à venir a été révélée, et qu’avec cette révélation vient la croix. C’est la fin de toutes les relations entre Dieu et Israël, et, en réalité, entre Dieu et l’homme, sauf celle de la grâce souveraine et le principe d’une relation nouvelle et céleste par la foi. Mais Christ, le Messie selon les promesses en Israël, Dieu manifesté en chair, la dernière espérance pour l’homme tel qu’il était sur la terre, Christ était rejeté. La relation entre Dieu et l’homme était rompue. Quelqu’un pouvait-il chercher quelque gloire ici-bas sachant que Christ était rejeté ? Quelle était la disposition qui, dans de telles circonstances, convenait à un disciple de Christ ? L’humilité ; celui qui voulait être le premier, devait être le dernier et le serviteur de tous. Alors Jésus prend un petit enfant et le place au milieu de ses disciples, puis il leur dit que quiconque reçoit un tel petit enfant en son nom, le reçoit lui-même, et que celui qui le recevait lui, le Christ, recevait le Père qui l’avait envoyé. Le nom de Christ est la pierre de touche ; la seule chose sur la terre réellement grande pour la foi.
Nous trouvons ensuite un reproche adressé par Christ à ses disciples pour un acte qui, en lui-même, dénotait de l’amour pour Jésus, bien qu’exprimé sous une forme rude et grossière ; mais cet acte, en même temps, trahissait quelque chose qui était au fond de leur coeur. Ils semblaient n’avoir en vue que la gloire de Christ, mais leur amour, en soi, n’était pas entièrement pur ; s’ils voulaient maintenir la gloire du nom de Christ, c’était en se rattachant eux-mêmes à cette gloire : « Nous avons vu quelqu’un qui chassait des démons en ton nom, qui ne nous suit pas ; et nous le lui avons défendu, parce qu’il ne nous suit pas ». Comme ce mot « nous » montre bien l’amour de soi le plus subtil ! Subtil, en vérité, et d’autant plus dangereux. La réponse du Seigneur fait voir combien il était entièrement rejeté : « Celui qui n’est pas contre nous est pour nous », parce que le monde entier était et est encore contre lui, et ainsi personne ne pouvait faire un miracle en son nom et, en même temps, parler mal de lui. Le nom de Christ est tout ; laissons de côté ce misérable « nous », et retenons fermement Christ.
Le verset 41 montre aussi, qu’en effet, le nom de Christ est tout dans un monde qui l’a rejeté. Mais quel témoignage quant à l’état de l’homme et à l’opposition profonde de son coeur contre Dieu révélé en Christ ! Si quelqu’un n’était pas contre lui, il était pour lui. Ainsi, le monde était complètement l’ennemi de Dieu.
Quelques conséquences importantes résultent de cet état. En tout premier lieu, la moindre manifestation d’amour et d’intérêt pour Christ, montrant la puissance de son nom sur le coeur, n’est pas oubliée de Dieu. Quel tableau de l’état des choses et de la patience de Christ, qui s’humiliait lui-même jusqu’à être rejeté et méprisé, et qui cependant n’oubliait pas le plus faible gage d’affection qui lui était donné, le plus faible désir pour sa gloire ! Nous voyons ensuite une autre conséquence de cette position. Le Seigneur ne veut pas qu’un petit enfant, qui croit en lui, soit méprisé. Il estime ces petits, parce que leurs coeurs reconnaissent son nom, parce qu’ils croient en lui, et c’est pourquoi ils ont une grande valeur devant Dieu. Malheur à celui qui les méprise et qui place devant leurs pieds une pierre d’achoppement ; il vaudrait mieux pour lui d’être noyé dans les profondeurs de la mer. Néanmoins, quant à ceux qui croient, tout dépend de la fidélité à Christ ; et à cause de cela, ils ont à se dégager de toutes les choses qui tendent à séparer de Christ, qui conduisent au péché, et qui produisent l’apostasie du coeur, aussi bien que l’apostasie extérieure. Dieu gardera les siens, je le crois, mais il les gardera en les rendant obéissants à sa parole.
Quoi qu’il puisse nous en coûter, il faut se séparer de tout ce qui serait une occasion de chute ; est-ce un oeil, il faut l’arracher ; est-ce une main, il faut la couper ; en un mot, la chose la plus précieuse possible doit être sacrifiée, car mieux vaut jouir d’une éternité de bonheur avec Christ que de conserver une main droite et d’être jeté dans les tourments éternels, « où leur ver ne meurt pas et où le feu ne s’éteint pas ».
De plus, Dieu met toutes choses à l’épreuve ; le feu de son jugement est appliqué à tout, aux saints comme aux pécheurs. Dans les saints, il consume les scories, afin que l’or pur brille de tout son éclat ; dans le cas des pécheurs, c’est le feu de Dieu et les peines éternelles, selon son juste jugement : « le feu qui ne s’éteint pas ». Tout sacrifice sera salé de sel est une allusion à Lév. 2:13. Le sel représente la puissance du Saint Esprit, non pas exactement pour produire la grâce seule, mais pour nous garder de tout ce qui est impur, et pour produire la sainteté dans un coeur dévoué à Dieu et qui introduit Dieu dans son sentier ; ainsi dans le coeur, il y a un lien avec lui-même qui nous garde de toute corruption. Nous sommes appelés à conserver cela dans nos coeurs et à appliquer le sentiment de sa présence à tout ce qui se passe au-dedans de nous, et à en juger par ce moyen.
Mais remarquez que le croyant est le vrai sacrifice offert à Dieu. « Je vous exhorte donc, frères, par les compassions de Dieu », dit l’apôtre, « à présenter vos corps en sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui est votre service intelligent » (Rom. 12:1). Un service intelligent, nous voyons là le vrai sacrifice ; de plus, cette sainte grâce, qui nous garde de tout ce qui est mal et impur, fait sentir son influence en nous, et le chrétien rempli de sainteté pratique est ainsi un témoin dans le monde. Tel est, en effet, l’état normal des chrétiens dans ce monde ; être au milieu du monde des témoins d’une puissance qui non seulement purifie, mais qui préserve de la corruption. Le sel agit sur d’autres choses et y produit cet effet ; mais si le sel lui-même perd sa saveur, avec quoi la lui rendra-t-on ? Si les chrétiens perdent leur sainteté pratique, à quoi sont-ils bons ? « Ayez du sel en vous-mêmes », dit le Seigneur. Il veut que nous soyons diligents afin que nos âmes, dans notre marche, soient ainsi sanctifiées devant Dieu, et ensuite manifestées devant le monde ; afin que nous jugions en nous-mêmes tout ce qui peut diminuer en nous la clarté et la pureté de notre témoignage, et afin que nous marchions en paix avec les autres, étant gouvernés par un esprit de paix dans nos relations avec eux.
Nous trouvons dans ce chapitre qui termine l’histoire de la vie de Christ, quelques principes importants. Dans les trois premiers évangiles, le récit des circonstances qui accompagnent la mort du Seigneur commence avec la guérison de l’aveugle près de Jéricho ; c’est ce que nous avons aux v. 46 à 52 de notre chapitre. Le premier principe qui nous est présenté est la corruption et la ruine de ce que Dieu a créé ici-bas. Dans les relations que lui-même a établies, le péché est entré et exerce ses pernicieuses influences. Dans les relations de la vie ici-bas, la loi même de Moïse permettait, à cause de la dureté du coeur de l’homme, des choses qui n’étaient pas selon les pensées et la volonté effective de Dieu.
Mais si les hommes sont incapables de vivre à la hauteur de leurs relations avec Dieu, et si Dieu les supporte dans des choses qui ne sont pas selon la perfection des relations qu’il a établies, il ne condamne pas ces relations et il ne cesse jamais de les reconnaître comme étant ce qu’il a établi au commencement. Ce qui a été établi par lui au commencement subsiste toujours, et il maintient ces relations par son autorité. La création en elle-même est bonne, mais l’homme l’a gâtée ; néanmoins, Dieu reconnaît ce qu’il a fait et les relations dans lesquelles il a placé l’homme qui est responsable de garder ce à quoi elles l’obligent. Il est vrai que Dieu, après la mort de Christ, a introduit une puissance qui n’est pas de cette création — celle du Saint Esprit ; et par cette puissance, un homme peut vivre en dehors de toutes les relations de l’ancienne création, si Dieu l’y appelle ; mais alors même il devra respecter ces relations là où elles existent.
Les pharisiens viennent demander à Jésus s’il est permis à un homme de répudier sa femme. Le Seigneur prend occasion de leurs questions pour insister sur cette vérité, que ce que Dieu a établi dès le commencement de la création subsiste toujours en soi-même. Moïse, dans la loi, avait permis à un homme de répudier sa femme ; c’était un effet du support de Dieu envers la dureté du coeur de l’homme, mais ce n’était pas selon le coeur et la volonté de Dieu. Au commencement Dieu avait fait ce qui était bon — faible, mais bon. Il permit d’autres choses, lorsqu’il ordonna provisoirement l’état de son peuple, de l’homme déchu ; mais il avait fait les choses différemment quand il les créa. Dieu avait uni l’homme et la femme, et l’homme n’avait aucun droit de les séparer. Le lien ne doit pas être rompu.
On apporte encore au Seigneur de petits enfants, et les disciples reprennent ceux qui les apportent. Mais Jésus éprouve du déplaisir de l’acte des disciples. Bien que la racine du péché soit dans les enfants, néanmoins ils étaient l’expression de la simplicité, de la confiance, et de l’absence de la ruse et de la corruption causées par la connaissance du monde et la dépravation de la nature. Ils présentent au coeur la simplicité de la nature non corrompue, qui n’a pas connu la séduction du monde. Et le Seigneur, qui était un étranger dans le monde, reconnaît en eux ce que son Père avait créé.
Mais y a-t-il réellement quelque bien dans l’homme ? Les restes de ce que Dieu a créé, ce qui est beau et agréable, se trouvent dans ce qui est purement la créature. Ce qui vient de la main de Dieu est souvent beau et doit être reconnu comme venant de lui. La nature qui nous entoure est belle ; c’est Dieu qui l’a faite, bien que l’on y trouve des ronces et des épines. On voit aussi quelquefois quelque chose d’aimable dans le caractère d’un homme et même dans les dispositions d’un animal. Mais dans la question que nous avons faite, il s’agit du coeur de l’homme, de sa volonté, de ce qu’il est envers Dieu, et non de ce qui est naturel, le fruit de la création ; alors la réponse est qu’en lui il n’habite aucun bien. Il n’y a rien pour Dieu — tout est contre lui, et cela a été manifesté par le fait de la réjection de Christ.
C’est là une leçon que nous apprenons dans le récit qui suit. Un jeune homme accourt, se jette à genoux devant Jésus, et lui demande : « Bon maître, que ferai-je afin que j’hérite de la vie éternelle ? » Il était aimable, bien disposé, et prêt à apprendre ce qui était bon ; il avait été témoin de l’excellence de la vie et des oeuvres de Jésus, et son coeur était touché de ce qu’il avait vu. Il avait en lui toute l’attrayante ardeur de la jeunesse ; il n’était pas dépravé par l’habitude du péché, car le péché déprave le coeur. Extérieurement il avait gardé la loi ; il croyait que Jésus lui enseignerait les préceptes les plus élevés de la loi, car les Juifs mêmes pensaient que quelques commandements avaient une plus grande valeur que d’autres.
Ce jeune homme ne connaissait ni lui-même, ni l’état dans lequel
l’homme est réellement devant Dieu. Il était sous la loi, et Jésus met d’abord
en avant la loi comme règle de vie, donnée de Dieu comme mesure de la justice
pour les fils d’Adam. Le jeune homme ne demande pas comment il pourra être
sauvé, mais comment il pourra hériter de la vie éternelle. Le Seigneur ne parle
pas de la vie éternelle, mais prend le jeune homme au point où il se place
lui-même ; la loi dit : « Fais ces choses, et tu vivras ». Le jeune homme
déclare qu’il a gardé toutes ces choses dès sa jeunesse. Le Seigneur ne le nie
pas, il ne met pas la chose en question, et nous lisons, de plus, qu’il le
regarda et l’aima. Nous voyons ici que ce qui est aimable est aimé du Seigneur.
Mais quel était le vrai état de ce jeune homme ? Le Seigneur tire le
voile, et l’homme se trouve devant Dieu dans sa nudité, et Dieu devant l’homme
dans sa sainteté. Faire
quelque chose
n’est pas la question ; être sauvé est une autre chose.
Examinons ce que le Seigneur dit touchant l’état de l’homme. Le jeune homme s’adresse à lui, non comme au Fils de Dieu, mais comme à un rabbi, c’est-à-dire comme à un bon docteur en Israël. Il l’appelle : « Bon maître ». Le Seigneur ne veut pas admettre que l’homme est bon ; aucun juste ne se trouve parmi les hommes, non pas même un seul. Il dit : « Pourquoi m’appelles-tu bon ? Nul n’est bon, sinon un seul, Dieu ». Certainement Christ était bon, mais il était Dieu, quoique, dans son amour parfait, il se fût fait homme. Il était toujours Dieu, et Dieu devint un homme sans cesser, et sans pouvoir cesser, d’être Dieu ; seulement, il avait caché sa divinité, ou, au moins, sa gloire, sous la nature humaine, afin de s’approcher de nous ; car, pour la foi, la puissance et l’amour divins sont ainsi manifestés plus clairement que jamais. Mais le jeune homme vient à Christ comme à un maître humain, à un rabbi ; et le Seigneur lui répond d’une manière conforme à sa demande, et établit en même temps ce principe important que nul n’est bon d’entre les enfants d’Adam déchu. C’est une vérité humiliante, mais d’une immense portée. L’on ne peut maintenant trouver un seul homme qui soit bon par nature ; nous savons qu’il reste de la première création certaines qualités, mais ce que Dieu avait créé et déclaré être bon, a été corrompu par la chute. L’homme recherche ses propres plaisirs, ses propres intérêts, et non point Dieu et sa gloire. Il peut les chercher honnêtement ou malhonnêtement dans les marécages du péché, mais il cherche toujours à satisfaire sa propre volonté : il a perdu Dieu et se recherche lui-même.
Le Seigneur, ayant présenté au jeune homme les commandements de la loi, par lesquels un homme a la vie s’il les garde, ajoute dans une exhortation le commandement qui fit sentir à Paul ce que la loi produit dans l’état où l’homme se trouve — c’est-à-dire dans la mort. « Une, chose te manque », dit le Seigneur : « Va, vends tout ce que tu as… et viens, suis-moi ». La convoitise du coeur, ce qui s’y trouve caché, se montre ; le vrai état du jeune homme est mis à nu par cette simple mais puissante parole du Seigneur, qui connaît et éprouve le coeur. Les belles fleurs de l’arbre sauvage ne servent de rien ; les fruits sont ceux d’un coeur étranger à Dieu ; la sève est celle d’un mauvais arbre. L’amour des richesses gouverne le coeur de ce jeune homme, quelque intéressant qu’il fût quant à ses dispositions naturelles. Le vil désir de l’or est au fond de son coeur ; c’était le ressort principal de sa volonté, la vraie mesure de son état moral. S’il s’en va triste et quitte le Seigneur, c’est parce qu’il préfère l’argent à Dieu, manifesté en amour et en grâce.
Quelle chose solennelle que de se trouver en la présence de Celui qui sonde le coeur ! Mais c’est ce qui gouverne le coeur, c’est le mobile qui le fait agir qui est la vraie mesure de l’état moral d’un homme, et non point ses qualités naturelles quelque agréables qu’elles soient. On trouve de bonne qualités même chez les animaux ; on doit les estimer, mais elles ne font pas du tout connaître l’état moral du coeur. Un homme d’un caractère dur et méchant, qui s’efforce par la grâce de réprimer ses mauvaises dispositions, d’être aimable envers les autres et de plaire à Dieu, est plus moral et meilleur devant le Seigneur que celui qui, d’un caractère aimable par nature, cherche d’une manière agréable, auprès des autres, sa propre jouissance, sans conscience à l’égard de Dieu, c’est-à-dire sans penser à lui ; aimé des hommes, mais ne plaisant pas à Dieu qu’il oublie. Ce qui donne à l’homme son vrai caractère moral, c’est l’objet qui gouverne son coeur ; et c’est ce que le Seigneur fait voir ici d’une manière si puissante, qu’elle touche au vif l’orgueil du coeur humain.
Mais le Seigneur va plus loin ; les disciples qui pensaient avec tous les pharisiens de tous les temps, que l’homme peut faire quelque chose pour obtenir la vie éternelle, et qu’il doit gagner le ciel par ses efforts, tout en reconnaissant le besoin du secours de Dieu, — les disciples sont étonnés. Quoi ! un homme riche avec de si bonnes dispositions, un homme qui a gardé la loi et qui cherche seulement à savoir de leur Maître quel était le plus excellent commandement, afin de l’accomplir — un tel homme serait-il éloigné du royaume de Dieu ? Lui serait-il donc extrêmement difficile d’y entrer ? Si nous ne comprenons pas que nous sommes déjà perdus, que nous avons besoin d’être sauvés, qu’il s’agit de l’état du coeur, que tous les coeurs sont par nature éloignés de Dieu, et qu’ils cherchent un objet, l’objet de leurs propres désirs, loin de lui, qu’ils ne souhaitent pas qu’il soit présent avec eux, parce que la conscience sent que sa présence empêcherait le coeur de suivre son objet ; si nous n’avons pas appris cette vérité par grâce, nous sommes entièrement aveugles.
Au point où nous sommes arrivés dans ce passage, il était trop tard pour garder caché à l’homme (au moins aux disciples) le vrai état de son coeur. Cet état avait été manifesté ; l’homme n’avait pas voulu recevoir le Fils de Dieu. Il avait été ainsi démontré qu’avec les meilleures dispositions naturelles, l’homme, tout en gardant une moralité extérieure, préférait suivre l’objet de ses désirs plutôt que le Dieu d’amour présent sur la terre, ou plutôt qu’un maître qu’il avait reconnu posséder la plus haute connaissance de la volonté de Dieu. L’homme était perdu ; il l’avait montré en rejetant le Fils de Dieu ; il devait apprendre cette vérité et cette autre, qu’avec ses qualités les plus excellentes, il ne peut se sauver lui-même. « Et qui peut être sauvé ? » demandent les disciples. Le Seigneur ne cache pas la vérité : « Pour les hommes, cela est impossible », répond-il. Paroles solennelles, prononcées par le Seigneur, par celui qui est venu pour nous sauver. Il savait que l’homme ne peut pas se sauver lui-même, qu’il ne peut pas sortir, sans l’aide de Dieu, de l’état où il est tombé. Pour les hommes, c’est impossible ; mais alors Dieu intervient, dans son amour infini, afin de nous sauver, et non pour nous cacher notre état et le besoin que nous avons d’un salut gratuit.
Il faut que nous connaissions notre état . ce n’est pas une chose sur laquelle on puisse passer à la légère que le glorieux Fils de Dieu se soit anéanti lui-même et soit mort sur la croix — seul moyen de racheter et de sauver l’homme perdu. Nous devons nous connaître nous-mêmes, et savoir dans nos coeurs que nous sommes condamnés, afin de pouvoir comprendre que Christ a porté la condamnation à notre place, et qu’il a accompli l’oeuvre de notre salut selon la gloire de Dieu. Il fallait que notre état de péché et de condamnation fût démontré, et que l’amour, la parfaite justice, et la sainteté d’un Dieu qui ne peut voir le mal, quelque patient qu’il soit, fussent clairement manifestés et glorifiés. « Pour les hommes, cela est impossible, mais… toutes choses sont possibles pour Dieu ». Par l’oeuvre du Seigneur Jésus Christ, et par cette oeuvre seule, oeuvre dans laquelle les anges désirent regarder de près, tout cela peut être fait ; le salut est obtenu par la foi — par la foi, parce que tout est accompli. À Dieu soit la louange et la gloire ! Le Seigneur est glorifié comme homme dans le ciel, parce que cette oeuvre a été faite et que Dieu en a reconnu la perfection ; c’est à cause de cela qu’il a placé Christ à sa droite. Dieu a été satisfait et glorifié dans l’oeuvre de Christ.
« Pour les hommes, cela est impossible, mais… toutes choses sont possibles pour Dieu ». Qu’elle est grande cette grâce qui nous montre ce que nous sommes et ce que Dieu est ! « La grâce et la vérité vinrent par Jésus Christ ». Pensez à cela, frères. Cela signifie que nous devons attendre une croix dans ce monde. Soyez prêts à recevoir les paroles du Seigneur, à prendre la croix, afin d’acquérir une vraie connaissance de vous-mêmes ; c’est-à-dire que vous êtes perdu par le péché, que le salut est uniquement par grâce et impossible pour l’homme ; mais que l’oeuvre du salut est parfaite et complète, et que la justice de Dieu est sur tous ceux qui croient en Celui qui a accompli cette oeuvre. La vérité fondamentale du besoin d’un salut venant de Dieu et de l’état de l’homme, n’est nulle part dans l’Écriture plus clairement établie que dans ce passage.
Le Seigneur donne ensuite ses enseignements touchant le sentier de la croix et les promesses qui l’accompagnent ; considérons-les.
Il est aisé de voir combien l’histoire du jeune homme ressemble à celle de l’apôtre Paul : seulement, dans celui-ci la grâce avait tout changé. Quant à la justice qui est par la loi, il était sans reproche ; mais lorsque la spiritualité de la loi eut opéré dans son coeur, la convoitise y fut découverte. Alors il reconnut qu’en lui, c’est-à-dire dans sa chair, il n’habitait point de bien. Mais quand il eut été convaincu de péché, Dieu révéla son Fils en lui, et alors il comprit que ce qui était impossible pour l’homme était possible pour Dieu. Dieu avait fait pour lui ce que lui ne pouvait pas faire (c’est-à-dire obtenir une justice qui fût selon la loi), et il apprit que le péché dans la chair avait été condamné à la croix de Christ, et qu’un sacrifice pour le péché avait été accompli par lui. Au lieu de se trouver perdu dans cet état de péché, il devient un homme nouveau.
Mais le jeune homme, lui, reste dans son état précédent, et abandonne le Seigneur pour garder ses richesses, tandis que, pour Paul, les choses qu’il estimait un gain, il les regarde à cause du Christ comme une perte. « Et je regarde même aussi toutes choses comme étant une perte, à cause de l’excellence de la connaissance du Christ Jésus, mon Seigneur, à cause duquel j’ai fait la perte de toutes et je les estime comme des ordures, afin que je gagne Christ ».
Voyez ici la différence entre l’effet de la grâce et la nature humaine. Il y avait de la sagesse en Paul ; remarquez-le, il n’estima pas seulement toutes choses comme des ordures, à cause de l’excellence de la connaissance de Christ, au commencement, lorsque d’abord Christ fut révélé en lui, mais il continua à les estimer telles en marchant en communion avec le Seigneur.
Maintenant, nous trouvons les promesses faites à ceux qui auront marché ainsi, comme le sentier lui-même, tel que le Seigneur le représente. Pierre dit à Jésus que, pour lui et les autres apôtres, ils avaient tout quitté pour le suivre, comme le Seigneur l’avait proposé au jeune homme ; que devaient-ils donc avoir ? Jésus déclare dans sa réponse, qu’il n’est personne qui ait quitté maison, ou frères, ou soeurs, etc., pour l’amour de lui et de l’évangile, qui n’en reçoive cent fois autant dans cette vie, et dans le siècle à venir la vie éternelle. Ceux qui auront ainsi suivi Jésus jouiront de beaucoup plus que des misérables choses de cette vie, mais ils auront en même temps des persécutions. Ils ont ainsi la promesse de la vie présente, aussi bien que de celle qui est à venir ; non pas des richesses peut-être, mais ils auront la vraie jouissance de tout ce qui est dans le monde selon la volonté de Dieu et comme dons de la part de Dieu. Mais avec cela, ils auront à faire avec l’opposition d’un monde qui ne connaît pas Dieu. Ceux qui étaient les premiers dans le judaïsme, seront les derniers parmi les chrétiens.
Le Seigneur se met maintenant en chemin pour Jérusalem. Le coeur des disciples était plein du pressentiment des dangers qui les attendaient dans cette ville. Ils suivaient Jésus avec crainte et en tremblant, car la chair redoute la malice d’un monde qui, s’il ne peut rien contre Dieu, peut persécuter ceux qui le servent ici-bas. Ici encore, nous voyons ce qui distinguait l’effet de la grâce chez Paul qui, ayant abandonné tout pour l’amour de Christ, se réjouissait à la pensée de la communion de ses souffrances, étant rendu conforme à lui dans sa mort, connaissant et désirant connaître la puissance de sa résurrection. C’est ce que les disciples ne connaissaient pas, et ce que la chair ne peut jamais comprendre. Mais le Seigneur ne veut pas cacher la vérité ; il veut que les disciples connaissent la place qu’il allait prendre, et qu’ils auraient à prendre aussi. Il commence par leur dire les choses qui devaient lui arriver, et quel allait être le lot du Fils de l’homme. Il devait être livré aux mains des sacrificateurs, condamné et abandonné aux gentils, qui le traiteraient avec le plus grand mépris et le mettraient à mort ; mais le troisième jour, il devait ressusciter. Ainsi se termine l’histoire du Fils de l’homme parmi les hommes. Son propre peuple était le premier à le condamner, et les gentils, par leur indifférence, étaient prêts à achever l’acte terrible du rejet du Sauveur dans ce monde. Le peuple de Dieu (les Juifs) se joignait à l’homme pécheur pour rejeter le Fils de Dieu, venu en grâce ici-bas. Il était important pour les disciples de savoir quelle devait être la fin de leur Maître. Le Fils de l’homme devait mourir. C’est là son enseignement, et c’est le fondement de toute bénédiction ; mais c’est ce qui détruisait toutes les espérances et l’attente terrestres des disciples, et ce qui, en même temps, montrait que l’homme était mauvais, et Dieu infiniment bon.
Les pensées des disciples se font jour tout d’un coup, et forment un contraste frappant avec ce que le Seigneur déclarait solennellement. Ils semblent vraiment être impénétrables jusqu’à la fin à la vérité. Par grâce, ils aimaient le Sauveur, ils se réjouissaient dans la pensée que Jésus avait les paroles de la vie éternelle, — car le système pharisaïque même en parlait. Mais tout cela n’était pas suffisant pour chasser les pensées d’un royaume qu’ils croyaient devoir être établi sur la terre, ni pour ôter de leur coeur le désir charnel d’occuper, dans ce royaume, une haute position auprès de la personne du Seigneur. Jésus ne pouvait trouver personne capable de le comprendre, d’entrer dans les pensées de son coeur, et d’être touché par ses souffrances ; personne qui comprît ce qu’il expliquait à ses disciples touchant sa mort à Jérusalem, lorsqu’il les avait pris à part pour leur parler.
Jacques et Jean demandent d’être assis, l’un à sa droite, et l’autre à sa gauche, dans sa gloire. Il y avait de la foi en eux, car ils croyaient qu’il régnerait ; mais ce qui agissait en eux était toujours le désir de la chair. Dans sa réponse, le Seigneur, toujours rempli de bonté pour les siens, fait servir cette demande charnelle à l’instruction de ses disciples. Il n’était pas le seul qui dût porter la croix. Lui seul pouvait accomplir la rédemption par l’offrande de lui-même, le Fils de Dieu qui se donnait dans son amour pour être l’Agneau de Dieu. Mais, quant à leur marche sur la terre, il fallait que les disciples entrassent dans le même sentier que lui et le suivissent, s’ils voulaient être avec lui. Le Seigneur montre ici sa profonde humilité et sa soumission dans la place qu’il avait prise.
Il s’était anéanti lui-même, et il accepte de bon coeur cette place ; non pas qu’il fût insensible à l’humiliation et aux souffrances de la croix, mais il recevait tout de la main du Père et se soumettait à tout ce qui se rencontrait dans ce chemin.
« S’asseoir à ma droite ou à ma gauche, n’est pas à moi pour le donner, sinon à ceux pour lesquels cela est préparé ». Il ne possède pas le droit de promotion dans son royaume. Il laisse au Père le droit de choisir, et donne la gloire spéciale destinée à un service spécial à ceux pour qui elle est préparée, et que la grâce a préparés pour cette gloire. Sa portion à lui c’est la croix, et la croix conduit à la gloire, si quelqu’un veut le suivre comme son disciple : telle est la leçon que les siens doivent maintenant apprendre. Il était soumis à son Père, et recevait de sa main tout ce qui lui était préparé selon sa volonté ; et si les disciples désiraient le suivre, ils devaient prendre la croix qui se trouvait dans ce sentier et qui s’y trouve toujours. En outre, pour suivre Jésus, le disciple doit s’humilier lui-même, comme le Seigneur l’a fait ; il ne doit pas être comme les grands de ce monde qui se font grands en dehors de Dieu, mais il doit être le serviteur de tous en amour, ainsi que le fut le Sauveur, bien que par droit il fût le Seigneur de tous. L’amour est de toutes choses la plus puissante, et aime à servir, non à être servi. C’est ainsi que Dieu s’est manifesté lui-même, dans l’homme Jésus ; c’est le sentier où il a marché, et où nous devons le suivre. Celui qui est le plus petit à ses propres yeux, celui-là est le plus grand.
Ici se termine l’histoire du Sauveur sur la terre, et commence le récit des événements qui concernent sa mort. Il se présente pour la dernière fois à Jérusalem, et comme Fils de David, l’objet des promesses faites à Israël, et aussi afin d’être reçu par son peuple et par la cité bien-aimée ; mais en fait, c’était pour être rejeté et mis à mort. Jusqu’à ce temps, il parle (v. 45) du Fils de l’homme venu « pour servir et pour donner sa vie en rançon pour plusieurs » ; mais maintenant, il se présente dans la seule relation qu’il pût avoir avec son peuple selon la prophétie.
Jésus entre dans Jéricho, la cité maudite, mais il y entre selon la grâce qui s’élève au-dessus de la malédiction ; en fait, il allait pour la porter lui-même, pour être fait malédiction sur la croix. Le Fils de David vient en grâce, avec la puissance divine, capable d’accomplir toutes choses, mais dans l’humilité et la bassesse. Il répond donc à ce nom de Fils de David, et montre sa puissance en grâce dans la guérison de l’aveugle. La foule qui l’accompagne ne veut pas qu’il soit troublé, mais lui s’arrête et, dans sa grâce, prête l’oreille aux besoins de son peuple. Il commande que l’on appelle Bartimée, qui accourt près de lui avec joie. Sa misère, profondément sentie, est ce qui le fait accourir vers Christ, celui qui peut répondre à ses besoins et leur appliquer un remède efficace.
L’homme aveugle présentait un tableau frappant du sombre état des Juifs ; dans ce qui a lieu, nous voyons l’oeuvre du Seigneur produisant, par sa grâce, le sentiment du besoin chez un Juif à ce moment. Nul doute que ce ne soit vrai en tout temps, mais ce l’était spécialement des Juifs dans l’état où ils se trouvaient alors. Bartimée s’informant de la cause du bruit qu’il entendait, la foule lui répond que Jésus de Nazareth passait. Ce nom n’apportait avec lui aucune idée aux Juifs ; Nazareth était plutôt un nom auquel se rattachait l’opprobre. Mais, dans le coeur de l’aveugle, il y avait de la foi, selon la place que Jésus prenait par rapport à son peuple, et il s’écrie : Jésus, Fils de David ! Il reconnaît que Jésus avait droit à ce titre. Jésus répond à sa foi, et le guérit. L’aveugle, ayant recouvré la vue, suit le Seigneur dans le chemin.
C’est une peinture touchante de la position d’Israël et de l’oeuvre qui se faisait au milieu de ce peuple. Le Fils de Dieu, le Fils de David selon la chair, celui qui était l’accomplissement des promesses, était venu en grâce et avait la puissance de guérir Israël. Là, dans la place où le Fils de David était reconnu, la puissance qu’il apportait avec lui et qui était en lui, ôtait l’aveuglement. Israël était entièrement aveugle, mais la puissance divine était là pour guérir et s’il y avait assez de foi pour reconnaître en Jésus le Fils de David, l’aveuglement disparaissait. Il est beau de voir la grâce entrer là même où la malédiction était tombée, mais c’est la grâce qui opère, lorsque Jésus est reconnu comme Fils de David ; la grâce qui ouvre les yeux de l’aveugle, désormais son disciple.
Nous avons déjà vu que le Seigneur prend ici le titre de Fils de David, nom qui parlait de l’accomplissement des promesses et le constituait vrai Roi d’Israël. Habituellement et de préférence, il se nommait lui-même le Fils de l’homme, nom qui avait une signification beaucoup plus étendue et annonçait le droit à une domination et à un pouvoir bien plus vastes que ceux qui appartenaient au Fils de David. Il plaçait Christ en relation directe avec tous les hommes, et affirmait son droit et toute la gloire qui revenait au Fils de l’homme, selon les conseils de Dieu. Dans le Ps. 2, nous trouvons deux titres assignés au Messie — celui de Fils de Dieu donné à Jésus comme né ici-bas, dans ce monde, et celui de Roi d’Israël, bien que rejeté. Puis dans le Ps. 8 (après que l’état de son peuple a été développé dans les Ps. 3-7), nous voyons sa gloire et l’étendue de sa domination comme Fils de l’homme établi au-dessus de toutes choses. Au chap. 7 de Daniel, nous est encore montré le Fils de l’homme amené devant l’Ancien des jours, des mains duquel il reçoit la seigneurie sur toutes les nations.
Dans les chap. 11 et 12 de l’évangile de Jean, nous voyons que Christ ayant été rejeté par les hommes, Dieu veut qu’un témoignage complet, un triple témoignage, lui soit rendu, sous les trois caractères de Fils de Dieu, Fils de David et Fils de l’homme. Le premier, c’est à la résurrection de Lazare, le deuxième, à son entrée à Jérusalem, et le troisième, lorsque les Grecs demandent à voir Jésus, et que le Seigneur dit : « L’heure est venue pour que le Fils de l’homme soit glorifié. En vérité, en vérité, je vous dis : À moins que le grain de blé, tombant en terre, ne meure, il demeure seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit ». Pour prendre possession de ces titres, et pour avoir avec lui ses cohéritiers — il faut qu’il meure.
Dans notre chapitre, Jésus prend le second titre et se présente lui-même pour la dernière fois sur la terre à la nation juive, selon la prophétie de Zacharie. Plus tard, il viendra dans la gloire et prendra possession du trône de David son père ; mais actuellement, tout ce qu’il fait, c’est de se présenter à son peuple comme Celui qui accomplissait toutes les promesses faites à Israël. Il savait bien quel serait le résultat, et qu’il allait prendre la place et le titre plus étendu de Fils de l’homme, afin d’avoir avec lui ses cohéritiers, quand, selon les conseils de son Père, il prendra sa grande puissance et entrera dans son règne. Mais il était nécessaire que ce dernier témoignage fût rendu de la part de Dieu, d’un côté au peuple et de l’autre au Seigneur lui-même, en tirant sa louange de « la bouche des petits enfants et de ceux qui tètent », anticipant ainsi l’établissement du royaume en puissance.
Or ce roi était Emmanuel, l’Éternel lui-même, et Jésus agit selon ce caractère. Il envoie ses disciples au village voisin, chercher une ânesse avec son poulain ; et lorsque le possesseur demande aux disciples pourquoi ils les détachent, ceux-ci répondent selon l’ordre de Jésus : « Le Seigneur en a besoin », et aussitôt on les laisse faire. Tout cela se faisait, afin que la parole du prophète fût accomplie, car, dans cet évangile, les faits sont toujours présentés non seulement comme des effets de la grâce souveraine, ainsi qu’ils l’étaient en réalité, mais comme l’accomplissement des promesses faites au peuple.
Remarquez que, dans la citation que fait Matthieu (chap. 21:5), du passage de Zacharie qui se rapporte au fait dont nous parlons, deux expressions sont omises qui ont rapport à la venue du Seigneur en puissance, quand il apparaîtra pour prendre possession de son royaume. Ce sont les mots « juste » et « ayant le salut » ; selon le premier, Christ exécutera le jugement sur ses ennemis ; comme Sauveur, il délivrera le résidu : le temps n’était pas encore venu pour ces deux choses.
Les disciples amènent donc l’ânesse et l’ânon à Jésus, et le Seigneur entre comme roi à Jérusalem. Une très grande multitude de personnes, mues par la puissance de Dieu, et ayant aussi vu les miracles de Jésus, en particulier la résurrection de Lazare, allaient devant lui et l’entouraient, les uns étendant leurs vêtements sur le chemin, tandis que d’autres coupaient des branches d’arbres et les répandaient devant lui. Ils lui attribuaient ainsi la place et la gloire de roi, et de fait le reconnaissaient comme le Messie royal. Scène admirable, dans laquelle les froids raisonnements de l’intelligence humaine n’ont rien à voir, qui n’était pas l’effet produit par ses miracles, bien qu’en étant le fruit, mais qui était l’opération puissante de Dieu sur les esprits de la foule, l’obligeant à rendre pour un moment témoignage au Fils de Dieu méprisé. Le Ps. 118, prophétie remarquable touchant les derniers jours en Israël, est aussi cité, comme souvent ailleurs. Le Seigneur lui-même parle plus loin des versets qui précèdent ceux que Dieu met dans la bouche de la multitude : « La pierre que ceux qui bâtissaient ont rejetée, celle-là est devenue la maîtresse pierre du coin ».
La foule emploie les paroles qui annoncent la reconnaissance du Fils de David par le résidu du peuple d’Israël : Hosanna ! (mot hébreu signifiant : Sauve maintenant ! et qui devient une espèce de formule pour demander l’aide du Seigneur quand le vrai Messie est reconnu) Hosanna au Fils de David : « béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! … Hosanna dans les lieux très hauts ! » Ce cri reconnaissait Jésus comme Fils de David, comme Messie. Telle était la volonté de Dieu, que son Fils ne fût pas laissé sans ce témoignage, sans être honoré de cette manière. Et maintenant, le Seigneur agit dans Jérusalem selon cette position.
Toute la ville était émue et demandait : Qui est celui-ci ? Et la foule répondait que c’était Jésus de Nazareth, le prophète qui devait venir. Jésus entre dans le temple, et le purifie avec l’autorité de l’Éternel en chassant ceux qui le profanaient. Il juge la nation et ses conducteurs, disant : « N’est-il pas écrit : Ma maison sera appelée une maison de prière… mais vous, vous en avez fait une caverne de voleurs ». Mais s’il est l’Éternel présent dans son temple, il est aussi toujours l’Éternel présent en grâce et répondant à tous les besoins de son peuple : il guérit les boiteux et les aveugles. Mais aucun témoignage n’est assez puissant pour percer la dure cuirasse d’incrédulité qui couvre le coeur des chefs du peuple, non pas même les miracles qu’ils voient. En entendant les enfants crier : Hosanna, ils s’indignent. Le Seigneur leur montre que le temps de les convaincre est passé, et en appelle au témoignage du Ps. 8. Dieu avait prévu et prédit ces choses : « Par la bouche des petits enfants et de ceux qui tètent, tu as établi ta louange ». Si le peuple refuse de le recevoir, Dieu prend soin qu’il reçoive la louange qui lui convenait.
Mais tout est fini pour le peuple, jusqu’au moment où la grâce souveraine de Dieu agira pour réveiller une partie de la nation au milieu de la tribulation que son incrédulité lui aura attirée ; et ce résidu repentant s’écriera comme les enfants : « Hosanna au Fils de David ! » mais alors tout sera grâce. Pour ce qui concerne la responsabilité de l’homme, tout était fini, et le peuple était jugé. C’est ce que le Seigneur montre dans l’incident qui suit. Il ne veut pas rester dans Jérusalem, la ville rebelle et incrédule, mais il va à Béthanie où la puissance de la résurrection avait été manifestée. Là, il peut trouver pour son coeur un objet et un refuge parmi les hommes, après que son peuple l’a rejeté.
Quand Jésus retourne à la ville, il a faim, et voyant un figuier sur la route, il va y chercher du fruit, mais n’en trouve point — le figuier n’a rien que des feuilles. Le Seigneur maudit l’arbre, en disant : « Que désormais personne ne mange jamais de fruit de toi » et à l’instant le figuier sécha. Cet arbre représente Israël sous l’ancienne alliance, l’homme selon la chair. C’est l’homme dans la position dans laquelle Dieu a dépensé pour lui toutes ses peines, a employé tous les moyens — l’homme pour qui il a donné même son Fils unique, afin de tirer quelque bien de son coeur, et de l’atteindre pour le gagner à ce qui est bon, pour le gagner à lui-même. Mais tout a été vain. Il avait épargné l’arbre encore cette année, sur la demande du vigneron (Luc 13) ; celui-ci l’avait déchaussé et y avait mis du fumier, mais l’arbre était resté stérile. Que pouvait-il faire à sa vigne de plus qu’il n’avait fait ? Ce n’est pas seulement que nous sommes des pécheurs, mais nous le restons encore, après que Dieu a fait tout ce qu’il pouvait pour gagner le coeur de l’homme. Nous voyons en cela l’importance de l’histoire d’Israël ; c’est notre histoire tracée par Dieu lui-même, c’est celle de sa patience et de toutes ses voies, sauf que nous avons ensuite le témoignage suprême de son amour dans la mort de Christ, de sorte que nous sommes encore plus coupables. Une abondance de feuilles, mais point de fruits ; des prétentions à la piété, des formes religieuses, mais sans le vrai fruit selon le coeur de Dieu, voilà ce qui se trouve en l’homme : ce qu’il cherche ne s’y trouve point. Israël selon l’ancienne alliance, c’est-à-dire l’homme selon la chair, bien que cultivé par les soins de Dieu, ne portera jamais de fruit pour Dieu. Il est mis de côté pour toujours. Il s’est montré inutile et incapable de répondre aux soins que Dieu lui a donnés. L’homme, dans la chair, est condamné à une éternelle stérilité. Ce miracle est d’autant plus remarquable que tous les miracles de Christ étaient non seulement des signes de puissance, mais un témoignage de l’amour de Dieu. La puissance divine était là, mais pour sauver, pour guérir, pour délivrer de la puissance de Satan et de la mort, pour détruire tous les effets du péché dans ce monde. Mais tout cela ne change pas le coeur de l’homme ; au contraire, la manifestation de la présence de Dieu réveille l’inimitié de ce coeur contre lui — inimitié trop souvent cachée à l’homme lui-même, dans les profondeurs de son être. Le miracle du figuier est le seul de tous ceux de Christ qui porte le caractère de jugement.
Maintenant, tout est mis clairement en évidence l’homme peut naître de nouveau, il peut recevoir la vie du second Adam. Israël peut être restauré par grâce, selon la nouvelle alliance ; mais l’homme en lui-même, l’homme dans la chair, après que tout a été fait pour lui faire produire du fruit, a été jugé, étant reconnu incapable de porter rien de bon. Dieu sauve les hommes, Dieu leur donne la vie éternelle. En recevant Christ, l’homme reçoit une vie qui porte du fruit ; l’arbre est greffé, et Dieu cherche du fruit sur la branche greffée, mais il en a fini avec l’homme dans la chair, excepté pour ce qui concerne le jugement qui doit tomber sur lui à cause de ses péchés ; et, grâces lui soient rendues, Dieu est libre de délivrer l’homme de son état, de le sauver par le sang de Jésus Christ, de l’engendrer de nouveau, de le réconcilier avec lui-même, de l’adopter comme son enfant, et de faire de lui les prémices de ses créatures. Israël est laissé et l’homme est jugé, mais la grâce de Dieu demeure, et Christ est le Sauveur de tous ceux qui croient en lui.
Quelle scène se présente devant nous, lorsque Christ, le Messie, le Fils de David, Emmanuel sur la terre, entre dans sa maison, que de ses yeux saints il regarde tout ce que l’homme y a fait, et qu’il montre son indignation contre le sacrilège qui l’a transformée en une caverne de voleurs ! Il revendique la gloire et l’autorité de l’Éternel, et chasse ceux qui profanaient le temple. Ensuite, il se trouve face à face avec tous ses adversaires qui viennent les uns après les autres pour le surprendre et trouver un sujet de l’accuser ; mais ils rencontrent en lui une lumière et une sagesse qui montrent clairement leur position, de sorte qu’en voulant le condamner, ils se trouvent eux-mêmes tous condamnés, et le Sauveur peut poursuivre son oeuvre de grâce et de rédemption en présence de ses adversaires réduits au silence. Mais avant qu’elle ne soit jugée par ses réponses, chacune des classes du peuple sert à manifester le principe fondamental qui rendra les disciples du Seigneur capables de surmonter les obstacles qui seraient placés devant eux par les Juifs qu’il avait condamnés, mais entre les mains desquels se trouvaient extérieurement le pouvoir et l’ordre établi.
« Ayez foi en Dieu », dit le Sauveur, lorsque Pierre s’étonne de ce que le figuier se soit séché si promptement. Quelque faibles que fussent les disciples devant la puissance qui s’opposerait à eux, cette puissance serait surmontée par la foi. C’est un principe très important pour la marche et le service chrétiens ; seulement, cette foi introduisant Dieu sur la scène, doit s’exercer sans qu’il y ait aucun doute dans le coeur. Elle ne doit pas être le mouvement de la volonté, mais la conscience de la présence et de l’intervention de Dieu. Il arrive ainsi que là où la foi se trouve et où la requête est présentée à Dieu par la foi, la réponse suit avec certitude. Mais en même temps la présence de Dieu est celle d’un Dieu d’amour ; et, lorsque nous demandons par la prière l’accomplissement de notre désir, il faut que nous soyons en communion avec lui : alors, nous réalisons sa puissance qui répond à la foi, et l’esprit de pardon envers les autres se trouve dans notre coeur. Par exemple, si je nourris un désir de vengeance contre mes ennemis, je ne puis pas espérer qu’il y ait une réponse à mes prières ; et même, si j’étais exaucé, je serais puni. Dieu ne peut pas intervenir de cette manière, car il condamne un désir qui est mauvais ; et si même il trouvait bon de répondre à la prière, nous attirerions le châtiment sur nous. Car Dieu, dans son gouvernement, agit toujours selon son caractère (*).
(*) Comme cette pensée peut sembler obscure à quelques-uns, je la présenterai comme suit en d’autres termes : La foi qui trouve une réponse à ses prières, doit avoir trouvé Dieu et jouir de sa communion. Mais Dieu est amour, et afin de réaliser sa puissance pour avoir la réponse, il faut savoir ce que c’est que d’être en sa présence que la foi a découverte. Mais cette communion ne peut pas être connue, s’il n’y a pas d’amour. En conséquence, lorsque nous nous présentons dans la foi pour demander l’accomplissement de nos désirs, il faut que nous pardonnions à notre frère ce que nous pourrions avoir contre lui ; sinon, nous sommes en la présence de Dieu quant à son gouvernement, et ainsi sujets à l’effet de nos péchés.
Christ rentre à Jérusalem. Il n’avait pas voulu loger dans une cité abandonnée de Dieu. Là, tous les chefs du peuple comme nous l’avons dit passent tour à tour devant lui ; il les juge tous. En premier lieu, c’est l’autorité qui s’élève contre la sienne. Comme il se promène dans le temple, les principaux sacrificateurs, les scribes et les anciens, viennent et lui demandent par quelle autorité il fait ces choses, et qui lui a donné cette autorité. Ainsi, nous les voyons placer ces deux autorités l’une contre l’autre ; elles sont l’une et l’autre mises en question. L’autorité officielle, celle qui est extérieure, était entre les mains des sacrificateurs ; la vérité et l’obéissance à Dieu étaient en Jésus. Sa puissance avait déjà été manifestée, sans qu’elle eût montré pour le moment rien qui annonçât la vengeance. Il était inutile de donner plus de signes de puissance ; ils étaient déjà condamnés. Ils avaient eu signe après signe, et s’étaient endurcis dans l’incrédulité ; le temps du jugement était venu, non pas, il est vrai, de son exécution, mais du jugement moral. Jésus les laisse sans réponse.
Les chefs du peuple demandent par quelle autorité il avait purifié le temple. Aucun zèle pour la sainteté de Dieu ne se trouvait en eux, mais une grande jalousie pour leur propre autorité ; c’est ce qui caractérise le clergé : il pense à son autorité et non à Dieu. Le Seigneur Jésus ne pensait qu’à l’autorité de Dieu, et ce qu’il faisait en était le résultat. Si la conscience des conducteurs du peuple n’avait pas été endurcie, même en n’étant pas satisfaits de ce que le Seigneur avait fait, ils auraient gardé le silence, honteux de l’état du temple confié à leurs soins. Ayant rejeté le Seigneur, ils ne pouvaient pas reconnaître son autorité ; dorénavant, les preuves étaient inutiles. Mais la divine sagesse de Jésus leur fait reconnaître leur propre incapacité à résoudre des questions relatives à l’autorité et au témoignage divin.
Jésus demande à ces chefs du peuple si la mission de Jean le Baptiseur était divine. S’ils disent oui, Jean avait rendu témoignage à Jésus ; s’ils disent non, leur autorité est compromise devant le peuple. Où était leur droit de demander : « Qu’est-ce que la vérité ? » Ils la connaissaient ; ils étaient satisfaits d’avoir l’honneur, depuis longtemps perdu, de posséder un prophète au milieu d’Israël, mais reconnaître leurs péchés ne leur convenait pas, de sorte que la lumière fut bientôt éteinte pour leurs coeurs. Mais le peuple avait toujours tenu Jean pour un prophète. Ils n’osent donc dire ni oui, ni non. Ils confessaient ainsi qu’ils n’étaient pas capables de juger si un homme qui professait avoir une mission divine, y avait réellement droit puisqu’ils disaient ne pas pouvoir dire si Jean était un prophète ou non. Tel étant le cas, Jésus n’avait pas besoin de leur répondre, ni de les convaincre touchant sa mission, comme s’ils eussent été des personnes revêtues de l’autorité de Dieu, et auxquelles chacun est tenu de dire la vérité.
L’incapacité et l’incompétence des gouverneurs juifs sont clairement démontrées. Ils avaient eu la prétention de juger le Seigneur, mais la parole de la sagesse divine les avait jugés et forcés de confesser leur incompétence. Maintenant le Seigneur, à son tour, montre aux différentes classes des Juifs qui se présentent à lui, l’état dans lequel ils se trouvent, et en premier lieu celui de tout le peuple. Israël avait été la vigne de l’Éternel. ; il l’avait louée à certains cultivateurs, afin de recevoir d’eux du fruit quand la saison serait venue. Il avait fait pour sa vigne tout ce qu’il avait pu ; il aurait été impossible de faire davantage. Israël jouissait de tous les privilèges dont une nation peut jouir. Au temps où l’on recueille le fruit, le maître envoie son serviteur pour le recevoir des cultivateurs.
Les prophètes cherchaient ce fruit chez le peuple de la part de Dieu, car il était le maître de la vigne ; mais les vignerons prirent l’un des serviteurs et le battirent, ils en tuèrent un autre, et les rejetèrent tous. C’est ainsi qu’Israël traita tous les serviteurs de Dieu qu’il leur envoyait pour les rappeler à leur devoir. Enfin, ayant encore un Fils unique et bien-aimé, il le leur envoya aussi, disant : « Ils auront du respect pour mon Fils » ; mais ils le prirent, le tuèrent et le jetèrent hors de la vigne. Ils voulaient s’emparer de la vigne en tuant l’héritier légitime.
Considérons un moment cette parabole. Avec quelle dignité et quel calme le Seigneur expose la conduite passée du peuple d’Israël, ainsi que sa conduite en ce moment même ! Il était sur le point de souffrir ; il était venu pour mourir, mais les actions de ses ennemis devaient être clairement manifestées ; ils comblaient, les yeux ouverts, la mesure de leurs iniquités. Pauvres Juifs ! Dieu, dans sa souveraine grâce, aura compassion d’eux. Il restaurera son peuple, par une nouvelle alliance ; il lui rendra sa place de peuple de Dieu, reconnu par lui.
La narration, dans l’évangile de Marc, est toujours rapide. La conséquence du péché d’Israël y est montrée, mais nous savons, par les autres évangiles, que les Juifs répondant au Seigneur, sont forcés de prononcer eux-mêmes leur propre sentence ; ils avaient bien compris le sens de la parabole. Ici, le simple fait de leur ruine est annoncé, après qu’ils ont rejeté le Christ, le Fils de Dieu. Le maître de la vigne, l’Éternel des armées, viendra, détruira les méchants vignerons, et donnera sa vigne à d’autres.
Le Seigneur cite ensuite de nouveau le Ps. 118, et demande aux chefs du peuple — cette question le concernait directement — : « N’avez-vous pas même lu cette écriture : La pierre que ceux qui bâtissaient ont rejetée, celle-là est devenue la maîtresse pierre du coin, celle-ci est de par le Seigneur, et est merveilleuse devant nos yeux ? » Déclaration prophétique bien claire de la position d’Israël et de ses conséquences. Toute l’histoire d’Israël est présentée brièvement, mais parfaitement décrite en quelques versets ; toute leur conduite, depuis les temps de Moïse jusqu’à la croix, est déroulée en peu de mots : leur péché contre l’Éternel, contre Christ et contre les prophètes, ainsi que les terribles conséquences de ce péché pour la nation et les voies de Dieu envers elle. Dieu lui enlève tous ses privilèges, et il donne à d’autres sa vigne où il était venu chercher du fruit. De plus, avec ce grand fait du péché de l’homme et de l’incrédulité des Juifs, c’est-à-dire le rejet et le crucifiement du Seigneur, nous avons aussi l’exaltation de Christ à la droite de Dieu ; il devait devenir la maîtresse pierre du coin. Ici aussi, nous avons la clef des écritures de l’Ancien Testament par la prophétie, car, d’un simple coup d’oeil, l’intelligence spirituelle voit se dérouler devant elle toutes les voies de Dieu. C’est seulement la sagesse et la révélation divines qui peuvent faire connaître les pensées de Dieu et les actions de l’homme, et nous les annoncer.
Nous avons vu que toutes les classes des Juifs viennent, l’une après l’autre, pour juger le Seigneur, mais, en fait, ils sont jugés eux-mêmes. Les pharisiens et les hérodiens se présentent d’abord pour le surprendre dans ses paroles. Ils n’osaient pas mettre les mains sur lui, bien qu’ils l’eussent fait volontiers, ayant parfaitement bien compris que la parabole des vignerons avait été prononcée contre eux ; mais le peuple était encore sous l’influence de ses paroles et de ses oeuvres. Les principaux craignaient le peuple, esclaves qu’ils étaient non seulement de leurs propres passions et de leur incrédulité, mais du peuple lui-même. Ils craignaient d’autant plus de faire quelque chose contre le Seigneur, croyant que le peuple le favoriserait, qu’ils n’avaient ni la puissance de la foi, ni la liberté qui est le résultat de la droiture ; mais ils étaient dépendants de la faveur du peuple.
L’heure du Seigneur n’était pas encore venue. Ses ennemis lui envoient des espions pour le surprendre dans ses paroles. Les pharisiens, remplis d’orgueil à cause des privilèges du peuple Juif, et toujours prêts à l’exciter contre les Romains, flattaient ses passions. Ils étaient assujettis au joug des gentils à cause de leurs péchés et n’étaient plus reconnus de Dieu comme son peuple. Le Messie promis leur avait été envoyé dans la personne du Seigneur, et ils n’avaient pas voulu le recevoir, parce qu’il manifestait Dieu sur la terre, et que leur coeur endurci n’avait aucun désir pour Dieu. Ils voulaient bien avoir la gloire d’être le peuple de Dieu, mais non pas recevoir Dieu et se soumettre à lui. La rébellion de leur coeur contre Dieu s’unissait à la rébellion de leur orgueil national contre les gentils.
Les hérodiens, au contraire, acceptaient l’autorité romaine, et ne s’inquiétaient pas des privilèges d’Israël. Ils étaient disposés à rechercher à tout prix les bonnes grâces du peuple puissant qui, par suite du jugement de Dieu, tenait Israël sous son joug pesant. Or, si le Seigneur avait dit qu’ils ne devaient pas payer le tribut, il se serait montré hostile au pouvoir romain, et les hérodiens auraient été prêts à l’accuser ; si, au contraire, il avait dit que le tribut devait être payé, il n’était pas le Messie qui devait affranchir son peuple du joug détesté des Romains, car ils n’avaient pas l’idée d’une autre délivrance. Ainsi Jésus aurait perdu la faveur du peuple. Les hérodiens et les pharisiens étaient d’accord pour se débarrasser du Seigneur, mais la sagesse divine répond à chaque difficulté.
Les Juifs auraient dû se soumettre au joug que Dieu lui-même leur avait imposé, jusqu’au temps où sa grâce les délivrerait et où ils recevraient le Libérateur qui devait venir, selon les promesses de Dieu. Jusqu’à ce que celles-ci s’accomplissent, ils devaient rendre humblement à Dieu ce qui lui était dû, acceptant leur châtiment de ses mains. Mais ils ne firent ni l’une ni l’autre de ces choses ; ils étaient hypocrites à l’égard de Dieu, rebelles envers les hommes. Le Seigneur leur demande une monnaie portant l’effigie de l’empereur, puis il dit : « De qui est cette image et cette inscription ? » De César, répliquent les Juifs. Eh bien, dit le Seigneur, « rendez les choses de César à César, et les choses de Dieu à Dieu ! » Les Juifs s’en vont tout étonnés. Réponse juste, qui non seulement mettait à néant l’accusation qu’ils auraient voulu porter contre lui, mais montrait en même temps le vrai état d’Israël et le jugement de Dieu sur ce peuple.
Ensuite viennent les sadducéens, autre secte des Juifs ; qui ne croyaient ni au monde invisible, ni aux anges, ni à la résurrection. Dieu, pensaient-ils, avait donné une loi à son peuple d’Israël, et c’était tout. Accoutumés aux arguments des hommes, ils n’étaient pas préparés à rencontrer la sagesse divine, ni la force irrésistible de la parole de Dieu. Ils présentent un cas, qui, à supposer que fût vrai ce que leur folie imaginait, aurait rendu la résurrection ridicule et impossible ; car ils supposaient que les relations et l’état de l’homme dans ce monde continuaient à exister dans l’autre. C’est là ce que font les hommes ; ils mêlent leurs propres pensées avec la parole de Dieu, et si leurs pensées ne s’accordent pas avec cette parole, ils la croient inintelligible et la rejettent. Mais, dans ce cas, une vérité fondamentale et d’une importance vitale était en question, et le Seigneur non seulement réduit au silence ses ennemis par la sagesse de sa réponse, mettant à nu leur hypocrisie, mais il révèle aussi clairement la vérité elle-même, qui était enseignée d’une manière cachée dans l’Ancien Testament et l’appuie de sa propre autorité.
Tout dépend de cette vérité de la résurrection ; elle est la preuve que Jésus Christ est le Fils de Dieu, et que Dieu a accepté son sacrifice. Elle est la victoire sur la mort ; elle laisse derrière elle tout ce qui appartient à la misérable condition de l’homme ; elle est l’entrée dans le nouvel état de l’homme selon les conseils de Dieu, l’introduction dans l’état éternel de gloire et de pleine conformité à Christ. Il est vrai que les méchants ressusciteront pour le jugement ; mais le Seigneur regarde à son état et à l’état des siens dans la résurrection, comme le fait aussi l’apôtre en 1 Cor. 15. Le Seigneur montre aux sadducéens que la révélation de cette vérité est contenue dans l’Ancien Testament. Quant à lui-même, sa résurrection est clairement enseignée dans le Ps. 16, mais les sadducéens ne voulaient recevoir que les livres de Moïse. Or ces livres s’occupent en tout premier lieu de ce que Dieu avait établi ici-bas pour son peuple terrestre : c’est l’évangile et la résurrection du Seigneur lui-même qui ont fait luire la vie et l’incorruptibilité. Bien que cette lumière fût voilée dans les temps de l’Ancien Testament, elle ne manquait cependant pas à ceux qui, pèlerins et étrangers sur la terre, cherchaient une meilleure patrie et une cité céleste. L’enseignement direct de l’Ancien Testament se rapportait au gouvernement de Dieu sur la terre, mais, par la foi, les coeurs des fidèles pouvaient y trouver amplement ce dont ils avaient besoin pour les diriger vers une patrie éternelle et céleste.
Les pharisiens croyaient à la résurrection, et, sur ce point, ils avaient l’intelligence de la vérité ; mais le Seigneur voulait montrer que, si même les sadducéens ne recevaient que la loi, Dieu avait donné en tout temps, et dans la loi même, ce qui était suffisant pour conduire l’intelligence spirituelle à espérer de meilleures choses que les terrestres, et à amener par la foi dans une relation plus intime avec Dieu que celle dont on pouvait jouir avec son gouvernement, qu’il s’agît de celui du monde ou de son peuple, quelque réel que fût ce gouvernement. Le Seigneur condamne donc absolument les sadducéens ; ils ignoraient complètement les Écritures et la puissance de Dieu. Le Seigneur révèle premièrement la vérité ; ceux qui ressuscitent sont comme les anges et il n’est plus question de se marier ou de donner en mariage. Ensuite, il montre que, dans ses éléments même, la première expression des relations de Dieu avec les hommes (quand Dieu parla à Moïse), contenait la notion d’une vie au-delà de la mort, et par conséquent la résurrection, puisque l’homme est composé, selon les conseils de Dieu, d’un corps et d’une âme. Abraham, Isaac et Jacob étaient morts depuis longtemps, mais Dieu était toujours leur Dieu ; ils étaient donc encore vivants et par conséquent ne resteraient pas toujours sous la puissance de la mort, mais ressusciteraient.
Les sadducéens, qui ne voulaient recevoir que la loi, avaient besoin d’une preuve claire et sensible tirée de la loi même, et qui établit la vérité de la résurrection. Mais quoi qu’il en soit des sadducéens, il est important pour nous de comprendre que depuis le commencement, le péché et la mort étant entrés dans le monde, quand Dieu entre en relations avec l’homme, il le fait toujours sur le terrain de la résurrection. Il n’y a pas d’autre vrai fondement de bénédiction. Les promesses, même faites à Israël, ou tout au moins leur accomplissement, sont fondées sur cette vérité (Actes 13:34). Ainsi, la première chose que l’évangile révèle, a sa racine dans la première manifestation distincte de Dieu en relation avec les hommes, relation fondée sur la rédemption, chose extérieure en Israël, mais éternellement accomplie en Christ.
Mais de même que la grande vérité du christianisme, le nouvel état de l’homme, est établie par la parole du Seigneur, de même aussi la perfection de la loi comme mesure des devoirs de l’homme, est mise en lumière. Un des scribes qui avait entendu le Seigneur raisonner avec les sadducéens, et qui s’était aperçu de la sagesse vraie et divine de sa réponse, s’approche et lui demande : « Quel est le premier de tous les commandements ? » Les scribes pensaient que les commandements différaient en importance, et que quelques-uns avaient plus de valeur que d’autres pour compléter la somme de justice à laquelle un homme devait atteindre. Le Seigneur répond cette fois sans faire tourner la question à la confusion de celui qui l’interrogeait, mais il établit les deux grands piliers de la responsabilité de l’homme : l’unité de Dieu et le devoir de l’homme envers lui et envers son prochain. C’était la foi d’Israël et son devoir envers tous. Le Seigneur ne cite pas les dix commandements, mais les grands principes de la loi quant à toutes les obligations morales de l’homme. Le Seigneur savait comment les amener en lumière, divinement cachés comme ils l’étaient dans les livres de Moïse (Deut. 6:4, 5 ; Lév. 19:18).
Le sentiment du devoir était parfait en lui, comme aussi la grâce et l’amour divin. Il est beau de voir cette perfection dans le Seigneur : la grâce et l’amour de Dieu étaient manifestés dans toute sa vie, nous les avons vus. Mais ici, nous trouvons aussi la règle parfaite de la marche et du devoir de l’homme sur la terre selon la loi ; ce n’était pas ce qui est évident à tous les hommes, — c’est-à-dire les dix commandements, la première chose qui serait venue à la pensée de l’homme, — mais les principes dispersés ici et là dans les livres de l’Ancien Testament, et qui brillaient de toutes parts pour Lui, pour ce coeur qui comprenait et possédait la perfection de l’humanité devant Dieu, et qui déployait devant les hommes la perfection divine. Son coeur voyait l’une et la comprenait — la perfection de la marche de l’homme selon la règle divine, — tandis que l’expression de l’autre, — la grâce et l’amour, — surgissait naturellement du même coeur.
La conscience et le coeur du scribe sont touchés il rend témoignage à la parfaite sagesse de la réponse du Seigneur, ajoutant qu’agir ainsi valait plus que tous les holocaustes et tous les sacrifices. Il n’était pas loin du royaume de Dieu. Un coeur qui comprend les pensées de Dieu touchant l’homme aime ce que Dieu aime ; le discernement moral de ce qui est bon est très, éloigné de la capacité de recevoir ce que Dieu révèle pour la bénédiction de son peuple. Depuis ce moment, personne n’ose plus interroger Jésus ; la sagesse du Seigneur était trop grande pour leurs coeurs.
Mais le Seigneur, à son tour, leur adresse une question ; toute la vérité relative à sa position et à la leur, dépendait de la réponse qui y serait faite De qui le Christ est-il fils ? Les Juifs répondent De David. C’était vrai, mais alors le Seigneur dit : Comment donc David l’appelle-t-il son Seigneur, s’il est son fils ? Jésus était le fils de David, mais dans sa nature humaine, il devait s’asseoir à la droite de Dieu comme Seigneur. C’était là la clef de la situation. Mais les relations du Seigneur avec les Juifs étaient à leur terme. Chaque classe des Juifs s’était présentée à son tour devant lui et avait été jugée.
(v. 38-40). Dans ces versets, le Seigneur accuse les scribes qui corrompaient la parole de Dieu tout en prétendant l’expliquer ; ils affectaient la forme de la piété, et cherchaient leur propre gloire et l’argent des autres, même celui des veuves près desquelles ils avaient accès sous prétexte de piété. À cause de cela, leur jugement serait d’autant plus terrible, car Dieu n’oublie pas les siens au milieu de l’hypocrisie d’une religion d’apparences. Ceux qui étaient au Seigneur pouvaient commettre des erreurs ; peut-être la pite de la veuve servit-elle à payer Judas ; mais elle était donnée au Seigneur, et le coeur de la veuve qui donnait de son indigence, ne pouvait échapper aux regards du Seigneur ; il avait égard à son amour pour lui. Les riches avaient donné beaucoup, mais la veuve s’offrait elle-même en sacrifice vivant, elle avait mis au trésor tout ce qu’elle avait, toute sa subsistance. Peut-être aurait-elle pu employer de meilleurs moyens, mais elle donnait sa pite du fond de son coeur au Seigneur, et il l’agréait. Pensons à cela.
Nous avons vu le peuple jugé, chacune des classes qui composaient la nation ayant été amenée devant le Seigneur pour entendre son jugement. Nous les avons vues condamnées moralement par la parole de Dieu et la sagesse du Seigneur. Mais l’iniquité qui attirait ce jugement devait causer plusieurs difficultés aux disciples. Ils devaient avoir à marcher dans un chemin rempli de dangers, et le Seigneur leur donne ici des avertissements, afin qu’ils puissent échapper au jugement prêt à tomber sur le peuple élu à cause de ses péchés. Le Seigneur ne serait plus là pour guider ses disciples, mais son coeur ne pouvait les laisser dans l’ignorance, soit quant au sentier à suivre, soit quant aux difficultés qu’ils auraient à rencontrer. Et le témoignage que Jésus en rendait, devait faire de ces difficultés et de ces dangers une preuve de la vérité de ses paroles, et être en même temps un encouragement pour leurs coeurs quand ils se trouveraient dans le trouble.
Mais le Seigneur ne s’arrête pas à l’accomplissement du jugement qui devait bientôt avoir lieu ; il découvre les voies de Dieu jusqu’à sa venue, lorsque Israël sera béni après avoir passé par un jugement tel qu’un faible résidu sera seul laissé, quand la puissance des bêtes (c’est-à-dire des empires gentils) sera détruite, que Satan sera lié, et que le monde reposera en paix. Néanmoins, le Seigneur veut donner ici un avertissement à ses disciples, plutôt que leur annoncer la paix et le repos du monde après l’exécution du jugement.
Habitués à considérer le temple comme la maison de Dieu et le centre glorieux de leur religion, les disciples, remplis d’admiration, font remarquer au Seigneur la beauté des bâtiments et la grandeur des pierres, et, comme il arrivait souvent, ils donnent ainsi au Seigneur l’occasion de leur communiquer les pensées de Dieu touchant les temps, et l’état de la nation coupable. Il leur annonce clairement et comme un fait certain, la destruction du temple ; mais lorsque les disciples lui demandent quand la chose arriverait, Jésus parle de l’état du peuple jusqu’à sa venue, pour autant que cette histoire a affaire avec le service de ses disciples. En général, ce qui est dit est analogue à ce que nous trouvons dans l’évangile de Matthieu ; mais le Saint Esprit nous présente ici le Seigneur comme s’occupant davantage d’enseigner ses disciples.
Comme dans l’évangile de Matthieu, nous avons ici un enseignement général qui va jusqu’à la fin de la période où la grâce est proclamée ; ensuite, vient le signe spécial de la ruine finale, de Jérusalem qui précède immédiatement la venue du Seigneur en gloire. L’intérêt du Seigneur pour le témoignage et le service de ses disciples répond au caractère de cet évangile qui rapporte l’histoire de son propre service. Le Seigneur ne répond pas immédiatement à la question des disciples, mais les avertit des dangers qu’ils rencontreraient dans leur service après son départ. Satan susciterait de faux christs pour tromper les Juifs, et plusieurs seraient séduits. Les disciples auraient à être sur leur garde. Il devait y avoir des guerres et des bruits de guerre, mais ils ne devaient pas se troubler ; ces choses devaient arriver, mais la fin ne serait pas encore. Ces choses étaient un commencement de douleurs, mais non pas la fin.
Le Seigneur ne parle pas de la mission de Paul, mais de celle des douze au milieu des Juifs ; seulement l’évangile devait être prêché à toutes les nations avant la fin. Le fait est affirmé, sans qu’il soit rien dit de la manière dont il s’accomplirait. Nous savons que ce sera l’évangile du royaume, comme il aurait été prêché durant la vie du Seigneur. Ici se trouve simplement annoncé le témoignage envoyé à la nation avant que la fin vienne. Mais la conséquence de ce témoignage, pour autant qu’il s’agissait des disciples, devait être la persécution. Ils seraient battus dans les synagogues et accusés devant les rois et les gouverneurs pour leur servir de témoignage. C’est le moyen que le Seigneur emploie pour que l’évangile soit porté aux rois et aux grands de la terre. Les prédicateurs ne sont pas les puissants d’icibas, et les disciples du Seigneur doivent conserver toujours leur vrai caractère sous lequel ils sont appelés à paraître comme prisonniers devant les rois et les gouverneurs pour rendre compte de leur foi.
Ainsi l’apôtre Paul paraît devant le sanhédrin juif, devant Festus et Agrippa, et finalement devant César. Mais le résultat possible de la prédication de l’évangile n’était pas tout. La révélation de Dieu dans la personne de Christ ou dans la parole prêchée, réveille l’inimitié du coeur humain. Aussi longtemps que Dieu n’est pas révélé, tout est toléré ; mais dès qu’il est révélé, la volonté de l’homme s’élève contre l’autorité de Dieu, et contre la pression que cette révélation exerce sur la conscience qui n’est pas en repos ; et plus les révélations d’homme à homme sont intimes, plus grande est la haine. Elle brise tous les liens naturels : le frère livre son frère à la mort, et le père son enfant ; les enfants s’élèvent contre leurs parents et les font mourir, et les disciples sont hais de tous à cause du nom du Sauveur.
Quel témoignage de l’état du coeur de l’homme ! Si l’on mentionne le nom de Jésus, si l’on parle de son amour, de cet amour qui le porta à venir nous sauver, aussitôt la haine du coeur de l’homme brise toutes les barrières, elle foule aux pieds toutes les affections naturelles. Mais le temps de la délivrance viendra, et ici c’est d’une délivrance terrestre qu’il est question. Nous avons mieux ; si nous sommes mis à mort, nous allons vers le Seigneur ; s’il vient, nous serons glorifiés avec lui. Mais, dans ce chapitre, le Seigneur parle du témoignage et du service des apôtres au milieu des Juifs. De quelque manière que nous considérions les choses, il reste un repos pour le peuple de Dieu. Mais il y a plus, Dieu est avec les siens dans leur sentier. Quand les disciples seront appelés devant les magistrats, ils n’auront pas besoin, leur dit le Seigneur, de méditer à l’avance comment ils parleront, et de préparer des discours ; le Saint Esprit sera avec eux et leur donnera, au moment même, ce qu’il leur faudra dire.
Tel est le tableau que le Seigneur trace du service de son peuple au milieu des Juifs jusqu’à la fin. Il ajoute que l’évangile sera prêché jusqu’aux extrémités de la terre. Mais, au v. 14, il fait connaître d’une manière plus précise et plus définie les événements qui arriveront à Jérusalem aux temps de la fin. « Quand vous verrez l’abomination de la désolation établie où elle ne doit pas être (que celui qui lit comprenne) », dit le Seigneur, « alors, que ceux qui sont en Judée s’enfuient dans les montagnes ». Le Seigneur fait allusion à la prophétie de Daniel qui parle de cette abomination et que nous trouvons au chap. 12 du livre de ce prophète. Le terme « abomination » désigne simplement une idole, et elle est appelée abomination de la désolation, parce qu’elle est la cause de la désolation de Jérusalem et du peuple juif.
Les Juifs recevront l’Antichrist. Le Seigneur a dit : « Je suis venu au nom de mon Père, et vous ne me recevez pas ; si un autre vient en son propre nom, celui-là vous le recevrez ». Sous l’influence de l’Antichrist, ils retourneront à l’idolâtrie. L’esprit immonde sorti d’eux après la captivité de Babylone, rentrera en eux avec sept esprits pires que lui, et le dernier état sera pire que le premier (Matt. 12:43-45). Ils dresseront alors une idole dans le lieu très saint, là oÙ elle ne doit pas être placée, et le jugement de Dieu tombera sur le peuple et sur la cité. La désolation sera complète : « Ces jours-là seront une tribulation telle qu’il n’y en a point eu de semblable depuis le commencement de la création ». Daniel dit aussi : « En ce temps-là se lèvera Micaël, le grand chef, qui tient pour les fils de ton peuple ; et ce sera un temps de détresse tel » qu’il n’y en a jamais eu. Cette tribulation durera un temps, des temps, et une moitié de temps, c’est-à-dire trois ans et demi, selon la manière de compter juive, ou 1260 jours, ou encore 42 mois. Alors seront sauvés ceux qui sont écrits dans le livre de Dieu — ceux qui auront persévéré jusqu’à la fin, malgré les difficultés, les souffrances et l’oppression de l’Antichrist et des gentils, comme le Seigneur l’a prédit.
Cependant, durant le temps de leur service, le Saint Esprit leur donnera toute la sagesse et les paroles mêmes qui leur seront nécessaires. La bonté du Seigneur se montre ici d’une manière touchante. Nous le voyons pensant même au temps de l’année au milieu de ce terrible jugement, si terrible que, l’histoire du monde n’en aura pas présenté et n’en présentera pas de semblable. Il leur dit de prier que leur fuite n’arrive pas en hiver. Il ne parle pas du sabbat, comme dans Matthieu, parce que, dans cet évangile de Marc, les choses juives sont moins en vue que dans le précédent. Il pense aux femmes enceintes et à celles qui allaiteront en ces jours-là. Combien grande est la compassion du Seigneur ! Rien n’échappe à sa mémoire et à son coeur plein de grâce.
Mais le Seigneur abrégera ces jours de détresse, sans quoi nulle chair ne pourrait être sauvée ; il les abrégera pour l’amour de ses élus. Puis il donne une espérance de délivrance, l’espoir que les souffrances prendront fin. De faux christs et de faux prophètes s’élèveront et feront des miracles et des prodiges pour séduire les élus même, si possible (si grande est la puissance de Satan, quand Dieu le permet). Mais ils avaient été avertis. Et maintenant, après cette tribulation sans pareille qui frappera Jérusalem, la fin de la dispensation viendra. Toutes les autorités établies seront renversées par le jugement de Dieu. L’ordre qu’il a établi pour le gouvernement de la terre sera jeté en confusion. Les signes du jugement apparaissent.
Alors on verra le Fils de l’homme venant sur les nuées avec une grande puissance et avec gloire. Le Seigneur apparaîtra pour prendre possession de la terre, que non seulement il a créée, mais qu’il a acquise par sa mort, comme Fils de l’homme. Mais ce qui est spécialement annoncé ici, est qu’il enverra ses anges pour rassembler ses élus de toutes les parties du monde. Il est toujours question ici du pays et d’Israël. La bénédiction des gentils et de tout le monde aura lieu, mais il n’en est pas fait mention dans cette portion des Écritures. Notre place est beaucoup plus élevée. Quand Christ sera manifesté, nous paraîtrons avec lui (Col. 3:4). Le Seigneur nous aura déjà ravis auprès de lui, il nous aura déjà glorifiés et faits semblables à lui. Selon sa grâce infinie et les conseils éternels d’un Dieu juste, il a acquis cette gloire pour nous. Nous serons semblables à son Fils et pour toujours avec lui, premier-né entre plusieurs frères. Mais dans notre chapitre, le Seigneur parle des élus du milieu d’Israël, dispersés parmi les gentils.
Tout ce qui est dit ici se rapporte au peuple terrestre. « Cette génération », dont parle le v. 30, est la génération perverse et incrédule des Juifs qui, de fait, reste même jusqu’à nos jours une race séparée de toutes les autres. Ils habitent parmi les nations, mais ils restent un peuple séparé, gardé pour l’accomplissement des conseils de Dieu. Nous trouvons ce fait et la force du mot « génération », en Deut. 32:5-20 : « C’est une génération tortue et perverse ». Et quant au jugement sous lequel se trouve la nation, après que le Seigneur eut prononcé ces paroles, il est dit au v. 20 du même chapitre : « Je leur cacherai ma face, je verrai quelle sera leur fin, car ils sont une génération perverse, des fils en qui il n’y a point de fidélité ».
Les trois ans et demi sont les jours que la bonté et la miséricorde de Dieu ont abrégés ; c’est la dernière demi-semaine de Daniel, laquelle reste à accomplir. Après que l’abomination aura été établie dans le lieu très saint, oÙ elle ne doit pas être, trois années et demie s’écouleront, puis il y aura encore quelques jours pour purifier le temple (Dan. 12:11). Ainsi, le résidu juif aura la consolation de savoir, au milieu de la grande tribulation, qu’elle ne durera qu’un peu de temps. Mais nous ignorons quand arrivera ce moment solennel ; cela n’est point révélé : Dieu seul le connaît. Le Seigneur considère ici ses disciples comme étant en rapport avec le peuple juif ; quand ils verront que ces événements commencent à s’accomplir, ils sauront que le temps est proche.
« Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point ». La destruction de Jérusalem par Titus présente quelque chose d’analogue à ce qui est dit ici, mais n’accomplit en aucune manière la prophétie du Seigneur. En premier lieu, le Seigneur n’est pas venu après cet événement, et ensuite ce dont Daniel a parlé n’a pas eu lieu. Que l’on compte 1260 jours, ou 1260 ans après la destruction de Jérusalem, rien n’est arrivé à aucune de ces époques, et il ne peut y avoir deux tribulations « telle qu’il n’y en a point eu de semblable ». Dans l’évangile de Luc, nous trouvons, avant tout, la destruction de Jérusalem et l’état actuel des Juifs, sans qu’il y soit question de l’abomination de la désolation ; mais le siège de la ville par Titus est clairement distingué de la venue du Seigneur qui a lieu beaucoup plus tard. L’évangile de Marc parle tout d’abord du service des disciples jusqu’à la fin, et ensuite de la tribulation finale, en commençant par l’érection de l’abomination de la désolation là où elle ne doit pas être. Ce sujet commence au verset 14.
Ce temps de tribulation est annoncé par Jérémie (chap. 30:7), mais cependant Jacob est délivré, tandis que, dans le trouble qui vint sur la nation au temps de Titus, il n’y eut pas de délivrance pour les Juifs. Au chapitre 12 de Daniel, nous voyons aussi la délivrance et l’intervention de Dieu par le moyen de Micaël. Cela arrivera à la seconde venue de Christ. Les seuls passages qui parlent de la grande tribulation telle qu’il n’y en a point eu de semblable, sont Jér. 30:7 ; Dan. 12:1 ; Matth. 24, et Marc 13 ; tous se rapportent aux derniers jours qui se terminent par la manifestation de Christ.
En dernier lieu, le Seigneur, dans notre chapitre, exhorte ses disciples à veiller et à prier, parce qu’ils ne savent pas l’heure à laquelle ce temps viendra. Le Seigneur était comme un homme qui, s’en allant en voyage, laisse sa maison (on voit qu’il s’agit de la terre et de Jérusalem), et donne de l’autorité à ses serviteurs, et à chacun son ouvrage, et qui commande au portier de veiller. C’est un tableau de l’état où le Seigneur a laissé ses disciples au milieu des Juifs. Mais ce qu’il leur dit, il le dit à tous : « Veillez ». C’est l’exhortation pour nous. Nous sommes appelés à attendre le Seigneur, ne sachant pas quand il viendra, et à veiller de peur qu’il ne nous trouve dormant. Puisse la grâce opérer dans nos coeurs, de sorte que nous attendions sa venue avec un réel désir de le voir ! Puissions-nous marcher de telle manière que la pensée de sa venue nous réjouisse toujours. Puisse-t-elle ne jamais être trop tôt pour nous !
Revenons à l’histoire du Seigneur et aux derniers jours de sa précieuse vie. La Pâque devait avoir lieu dans deux jours, et les chefs cherchaient à faire périr Jésus. Mais ils craignaient d’exciter quelque trouble parmi le peuple, dans le coeur duquel ils sentaient que sa doctrine et ses miracles avaient produit un effet puissant. Ils disaient donc : Que ce ne soit pas durant la fête, « de peur qu’il n’y ait du tumulte parmi le peuple ». C’était leur pensée, mais non celle de Dieu. Le Seigneur devait mourir comme le vrai agneau pascal immolé pour nous. De plus, il devait mourir le jour même de la Pâque. Mais son sacrifice l’emportait infiniment sur celui qu’on offrait en ce jour-là selon la loi. Ce dernier rappelait la délivrance d’Égypte, qui ne faisait que préfigurer une délivrance infiniment plus précieuse, c’est-à-dire celle de la culpabilité devant Dieu, et de la puissance du péché.
Le moment de la mort du Sauveur approchait et des sentiments soit d’affection, soit d’iniquité et de haine contre lui, se développaient et se manifestaient d’un côté et de l’autre. Ici, nous voyons Marie, celle qui s’asseyait aux pieds de Jésus pour l’écouter et pour comprendre ses paroles. Là, son coeur avait bu aux enseignements qui découlaient du coeur de Jésus. Jésus, la source de toutes les bénédictions, était l’objet qui avait fixé son coeur, et elle l’avait senti dans ses affections. La grâce et l’amour de Jésus avaient produit en elle l’amour pour lui, et sa parole qu’elle avait reçue avait été pour elle la source de l’intelligence spirituelle. Or cet amour pour le Sauveur la rendait d’autant plus sensible à la haine croissante des Juifs. Les disciples savaient que ceux-ci cherchaient à le faire mourir, mais Marie le sentait ; non qu’elle fût une prophétesse, mais son coeur pressentait ce que la haine de l’homme désirait, et elle fit ce qui était en son pouvoir pour témoigner du sentiment contraire qu’elle éprouvait. Le Seigneur annonce que l’on parlerait de cet acte d’amour partout où l’évangile serait prêché dans le monde.
Il est doux d’entrer dans la maison où cette famille habitait (ici, l’acte de Marie se passe dans la demeure de Simon le lépreux) ; cette famille aimée du Seigneur, le refuge de son coeur lorsque, rejeté par le peuple, il ne pouvait plus reconnaître la ville qu’il avait aimée si longtemps. Il avait accoutumé de vivre avec la famille de Béthanie. Marthe, qui semble avoir été l’aînée des deux soeurs, occupée de beaucoup de service, fidèle au Seigneur et aimée de lui, mais sans grande intelligence spirituelle, comprenait peu ce qui remplissait le coeur du Maître. Quant à Marie, elle aimait à s’asseoir à ses pieds pour écouter ses enseignements, et il avait ressuscité d’entre les morts leur frère Lazare. Ainsi le coeur de Marie s’était attaché au Seigneur, et donnait l’expression du petit résidu qui, uni à Jésus lui-même, suivait le développement des voies de Dieu ; il ne s’arrêtait pas aux espérances et aux pensées juives, mais, bien que l’intelligence que le Saint Esprit devait donner, manquât encore, il suivait de près le Seigneur, et ainsi était prêt à recevoir tout ce qui allait être révélé.
On a fait la remarque que cette Marie n’était pas au sépulcre, cherchant parmi les morts un Sauveur vivant. Il en est toujours ainsi. Les coeurs attachés à Jésus et qui aiment à être près de lui, reçoivent de lui-même, quand le temps est venu, la révélation de sa sagesse et de sa gloire. Il est précieux aussi de remarquer que le Seigneur, bien qu’il fût Dieu (toute la plénitude de la Déité habitait en lui), était réellement un homme, parfait et saint en toutes choses et en toutes ses pensées ; — la source même de toute bonne pensée. À cause de cela, il n’était pas insensible à ces affections intimes. Nous savons qu’il y avait un disciple que Jésus aimait : ce disciple lui-même se plaît à le rappeler ; le Seigneur aimait Marthe, et Marie, et Lazare, et leur maison offrait un repos à son coeur, quand un monde ingrat et un peuple rebelle le rejetaient. C’était un fruit de sa grâce, sans doute ; mais néanmoins précieux à son coeur, à cause de cela même.
Mais, hélas ! ce qui est aux uns odeur de vie pour la vie, est aux autres odeur de mort pour la mort. Ce que Marie répandait, dans son amour pour le Seigneur, éveille l’avarice de Judas, car c’était une perte pour lui. D’autres aussi tombaient sous l’influence de Judas et se laissaient entraîner par ses mauvaises pensées ; mais le Seigneur justifie la femme. « Ce qui était en son pouvoir, elle l’a fait », dit Jésus plein de grâce. Son dévouement pour le Seigneur sera reconnu dans tous les âges. Quand le Seigneur, dans son amour divin, se donne lui-même, elle, par grâce, fait tout ce qu’il est possible à un coeur dévoué de faire pour lui, et son nom sera uni à celui du Seigneur dans l’acte qui est le plus puissant témoignage de son éternel amour. Bien que ce qu’elle pouvait faire fût peu de chose, le Seigneur n’oublie jamais le peu fait pour lui, quand le coeur est fidèle.
(v. 10, 11). Maintenant, tout se hâte vers la fin. Judas, poussé peut-être par l’appât du gain, mais en réalité conduit par Satan, s’en va pour trahir le Seigneur. Le bien et le mal sont accomplis ; ils trouvent leur accomplissement à la croix. Ni la conscience, ni la crainte de Dieu n’arrêtent les chefs dans leur voie d’iniquité et dans leur opposition au Seigneur de gloire ; ils conviennent avec Judas de lui donner de l’argent pour trahir le Seigneur, et il cherche une occasion de le livrer aux sacrificateurs sans causer trop de bruit. Misérable service, assurément !
(v. 12-16). Pendant ce temps, le Sauveur expose à ses disciples la manière dont il se livrerait lui-même pour eux, et il institue le précieux mémorial de sa mort, afin que nous puissions toujours en garder le souvenir, et que non seulement nous croyions en l’efficacité de ce sacrifice accompli une fois et pour toujours pour nous sur la croix, mais que nos coeurs soient attachés au Sauveur qui nous a aimés et s’est donné lui-même pour nous ; pensant à lui et annonçant sa mort jusqu’à ce qu’il vienne. Nous, chrétiens, nous sommes placés entre la croix et la venue du Seigneur, établis en toute sécurité sur l’oeuvre accomplie à la première, et regardant en avant et attendant constamment le moment où aura lieu la seconde.
Quoique le Seigneur soit arrivé maintenant au temps de sa plus profonde humiliation, la gloire de sa personne et ses droits sur toutes choses restaient toujours les mêmes. Il dit à ses disciples d’entrer dans la ville, et que là un homme, portant une cruche d’eau, viendrait à leur rencontre. Dans la maison où il entrerait, ils trouveraient un coeur préparé par grâce à recevoir le Seigneur. À celui-là ils devaient dire : « Le maître dit : Où est mon logis où je mangerai la pâque avec mes disciples ? » Jésus connaissait toutes les circonstances et tous les coeurs. Les disciples trouvent l’homme comme il le leur avait dit, et préparent la Pâque.
(v. 17-20). Quand le soir fut arrivé, le Seigneur vint avec les douze. C’était la commémoration de la délivrance du peuple hors d’Égypte ; mais Jésus allait accomplir une meilleure rédemption, et il institue un mémorial infiniment plus excellent. Mais pour cela, il lui fallait mourir. Ils étaient tous ensemble à table, et le Seigneur Jésus, rempli d’amour, regardant ses disciples, sentait profondément le fait que l’un de ceux, qui avaient vécu en sa sainte présence, allait le trahir. Il savait bien qui serait le traître, mais il exprime l’angoisse de son coeur, quand il dit « L’un d’entre vous… me livrera ». Il voulait éprouver encore leurs coeurs et amener en lumière ce qui se trouvait au-dedans. Ils croyaient les paroles du Seigneur, et chacun d’eux, rempli de confiance en Lui, mais d’une sainte défiance d’eux-mêmes, se mit à dire : Seigneur, « est-ce moi ? » Beau témoignage de coeurs droits et éprouvés qui pensent au fait et à la possibilité d’un tel crime avec plus de confiance en Jésus qu’en eux-mêmes.
Mais le Seigneur devait souffrir toutes ces douleurs — il ne les cache pas avec fierté, mais désire déposer, dans des coeurs humains, les douleurs qu’il éprouve comme homme ; l’amour compte sur l’amour. Il y avait des douleurs qui ne pouvaient pas être versées dans des coeurs d’homme, et néanmoins c’était la volonté de Dieu (que son nom en soit à jamais béni !) que nous connussions les souffrances de son Fils, lesquelles, bien qu’au-dessus de notre portée, sont néanmoins présentées à nos coeurs. Ainsi, nous l’entendons s’écrier : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Et si nous ne pouvons pas sonder les profondeurs de ses souffrances, nous pouvons comprendre qu’elles étaient infinies.
(v. 21). À table avec ses disciples, le Seigneur leur annonce son départ de ce monde, selon les Écritures, et le terrible jugement de Judas ; car l’accomplissement des conseils de Dieu n’ôte pas l’iniquité de ceux qui les accomplissent, autrement comment Dieu jugerait-il le monde ? Car toutes choses travaillent ensemble à l’accomplissement de ses conseils. La mauvaise volonté de l’homme est aussi toujours active pour faire le mal. L’objet du Seigneur, comme nous le voyons dans cet évangile, n’est pas de désigner la personne qui devait commettre le crime, mais de leur faire sentir que c’était l’un des douze qui le commettrait.
(v. 22). Maintenant, le Seigneur institue la Cène, précieux signe et mémorial de son amour et de sa mort. Jusqu’à ce moment, la Pâque avait été la commémoration de la délivrance du peuple de la captivité où il avait été en Égypte, lorsque le sang de l’agneau avait été mis sur les portes des maisons des Israélites. Maintenant, le sang d’un sacrifice plus excellent, celui de l’Agneau sans défaut et sans tache, a été placé sur le propitiatoire dans le ciel, devant les yeux de Dieu, lorsque Christ, l’Agneau de Dieu, a tout accompli pour la gloire de Dieu et pour le salut de tous les croyants. L’oeuvre a été faite : dans le sacrifice offert sur la croix, Jésus a bu la coupe de malédiction et ne peut plus la boire. Il a parfaitement glorifié Dieu touchant le péché ; il est impossible d’ajouter quelque chose à ce qu’il a fait, comme si quelqu’un manquait pour compléter la perfection de cette oeuvre. Il a porté les péchés de plusieurs et ne peut pas les porter de nouveau ; il ne peut plus s’offrir lui-même : il est assis à perpétuité à la droite de Dieu (Héb. 9:24-26). Si la seule offrande faite sur la croix n’avait pas ôté pour toujours tous les péchés de tous les croyants, il aurait dû souffrir plusieurs fois : sans effusion de sang, il n’y a pas de rémission.
Le pardon des péchés pour les croyants est complet, parfait et éternel, à cause de l’oeuvre de Christ. Si nous péchons après avoir reçu le pardon de nos péchés, Christ prie pour nous ; il est notre avocat en vertu de cette propitiation et paraît en la présence de Dieu pour nous, comme notre justice (1 Jean 1:2) ; l’effet de son intercession pour nous, est que le Saint Esprit opère en nos coeurs. Nous sommes humiliés, nous confessons nos fautes à Dieu, et notre communion avec le Père et avec le Fils se trouve rétablie. Mais le péché n’est pas imputé comme un crime, car Christ l’a déjà porté — c’est à lui qu’il a été imputé. Tel était le cas lors de la Pâque en Égypte ; Dieu dit : Quand je verrai le sang, je passerai par-dessus vous. Le sang de Christ est toujours devant les yeux de Dieu, toujours présent à sa mémoire. Ainsi Christ nous lave les pieds par l’eau de la Parole, de même qu’il nous a sauvés par son sang, lorsque, par grâce, nous avons cru. Mais si Dieu n’oublie jamais le sang de Christ versé une fois pour toujours, il ne veut pas non plus que nous, nous l’oubliions. Le Seigneur Jésus, dans sa grâce infinie, désire que nous pensions à lui, que nous nous souvenions de lui. Quelle précieuse manifestation d’amour pour nous, que le Sauveur se plaise au souvenir que nous avons de lui, et qu’il nous ait laissé un touchant mémorial de lui-même et de son amour. Bienheureuse pensée ! Jésus veut que nous nous souvenions de lui, parce qu’il nous aime ! Le sacrifice ne peut être répété, mais sa valeur est toujours la même devant Dieu et Jésus est assis à la droite de Dieu, attendant que ses ennemis soient mis pour marchepied de ses pieds. Nous, nous attendons qu’il vienne nous prendre avec lui dans la maison du Père, et, dans la cène, nous annonçons sa mort jusqu’à ce qu’il vienne.
Il est important de remarquer qu’il n’y a pas de sacrifice dans le temps actuel, et que le Seigneur n’est pas personnellement présent dans le pain et le vin. L’église de Rome enseigne que la cène du Seigneur (ou plutôt la messe, comme elle dit) est le même sacrifice que celui qui fut accompli sur la croix. Mais, quand le Seigneur dit : « Ceci est mon corps… faites ceci en mémoire de moi », il n’était pas encore sur la croix ; son sang n’avait pas encore été versé ; et quand il rompit le pain, il ne se tenait pas lui-même dans ses mains, c’était encore moins lui-même crucifié, car il n’était pas encore sur la croix. Il n’y a pas maintenant de Christ crucifié ; Christ est assis à la droite de Dieu, et il n’y a actuellement aucune aspersion de sang. C’est une chose précieuse pour nous qu’il y ait un signe, une commémoration de la mort de Christ sur la croix, du sacrifice alors offert à Dieu, mais il est impossible que cela soit ainsi réellement et substantiellement dans le temps actuel ; il n’y a pas maintenant un Christ mort.
Dans la Cène, nous rappelons sa mort et son sang versé pour nous mais un Christ glorifié ne peut être un sacrifice il ne peut descendre du ciel pour mourir, et si le pain est changé en son corps et qu’il y ait en lui une âme, ce doit être une autre âme, ce qui est absurde. Les catholiques romains disent que la Déité est partout, et que la substance du corps est là ; mais l’âme est individuelle ; elle vit, elle sent, elle aime, elle est simple et individuelle. Selon l’enseignement de l’église romaine, l’âme du Seigneur Jésus quitte le ciel, mais ce ne peut être la même âme, et si l’on dit que c’en est une autre, c’est une absurdité. Le Seigneur, dans l’évangile de Luc, dit : « Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang », c’est-à-dire qu’elle représente le sang, car la coupe elle-même n’est pas la nouvelle alliance. Ainsi le pain nous représente, de la manière la plus frappante, le corps du Seigneur crucifié sur la croix, et le vin son sang versé pour nous.
En dernier lieu, le Seigneur donne à boire à ses disciples du fruit de la vigne ; et il est nommé ainsi après que le Seigneur eut dit, au v. 24 : « Ceci est mon sang, le sang de la nouvelle alliance ». Il est tout à fait clair que, lorsque le Seigneur dit : Je n’en boirai plus, il parle du vin dans le sens naturel. Après le souper, ils chantent une hymne, le Seigneur étant parfaitement calme dans son esprit. Puis ils sortent et s’en vont à la montagne des Oliviers. Le Seigneur avertit ses disciples que, cette même nuit, ils seraient tous scandalisés à cause de lui, et qu’ils l’abandonneraient, selon la prophétie de Zacharie : « Je frapperai le berger, et les brebis seront dispersées ». Mais il leur annonce, en même temps, sa résurrection, et leur dit qu’après avoir été ressuscité, il irait devant eux en Galilée. Nous voyons une différence entre l’apparition du Seigneur en Galilée, et son apparition à Béthanie ; cette dernière nous est rapportée dans l’évangile de Luc. C’est de Béthanie qu’il est monté au ciel. En Galilée, le Seigneur est toujours envisagé comme étant sur la terre, bien que ressuscité d’entre les morts, et là il donne à ses disciples la commission de prêcher l’évangile à toutes les nations et de les baptiser. Ce service ne fut pas accompli par les apôtres — plus tard ils le laissèrent à Paul (c’est-à-dire la prédication de l’évangile aux nations), ayant reconnu que le Seigneur l’avait choisi et envoyé pour cette oeuvre.
Nous voyons que la commission donnée aux disciples, dans l’évangile de Marc, est encore différente ; elle est en rapport avec la puissance céleste du Seigneur. L’oeuvre du Seigneur, son ministère propre, se fit principalement en Galilée. Le résidu juif est reconnu, rassemblé et accepté ; puis il est envoyé pour amener les gentils dans la jouissance des bénédictions attendues de Dieu. La révélation et la prédication des bénédictions célestes, le salut révélé par le Saint Esprit envoyé du ciel après que Christ y est monté, est tout une autre chose. Mais que les bénédictions soient terrestres ou célestes, elles ne peuvent venir par le premier homme : le second homme est le seul fondement possible pour toute bénédiction.
Maintenant, le Sauveur doit être tout à fait seul dans son oeuvre et ses souffrances, et l’homme va montrer ce qu’il est quand il n’est pas gardé par Dieu. Les disciples avaient été avertis, mais Pierre, rempli de confiance en sa fidélité (et il était sincère), se confiant aussi à sa propre force, ne veut pas croire les paroles du Seigneur. Mais la chair ne peut pas résister à la puissance de Satan. Le Seigneur allait se trouver abandonné et renié ; l’homme, quelque sincère qu’il fût, aurait à reconnaître son absolue faiblesse : leçon humiliante, mais bien utile, et qui fait briller la grâce et la patience du Seigneur. Il est très important de nous rappeler — et nous le voyons clairement ici — que la sincérité ne suffit pas pour nous garder dans le droit chemin ; c’est une qualité tout à fait humaine. Quoique sincères, nous n’avons pas moins besoin de la force du Seigneur contre les ruses du diable et la crainte du monde. Si le Seigneur n’est pas là, une jeune fille peut renverser un apôtre. La crainte de l’homme est un terrible piège pour l’âme, et cette crainte agissait avec puissance dans le coeur de Pierre. Même après avoir reçu le Saint Esprit, il dissimula à Antioche, lorsque quelques croyants juifs furent venus de Jérusalem.
Remarquez la manière dont le Seigneur a préparé les deux plus grands apôtres pour son oeuvre. Paul essayait de faire disparaître le nom de Christ de dessus la terre, et Pierre renia ouvertement le Seigneur après l’avoir connu et avoir opéré des miracles en son nom. Ainsi, il ne leur était pas possible à l’un ni à l’autre de parler d’autre chose que de grâce, et toute fausse confiance en eux-mêmes était détruite dans leurs coeurs. Ils pouvaient fortifier d’autres par la conscience de la grâce du Seigneur, qui les avait supportés et leur avait pardonné ; ils avaient aussi appris par expérience quelle est la méchanceté du coeur humain, et combien l’homme, et même le chrétien, est faible, sans le secours de la grâce divine. Aussi le Seigneur dit-il à Pierre : « Quand… tu seras revenu (c’est-à-dire quand tu te seras repenti de ta faute), fortifie tes frères ». Il tomba encore une fois plus tard, de telle sorte que Paul eut à lui résister en face. Paul lui-même avait une écharde dans la chair, un ange de Satan pour le souffleter, de peur qu’il ne s’enorgueillît. La chair ne s’améliore jamais ; combien donc il est nécessaire, pour de faibles chrétiens, de veiller, d’avoir toujours présente la conscience de leur faiblesse, et de chercher cette puissance qui s’accomplit dans l’infirmité, cette grâce précieuse du Seigneur qui suffit à tout pour nous. Il n’est pas nécessaire que nous tombions, car Dieu est fidèle et ne permettra pas que nous soyons tentés au-delà de ce que nous pouvons supporter ; mais il nous faut veiller afin que nous n’entrions pas en tentation.
Dans la scène placée devant nous, ‘tandis que le Seigneur prie en agonie, Pierre dort ; tandis que le Seigneur se livre lui-même et reste muet comme un agneau devant celui qui le tond, Pierre frappe de l’épée ; et quand le Seigneur confesse la vérité avec calme et fermeté devant ses ennemis, Pierre le renie. Voilà ce qu’est la chair et le fruit de la fausse confiance en soi-même ! Pierre aussi avait été pleinement averti. Le Seigneur avait parlé une seconde fois et lui avait dit qu’avant que le coq eût chanté deux fois, Pierre l’aurait renié trois fois. Mais Pierre se confie en lui-même ; il répond : « Quand il me faudrait mourir avec toi, je ne te renierai point ». Nous savons que Satan était là avec ses ruses, car Satan avait demandé à cribler Pierre comme on crible le blé ; mais le Saint Esprit dirige ici notre attention sur la fausse confiance de la chair dans le coeur humain.
Mais tournons nos regards vers le Seigneur, le modèle d’une fidélité parfaite, de même que Pierre était celui de la fausse confiance et de la faiblesse de la chair. Nous voyons en Jésus un vrai homme, bien que la puissance divine fût nécessaire afin que la nature humaine pût endurer, sans défaillir, tout ce qu’il souffrit.
Le Seigneur prend trois disciples pour être avec lui et veiller pendant qu’il prierait. Ce sont ceux qui étaient plus particulièrement avec lui et qui, plus tard, devaient être les colonnes de l’Église. La vue anticipée de la coupe qu’il avait à boire accablait son esprit ; la mort, expression du jugement de Dieu contre le péché, était devant ses yeux, et Satan faisait peser lourdement sur lui le sentiment de ces choses, afin de l’empêcher, si c’eût été possible, d’accomplir l’oeuvre du salut. Le Seigneur sentait tout, et restait fidèle en tout : il commença à être saisi d’effroi et fort angoissé. Il n’y avait pas d’agonie dans la mort d’Étienne ; c’était un triomphe plein de paix et d’amour ; il va vers son Seigneur qui l’attendait à la droite de Dieu dans le ciel, et tout le temps, semblable à son Seigneur, il prie pour ses ennemis. Le Seigneur, lui, est rempli d’angoisse devant la perspective de la mort ; nous voyons par là ce que la mort était pour lui, et la réalité de son oeuvre lorsqu’il portait nos péchés en son corps sur la croix. À ce moment (dans le jardin de Gethsémané), il ne les portait pas encore, mais le sentiment de ce qu’il avait devant lui oppressait son coeur ; il sentait avec Dieu dans son esprit le poids du péché et de la malédiction, car il était toujours en communion avec son Père. Non seulement il devait se soumettre à la justice de Dieu, comme étant fait péché pour nous devant lui, et en porter la pénalité, mais il avait aussi à souffrir « à cause de sa piété », en ce que l’anticipation de la pénalité pesait sur lui avant qu’il la portât. Il s’est offert lui-même volontairement, mais en obéissance, pour la gloire de son Père, et pour nous, en grâce ; il fut obéissant jusqu’à la mort. Que son nom soit loué ! et il le sera éternellement.
Étienne se réjouissait, parce que Christ avait souffert et lui avait ouvert le chemin du ciel, en subissant pour lui le juste jugement de la mort ; il l’a fait pour nous aussi. Nous pouvons comprendre la valeur de sa mort aux yeux de Dieu, et regarder en haut vers lui comme Étienne, lorsque, rempli du Saint Esprit, il avait les yeux attachés sur le ciel.
Le Seigneur avait laissé ses disciples à l’entrée du jardin, sauf Pierre, Jacques et Jean, qu’il avait pris avec lui, leur disant de veiller tandis qu’il priait. il demande que l’heure passe loin de lui, si possible. Il avait pris toutes les coupes de souffrances de la main des pécheurs, sans se plaindre d’eux. La faveur de son Père lui suffisait. Mais cette coupe, être fait malédiction, le juste fait péché, se trouver lui-même, lui qui, dans le sein du Père, avait toujours été l’objet d’un amour infini, se trouver abandonné de Dieu ; — à cause de sa piété, il aurait voulu que cette coupe passât loin de lui. Mais pour que nous pussions échapper au châtiment dû au péché, il fallait qu’il la bût pour nous.
Mais tout cela ne fut que l’occasion pour le Sauveur de donner la preuve de sa soumission et de sa parfaite obéissance. Il dit : « Toutefois non pas ce que je veux, moi, mais ce que tu veux, toi ! » Il sentait tout, et il plaçait tout devant son Père, de sorte qu’il passe à travers toute l’épreuve dans une parfaite soumission à son Père. Comme épreuve, c’était fini ; la volonté de Dieu était manifestée et l’obéissance du Seigneur était parfaite, bien que l’oeuvre elle-même fût encore à accomplir. Les disciples étaient incapables de traverser même l’ombre de l’épreuve, et tous les hommes étaient ses ennemis. Satan était là dans toute sa puissance, et par-dessus tout, devant lui, il y avait à porter la malédiction prononcée sur le péché. L’épreuve était entière, mais Christ, soumis à la volonté de son Père, manifeste son amour pour Lui.
Il nous est accordé d’être témoins des exercices de coeur du Sauveur et de prendre part, dans notre faiblesse, à l’angoisse de son âme, quoique dans l’épreuve même il fût seul : grâce immense ! Dans l’oeuvre à accomplir, il devait être absolument seul ; ici aussi il est seul, mais avec adoration nous pouvons écouter le cri du Sauveur, lorsqu’il ouvre son coeur au Père à l’occasion de ses souffrances. Ah ! que nos coeurs, par le Saint Esprit, soient tenus veillants et attentifs aux saints soupirs du Sauveur. Nous sommes invités à regarder vers lui, à comprendre ce qu’il a fait pour nous, à jouir des sentiments de son coeur humain et de sa perfection comme vrai homme pour nous. Ainsi, en Jean 17, il nous est accordé de l’entendre quand il se présente lui-même au Père, nous plaçant devant lui dans sa propre position de faveur, et dans celle de témoignage devant les hommes. Si la paix que nous possédons, comme appartenant à cette nouvelle position fondée sur son oeuvre accomplie, est si grande, le privilège d’entendre son cri d’angoisse ne l’est pas moins.
Remarquons avec quelle douceur le Seigneur réprimande ses disciples. Il montre à Pierre, avec la plus grande tendresse, le contraste entre le courage bouillant qu’il montrait quand l’ennemi n’était pas présent, et l’incapacité de veiller même une heure avec son Maître en agonie, et il excuse ses disciples par ces paroles remplies de bonté : « L’esprit est prompt, mais la chair est faible ». Plein, en même temps, de la solennité du moment, il les avertit aussi de veiller et de prier, de peur qu’ils n’entrent en tentation. Nous ne voyons jamais les souffrances du Seigneur l’empêcher de penser aux autres. Sur la croix, il pense au brigand, comme s’il ne souffrait pas lui-même ; s’il n’avait pas le temps de manger, il avait assez de temps pour annoncer la vérité à la foule qui le suivait ; fatigué, près du puits de Jacob où il s’est assis, son coeur ne se trouve point las pour parler de l’eau vive et s’adresser à la conscience de la pauvre Samaritaine. Jamais il ne se lassait de faire du bien, et il est le même hier, et aujourd’hui, et éternellement.
Mais le moment était arrivé ; la troisième fois qu’il vient vers ses disciples, il les trouve dormant comme la première et la deuxième. Il doit faire l’expérience, même au milieu de ses disciples, de cette solitude morale où il se trouvait parmi les hommes. Il y a une solitude dans laquelle on peut se trouver tout à fait seul moralement, bien que d’autres soient présents. Le traître approchait : « Dormez dorénavant », dit le Seigneur. « Levez-vous, allons ; voici, celui qui me livre s’est approché ». Le Seigneur devait recevoir le dernier témoignage de la faiblesse du coeur de l’homme, laissé à lui-même et endurci par Satan. Judas le trahit par un baiser tant est grande la dureté de son coeur ! « Saisissez-le, et emmenez-le sûrement », dit-il. Mais le Seigneur qui, dans son âme, avait passé à travers tout avec Dieu, demeure dans une paix parfaite devant les hommes dans ces circonstances sans pareilles. Il parle à la foule venue pour s’emparer de lui : il avait été tous les jours avec eux dans le temple, et ils ne s’étaient pas saisis de lui ! Mais les Écritures devaient être accomplies. Le Seigneur veut rendre témoignage à l’autorité des Écritures ; puisqu’elles ont annoncé sa mort, il faut qu’il meure. Les Écriture sont la révélation des conseils et du dessein de Dieu, aussi bien que de toutes ses pensées. Le Seigneur, aussi comme homme sur la terre, les prenait pour la règle et le mobile de tout ce qu’il faisait et disait, bien qu’il fût toujours dans une communion ineffable avec son Père. Les Écritures sont la révélation des pensées de Dieu à l’égard de la terre, et à l’égard de l’homme sur la terre ; elles révèlent aussi sa destination céleste, et ce que sont les choses célestes. Quelle immense bénédiction que de posséder les saints écrits !
Tous les disciples abandonnent le Seigneur et s’enfuient ; plus tard, Pierre le suivit de loin. Jésus est amené au palais du souverain sacrificateur. Le Seigneur se soumet dans un calme parfait ; tout avait été déjà pesé en la présence de son Père, dont la volonté rendait tout simple pour le Seigneur ; mais nul ne pouvait le suivre dans la vallée de la mort, ni tenir devant la puissance de l’ennemi, sauf lui seul, le fidèle Sauveur. C’était l’heure où il était permis au méchant d’avoir de la puissance, afin que le Seigneur fût livré pour nous entre les mains des impies.
Les disciples s’enfuient ; un jeune homme désire le suivre, mais plus la volonté s’aventure dans ce sentier, plus elle est obligée de se retirer avec honte. On veut le saisir, mais il échappe nu de leurs mains. Le pauvre Pierre va plus loin, mais pour tomber encore plus bas, apprenant ainsi, pour son propre bien, ce que nous sommes tous. C’est une bonne chose de penser à l’angoisse du Seigneur devant Dieu, lorsqu’il ouvre tout son coeur à son Père ; nous voyons ses profondes souffrances, son calme parfait devant les hommes, fruit de son entière soumission : dans cette soumission, il ne regarde en rien aux hommes, et Satan ne pouvait rien faire, car le Seigneur avait pris la coupe de la main de son Père. C’est là un enseignement très important pour nous.
La condamnation du Seigneur était une chose résolue d’avance ; les chefs des Juifs ne cherchaient que le moyen de consommer leur iniquité et leur meurtre sous l’apparence de la justice. Ils cherchent un témoignage contre lui, afin de le faire mourir ; mais ceux qui se présentent sont de faux témoins, et ils ne s’accordent pas. Plusieurs étaient prêts à porter témoignage, mais leurs paroles n’avaient aucune valeur ; le Seigneur devait être condamné sur son propre témoignage. Il est douloureux de voir l’inimitié du coeur de l’homme contre le Seigneur qui n’avait jamais fait que du bien aux hommes, guérissant les malades, rassasiant les affamés, ressuscitant les morts, chassant les démons, et ne manifestant la puissance divine que par des actes de bonté.
Lorsque le Fils de l’homme vint, la puissance divine, suffisante pour faire disparaître sur la terre toutes les conséquences du péché, jusqu’à la mort même, fut manifestée ; Christ opéra selon cette puissance : dans le désert, il lia l’homme fort, puis il pilla ses biens. Il y avait sur la terre une puissance capable d’annuler tous les effets du péché ; car la puissance de Dieu se manifestait en bonté. Mais cela ne fit qu’éveiller l’inimitié naturelle du coeur humain contre Lui. Il n’y avait aucun motif pour faire mourir Jésus : cette inimitié en était la seule cause. Ce qui enlevait les tristes effets du péché, n’ôtait pas du coeur de l’homme le péché lui-même, mais manifestait assez ce que Dieu était pour éveiller l’inimitié naturelle du coeur, et montrer ainsi ce qu’était ce coeur.
Nous lisons dans l’évangile de Luc (chap. 4:13), que « le diable se retira d’avec lui pour un temps » ; mais ensuite il revient comme prince de ce monde. Il n’avait rien dans le Seigneur, « mais », dit Jésus, « afin que le monde connaisse que j’aime le Père ; et selon que le Père m’a commandé, ainsi je fais » (Jean 14:30, 31). Le diable pouvait dire à Jésus : Si tu persévères à soutenir la cause des hommes, j’ai le droit de la mort contre toi. À la vérité, la malédiction de Dieu pesait sur eux, et le Seigneur devait passer par la mort et boire la coupe de la malédiction de Dieu due au péché, afin de délivrer l’homme. Recula-t-il devant cette terrible pénalité de la malédiction et de la mort ? Il la sentait, mais il but la coupe par amour pour son Père et pour nous, et il le fit dans une parfaite obéissance. Il vint en grâce et en obéissance, là où nous étions dans le péché et la désobéissance ; lui qui ne connaissait pas le péché, fut fait péché pour nous ; l’Agneau sans tache s’offrit pour nous à Dieu.
Dans ce chapitre, nous voyons le Seigneur comme une brebis muette devant ceux qui la tondent. Il ne répond pas à l’accusation de ses ennemis ; ils étaient là avec l’intention de le mettre à mort, et il le savait ; il allait donner sa vie pour la rançon de plusieurs. Il ne répond pas aux accusations pleines de malice et de mensonge que l’on portait contre lui, mais quand le souverain sacrificateur lui demande s’il est le Christ, le Fils du Béni, il rend pleinement témoignage à la vérité. Il est rejeté et crucifié à cause du témoignage que lui-même rend à la vérité ; mais, bien qu’il reconnaisse la vérité selon la question que lui pose le souverain sacrificateur, il ne va pas au-delà de sa position de Messie parmi les Juifs.
Le Seigneur ajoute encore à son témoignage celui de sa position comme Fils de l’homme, position qu’il était sur le point de prendre à ce moment. Nous avons vu qu’il avait défendu à ses disciples de dire qu’il était le Christ, leur annonçant en même temps que le Fils de l’homme devait souffrir. Or nous trouvons maintenant l’accomplissement de ces paroles, car Christ est reconnu comme Fils de Dieu, selon le Ps. 2, mais depuis ce moment, il prend la nouvelle position de Fils de l’homme, selon le Ps. 8. Les Juifs devaient voir — non plus le Christ promis venant parmi eux en grâce et rejeté, comme il est dit au Ps. 2, mais — le Fils de l’homme assis à la droite de Dieu, venant sur les nuées du ciel, et manifestant sa puissance en jugement. Seulement il attend, assis à la droite de Dieu, ainsi que nous le montre le Ps. 110, jusqu’à ce que ses ennemis soient mis comme marchepied de ses pieds.
Pour nous, nous le voyons au ciel, ayant accompli l’oeuvre que son Père lui a donnée à faire ; nous le voyons à la droite de Dieu, nos péchés ayant été abolis, et là il reste assis à perpétuité, « attendant désormais jusqu’à ce que ses ennemis soient mis pour marchepied de ses pieds ».
Le Seigneur confesse la vérité, lorsque l’autorité supérieure le demande ; il est absolument parfait, il est la vérité même.
Satan ne peut rien dans ce cas, excepté, malgré lui, d’amener la vérité à être mise en évidence par la bouche du Seigneur, et d’être l’instrument pour accomplir l’oeuvre de rédemption que Dieu désirait qui fût faite, que son nom en soit à jamais béni ! Quant aux hommes, le Seigneur est jugé digne de mort, parce qu’il a dit la vérité, et la vérité quant à l’oeuvre de l’amour de Dieu dans l’envoi du Fils dans le monde. La vérité de Dieu, aussi bien que la personne du Fils de Dieu et Dieu lui-même, sont les objets de la haine de l’homme ; mais la vérité vint par Jésus Christ, et la grâce, suivant la souveraine puissance ; et la sagesse de Dieu fut accomplie au moyen de cette haine, haine dans laquelle l’homme s’est montré l’esclave de Satan. Quel contraste entre les hommes religieux, la caste ecclésiastique, et la vérité et la grâce de Dieu !
Mais pensons à ce divin Sauveur, muet comme une brebis devant ceux qui la tondent, se soumettant sans résistance aux outrages dont les hommes l’accablent. Il aurait pu avoir douze légions d’anges, mais il ne veut pas user de sa puissance. Il poursuivait son chemin d’amour patient et d’obéissance. Ce qu’il y eut de plus douloureux pour lui fut de se voir renié par son disciple ; cela était bien plus pour son coeur que d’être couvert d’ignominie par des hommes brutaux et ignorants. Mais quelles que fussent les souffrances de Jésus, la chute de son faible disciple ne fit qu’attirer sur lui le regard du Seigneur pour l’encourager, soutenir sa confiance en lui, et produire dans son coeur les larmes de repentance au lieu du désespoir. Les souffrances du Sauveur, si grandes fussent-elles, n’arrêtaient pas l’action de son merveilleux amour.
Que son nom soit béni éternellement !
L’évangile de Marc raconte très brièvement les circonstances de la condamnation du Seigneur ; c’est un fait important à noter. Dès qu’il l’a montré rejeté par les Juifs, Marc parle de ce qui eut lieu devant Pilate pour rapporter ce qui est nécessaire, et montrer que le Seigneur est, cette fois encore, condamné pour le témoignage qu’il rend à la vérité — bien qu’en réalité il le fût par la malice des principaux des Juifs. En effet, Pilate s’efforce de le mettre en liberté, mais n’ayant aucune force morale et méprisant les Juifs et tout ce qui leur appartenait, il abandonne sans conscience le Seigneur à leur volonté. Lorsque Pilate demande : « Toi, tu es le roi des Juifs ? » Jésus répond : « Tu le dis ». Mais aux accusations des Juifs, il ne répond rien ; son témoignage a déjà été rendu.
Le Seigneur Jésus devait bientôt souffrir comme victime. Toutes les accusations portées contre lui ne valaient rien, et Pilate le savait bien, mais il fallait que les Juifs manifestassent l’esprit qui les animait. Pilate essaie de se débarrasser de Jésus et de la difficulté dans laquelle il se trouve, par une coutume qui semble avoir été introduite à cette époque et qui consistait à mettre en liberté un prisonnier à la fête de Pâque, afin de plaire aux Juifs. Il cherchait ainsi, en faisant cet appel au peuple, à détourner le coup de l’envie et de la malice des sacrificateurs ; mais c’était en vain : le Seigneur devait souffrir et mourir. Les principaux sacrificateurs incitèrent le peuple à demander que Barabbas fût relâché et le Seigneur crucifié. Pilate essaie encore de le sauver, mais enfin, pour satisfaire le peuple, il leur abandonne Jésus.
En tout cela, les Juifs étaient coupables ; naturellement le gouverneur romain aurait dû être ferme et agir selon la justice, et ne pas laisser le Seigneur exposé à la haine des sacrificateurs. Il était insouciant et sans conscience, et méprisait un pauvre Juif qui n’avait point d’amis ; il était aussi important pour lui de satisfaire la populace turbulente. Mais, dans l’évangile de Marc, toute la haine et l’animosité contre le Seigneur se trouvent chez les sacrificateurs ; ils se montrent toujours et partout les ennemis de la vérité et de Celui qui est lui-même la vérité en personne. La résistance de Pilate ne sert de rien ; c’était la volonté de Dieu que Jésus souffrît : Il était venu pour cela, et pour donner sa vie en rançon pour plusieurs. Dans ce qui suit, nous trouvons l’histoire de la brutalité du coeur de l’homme, qui trouve son plaisir à outrager ceux qui lui sont abandonnés sans pouvoir se défendre. En outre, le Seigneur devait être méprisé et rejeté des hommes, soit Juifs, soit gentils. Et c’est là ce qui a prouvé que l’homme n’a pas voulu recevoir Dieu venant à lui dans sa bonté.
Mais la nation juive devait être humiliée — les soldats tournent en dérision la nation entière en se moquant de son Roi. Le Seigneur est revêtu de pourpre, comme un roi, battu et raillé sous de prétendus honneurs, et puis conduit dehors pour être crucifié. Sur la croix étaient écrites ces paroles : « Le Roi des Juifs » ; le Seigneur était mis au rang des iniques. Ce qui ressort principalement ici, est l’humiliation du roi d’Israël. « Que le Christ, le roi d’Israël, descende maintenant de la croix, afin que nous voyions et que nous croyions », disaient les principaux sacrificateurs. Ceux qui étaient crucifiés avec lui l’insultaient aussi : nous savons que l’un des deux fut converti ensuite et confessa que Jésus était le Seigneur.
Jusqu’au v. 33, nous voyons l’humiliation du Seigneur et le triomphe apparent du mal. L’homme, en général, et Israël, comme nation, montraient leur joie d’avoir pu se débarrasser du fidèle témoin de Dieu, de la présence même de Dieu, et du vrai roi d’Israël mais ils s’abaissaient eux-mêmes en s’efforçant d’abaisser le Seigneur, dont l’amour continuait d’accomplir l’oeuvre que le Père lui avait donnée à faire au milieu des outrages, de l’aveuglement, de la folie et de la méchanceté des hommes et de son peuple d’Israël qui, hélas ! comblait la mesure de son iniquité. L’amour du Sauveur était plus fort que la haine et la perversité de l’homme ; que son saint nom en soit béni !
Mais, depuis le v. 33, nous trouvons une oeuvre plus profonde que les souffrances extérieures du Sauveur, quelque réelles et profondes que celles-ci fussent pour lui. Il était laissé seul il n’y avait personne qui eût compassion de lui nous ne voyons rien qu’abandon et cruauté. Mais il y a une grande différence entre la cruauté de l’homme et la pénalité contre le péché exécutée par Dieu.
À la sixième heure, tout le pays (ou peut-être toute la terre) fut couvert de ténèbres. Christ est seul avec Dieu, toutes les choses visibles sont cachées, et lui aussi est caché à tout oeil, afin d’être entièrement avec Dieu. Il porte la peine de notre péché ; il boit pour nous la coupe de la malédiction ; Celui qui n’a pas connu le péché est fait péché pour nous. Dans le Ps. 22, nous voyons que le Seigneur, sentant pleinement la pression de la haine et de la malice de l’homme, se tourne vers Dieu. Il avait prévu, en Gethsémané, ce qui allait arriver, et dans cette anticipation, sa sueur était devenue comme des grumeaux de sang. Il se tourne vers Dieu et dit : « Ne te tiens pas loin de moi » (Ps. 22:11), mais, dans l’angoisse de son âme, il est abandonné de Dieu. Et jamais il ne fut plus précieux à Dieu, que dans cette parfaite obéissance, lui qui était de toute éternité les délices de Dieu. Mais cette obéissance avait son accomplissement, lorsqu’il était fait péché pour nous. Jamais il n’avait autant glorifié son Père dans sa justice et son amour, mais étant fait un sacrifice pour le péché, et sentant dans les profondeurs de son âme ce que Dieu est contre le péché, il en portait la peine.
Ainsi Dieu devait cacher sa face de Celui qui était fait péché pour nous. Cela était nécessaire pour la gloire et la majesté de Dieu, aussi bien que pour notre salut. Mais qui peut sonder les profondeurs des souffrances du Sauveur ! Celui qui avait toujours été l’objet des délices du Père est maintenant abandonné de lui ! Celui qui était la sainteté même, se trouve être fait péché devant Dieu ! Mais tout est passé, toute la volonté de Dieu touchant l’oeuvre qu’il avait donnée à faire à Jésus a été accomplie. Pensée bénie ! Plus il a souffert, plus il nous est précieux, et nous l’aimons quand nous pensons à son amour parfait et à la perfection de sa personne. Toute souffrance a pris fin pour lui à sa mort, et, dans sa résurrection, tout est nouveau pour nous. Tous nos péchés sont pardonnés, nous sommes avec lui dans la présence de Dieu, et quand il viendra nous serons semblables à lui en gloire.
Mais s’il est mort, ce n’était pas que la force vitale fût épuisée en lui. Il jette un grand cri et expire. Tout était passé, et il remet son esprit entre les mains de son Père ; il est réellement mort pour nous. Il s’est offert lui-même à Dieu, sans tache, et Dieu a mis sur lui les péchés de plusieurs. Il devait mourir, mais personne ne lui a ôté la vie : il avait le pouvoir de la laisser, et le pouvoir de la reprendre. Il l’a laissée lui-même quand tout a été accompli.
Alors le voile du temple se déchira en deux depuis le haut jusqu’en bas. Nous voyons ainsi que le chemin du lieu très saint est ouvert à tous les croyants qui étaient sous la loi. Le voile qui était placé entre le lieu saint et le lieu très saint, signifiait que l’homme ne pouvait entrer en la présence de Dieu (Héb. 9) ; la mort de Christ a ouvert un chemin pour entrer dans le lieu très saint ; son sang nous y donne accès (Héb. 10:19, 20). Immense différence avec la condition précédente et précieux privilège pour nous ! Par son sang, nous pouvons entrer en la présence de Dieu, sans crainte, plus blancs que la neige, et nous réjouir dans l’amour qui nous a introduits dans cette position. Christ a fait la paix par le sang de la croix et nous a amenés à Dieu lui-même — lui, le juste, qui est mort pour nous injustes.
Et « par une seule offrande, il a rendu parfaits à perpétuité ceux qui sont sanctifiés ». Il ne peut s’offrir encore une fois. Si tous nos péchés n’ont pas été effacés par cette seule offrande, ils ne peuvent jamais l’être, car Christ ne peut pas mourir une seconde fois. Il n’est pas question d’aspersion, il est dit : « Sans effusion de sang il n’y a pas de rémission ». L’apôtre démontre cette solennelle vérité, lorsqu’il dit : « Dans ce cas il aurait fallu qu’il souffrît plusieurs fois depuis la fondation du monde ; mais maintenant, en la consommation des siècles, il a été manifesté une fois pour l’abolition du péché par son sacrifice » (Héb. 9:26). Lorsqu’un homme croit, il entre en possession de cette bénédiction ; il est rendu parfait à perpétuité en Christ devant Dieu ; le péché ne peut lui être imputé, parce que Christ, qui l’a porté et expié, est toujours en la présence de Dieu pour lui, témoin que ses péchés sont déjà ôtés, et ainsi celui qui vient à Dieu par le Sauveur est accepté en lui.
Des gens disent : « En ce cas, nous pouvons vivre dans le péché » ; telle était l’objection faite à l’évangile que l’apôtre Paul prêchait. La réponse se trouve au chapitre 6 de l’épître aux Romains. Si nous avons réellement cru en Christ, nous sommes nés de nouveau, nous avons une nouvelle nature, nous avons dépouillé le vieil homme et revêtu le nouveau, nous sommes morts au péché, morts avec Christ par la foi, crucifiés avec lui, de sorte que ce n’est plus nous qui vivons, mais Christ vit en nous. Nous sommes de nouvelles créatures ; il y a une oeuvre divine opérée en nous, tout comme il y a une oeuvre divine opérée pour nous. Si Christ est notre justice, il est aussi notre vie, et le Saint Esprit nous est donné ; nous sommes alors responsables de marcher comme Christ a marché ; mais cela n’est pas en opposition avec j’oeuvre de Christ pour nous — oeuvre parfaite, acceptée de Dieu, oeuvre en conséquence de laquelle il est assis à la droite de Dieu, comme homme, dans cette gloire qu’il avait comme Fils avec le Père avant que le monde fût. Avant que Christ vînt, Dieu ne se montrait pas, et l’homme ne pouvait pas entrer en sa présence. Maintenant, Dieu est sorti et est venu vers nous en amour, et l’homme entre en sa présence selon la justice de Christ.
En voyant comment Christ expire, la conscience du centurion parle. Il était seul près de Christ ; tous se tenaient loin ; tous, sauf les disciples qui avaient fui, étaient des ennemis. Mais la voix forte du Seigneur qui ne laissait voir aucun signe de faiblesse, et le fait qu’il remettait son esprit à son Père, agit puissamment sur l’âme de cet homme, et il reconnaît en Jésus mourant le Fils de Dieu. Maintenant l’oeuvre est accomplie, et Dieu prend soin que si, dans sa mort, il a été avec les transgresseurs, il soit avec le riche dans sa sépulture, honoré et traité avec tout respect. Les femmes qui l’avaient suivi sont occupées de lui. Elles regardaient de loin quand il fut crucifié, et quelques-unes d’entre elles, Marie de Magdala et l’autre Marie, la mère de Joses, virent la place où son corps fut déposé dans le sépulcre. Car Joseph d’Arimathée était allé vers Pilate pour demander le corps de Jésus ; plus courageux quand Jésus fut mort que durant sa vie. Il en est souvent ainsi ; la grandeur du mal force la foi à se montrer.
Mais les femmes, remarquez-le bien, ont une position encore plus heureuse ; elles avaient suivi Jésus depuis la Galilée, et l’avaient servi et assisté de leurs biens, et nous les trouvons près du Seigneur quand ses disciples l’ont abandonné. Elles n’avaient pas été envoyées pour prêcher, mais leur dévouement au Seigneur, leur fidélité et leur amour constant pour lui, quand les dangers se présentent, brillent d’un grand éclat dans l’histoire du Seigneur. Nous avons une autre preuve du fait que le Seigneur donna lui-même sa vie et qu’elle ne lui fut pas ôtée en ce que Pilate s’étonna qu’il fût déjà mort et fit venir le centurion pour en être assuré. Quand il l’eut appris, il donna le corps à Joseph qui le mit dans son propre sépulcre tout neuf, jusqu’à ce que le sabbat fût passé.
L’histoire de la résurrection, dans Marc, est très courte et simple. Il n’est pas douteux que plus d’une compagnie de ces femmes qui avaient suivi le Seigneur, visitèrent le sépulcre l’une après l’autre. Il est clair que Marie de Magdala arriva avant les autres, et que l’autre Marie et Salomé étaient ensemble ; ensuite, vinrent les autres. Chaque évangile nous donne ce qui est nécessaire pour notre foi, et cela selon l’enseignement spécial que Dieu a voulu nous présenter dans cet évangile. Par exemple, en Jean, nous avons l’histoire de Marie de Magdala, et cette histoire si belle est tout à fait en rapport avec la doctrine de cet évangile. Le v. 9 de notre chapitre en parle aussi ; Marie vint comme il faisait encore nuit, nous dit Jean ; ici, c’est au lever du soleil. D’autres femmes avaient acheté des aromates pour embaumer le corps du Seigneur ; c’était avant que le sabbat commençât, afin de se reposer ce jour-là, et certainement quand le sabbat fut passé, c’est-à-dire à six heures, elles attendirent jusqu’au matin pour faire l’embaumement.
Mais lorsque Marie de Magdala vint au sépulcre, la pierre qui fermait le sépulcre et qui était très grande, avait déjà été roulée de devant l’ouverture par un ange descendu du ciel ; le Seigneur n’était plus là. Il était ressuscité par la puissance divine, dans un calme parfait ; tous les linges qui l’avaient enveloppé étaient en bon ordre dans le sépulcre. Ce que Dieu fit pour éveiller l’attention des hommes, est raconté dans Matt. 28:2-4 ; mais Jésus n’était pas là. La grande pierre roulée à l’entrée du sépulcre ne présentait aucun obstacle à la sortie du Seigneur ; la puissance divine qui l’avait ressuscité et le corps spirituel qu’il possédait alors rendaient aisée sa disparition du lieu où il avait été déposé.
Marc ne parle de la première visite de Marie de Magdala au sépulcre qu’au v. 9 ; au v. 2, l’autre Marie et Salomé sont mentionnées. Marie de Magdala avait déjà quitté le sépulcre pour annoncer à Pierre et à Jean qu’il était vide. Les deux autres femmes, ayant trouvé la pierre roulée, entrèrent dans le sépulcre et virent, assis au côté droit de la place où Jésus gisait, un ange qui encourage ces femmes craintives, mais fidèles : « Ne vous épouvantez point », leur dit-il, « vous cherchez Jésus… il n’est pas ici… ». Et il leur montre la place où il avait été mis. Il est précieux de voir la bonté de Dieu : il y avait encore quelque incrédulité chez les femmes, car elles auraient dû comprendre que Jésus était ressuscité ; l’ange le leur avait dit. Mais c’était trop pour leur foi ; elles croyaient en sa Personne ; elles croyaient qu’il était le Fils de Dieu, mais sa résurrection était encore une vérité trop glorieuse pour leur foi. Leur coeur était sincère, mais elles cherchaient le vivant parmi les morts, et ici, Dieu, rempli de compassion, les rassure dans sa grâce.
Ces femmes ne trouvent pas Jésus mort, mais elles reçoivent le précieux témoignage qu’il est vivant. Elles deviennent des messagères envoyées aux disciples pour leur porter la parole du Seigneur que l’ange leur a dite. C’est la consécration du coeur au Seigneur qui apporte la lumière et l’intelligence à l’âme, lorsque nous cherchons la vérité et Jésus lui-même. Marie de Magdala montre plus de cette consécration à Christ que les autres, et c’est pour cela que nous la voyons au sépulcre avant le lever du soleil, aussi est-elle la première qui voit le Seigneur ressuscité. De plus, un message plus excellent lui est confié ; elle devait aller annoncer aux apôtres eux-mêmes la position si élevée que le Seigneur nous donne ; nos privilèges les plus magnifiques. Le Seigneur lui dit : « Va vers mes frères, et dis-leur : Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu ». Pour la première fois, les disciples sont appelés les frères de Christ, de Christ ressuscité. Son Dieu est notre Dieu ; son Père est notre Père.
Les autres femmes, bien qu’honorées du Seigneur, n’ont pas un si grand privilège ; un autre message leur est confié. Le Christ ressuscité prend deux caractères : l’un est sa relation avec le résidu d’Israël, l’autre sa nouvelle position comme homme glorifié devant le Père. Sous le premier, il apparaît à ses disciples en Galilée, où il avait été avec eux habituellement ; selon la seconde relation, il monte au ciel à Béthanie. La mission confiée aux disciples est aussi différente. Matthieu nous la présente en rapport avec le premier caractère, et, par conséquent, son évangile ne fait pas mention de l’ascension du Seigneur. Luc qui place devant nous le second, nous montre le Seigneur montant au ciel et y étant reçu. Le message aux disciples est donné à Marie et à Salomé ; les disciples doivent aller en Galilée. Ce qui arrive là ne nous est pas rapporté ici : elles s’en vont toutes saisies.
L’évangile de Marc nous donne ensuite un sommaire de l’histoire de Jésus ressuscité, de ce que nous trouvons dans Luc et dans Jean ; ce qui concerne Marie de Magdala et les deux disciples qui allaient à Emmaüs. Après cela, nous avons la mission générale des apôtres, qui devaient aller et prêcher l’évangile dans tout le monde. Quiconque croirait et ferait une confession publique de Christ serait sauvé. Des miracles devaient être accomplis, non seulement par les apôtres, mais aussi par ceux qui auraient cru par leur moyen ; ils devaient manifester par les miracles qu’ils accompliraient, la puissance de celui en qui ils avaient cru.
Le Seigneur, enfin, est reçu dans le ciel où il s’assied à la droite de Dieu. Les apôtres vont prêcher dans le monde, et le Seigneur coopère avec eux, confirmant la parole par les signes qui l’accompagnaient. Le salut dépendait de la foi et de la confession de Christ, et le Seigneur, quand la parole avait été plantée, rendait témoignage à la vérité par des signes de puissance ; cela aidait la foi, et laissait les incrédules sans excuse.