Paul Fuzier
Les sous-titres ont été ajoutés par Bibliquest
Table des matières abrégée :
1 - Combats à fuir et combats à poursuivre
2 - « …De Gédéon, de Barac… » (Héb. 11:32)
3 - Armes pour le combat chrétien. Luc 22:35-38
4 - « Vous avez vaincu le méchant » — 1 Jean 2:13, 14
Table des matières détaillée :
1 - Combats à fuir et combats à poursuivre
1.1.1 - Origine des conflits — Les vrais problèmes
1.1.4 - Les luttes fratricides
1.2.1 - Les buts de l’adversaire
1.2.3 - Combattre par la prière
2 - « …De Gédéon, de Barac… » (Héb. 11:32)
2.1 - Assauts de l’ennemi, et gouvernement de Dieu
2.2 - Ne pas s’accoutumer aux défaillances
2.3 - Causes premières, causes secondes
2.4 - Préparation au combat (nourriture, armure), ou concessions à l’ennemi
2.5 - Foi et énergie faibles. Dieu opère quand même
2.6 - Responsabilités spéciales
2.7 - Dieu connaît l’état de chacun
2.7.1 - Ruben : l’opposé d’Abraham (grandes délibérations de cœur)
2.7.2 - Galaad, les deux tribus et demi (christianisme terrestre)
2.7.3 - Dan et Aser (occupations personnelles)
2.7.4 - Zabulon, Nephtali (dévouement aux intérêts et à la gloire de Christ)
2.7.5 - Méroz maudit (refus du combat)
2.8.1 - Préparation antérieure au combat
2.8.2 - Commencer par sa propre maison
2.8.3 - Ceux que Dieu utilisent et ceux qu’Il met de coté
3 - Armes pour le combat chrétien. Luc 22:35-38
3.1 - Luc 22:35-38. Armes charnelles
3.2 - L’épée de l’Esprit qui est la Parole de Dieu
4 - « Vous avez vaincu le méchant » — 1 Jean 2:13, 14
4.1 - Marcher de force en force : trois ressources
4.2 - Force du nazaréen : une vie de séparation pour Dieu :
4.3 - Se fortifier dans la grâce
4.4 - Source de force dans la confiance de la foi
4.5 - Activité acharnée de l’adversaire contre l’assemblée
4.6 - Difficultés du combat, importance de l’armure
4.7 - Causes premières et causes secondes des victoires de l’adversaire
4.8 - Parole de Dieu et prière
4.9 - Points sur lesquels il faut faire progresser les âmes
4.10 - Manque de puissance et son résultat
ME 1947 p. 57
La Parole nous entretient de combats de nature bien différentes : nous sommes exhortés aux uns, nous devons fuir les autres.
Romains 12:18 nous engage à vivre en paix avec tous les hommes et Éphésiens 6:12 nous rappelle que « notre lutte n’est pas contre le sang et la chair ». Nous devons donc éviter les conflits avec qui que ce soit ici-bas. Mais surtout, nous avons à nous garder soigneusement des combats qui se livrent entre frères, les plus douloureux de tous. Jacques 4:1 nous révèle leur origine : « D’où viennent les guerres et d’où les batailles parmi vous ? N’est-ce pas de cela, de vos voluptés qui combattent dans vos membres ? » Il est souvent difficile de déterminer exactement ce qui a pu donner naissance à un conflit entre frères. La parole de Dieu nous permet de le discerner : quand la guerre ouverte éclate, le combat avait déjà eu lieu intérieurement. Lorsque notre propre volonté n’a pas été brisée dans notre cœur, nous cherchons à la faire triompher au dehors et voilà les jalousies et les querelles qui provoquent du désordre et produisent toute espèce de mauvaises actions (Jacques 3:16).
C’est donc une erreur de croire qu’il y a eu conflit parce que telle ou telle circonstance est survenue plus ou moins fortuitement, dans laquelle l’un ou l’autre a agi de telle ou telle façon. Cela n’a été que l’occasion, permise ou commandée par Dieu (Lam. Jér. 3:37), de manifester ce qu’il y avait dans le cœur : une volonté non brisée. Le cœur n’était pas rempli de « la sagesse d’en-haut » dont Jacq. 3:17, 18 nous donne les caractères.
Nous comprenons ainsi pourquoi il est si difficile d’apaiser les conflits qui ont pu surgir entre des frères. On essaie — à la manière des hommes, avec plus ou moins de diplomatie — d’arranger un état de choses, de réparer des torts, et l’on oublie qu’il faut avant tout regarder au dedans (Matt. 15:19) et laisser la Parole agir dans l’être intérieur. Quand la conscience a été exercée, quand la propre volonté a été brisée, quand nous nous sommes humiliés et jugés devant Dieu, alors tout est simple, la paix est vite rétablie entre les combattants.
Retenons cet enseignement de la Parole, il est très important. Nous pouvons toujours dire que si deux ou plusieurs frères sont en guerre, quelles que soient les circonstances qui ont provoqué le conflit, c’est parce que leur état spirituel n’est pas bon — et généralement aussi bien dans un camp que dans l’autre. Il y a des voluptés qui combattent dans leurs membres, selon l’expression qu’emploie l’apôtre Jacques. Ce qui est extérieur n’est que la manifestation d’un état intérieur. Vouloir essayer d’aplanir les difficultés sans agir sur ce qui est à la source, c’est s’efforcer de guérir un mal sans en supprimer les causes.
L’apôtre supplie
deux sœurs « d’avoir une même pensée dans le Seigneur. »
(Phil. 4:2). Si nous réalisions assez de dépendance de Lui et assez de
communion avec Lui pour avoir sa pensée, il n’y aurait jamais de dissentiments
entre frères, car la même pensée nous occupe de Christ et nous fait marcher
avec Lui, cherchant à Lui plaire. Avoir une même pensée, quelle force et quelle
bénédiction pour l’assemblée ! C’est ainsi qu’ayant demandé la paix de l’assemblée
nous serons de ceux qui recherchent ce qu’ils ont demandé ; il y aura
alors de la prospérité non seulement pour le témoignage, mais aussi pour chacun
des rachetés de Christ (Ps. 112:6).
Il est bon et agréable que des frères habitent unis ensemble ; c’est là que Dieu a commandé la bénédiction. Mais Satan, qui ne peut supporter de voir des frères unis entre eux, déploie tous ses efforts pour nous priver de cette bénédiction, pour ruiner ainsi notre vie spirituelle et détruire le témoignage — témoignage individuel et surtout témoignage collectif. Nous n’ignorons pas ses desseins (2 Cor. 2:11) et cependant nous devenons parfois ses instruments dans l’œuvre néfaste qu’il poursuit inlassablement. Les luttes entre frères sont un des principaux moyens dont il se sert pour arriver à ses fins. Bien que nous le sachions les uns et les autres, nous nous laissons si facilement aveugler et détourner par lui ! Engagés dans cette voie, nous n’avons plus aucun discernement des choses, nous ne pensons plus qu’à nos disputes, nous ne vivons plus que pour cela… Jusqu’où irions-nous, si le Seigneur n’avait compassion de nous ?
Imitons le parfait Modèle, Celui qui « lorsqu’on l’outrageait ne rendait pas d’outrage, quand il souffrait ne menaçait pas, mais se remettait à celui qui juge justement » (1 Pierre 2:21-23). « Pourquoi ne supportez-vous pas plutôt des injustices ? Pourquoi ne vous laissez-vous pas plutôt faire tort ? » dit l’apôtre aux Corinthiens (1 Cor. 6:7). Si nous avons le sentiment que nous avons été injustement attaqués, calomniés même, nous pouvons être assurés que le Seigneur le sait : « Qu’on écrase sous les pieds tous les prisonniers de la terre, qu’on fasse fléchir le droit d’un homme devant la face du Très-haut, qu’on fasse tort à un homme dans sa cause, le Seigneur ne le voit-il point ? » (Lam. Jér. 3:34-36). Écoutons le conseil de David : « Remets ta voie sur l’Éternel et confie-toi en lui ; et lui, il agira, et il produira ta justice comme la lumière et ton droit comme le plein midi. Demeure tranquille, appuyé sur l’Éternel et attends-toi à lui… Laisse la colère et abandonne le courroux ; ne t’irrite pas, au moins pour faire le mal… » (Ps. 37:5-8).
N’oublions pas aussi que les
accusations injustes sont parfois permises par Dieu. David, accusé à tort,
accepte les circonstances comme disposées par Lui, réalisant pour lui-même l’exhortation
contenue dans le Ps. 37 qu’il a composé, et il continue son chemin en paix,
bien que Shimhi jette encore des pierres contre lui
(2 Sam. 16:5-14). Dans l’histoire des frères de
Joseph, nous avons aussi deux exemples d’accusations injustes : dans le
chapitre 42 du livre de la Genèse, ils sont accusés d’être des espions ;
Dieu s’en servira pour réveiller leur conscience endurcie, les amenant à reconnaître
leur véritable culpabilité à l’égard de Joseph (Genèse 42:21) — dans le
chapitre 44, ils sont accusés d’avoir mis la coupe dans le sac de Benjamin ;
leur conscience est atteinte cette fois de façon décisive et ils sont conduits
à dire : “Dieu
a trouvé l’iniquité
de tes serviteurs » (Gen. 44:15-16). Quel
travail Dieu opère dans un cœur soumis à la discipline et acceptant les
circonstances comme venant de Lui !
Joseph avait adressé à ses frères
cette pressante recommandation : « Ne vous querellez pas en chemin »
(Genèse 45:24). N’est-elle pas aussi pour nous ? Le monde nous observe, le
monde religieux surtout. Quel déshonneur jeté sur le nom du Seigneur quand nous
nous mordons et nous dévorons l’un l’autre, alors que nous avons reçu une
nature divine (et c’est l’amour fraternel qui doit en être la preuve : « nous
savons que nous sommes passés de la mort à la vie parce que
nous aimons les frères », l Jean 3:14), alors que,
le Saint Esprit habitant en nous, nous devrions sans cesse produire le fruit de
l’Esprit (Galates 5:15 et 22). Bien au contraire, perdant de vue que « ceux
qui sont du Christ ont crucifié la chair
avec les passions et les convoitises », nous nous conduisons de telle
façon que « les œuvres de la chair sont manifestes » (Gal. 5:24 et 19
à 21).
Les luttes fratricides sont des sujets de tristesse pour tous — pensons à ce que ce doit être pour le cœur du Seigneur ! — et les combattants eux-mêmes en sortent tout meurtris, humiliés et dans les larmes, parfois « consumés l’un par l’autre » (Galates 5:15). La Parole nous donne le récit de quelques-unes de ces luttes si douloureuses.
Nous en avons un exemple dans le deuxième chapitre du second livre de Samuel. Abner et les serviteurs d’Ish-Bosheth sont engagés dans un combat sans merci avec Joab et les serviteurs de David. Abner est le chef de l’armée de Saül et c’est Ish-Bosheth, « fils de Saül », qu’il a pris pour le faire régner sur Israël tout entier. N’est-ce pas à lui qu’il appartient de monter sur le trône puisqu’il est de la descendance de Saül ? Méconnaissant celui qui était l’oint de l’Éternel, David, s’opposant ainsi aux pensées de Dieu, Abner est prêt à la lutte. Il a en face de lui Joab et les serviteurs de David. Joab est caractérisé par une très grande ambition, il voulait occuper la première place dans le royaume. Aussi, il va droit devant lui et ne se laisse arrêter par quoi que ce soit pour satisfaire ses propres désirs. Prétendant combattre pour David, il lutte en fait pour sa propre cause et pour sa propre gloire. Homme charnel, il veut pourtant se faire le défenseur du témoignage de Dieu dans la personne de l’oint de l’Éternel. Quels tristes résultats quand la chair veut se mettre en avant et prétend combattre pour le témoignage !
Tels sont les deux camps. Les armes à la main, avec une énergie farouche, ils sont prêts à lutter pour la cause qui leur apparaît la seule juste. Rien ne les arrêtera ! Ils iront jusqu’à s’entre-déchirer. C’est la chair qui est en activité d’un côté comme de l’autre.
Comment des frères peuvent-ils en arriver là ? Faut-il que l’ennemi ait réussi à aveugler leurs yeux ! Celui qui est menteur et meurtrier dès le commencement sait bien comment présenter les choses pour faire de ce combat une espèce de guerre sainte : ce sont les droits du Seigneur que l’on met en avant ! Comme l’ennemi est rusé ! Mais remarquons qu’il n’est pas parlé de David dans la portion des Écritures que nous considérons. Ses serviteurs prétendent lutter pour défendre ses droits, mais lui n’est pas avec eux. Quel enseignement ! Souvenons-nous que le Seigneur n’est jamais avec des frères qui combattent contre leurs frères !
Un premier engagement a lieu près du réservoir de Gabaon, douze d’un côté et douze de l’autre, « et ils tombèrent tous ensemble ». Aucun de ceux qui avaient pris part à la lutte n’en est revenu. La leçon aurait dû être salutaire. Hélas ! il n’en a rien été. La fin du chapitre nous parle d’une deuxième bataille, défaite pour les serviteurs d’Abner, mais qui n’est pas une victoire pour ceux de David, car Asçaël y laisse sa vie. La caractéristique des combats entre frères c’est qu’il n’y a à la fin que des vaincus. Résultat : aucun profit pour personne, rien que des deuils et des larmes, et le Seigneur dont on revendique si hautement les droits est déshonoré.
Juges 20 présente un cas sans
doute quelque peu différent ; nous y voyons cependant un autre combat
entre des frères. Le chapitre précédent nous dépeint l’état moral du peuple d’Israël,
plus mauvais encore que son état religieux. Les circonstances qu’il rapporte
sont telles qu’il nous est dit : « Jamais chose pareille n’a eu lieu
ni ne s’est vue » (Juges 19:30). Après ce qui s’est passé à Guibha, tous les fils d’Israël se réunissent
à Mitspa — tous, sauf la tribu de Benjamin (les
hommes de Guibha étaient benjaminites,
Juges 19:16). Onze tribus, agissant comme un juge inflexible, avaient déjà
exclu la douzième. Elle était coupable, c’est vrai, mais ne faisait-elle pas
partie du peuple de Dieu ? Les Benjaminites n’étaient-ils
pas des frères ? Les onze tribus l’ont oublié. Perdant de vue l’unité du
peuple, elles considèrent la tribu de Benjamin comme un ennemi, au lieu de
réaliser qu’elles en étaient solidaires, qu’il convenait donc pour le peuple
tout entier de juger dans l’humiliation le mal qui avait été commis. Cet état d’esprit
ressort des paroles adressées aux Benjaminites :
« quel est ce mal qui est arrivé au milieu de vous
? » (Juges 20:12). Les onze tribus oublient encore
autre chose : il fallait tout d’abord rechercher les directions divines
pour n’agir qu’ensuite et dans une entière dépendance. Bien au contraire, elles
commencent par l’action, après quoi elles interrogent Dieu. Tout cela n’était
pas le vrai chemin, aussi la discipline fut extrêmement douloureuse.
Vingt-deux mille hommes de Juda restent étendus morts après la bataille — un combat entre frères ! Quel déchirement pour le peuple ! Ils pleurèrent devant l’Éternel jusqu’au soir… C’est dans les larmes qu’ils sont ramenés au sentiment que Benjamin était leur frère. Brisés devant Dieu, ils l’interrogent maintenant pour savoir s’il convenait de livrer bataille à nouveau. « Et l’Éternel dit : Montez contre lui ». — Engagés dans ce mauvais chemin, l’Éternel ne juge pas bon de les délivrer tout aussitôt, Il les laissera aller jusqu’au bout. Bien qu’elles aient interrogé Dieu, n’y avait-il pas toujours dans le cœur des onze tribus la pensée de combattre à nouveau contre Benjamin ? Israël avait encore quelque chose à apprendre et il a dû l’apprendre au travers de beaucoup de larmes. Au cours de cette deuxième journée, dix-huit mille hommes ne se relevèrent pas. Alors tout le peuple se rassembla dans la présence de l’Éternel à Béthel et ils jeûnèrent et pleurèrent. Humiliés, s’étant jugés profondément devant Dieu, ils prononcent maintenant des paroles qui témoignent de l’œuvre accomplie en eux : leur propre volonté a été entièrement brisée (v. 28). L’œuvre intérieure a été faite.
Cependant, cette lutte fratricide n’était pas encore terminée. Le troisième jour, ce sont cinquante mille hommes de Benjamin qui sont frappés à mort, non sans que les onze tribus aient perdu une trentaine des leurs. Ainsi donc l’un des deux camps a perdu plus de quarante mille hommes, l’autre plus de cinquante mille. Chacun a appris la leçon qui lui était nécessaire, mais combien douloureusement ! Peut-il en être autrement quand nous nous engageons dans de tels combats ?
Sans doute Benjamin était coupable. Au lieu de supporter la parole d’exhortation et de juger le mal qui était dans son sein, cette tribu était sortie en guerre contre ses propres frères et avait pris parti pour Guibha contre le peuple ! Mais les onze tribus avaient gravement manqué elles aussi. Elles n’avaient pas eu le sentiment qu’elles étaient solidaires de Benjamin et rien dans leur façon d’agir n’avait été le fruit de l’amour — amour pour Dieu et pour les frères, car les deux sont inséparables. Le résultat ne pouvait être différent : deuils et larmes versées de part et d’autre. Au terme de ces combats entre frères, ainsi que nous l’avons déjà remarqué, il n’y a jamais des vainqueurs ici et des vaincus là-bas, il n’y a que des vaincus. Tous les combattants, brisés et humiliés, apprennent au travers de grandes souffrances, ce qu’il eût mieux valu apprendre dans la paix aux pieds du Seigneur.
Mais
il ne faut pas penser que, la leçon apprise, on pourra dire : il ne valait
pas la peine de se battre pour une telle affaire, c’est bien peu de chose et
nous aurions dû passer là-dessus : que chacun agisse comme il lui semble
bon. Non. Ce qui caractérise Israël dans le chapitre 21 du livre des Juges, c’est
un vrai amour pour les frères, mais en même temps une ferme résolution de
demeurer séparé du mal (v. 1). La discipline a produit ce double résultat. À Béthel,
la maison de Dieu, où tous se trouvent dans sa présence, pleurant amèrement,
les onze tribus sentent qu’une brèche a été faite : « il manque
aujourd’hui à Israël une tribu » (v. 3). Et c’est alors la grande question
qui est posée : « Pourquoi ceci est-il arrivé en Israël ? »
Quel contraste avec celle précédemment adressée à Benjamin : « Quel
est ce mal qui est arrivé au milieu de vous
? »
— Ah ! pourquoi ceci est-il arrivé ? C’est
dans les larmes que cette parole a dû être prononcée. Elle atteint et sonde la
conscience, elle conduit au jugement de soi-même dans la présence de Dieu, elle
produit une humiliation vraie et profonde.
La fin du chapitre nous montre la restauration de Benjamin et tout l’amour, tous les tendres soins que maintenant les onze tribus vont lui témoigner.
Nous sommes unis en un seul corps avec tous ceux qui sont nos frères en Christ. Que cette pensée nous garde, dans des cas semblables d’agir comme les onze tribus quand elles partirent en guerre contre Benjamin. Elles croyaient avoir affirmé l’unité du peuple en se groupant « comme un seul homme » à Mitspa (Juges 20:1). Mais il n’en était rien, car une tribu était exclue. Tandis qu’au contraire, l’unité était réalisée dans les cœurs lorsque cette parole a été dite : « il manque aujourd’hui à Israël une tribu ». Pour cela, il fallait comprendre que tous étant solidaires, la place des uns et des autres était dans l’humiliation et dans le deuil, dans le jugement de soi-même. L’humiliation individuelle d’abord, collective ensuite, est le vrai chemin, le seul chemin de la restauration et de la bénédiction. Si nous ne prenons pas cette place et nous engageons au contraire dans des luttes entre frères, Dieu saura nous y amener, mais après que nous aurons traversé des souffrances que nous aurions dû éviter. Plus de 90000 hommes sont tombés de part et d’autre dans des combats entre frères…
2 Samuel 2:12-32 nous parle de conflits que des frères peuvent avoir entre eux. Juges 20 donne un enseignement qui concerne plutôt le témoignage collectif. Dans un cas comme dans l’autre, nous voyons les tristes conséquences des luttes fratricides.
Que Dieu ait compassion de notre faiblesse et nous garde de jamais nous engager dans de telles guerres ! Nous pourrons fuir ces combats si nous livrons d’abord ceux auxquels nous sommes exhortés par la Parole.
Notre combat, c’est la lutte contre un adversaire qui poursuit un quadruple but :
1° Retenir les hommes sous son emprise. C’est pour cela qu’il s’oppose à la présentation de l’Évangile aux âmes, d’où la nécessité du combat de Phil 1:27-30. L’apôtre désirait que les Philippiens combattent ensemble d’une même âme, avec la foi de l’Évangile ; ils avaient à soutenir le même combat qu’ils avaient vu en lui et qu’ils apprenaient être encore en lui. Qu’il fût au milieu d’eux ou en prison à Rome, l’apôtre tenait tête aux assauts de l’adversaire contre l’Évangile. Il savait que Christ aurait la victoire — encouragement pour lui et pour ceux qu’il invitait à livrer le même combat.
2° Reprendre ses droits sur ceux qui ont été arrachés à son esclavage. Agissant en nous par le moyen de la chair, il essaie de nous faire broncher en chemin. Nous avons donc à combattre contre le péché (Héb. 12:4). Les croyants hébreux avaient enduré « un grand combat de souffrances » (10:32), mais ils n’avaient pas eu à sceller de leur sang leur témoignage. Christ a dû aller jusque-là ; plusieurs des témoins dont il est parlé au chapitre 11 également. Les tentations sont multiples autour de nous, à chaque instant nous sommes en danger de pécher ; il s’agit de résister et, s’il le fallait, de résister « jusqu’au sang » en luttant contre le péché — de tenir ferme jusqu’à la mort, si cela était nécessaire. Christ, parfait Modèle, a glorifié Dieu en toutes choses, comme homme, et a été jusqu’à la mort. Comme ceux auxquels l’apôtre s’adresse, nous reculons souvent devant de telles souffrances, car la chair recule toujours devant la souffrance, et Satan agit en nous par le moyen de la chair qui nous conduit au péché lorsqu’elle est en activité. Alors Dieu nous discipline, Il brise en nous toute volonté propre, Il brise la chair afin de nous amener à combattre contre le péché, à résister.
3° Empêcher le croyant d’entrer dans les lieux célestes par la foi. Il présente un faux enseignement, il travaille afin que la position céleste du chrétien soit méconnue. Il est donc nécessaire de maintenir l’ensemble des vérités qui nous ont été révélées, c’est « le bon combat de la foi ». « Combats le bon combat de la foi », dit l’apôtre à Timothée (1 Tim 6:12). C’est de celui-là qu’il avait parlé aux Corinthiens à la fin du chapitre 9 de sa première épître. Nous sommes appelés à ce combat, afin que nous puissions « recevoir le prix » notre responsabilité est de remplir fidèlement le service qui nous a été confié, quelles que soient les difficultés rencontrées pour maintenir la vérité de Dieu. Pouvant dire, au terme de son ministère : « j’ai combattu le bon combat » (2 Tim. 4:7), l’apôtre demeure un exemple pour nous et pour Timothée, appelé à combattre « le bon combat » (1 Tim. 1:18), c’est-à-dire à maintenir la saine doctrine dans l’assemblée de Dieu qui est « la colonne et le soutien de la vérité ». Afin de livrer ce combat et de remporter la victoire, Timothée devait « garder la foi », l’ensemble de la doctrine chrétienne reçue par la foi. L’apôtre Jude nous exhorte aussi à « combattre pour la foi qui a été une fois enseignée aux saints » (Jude 3).
4° Ravir à celui qui est entré dans les lieux célestes la jouissance des richesses qui y sont. Cela demande un nouveau combat, celui d’Éphésiens 6. Le véritable combat chrétien n’est pas celui du désert — lutte de l’Esprit contre la chair, dont nous parle Galates 5:16-18 — c’est celui de Canaan. Pour Israël un combat succédait à l’autre. Bien souvent le chrétien ne va pas au delà du combat du désert (nécessaire pour qu’il apprenne à se connaître ; Deut. 8:2) et même s’il connaît quelque chose de la lutte de Canaan, il revient encore à ce conflit avec le moi, tant il a de peine à réaliser la crucifixion de la chair. Combien de fois avons-nous fait cette expérience ! Nous oublions facilement ce qu’est notre vieille nature et, au lieu de progresser en Canaan, triomphant de ses rois, nous revenons à la lutte du désert, au combat contre Amalek. Nous n’avons pas réalisé pratiquement que notre vieil homme a pris fin dans la mort de Christ, que nous sommes morts et ressuscités avec Lui, vérité que le Jourdain nous présente en type.
Le Pharaon, Amalek, les forteresses de Jéricho et les rois de Canaan sont, dans l’histoire d’Israël, ces quatre aspects de la puissance de l’ennemi.
Avant de livrer le combat en Canaan :
1° Il faut pratiquer la circoncision, c’est-à-dire le jugement de la chair et sa mise de côté, car elle ne peut entrer dans le combat.
2° Le combattant doit être nourri. Cette nourriture, c’est un Christ céleste, Homme parfait sur la terre, maintenant glorifié dans le ciel après avoir connu toute l’ardeur du feu du jugement (vieux blé du pays — pains sans levain — grain rôti. Josué 5:11).
3° Un chef doit être là, pour conduire et soutenir dans la lutte. C’est le Chef de l’armée de l’Éternel.
Josué 5 développe ces trois sujets. Éphésiens 6 nous dit comment nous pourrons remporter la victoire. Pour tenir ferme contre les artifices du diable, nous devons tout d’abord nous fortifier dans le Seigneur et dans la puissance de sa force, ensuite, revêtir l’armure complète de Dieu. Pour revêtir l’armure, il faut être fort, mais pour pouvoir user de cette force dans le combat, il faut avoir revêtu l’armure, car nous avons à lutter contre un ennemi extrêmement redoutable. Nous pourrons alors « résister et après avoir tout surmonté tenir ferme ».
Nous ne voudrions pas terminer sans parler d’un combat que nous devrions livrer sans cesse et que nous livrons si peu ! Dirons-nous que c’est le plus important de tous ? Si nous étions à cet égard des combattants toujours à la brèche, nous remporterions toujours la victoire dans le combat de l’Évangile, dans le combat contre le péché, dans le combat de la foi, dans le combat contre « la puissance spirituelle de méchanceté qui est dans les lieux célestes » — et nous serions gardés de nous engager jamais dans des combats entre frères ! Nous voulons parler du combat qu’Épaphras livrait pour les Colossiens : « combattant toujours pour vous par des prières » (Col. 4:12). L’arme la plus puissante que le chrétien ait à sa disposition, c’est la prière. Elle est nécessaire pour l’emploi de la première des armes offensives qui font partie de l’armure d’Éphésiens 6. L’ennemi, si puissant et tellement plus fort que nous, ne peut tenir contre une telle arme, car elle fait appel à la puissance de Celui qui l’a vaincu à la croix d’une manière complète. Celui qui l’emploie réalise sa grande faiblesse, mais c’est alors qu’il est fort. Dans le sentiment profond des besoins multiples pour lesquels il nous faut tout le secours d’en-haut, puissions-nous manifester dans la prière l’énergie et la persévérance qu’expriment ces deux termes : « combattant toujours ».
L’apôtre demandait aux chrétiens de Rome qu’ils combattent avec lui et pour lui dans leurs prières (Rom. 15:30). Épaphras combattait pour les Colossiens par des prières. Quels exemples pour nous ! Un serviteur de Dieu, une assemblée de Dieu ont peut-être besoin que nous livrions un tel combat par la prière… Y pensons-nous assez ? Exercés par nos propres besoins, par ceux de nos frères, par ceux des assemblées, puissions-nous toujours combattre par des prières ! C’est le secret de la victoire dans tous les autres combats auxquels nous sommes exhortés, c’est la meilleure ressource à notre disposition pour mettre un terme à tous les combats que nous avons à fuir !
ME 1961 p. 259-271
Pourquoi l’ennemi livre-t-il contre le peuple de Dieu de si fréquents et de si rudes assauts ? Pourquoi Dieu le permet-Il ? L’histoire d’Israël, telle qu’elle nous est rapportée dans le livre des Juges, cette deuxième Épître à Timothée de l’Ancien Testament, donne la réponse à ces questions : c’est parce que « les fils d’Israël firent de nouveau ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel » que l’Éternel intervint Lui-même pour les livrer entre les mains de Jabin, roi de Canaan, ou encore en la main de Madian (Juges 4:1,2 ; 6:1). L’ennemi se déchaîne parce que l’Éternel, pour un moment, lui livre son peuple. C’est l’amour de Dieu à l’égard d’Israël qui le conduit à exercer envers lui un jugement gouvernemental ; Il eût préféré sans aucun doute pouvoir bénir son peuple et le faire prospérer en paix, mais les infidélités renouvelées des fils d’Israël le contraignent à laisser agir l’ennemi, Madian ou le roi de Canaan.
Ce sont nos manquements répétés, tolérés et non jugés, qui conduisent Celui qui malgré cela nous aime toujours, à laisser l’ennemi opérer et nous assaillir de ses terribles assauts. Nous passons facilement sur tant de manquements, nous croyons parfois nous en excuser en citant l’exemple d’enfants de Dieu qui peut-être font plus mal encore, et nous pensons que leur culpabilité présumée est de nature à établir notre innocence ou, tout au moins, à justifier notre manière de faire. Nous finissons par nous accoutumer à de multiples défaillances, une sorte d’endurcissement se produit en nous et nous sommes portés à croire que, puisque les choses ont été ainsi un certain temps, elles continueront toujours de même. Mais Dieu, parce qu’Il nous aime, ne le permet pas. Sans doute, Il use de grâce, de patience à notre égard, nous faisant entendre des appels répétés, nous avertissant de bien des manières, nous reprenant chaque fois qu’il le faut, mais si nous demeurons insensibles et persévérons dans l’obstination de nos mauvais cœurs, Il est contraint à agir dans son gouvernement envers nous. Et son peuple est alors comme livré à l’ennemi !
Puissions-nous comprendre le pourquoi de ces assauts de l’adversaire, au lieu de nous arrêter aux causes secondes ! Que cela nous amène en premier lieu à juger devant Dieu tout ce qui, dans nos vies individuelles et dans la vie des assemblées, n’a pas été selon sa volonté et à sa gloire. C’est bien là que Dieu voudrait nous conduire et c’est le véritable but de la discipline qu’Il nous dispense.
Lorsque l’ennemi se présente, soit avec toute sa puissance soit avec ses pièges et ses ruses, il faut combattre. Prier, sans aucun doute — et, dans le livre des Juges, nous voyons souvent les fils d’Israël « crier à l’Éternel » — mais aussi combattre, le livre des Juges nous l’enseigne également. Et le combat est d’autant plus difficile que notre redoutable adversaire a préalablement travaillé en vue de nous ravir la nourriture nécessaire à nos âmes et de nous ôter les armes indispensables pour la lutte. Comment réaliser alors Éphésiens 6:10, 11 : « Fortifiez-vous dans le Seigneur et dans la puissance de sa force ; revêtez-vous de l’armure complète de Dieu, afin que vous puissiez tenir ferme contre les artifices du diable » ? — Les hommes de Madian « détruisaient les produits du pays » et « ne laissaient point de vivres en Israël », tandis qu’aux jours de Jabin, roi de Canaan, « on ne voyait ni bouclier ni pique chez quarante milliers en Israël », ni les armes défensives (bouclier) ni les armes offensives (pique) (Juges 6:3 à 6 ; 5:8). Cela nous aide à comprendre pourquoi aux jours où il faudrait combattre, nous sommes généralement si peu disposés à le faire. Nous ne sommes pas revêtus de « l’armure complète de Dieu » ; d’autre part — et c’en est la conséquence — sentant plus ou moins la faiblesse qui nous caractérise, au combat nous préférons la paix, même au prix de graves concessions. Héber, le Kénien, est un exemple de ceux qui au lieu de combattre l’adversaire pactisent avec lui : il s’était séparé de sa propre tribu et avait fait la paix avec Jabin, l’ennemi du peuple (Juges 4:11 et 17). Mais remarquons ici la fidélité de Jaël sa femme : malgré la faiblesse coupable de son mari, elle n’hésitera pas, dans sa tente, à mettre à mort Sisera, chef de l’armée de Jabin — (image de ce qu’une femme ferme dans sa piété peut être amenée à faire dans son propre foyer, s’il y a une défaillance marquée de son mari). Et puis, l’adversaire vient nous suggérer des pensées comme celles-ci : les concessions à faire pour avoir la paix ne sont au fond que peu de chose, ne vaut-il pas mieux y consentir plutôt que de s’engager dans des combats dont on ne peut prévoir les conséquences ? — d’autre part, ces combats ne sont-ils pas des luttes entre frères et enfin, ne convient-il pas de laisser Dieu agir à son moment, attendant patiemment et en prières qu’Il nous accorde la délivrance ? En apparence, tout cela est excellent. En fait, un tel comportement laisse le champ libre à l’adversaire qui poursuit tout à son aise son travail de destruction.
Nous avons en Barak l’illustration de ce manque de courage moral qui conduirait à fuir le combat. Il a fallu toute la grâce de Dieu, la détermination de Debora, pour l’amener enfin à rassembler dix mille hommes de Zabulon et Nephthali et à se rendre sur le champ de bataille où il a été le spectateur de la victoire remportée par l’Éternel, qui a livré Sisera en sa main (Juges 4:8 à 16). L’illustration est plus saisissante encore avec Ruben, Galaad, Dan, Aser ou les habitants de Méroz, ceux du peuple qui trouvèrent maints prétextes pour se tenir éloignés du combat. Tandis que Gédéon, malgré sa faiblesse reconnue et confessée, ira à la bataille, ayant été formé et préparé pour cela.
Après avoir lu le récit du livre des Juges, nous n’aurions sans doute pas inscrit Barak parmi les combattants de la foi de Hébreux 11, si nous avions eu à écrire ce chapitre. Mais Celui qui ne s’arrête pas à l’apparence extérieure a discerné dans le cœur de Barak la réalité d’une vraie foi. Quel encouragement pour nous : nous pouvons manifester le manque d’énergie d’un Barak, Dieu saura voir au travers de cela, s’il y est vraiment, le peu de foi qui nous conduit, malgré tout, à lutter pour sa gloire !
Sans doute, comme nous l’avons remarqué, en dépit des hésitations d’un Barak sans énergie, la victoire est tout de même remportée. En fait, c’est l’Éternel qui la remporte, c’est toujours Lui et ce n’est que Lui qui peut l’obtenir : « Et l’Éternel mit en déroute Sisera, et tous ses chars, et toute l’armée, par le tranchant de l’épée, devant Barak (Juges 4:15 — cf. 6:16 ; 7:7 et 22). Mais de quels instruments se sert-Il ? D’un Barak, d’une Debora, d’une Jaël. Cela nous dit bien la faiblesse du peuple dans ces jours de ruine.
Le chapitre 4 ne nous donne que peu de détails sur le combat, nous en aurons davantage au chapitre 5. Dans son cantique — cantique auquel s’associe Barak — Debora célèbre la délivrance qui marque un réveil momentané du peuple. Elle exhorte les fils d’Israël à bénir l’Éternel, cela en tout premier lieu et pour deux motifs : « parce que des chefs se sont mis en avant » et « parce que le peuple a été porté de bonne volonté » (Juges 5:2). Malgré la ruine, la faiblesse du peuple et son manque d’énergie pour le combat, Dieu a quand même opéré chez quelques-uns des chefs, qui « se sont mis en avant » et, d’une manière générale, dans l’ensemble du peuple dont, ici, il n’est pas dit autre chose que ceci : il a été « porté de bonne volonté ». Lorsqu’il en est ainsi, c’est bien un sujet de reconnaissance envers Dieu.
Ceux auxquels Dieu a confié, parmi son peuple, une responsabilité spéciale, sont appelés à se « mettre en avant » au jour du combat. L’on comprend qu’il y ait quelque hésitation à le faire — on dira volontiers que l’on n’est guère qualifié pour cela, que d’autres le sont bien davantage, etc… — car dans toutes les batailles il y a des coups à recevoir. Il faut aussi que chacun de ceux qui constituent l’ensemble du peuple comprenne sa propre responsabilité et soit « porté de bonne volonté ». Nul ne peut dire : ce combat n’est pas mon affaire, je n’y ai aucune part. — Très nombreux sont ceux qui, la lutte achevée, sont heureux de jouir en paix des fruits de la victoire (cf. Juges 5:10), alors que quelques-uns seulement ont combattu : tandis qu’Israël était appelé à la bataille, ce n’est pourtant pas le peuple dans son entier qui a livré le combat, c’est « le résidu des nobles », mais il est l’expression d’Israël dans son ensemble : « comme son peuple ». Quel précieux encouragement est donné ici à ce « résidu des nobles » : l’Éternel est descendu « au milieu des hommes forts » ! (Juges 5:13).
Un autre encouragement tout aussi précieux pour le fidèle : Dieu connaît ceux qui sont disposés à combattre et Il sait quels sont ceux qui préfèrent demeurer en arrière. Éphraïm, Benjamin, Zabulon, Issacar avec ses princes n’ont pas reculé ; sans hésitation, ils se sont présentés pour livrer les combats de l’Éternel (Juges 5:14, 15). Hélas ! leur exemple n’a pas été suivi par Ruben, Galaad, Dan ou Aser, pas plus que par les habitants de Méroz !
Pour Ruben, il y a eu de « grandes considérations » et de « grandes délibérations de cœur » (Juges 5:15, 16). Qui dira toutes les « grandes considérations » et les « grandes délibérations de cœur » qui ont retenu tant de croyants appelés pourtant à livrer les combats de Dieu, combats pour la vérité, combats « pour la foi qui a été une fois enseignée aux saints » (Jude 3) ? Les sentiments d’affection légitimement éprouvés pour un parent ou pour un frère en Christ prennent souvent le pas sur toute autre considération et l’on reste ainsi en arrière au jour de la bataille. L’exemple d’Abraham nous est aussi donné en Hébreux 11, non pas sans doute parmi les combattants de la foi du verset 32 mais parmi ceux qui ont manifesté la patience, la confiance, l’obéissance de la foi. Lorsqu’il s’est agi d’obéir à Dieu (Héb. 11:17 à 19), Abraham a fait taire tous les sentiments de son cœur, et pourtant Dieu lui demandait beaucoup : il devait offrir en holocauste « son fils », « son unique », « celui qu’il aimait », Isaac ! Et dans son cœur, il a été jusqu’au sacrifice : Dieu savait que s’Il n’avait pas arrêté le bras d’Abraham sur la montagne de Morija, Abraham, lui, ne se serait pas arrêté. Nous trouvons tout autre chose chez Ruben ! Au lieu d’aller à la bataille, il est resté « entre les barres des étables, à écouter le bêlement des troupeaux » ; il désirait jouir de la prospérité matérielle, des bénédictions accordées par Dieu, et cela constituait pour lui une entrave au jour du combat. Hélas ! Ruben a sans doute davantage d’imitateurs qu’Abraham, imitateurs caractérisés par un manque de courage moral et qui, au lieu de se déclarer prêts à obéir, prêts à combattre lorsque sont en jeu les intérêts et la gloire de Christ, se tiennent à l’écart après de longues considérations et délibérations de cœur, considérations et délibérations dont il n’est nullement question en Genèse 22:3 et 9, 10.
De même, Galaad n’est guère disposé à combattre. Généalogiquement, Galaad descend de Manassé (encore 1 Chr. 5:14 mentionne-t-il un Galaad parmi les Gadites) et le pays de Galaad se partageait entre Ruben, Gad et la demi-tribu de Manassé ; or, nous savons que Ruben, Gad et la demi-tribu de Manassé demeurèrent en deçà du Jourdain au lieu de prendre possession du pays de Canaan. Cela nous permet de comprendre ce qui est dit de Galaad en Juges 5:17 : « Galaad est demeuré au delà du Jourdain ». Image des croyants qui ne connaissent pratiquement pas leur position céleste et sont satisfaits d’un christianisme terrestre, qui de ce fait n’ont aucun désir de prendre part aux combats qu’il faut pourtant livrer si l’on a à cœur de maintenir un témoignage pour Christ, un témoignage fidèle. Au fond, ce témoignage ils ne savent pas ce qu’il est, pourrait-il donc avoir une valeur quelconque à leurs yeux ? Or, l’on n’est disposé à lutter et à vaincre que pour ce à quoi l’on attache du prix.
Dan a « séjourné sur les navires », Aser « est resté au bord de la mer, et il est demeuré dans ses ports » (Juges 5:17). Combien de croyants sont absorbés par leurs affaires, leurs intérêts ici-bas, au point de se consacrer à peu près entièrement à ce qui disparaîtra à jamais ! Ils ont trop d’occupations et n’ont vraiment pas le temps de penser aux combats à livrer pour Christ et pour son témoignage, encore moins d’y prendre part ! Et même, cela présente-t-il pour eux quelque intérêt ?
Tandis que Ruben, Galaad, Dan et Aser sont ainsi défaillants, il en est d’autres qui, Dieu soit béni ! manifestent un vrai dévouement aux intérêts et à la gloire de Christ. « Zabulon est un peuple qui a exposé son âme à la mort, Nephthali aussi… » (Juges 5:18 — cf. 4:10). Quelle récompense ils en auront, ces fidèles qui, malgré l’opprobre et la souffrance, en dépit de tant de défaillances autour d’eux, ont été jusqu’à faire le sacrifice de leur vie ! D’eux aussi, il peut être dit : « ils n’ont pas aimé leur vie, même jusqu’à la mort » (cf. Apoc. 12:11).
Ces combattants ne se glorifient pas des victoires remportées ; ils savent bien, comme David le dira plus tard, que « la bataille est à l’Éternel » (1 Sam. 17:47) : « On a combattu des cieux… les étoiles ont combattu contre Sisera » (Juges 5:20 — cf. 4:6, 7 et 14 à 16). Ils réalisent, dans le combat, leur grande faiblesse et comptent sur Celui qui est tout-puissant et veut manifester sa puissance dans l’infirmité des instruments qu’Il se plaît à employer.
Vient ensuite une malédiction prononcée sur Méroz et ses habitants : Juges 5:23. Pourquoi sont-ils ainsi maudits ? C’est qu’ils ne sont pas venus pour le combat, ne se sont pas joints à ceux qui sont appelés les « hommes forts » parce que leur force est en Dieu seul. L’expression qui est employée ici est très remarquable : les habitants de Méroz « ne sont pas venus au secours de l’Éternel, au secours de l’Éternel, avec les hommes forts ». Le combat à livrer, c’est pour l’Éternel et non pour tel ou tel homme ou pour tel ou tel groupe d’hommes. C’est l’Éternel, c’est son témoignage qui est en péril et c’est « à son secours » qu’il faut aller. Si d’un côté il est vrai que « la bataille est à l’Éternel », que seul Il peut donner la victoire, de l’autre côté Il veut faire appel aux siens afin qu’ils viennent combattre et, en quelque sorte, « Le secourir » dans le péril qui est là. Quelle importance et quel prix cela donne au combat à livrer ! Qui donc refuserait d’aller « au secours de l’Éternel, au secours de l’Éternel » ?
Il y a aussi dans ces chapitres du livre des Juges, en rapport avec le combat, une instruction utile à retirer de l’histoire de Gédéon.
Tous les efforts de l’adversaire étaient faits en vue de priver le peuple de nourriture. Aussi Gédéon, ayant pleinement conscience des conséquences qui en résulteraient, s’emploie activement, avec les ressources et les moyens dont il dispose, à mettre un peu de froment en sûreté de devant Madian (Juges 6:3 à 6 et 11). Dieu sait de quoi nos cœurs sont occupés et quel est le but que nous poursuivons ; aussi l’Ange de l’Éternel, apparaissant à Gédéon, lui déclare tout de suite : « L’Éternel est avec toi… » En d’autres termes : tu es approuvé dans ce que tu fais, l’intérêt que tu portes à son peuple t’assure la présence de l’Éternel à ton côté et tout son appui. Mais il y a encore chez Gédéon un autre trait remarquable : il n’a aucune prétention à la force ; tout au contraire, il sent sa faiblesse et la confesse : « Voici, mon millier est le plus pauvre en Manassé, et moi je suis le plus petit dans la maison de mon père » (Juges 6:15). Un tel homme est qualifié pour livrer les combats de l’Éternel : les pensées qui l’occupent, l’intérêt qu’il porte au peuple de Dieu, l’activité qu’il déploie pour assurer quelque nourriture à ce peuple, le sentiment qu’il a de sa petitesse, de son incapacité, tout cela fait de lui l’instrument dont Dieu pourra se servir.
Va-t-il donc aussitôt être appelé à engager le combat contre Madian, l’ennemi du peuple ? Non. Le service commence toujours dans sa propre maison ; le combat aussi, parfois. Dans la maison de Joas, père de Gédéon, il y avait un autel de Baal, une ashère… Quelle humiliation ! Aussi, c’est là qu’il fallait d’abord livrer le combat contre l’adversaire. Combat difficile, certes. Gédéon tremble à la pensée qu’il doit renverser l’autel de Baal qui est à son père et couper l’ashère. Nous comprenons bien ses craintes. N’aurions-nous pas reculé ? Que d’arguments à mettre en avant pour ne pas faire ce qui était commandé ! Mais la foi ne raisonne jamais et, tel Abraham autrefois, sans présenter aucune objection, Gédéon obéit. Il obéit « de nuit », c’est vrai, mais il obéit quand même ! — Et le v. 31 de Juges 6 nous dit quel fut le résultat de cette obéissance ; aux hommes de la ville qui lui avaient déclaré : « Fais sortir ton fils, et qu’il meure ; car il a démoli l’autel de Baal et a coupé l’ashère qui était auprès », Joas répond : « Est-ce vous qui plaiderez pour Baal ? Est-ce vous qui le sauverez ? Celui qui plaide pour lui, qu’il soit mis à mort, d’ici au matin. S’il est dieu, qu’il plaide pour lui-même, car on a démoli son autel ». On peut dire sans doute que lui aussi, comme les Thessaloniciens plus tard, s’était « tourné des idoles vers Dieu ». Après les craintes éprouvées, Gédéon a certainement connu une joie profonde en entendant les paroles de son père.
Exemple à imiter dans des combats qui peuvent offrir quelque analogie avec celui-là ! Nous ne devrions avoir à livrer de combats que contre l’ennemi qui est en Canaan, « la puissance spirituelle de méchanceté qui est dans les lieux célestes » (Éph. 6:12) ; il faut hélas ! rencontrer parfois l’adversaire dans sa propre maison, ou la maison des siens. Sommes-nous prêts à l’affronter et à en triompher ? Y a-t-il, de nos jours, beaucoup de Gédéon ? Fort peu sans doute, comme il y a aussi bien peu de Jaël !
Ayant livré victorieusement, malgré sa faiblesse et ses craintes, ce premier combat, Gédéon est à même d’aller affronter Madian. Il va partir avec trente-deux mille hommes, en apparence une puissante armée, capable de vaincre. Mais Israël se glorifierait alors de la victoire et il faut que tout soit à la seule gloire de Dieu. Aussi, l’Éternel met de côté tous ceux qui en fait n’étaient pas propres pour le combat ; sur ces trente-deux mille, trois cents seulement pouvaient accompagner Gédéon, auquel l’Éternel déclare : « Par les trois cents hommes qui ont lapé l’eau je vous sauverai, et je livrerai Madian en ta main… » (Juges 7:1 à 8). « Je vous sauverai », « je livrerai Madian en ta main », tout est en Lui. Mais, remarquons-le encore, Il veut employer des instruments pour combattre : « Par les trois cents hommes… » Quel encouragement pour les combats qu’il faut livrer contre un adversaire qui ne désarme jamais mais dont les assauts sont parfois plus spécialement dangereux !
Dieu nous enseigne par sa Parole. Qu’Il nous donne une oreille attentive, la force et l’énergie qui nous font si souvent défaut dans les combats qu’il faut pourtant livrer pour sa gloire, pour le maintien d’un témoignage fidèle !
« Et que dirai-je davantage ? Car le temps me manquera si je discours de Gédéon, de Barak… » (Héb. 11:32). Ces deux hommes figurent dans la lignée des hommes de foi de Hébreux 11, parmi les sept qui sont cités comme exemples des combattants de la foi ! Ils ont combattu dans des jours de ruine, leur faiblesse était grande… Comme eux, nous vivons aussi dans des jours de déclin et notre faiblesse est plus grande encore que nous ne le pensons ! Juges 5:2 nous parle de « chefs » qui se sont « mis en avant », du « peuple… porté de bonne volonté ». Quelle responsabilité pour ceux qui « sont à la tête » (cf. 1 Thess. 5:12, 13) et qui peut-être hésitent parfois, tel Barak, quand il faudrait « se mettre en avant » pour le combat à livrer ! Mais quelle responsabilité aussi, ne l’oublions pas, pour ceux qui sont appelés à prendre part à la bataille et qui sont exhortés à imiter, non Ruben, Galaad, Dan, Aser ou Méroz mais au contraire, Éphraïm, Benjamin, Zabulon, Nephthali et Issacar ! Dieu veuille qu’il ne soit pas dit de nous : « ils ne sont pas venus au secours de l’Éternel, au secours de l’Éternel, avec les hommes forts » !
ME 1965 p.156
Lorsqu’Il était ici-bas, le Seigneur s’est occupé de ses disciples. Il les avait envoyés « sans bourse, sans sac et sans sandale » et cependant ils n’avaient manqué « de rien » (Luc 22:35). Mais « maintenant » que leur Maître allait être rejeté et crucifié, puis glorifié dans le ciel, leur condition allait changer ; le Seigneur le leur annonce : ils auraient besoin de ressources — d’une « bourse » —de provisions — d’un « sac » — et même d’une « épée », car ils auraient à rencontrer la puissance de l’adversaire s’opposant à leur témoignage et, par conséquent, à le combattre (v. 36). Les disciples ne comprirent pas que le Seigneur employait là un langage symbolique et ils en donnèrent la preuve en Lui apportant « deux épées ». Aussi fut-Il amené à leur dire : « C’est assez » — en d’autres termes : « Vous n’avez pas saisi ce que j’ai voulu vous enseigner ».
Le Saint Esprit devait, plus tard, le leur faire comprendre — nous le faire comprendre aussi. L’apôtre Paul écrit en effet aux Corinthiens : « Les armes de notre guerre ne sont pas charnelles » (2 Cor :10:4) et aux Éphésiens : « Notre lutte n’est pas contre le sang et la chair, mais contre les principautés, contre les autorités, contre les dominateurs de ces ténèbres, contre la puissance spirituelle de méchanceté qui est dans les lieux célestes » (Éph. 6:10 à 12). Pour ce combat, « l’armure complète de Dieu » est indispensable et l’une des pièces de cette « armure » est précisément « l’épée de l’Esprit qui est la parole de Dieu » (v. 17).
Les « deux épées » sont des armes « charnelles » pour lutter « contre le sang et la chair ». L’« épée » dont le Seigneur engage ses disciples à se munir, c’est une arme « puissante par Dieu » pour le véritable combat chrétien.
ME 1971 p. 3
Parce qu’il désire nous voir marcher « de force en force » (Ps. 84:7), Dieu met à notre disposition les différents moyens grâce auxquels nous pouvons être forts de sa force.
Le premier d’entre eux, c’est sa Parole. À juste raison, nous rappelons fréquemment que, dans les jours actuels, nous manquons d’anciens dans les assemblées locales, comme aussi de pasteurs pour l’ensemble du troupeau ; mais nous manquons également de « jeunes gens », dans le sens que 1 Jean 2 donne à ce terme, de ces « jeunes gens », qui sont « forts » parce que « la parole de Dieu demeure en eux », grâce à quoi ils ont « vaincu le méchant » (v. 14 — la note, en bas de page, donne la signification plus précise de l’expression « vous avez vaincu » : vous avez vaincu et êtes victorieux ; c’est dire que l’état produit se continue).
Le second, c’est le Saint Esprit. Nous sommes « fortifiés en puissance par son Esprit, quant à l’homme intérieur », et alors demeure en nous Celui qui se plaît à nous communiquer quelque chose de la puissance (celle de la Parole) avec laquelle, comme homme ici-bas, il a triomphé de l’adversaire : « le Christ habite, par la foi, dans vos cœurs » (Éph. 3:16, 17). Le Saint Esprit a une épée, la Parole de Dieu, et il reste toujours un Esprit de puissance bien que nous soyons parvenus aux « temps fâcheux » des « derniers jours » (Éph. 6:17 ; 2 Tim. 1:7 et 3:1).
Nous trouvons également de la force en priant par l’Esprit (cf. Éph. 6:18, 20) ; Dieu ne nous accorde pas toujours aussitôt ce que nous lui demandons, mais il nous donne la force dont nous avons besoin pour traverser l’épreuve, livrer le combat, « marcher sur les eaux » : « Au jour que j’ai crié, tu m’as répondu ; tu as augmenté la force de mon âme » (Ps. 138:3). La réponse, c’est la force nécessaire pour attendre en paix le moment de la délivrance. — Telles sont les trois ressources fondamentales pour la vie individuelle et pour la vie des assemblées : la Parole, le Saint Esprit et la prière.
Dans la vie pratique, l’emploi de ces ressources nous amènera à réaliser que nous sommes « morts avec Christ… ressuscités avec le Christ » et ainsi, à « chercher les choses qui sont en haut, où le Christ est assis à la droite de Dieu » (Col. 2:20 ; 3:1). C’est le secret d’une vie vécue dans le sanctuaire pour y contempler Christ et y jouir de Lui, avec le résultat qui en découle : « nous sommes transformés en la même image, de gloire en gloire, comme par le Seigneur en Esprit » (2 Cor. 3:18). Nous trouverons là une source sans cesse renouvelée de force et de joie, car il est toujours vrai que « la force et la joie sont dans le lieu où il habite » (1 Chron. 16:27). Et nous sommes ainsi conduits, tout naturellement, à une vraie séparation pour Christ, à un nazaréat que Christ seul a vécu de manière parfaite, que Samson a manifesté au début de son chemin et qui est une source de force. Samson est sans doute — l’Homme parfait mis à part — un des hommes les plus forts dont nous parlent les Écritures ; or, il a vécu dans des temps de grande faiblesse, ceux que dépeint le livre des Juges, livre de l’Ancien Testament qui correspond à la seconde épître à Timothée dans le Nouveau. « Sa grande force » avait un secret que le monde ignorait (Juges 16:5, 15) ; elle résidait dans un nazaréat permettant le déploiement de la puissance de « l’Esprit de l’Éternel » (Juges 16:17 ; 14:6, 19 ; 15:14). Les chapitres 14 à 16 de ce livre des Juges rapportent sept circonstances dans lesquelles Samson a été amené à montrer « sa grande force » : 14:6, 19 ; 15:14 ; 16:3, 9, 12, 14. Il a perdu sa force quand il a perdu son nazaréat et sa force s’en est allée sans même qu’il s’en rendît compte (16:19, 20). — Il en est de même aujourd’hui : l’affaiblissement spirituel et moral, allant parfois jusqu’à la perte de toute force, peut se produire (et se produit souvent) sans que nous en ayons conscience. Combien nous avons donc à prendre garde ! — En même temps que son nazaréat et sa force, Samson a aussi perdu son discernement (ib. 21). Sans doute a-t-il retrouvé sa force, mais un instant seulement et au tout dernier moment de sa vie, Dieu le permettant pour le jugement des Philistins, sans que pour autant il ait retrouvé ses deux yeux (ib. 28 à 30).
Parvenus aux « temps fâcheux » des « derniers jours » annoncés par l’apôtre à Timothée dans sa seconde épître (3:1), alors qu’il y a dans la maison de Dieu la « forme » de la piété mais trop souvent sans la « puissance » qui découle d’une piété réelle (ib. 5), c’est « dans la grâce qui est dans le christ Jésus » que nous sommes exhortés, comme l’était Timothée, à nous fortifier (2 Tim. 2:1). Cette grâce n’est pas celle — improprement appelée de ce nom — que nous mettons parfois en avant pour essayer d’excuser trop facilement nos manquements, pour atténuer le mal et passer par-dessus, c’est celle dont parle l’apôtre dans son épître à Tite : « Car la grâce de Dieu qui apporte le salut est apparue à tous les hommes, nous enseignant que, reniant l’impiété et les convoitises mondaines, nous vivions dans le présent siècle sobrement, et justement, et pieusement, attendant la bienheureuse espérance et l’apparition de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus Christ, qui s’est donné lui-même pour nous, afin qu’il nous rachetât de toute iniquité et qu’il purifiât pour lui-même un peuple acquis, zélé pour les bonnes œuvres » (2:11 à 14). Quelle force il y a pour le fidèle dans l’observation des enseignements de « la vraie grâce de Dieu » (1 Pierre 5:12), cette grâce qui, avec la vérité dont elle est inséparable, vint ici-bas « par Jésus Christ » (Jean 1:17) !
Une autre conséquence de l’utilisation des trois ressources essentielles que nous avons rappelées, c’est la confiance de la foi, dans laquelle est aussi la force : « dans la tranquillité et dans la confiance sera votre force » (És. 30:15 — voir aussi Ps. 16:1, 8). Tandis que la foi est éprouvée au sein des combats qu’il convient de livrer, Dieu opère pour nous fortifier dans la lutte même, comme il l’a fait autrefois pour ces combattants de la foi desquels il est écrit : « … de faibles qu’ils étaient furent rendus vigoureux, devinrent forts dans la bataille… » (Héb. 11:34).
Ce n’est pas d’aujourd’hui que l’ennemi s’attaque à l’Église de Christ. Le livre des Actes nous montre que son activité s’est exercée dès le début de l’histoire de l’Assemblée sur la terre ; tantôt par la violence, tantôt par ses ruses et ses artifices, il a essayé d’y introduire le mal, de troubler, de désunir, de disperser ceux auxquels le Seigneur a voulu confier un témoignage, le témoignage que l’Assemblée est responsable de maintenir, dans le monde et devant les anges, jusqu’à la venue du Seigneur. Ne soyons donc pas surpris de le voir si actif encore maintenant, soit comme « lion rugissant » dans certains pays, soit plutôt comme « serpent » ou « ange de lumière » dans nos contrées (1 Pierre 5:8 ; 2 Cor. 11:3, 14). L’Assemblée, chère à nos cœurs et bien davantage au cœur du Seigneur, est « cruellement tourmentée » par l’adversaire, comme l’était jadis un objet cher au cœur de la femme cananéenne : sa propre fille (cf. Matt. 15:22). Et sans doute en sera-t-il ainsi jusqu’à la fin. Nous avons donc affaire à un ennemi qui ne désarmera jamais et qui est, par ailleurs, beaucoup plus fort que nous ; n’en prenons pas prétexte pour accepter par avance toutes les défaites, ne nous laissons pas gagner par une sorte de résignation fataliste, par une regrettable passivité, qui ne pourraient que faciliter ses desseins !
Les chapitres 2 et 3 de l’Apocalypse nous montrent que, dans quelque période que ce soit de l’histoire de l’Église sur la terre, il y a des combats à livrer : une promesse faite « à celui qui vaincra » se trouve dans chacune des lettres adressées aux sept assemblées. Ces promesses sont là encore aujourd’hui pour nous encourager à lutter et à vaincre.
Il y a des combats à soutenir dans la vie des assemblées, il y en a dans nos vies individuelles. La vie chrétienne est un combat incessant — un combat aux multiples aspects — contre un adversaire qui agit tout autour de nous, et d’abord en nous par le moyen de la chair. Or, le combat est toujours difficile, c’est pourquoi nous ne l’aimons pas, préférant le repos à la lutte, le relâchement à l’énergie qu’il faut déployer sans cesse pour « tenir ferme », pour « résister » et « après avoir tout surmonté, tenir ferme » encore et toujours. Le combat nécessite une préparation spirituelle et morale (cf. 1 Cor. 9:24 à 27), il ne peut être livré avec succès que si l’armure a été préalablement revêtue : « Au reste, mes frères, fortifiez-vous dans le Seigneur et dans la puissance de sa force ; revêtez-vous de l’armure complète de Dieu, afin que vous puissiez tenir ferme contre les artifices du diable : car notre lutte n’est pas contre le sang et la chair, mais contre les principautés, contre les autorités, contre les dominateurs de ces ténèbres, contre la puissance spirituelle de méchanceté qui est dans les lieux célestes. C’est pourquoi prenez l’armure complète de Dieu, afin que, au mauvais jour, vous puissiez résister, et, après avoir tout surmonté, tenir ferme » (Éph. 6:10 à 13 — et versets suivants). Sommes-nous préparés aux combats que nous avons à livrer, quel que soit le caractère qu’ils revêtent ? Sommes-nous revêtus constamment de « l’armure complète de Dieu » ? Ne devons-nous pas confesser que, trop souvent hélas ! nous ne sommes préparés, armés, ni pour le combat de Galates 5 ni pour celui d’Éphésiens 6 ? Ne sommes-nous pas marqués, au contraire, par une faiblesse qui facilite le travail de l’ennemi ? Il trouve alors un terrain favorable à l’exercice de son activité destructrice. N’est-il pas significatif que lors de sa première attaque, dans le jardin d’Éden, le « serpent » se soit dirigé vers celui des deux qui était le plus faible ? C’est « la femme », « un vase plus faible », qu’il est venu « séduire par sa ruse » (Gen. 3:1 ; 1 Pierre 3:7 ; 2 Cor. 11:3 — voir aussi 1 Tim. 2:14).
Chaque fois que nous assistons impuissants à quelque triomphe de l’adversaire, ne devrions-nous pas, avant toute autre chose, nous humilier de notre faiblesse ? Si nous avions réalisé pratiquement Colossiens 3:1 à 3 ; 5:8 à 10, 12 à 17, si nous avions été plus forts — de la force de Dieu — aurait-il aussi aisément remporté la victoire ? Sans doute pas, car il aurait alors rencontré Christ, la puissance de Christ en nous. Gardons-nous de nous arrêter aux causes secondes, essayant de déterminer quelle est celle qui a pu provoquer la défaite que nous déplorons ; gardons-nous de nous borner à chercher à remédier aux effets, c’est jusqu’à la cause première qu’il faut remonter, c’est-à-dire à notre état de faiblesse et à ce qui nous y a conduits. Une attaque de l’ennemi, n’est-ce pas une circonstance permise par Dieu pour nous amener à discerner notre état moral et spirituel ? Si l’état est bon, si nous avons réalisé la mort du vieil homme et vécu de la vie du nouvel homme, si nous avons largement puisé aux ressources par le moyen desquelles Dieu se plaît à nous communiquer quelque chose de sa force, l’ennemi sera vaincu. Si au contraire il atteint son but, c’est en raison de notre faiblesse. Par le moyen du succès remporté par l’adversaire, Dieu voudrait ouvrir nos yeux sur notre condition véritable, nous amener d’abord à nous en humilier, ensuite à rechercher la force à la source.
Nourrissons-nous de la Parole, laissons agir en nous le Saint Esprit sans l’attrister, sans entraver sa bienfaisante activité : nos âmes seront ainsi occupées de Christ. Prions beaucoup individuellement et en assemblée — faut-il observer ici que l’un des signes les plus caractéristiques de notre faiblesse et de notre bas niveau spirituel est bien le relâchement quant à l’assiduité aux réunions de prières, alors qu’il y a tant de sujets de crier au Seigneur… — Nous pourrons alors vivre de la vie nouvelle, réaliser un christianisme céleste et pratique, une vie dans le sanctuaire et la vraie séparation qui en découle — c’est-à-dire une séparation pour Christ — une séparation d’avec le monde sous ses divers caractères. À cet égard, n’est-il pas vrai que, trop souvent, puisant trop peu aux ressources fondamentales de la vie chrétienne, nous cherchons plutôt les choses qui sont en bas que celles qui sont en haut ? (Col. 3:1 à 3). Humilions-nous de ce que, par voie de conséquence, la mondanité pénètre largement nos vies et nos maisons, tandis que la conformité au monde religieux, dans ses activités diverses, nous gagne de plus en plus, sans même que nous en ayons conscience. Placés au sein d’un monde christianisé et d’un christianisme mondanisé, avons-nous l’ardent désir, traduit en actes, de vivre le vrai christianisme, celui que la Parole nous enseigne et que le Seigneur désire nous voir vivre, pour notre joie et pour Sa gloire ?
Brebis malades, n’avons-nous pas besoin d’être fortifiés ? La maladie est une conséquence de la faiblesse, c’est donc à l’état de faiblesse qu’il convient, d’abord, de remédier pour que soit obtenue une pleine guérison. Le Seigneur, bon Berger des brebis, s’emploie à ce travail d’amour : « la malade, je la fortifierai », nous assure-t-il (Ézéch. 34:16). Mais puisse-t-il aussi y avoir dans les assemblées l’exercice du ministère pastoral et, dans chaque assemblée locale, de véritables anciens « paissant le troupeau de Dieu… étant les modèles du troupeau » (1 Pierre 5: 2, 3). C’est de cela surtout que nous avons besoin, c’est le vrai remède à ce qui est la cause profonde de tant de misères sur lesquelles nous gémissons : nourrir les âmes de la Parole, les occuper de Christ, les amener à vivre de sa vie, à puiser à tout ce qui apporte force et joie, les « fortifier dans la grâce qui est dans le christ Jésus », réveiller et développer en elles un esprit de prière et de supplication. Alors les assauts de l’ennemi tourneront à sa confusion et nous pourrons « marcher de force en force ».
« Si l’Église ne se manifeste pas en puissance (puissance de l’Esprit) elle est envahie par l’erreur et conquise par le monde » a écrit l’un de nos devanciers. L’histoire de l’Église, devenue la « grande maison », justifie pleinement cette assertion ; mais aussi, le succès des efforts de l’adversaire pour faire pénétrer de fausses doctrines au sein même de ce qui est l’expression de l’Assemblée sur la terre, ou pour y implanter, sous des aspects séduisants, pensées et activités du monde, nous montre bien que la puissance a manqué.
Afin que nous soyons préservés de toute prétention à la force, ajoutons que nous avons à demeurer, individuellement (cf. 2 Cor. 12:9, 10) et collectivement (cf. Apoc. 3:8), dans l’humilité et dans le sentiment profond de la faiblesse qui est en nous. C’est seulement alors que la puissance de Dieu pourra se déployer. « Quand je suis faible », écrit l’apôtre, « alors je suis fort ». Réalisant vraiment sa complète impuissance, il se glorifiait de la victoire remportée par Christ, par la puissance de Christ opérant en lui. Si, dans une mesure au moins, nous pouvions le réaliser comme lui !
Qu’au début d’une nouvelle année de notre passage ici-bas, ces pensées nous amènent à d’utiles réflexions ; qu’un travail de la grâce de Dieu s’accomplisse en nous, nous réveillant dans nos affections pour le Seigneur, exerçant nos consciences, afin que, discernant la cause première de nos douleurs, nous soyons conduits à rechercher, par les divers moyens que Dieu veut mettre à notre disposition et qu’il trouve bon de nous rappeler encore une fois, la force dont nous avons besoin — la sienne — pour être rendus capables de repousser les attaques de l’ennemi, de déjouer ses ruses, de « vaincre le méchant » !