(Hébreux 5:12 : Vous devriez être des docteurs vu le temps)
Paul Fuzier
Table des matières :
1 - L’ennemi cherche à faire douter de Dieu
2 - Les versets qui insistent sur les œuvres
3 - Principes d’interprétation. Importance du contexte
4 - Le cas d’Abraham selon les Romains et selon Jacques
7 - Philippiens 2:12. Travailler à son propre salut
9 - Se réveiller du sommeil. Montrer sa foi par des œuvres
Les sous-titres ont été ajoutés par Bibliquest. ME 1943 p. 177
L’ennemi ne laisse jamais le croyant en repos. Il est sans cesse en activité (Job 1:7 ; 2:2), accusateur des frères devant Dieu jour et nuit (Apoc. 12:10), cherchant à les faire broncher ou bien essayant de les troubler. Depuis le commencement, ses moyens pour accomplir cette œuvre de destruction restent les mêmes : aujourd’hui encore, afin d’ébranler la foi, il sème le doute dans les cœurs et c’est toujours le : « Quoi, Dieu a dit ? » de Genèse 3:1.
Que des âmes soient troublées sur un sujet aussi clair et aussi souvent exposé que celui de la justification par la foi, c’est bien la preuve que l’ennemi renouvelle toujours ses assauts. Une voix s’est fait entendre à leurs oreilles ; elle a présenté la Parole (comme lors de la tentation du Seigneur Jésus au désert, Matt. 4:6 ; Luc 4:10) : « Vous voyez qu’un homme est justifié par les œuvres et non par la foi seulement » (Jacq. 2:24) ; et elle a tenu ce langage : tu vois combien ta conduite laisse à désirer — où sont les œuvres que tu accomplies ? Il n’y a rien, c’est donc la preuve que tu n’es pas justifié. Tu as la foi, mais cela ne suffit pas puisque la Parole dit que l’on n’est pas justifié par la foi seulement. D’autres passages sont présentés aussi ; leur sens est faussé et ils entretiennent le doute dans cette âme angoissée. C’est Rom. 11:22 : « Toi aussi, tu seras coupé… », ou Phil. 2:12 : « Travaillez à votre propre salut avec crainte et tremblement ». C’est encore Hébr. 6:4-6 pour laisser croire que le racheté de Christ peut très bien perdre son salut et pour ôter tout espoir de restauration à ceux qui ont bronché : « il est impossible que ceux qui ont été une fois éclairés, et qui ont goûté du don céleste, et qui sont devenus participants de l’Esprit Saint, et qui ont goûté la bonne parole de Dieu et les miracles du siècle à venir, et qui sont tombés, soient renouvelés encore à la repentance, crucifiant pour eux-mêmes le Fils de Dieu, et l’exposant à l’opprobre ». Si les mots ont un sens, dira l’âme troublée, il n’y a aucun doute… Elle est ainsi maintenue dans une inquiétude continuelle au sujet de son salut, ayant toujours peur de ne pas accomplir assez d’œuvres pour l’obtenir ou pour ne pas le perdre.
Une double remarque : il est dangereux d’isoler un texte de son contexte et, d’autre part, la Révélation constitue un tout. De la Parole il est dit : « Les jugements de l’Éternel sont la vérité, justes tous ensemble » (Ps. 19:9). Cette expression « tous ensemble » nous montre bien que le sens d’un passage doit être recherché en accord avec les vérités connues du Saint Livre. Ce double principe doit toujours nous guider dans l’examen d’une portion des Écritures.
Au sujet de la justification, l’apôtre Paul écrit aux Romains : « à celui qui ne fait pas des œuvres, mais qui croit en celui qui justifie l’impie, sa foi lui est comptée à justice » (Rom. 4:5), tandis que l’enseignement de l’apôtre Jacques est celui-ci : « Vous voyez qu’un homme est justifié par les œuvres et non par la foi seulement » (Jacq. 2:24). Isolés de leur contexte, ces deux passages apparaissent contradictoires et c’est cette apparente contradiction qui est un sujet de trouble pour plusieurs.
Il faut redire encore une fois que deux sujets bien différents sont
traités dans ces deux pages de la Parole : dans l’épître aux Romains, c’est
la justification devant Dieu — dans l’épître de Jacques, devant les hommes. Dieu
lit dans mon cœur, Il peut y discerner la réalité de ma foi sans que des œuvres
soient nécessaires pour cela
. Tandis que
ceux qui m’entourent ne peuvent en juger que par ma vie pratique : « Par
mes œuvres je te montrerai ma foi » (Jacq. 2:18).
Un même exemple — celui d’Abraham — est choisi dans les deux passages cités, et c’est tout à fait remarquable. Romains 4 fait allusion à la scène de Genèse 15 : « Regarde vers les cieux et compte les étoiles… Ainsi sera ta semence ». Voilà ce que Dieu a dit. Il suffit de croire pour être justifié : « Et il crut l’Éternel et il lui compta cela à justice » (v. 5:6). C’est le verset rappelé en Rom. 4:3, cité également en Jacq. 2:23, mais précédé alors de ces mots : « Et l’écriture a été accomplie qui dit… ». Quand cette écriture a-t-elle été accomplie ? Lorsqu’Abraham a offert son fils Isaac sur l’autel (v. 21). La scène de Genèse 15, au cours de laquelle a été prononcée la parole accomplie en Genèse 22 est bien antérieure. Isaac n’était pas né alors : la foi précède les œuvres qui en sont seulement la conséquence et le témoignage devant le monde. En Genèse 22, il y avait des témoins — « deux de ses jeunes hommes » — quoiqu’ils n’allèrent pas jusqu’au lieu du sacrifice.
Quel est le résultat dans chacune de ces deux circonstances ? Genèse 15 : Abraham crut Dieu. Cela lui est compté à justice, il est justifié devant Dieu par sa foi. Il n’est pas question d’œuvres : « à celui qui ne fait pas des œuvres, mais qui croit… » (Rom. 4:5). Genèse 22 : ses œuvres manifestent sa foi. Il n’est pas dit ici que cela lui est compté à justice ; ce sont deux messages qui lui sont adressés : « Mais l’ange de l’Éternel lui cria des cieux.. » (v. 11). « Et l’ange de l’Éternel cria des cieux à Abraham une seconde fois.. » (v. 15). Que sont ces deux messages ? Le premier : « Maintenant, je sais que tu crains Dieu.. » (v. 12). Le second : « Parce que tu as fait cette chose-là… certainement je te bénirai… » (v. 16-18).
Il est donc bien clair que nous sommes justifiés devant Dieu par la foi. Les œuvres que nous sommes appelés à accomplir n’ajoutent rien à un salut parfait qui est sur le principe de la foi seulement ; elles manifestent cette foi aux yeux de notre entourage et montrent que nous vivons dans la crainte de Dieu (Gen. 22:12), elles nous procurent non le salut, mais la bénédiction dans le chemin (Gen. 22:16-18). Ces vérités sont exposées aussi dans d’autres passages : Éph. 2:8-10 ; Tite 3:5-8 ; Gal. 2:16 entr’autres.
Ajoutons ce que nous dit encore l’épître aux Romains au sujet de la justification : c’est Dieu qui justifie (8:30 et 34), Dieu et non pas l’homme. Pourquoi le fait-Il ? Parce qu’Il est un Dieu de grâce : « étant justifiés gratuitement par sa grâce » (3:24). Mais comment peut-Il justifier des coupables puisqu’Il est aussi un Dieu juste et saint ? C’est en vertu de l’œuvre accomplie à la croix : le sang de Christ a été répandu et nous sommes « justifiés par son sang » (5:9). Cela, il suffit de le croire — « justifiés sur le principe de la foi » (5:1) — pour avoir la paix avec Dieu.
La véritable portée du chap. 11 de l’épître aux Romains est perdue de vue quand on l’applique au salut de l’âme. D’autres passages de la Parole (épître aux Éphésiens par exemple), nous enseignent que les rachetés de Christ sont vivifiés et ressuscités ensemble avec Lui, assis ensemble dans les lieux célestes en Lui — que l’Église est un seul corps avec Lui. Comment donc pourrait-il être question de rejeter ce qui est un avec Christ dans le ciel ? Dans le chap. 11 de l’épître aux Romains, c’est de la terre qu’il s’agit et non du ciel : l’image choisie par l’apôtre — un arbre — le montre bien. Cet olivier représente non l’Église, mais la nation juive et l’olivier sauvage, les nations. L’apôtre écrit : « car je parle à vous, nations, en tant que moi je suis en effet apôtre des nations.. » (v. 13). L’Évangile a été annoncé aux nations, mais si elles ne persévèrent pas dans la crainte de Dieu, elles seront coupées (v. 22), de la même façon que l’ont été les branches de l’olivier franc, c’est-à-dire Israël. Pourrait-il y avoir dans le corps de Christ des membres que l’on arracherait pour faire place à d’autres ? Y a-t-il dans ce corps une différence quelconque entre Juifs et gentils ? L’apôtre Pierre ne dit-il pas aux Juifs, en parlant des croyants d’entre les nations : « il n’a fait aucune différence entre nous et eux… » (Actes 15:8, 9), et l’apôtre Paul n’écrit-il pas aux Éphésiens : « Car c’est lui qui est notre paix, qui des deux en a fait un… afin qu’il créât les deux en lui-même pour être un seul homme nouveau, en faisant la paix ; et qu’il les réconciliât tous les deux en un seul corps à Dieu par la croix » (2:14-16) ?
Il est donc hors de doute que dans le chap. 11 de l’épître aux Romains il ne s’agit pas du corps de Christ, mais des Juifs et des nations, responsables du témoignage de Dieu sur la terre. Se servir de cette portion des Écritures pour affirmer que le croyant qui ne marche pas fidèlement peut perdre son salut serait une erreur. Ce serait en contradiction avec tout le reste de l’enseignement de la Parole à ce sujet.
L’explication de Phil. 2:12 a été donnée bien souvent aussi. Ce n’est pas la justification que l’apôtre a en vue quand il écrit : « Travaillez à votre propre salut avec crainte et tremblement ». Dans l’épître qu’il adresse aux Philippiens, il présente le salut comme le but à atteindre, la délivrance au terme de la course. Possédant le salut sur le principe de la foi (n’est-ce pas précisément à Philippes qu’il a répondu à la question du geôlier : « Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé, toi et ta maison » ? (Actes 16:30-32) nous sommes appelés à travailler en vue de cette délivrance finale : c’est un travail incessant, un combat à livrer contre celui qui voudrait nous faire tomber en chemin. Sans doute, s’il fallait mener ce combat avec nos propres forces et nos seules ressources, qui de nous pourrait prétendre atteindre le but ? Mais « c’est Dieu qui opère en nous et le vouloir et le faire selon son bon plaisir » (v. 13). Ainsi, nous pouvons attendre avec une confiance entière « l’adoption, la délivrance de notre corps » (Rom. 8:23, 24). Le salut de nos âmes est acquis, c’est celui de nos corps que nous attendons.
Le premier verset de l’épître aux Hébreux montre bien qu’elle a été adressée à des croyants juifs. Dieu avait parlé aux pères par les prophètes ; quand Il a parlé dans le Fils, son peuple l’a rejeté et crucifié. Toutefois, ils l’ont fait par ignorance (Actes 3:17). L’Évangile leur est alors annoncé, la repentance leur est prêchée. Mais si après avoir écouté, après être entrés dans la profession chrétienne, ils rejettent Christ en retournant au judaïsme, Dieu n’a pas d’autre troyen de salut à leur offrir. C’est ce que l’apôtre Pierre dira, après avoir prononcé les paroles que nous venons de citer (Actes 4:12). Le passage considéré du chap. 6 de l’épître aux Hébreux s’applique donc à des Juifs qui ont eu pour un temps la profession chrétienne, mais non pas la vie de Dieu. La « bonne parole de Dieu » qu’ils ont entendue, qu’ils ont goûtée, les a éclairés ; c’est le cas pour tant de professants encore de nos jours. Ils sont devenus « participants de l’Esprit Saint » — ce n’est pas l’expression d’Éph. 1:13 qui est employée ici : « ayant cru, vous avez été scellés du Saint Esprit », ce n’est pas le sceau du Saint Esprit que Dieu met sur ses enfants comme une marque de propriété — ils ont été dans la chrétienté, maison de Dieu sur la terre, « habitation de Dieu par l’Esprit » (Éph. 2:22), mais ils n’ont jamais fait partie du « seul corps » (Éph. 1:23 ; 4:4).
Rien dans ces versets ne permet de dire qu’un enfant de Dieu peut perdre son salut et qu’il est impossible qu’il soit renouvelé à la repentance s’il est tombé. Un croyant qui tombe ne perd pas son salut, il perd la jouissance de sa communion avec le Seigneur. Ce sont deux choses très différentes (Lév. 21:21-23).
Nous sommes sans doute dans des temps de relâchement. À bien des égards, il est utile d’arrêter notre attention sur notre responsabilité. « C’est déjà l’heure de nous réveiller du sommeil » (Rom. 13:11-14), et cette exhortation s’adresse aussi à nous : « Souviens-toi donc d’où tu es déchu et repens-toi et fais les premières œuvres » (Apocalypse 2:5). Nous avons besoin de considérer sérieusement notre marche individuelle et collective, répondant à l’invitation qui nous en est faite (Lam. de Jér. 3:40). On pourrait peut-être douter qu’il soit réellement sauvé — Dieu seul lit dans les cœurs — celui qui dirait : je suis sauvé, que m’importe de marcher fidèlement ou non ! Celui qui croit devient celui qui aime parce que l’amour de Dieu est versé dans son cœur et cet amour est manifesté en gardant Sa parole (Jean 14:21-23). C’est en cela que nous avons à montrer notre foi par des œuvres.
Mais si notre salut dépendait de notre marche, qui oserait alors
prétendre être sauvé ? Chercher à réveiller la conscience des saints assoupis
en leur affirmant que c’est toute la question de leur salut qui peut être mise en
cause parce que leur marche n’est pas ce qu’elle devrait être, aurait pour seul
résultat de troubler au lieu de réveiller. Notre vie est liée à celle de notre bien-aimé
Sauveur : « parce que moi je vis, vous aussi vous vivrez » (Jean
14:19). De ses brebis auxquelles Il a donné la vie éternelle, Il peut dire :
« elles ne périront jamais
;
et personne
ne les ravira de ma main.
Mon Père qui me les a données est plus grand que tous, et personne
ne peut les ravir de la main de mon Père » (Jean 10:28,
29). Ce salut qui repose sur l’œuvre parfaite de Christ, accomplie à la croix et
que nous avons reçu par la foi ne peut nous être ôté. C’est cette assurance qui
fait notre joie et qui est notre paix.
Qu’aucun enfant de Dieu ne doute de son salut : il repose sur ce que Christ a fait et non sur ce que nous faisons. Mais que chacun d’eux manifeste sa foi par des œuvres, pour entendre cette parole : « Maintenant je sais que tu crains Dieu… certainement je te bénirai » — pour jouir d’une heureuse communion et avec le Père et avec le Fils : « nous viendrons à lui et nous ferons notre demeure chez lui » (Jean 14:23) — pour connaître toute la joie qui est dans l’obéissance : « Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour… Je vous ai dit ces choses afin que ma joie soit en vous et que votre joie soit accomplie » (Jean 15:10, 11).