Par W. Trotter
Mais le seul et même Esprit opère toutes ces choses, distribuant à chacun en particulier comme il lui plaît.
1 Cor. 12:11.
Table des matières :
1 - Première Lettre — Dieu présent dans l’assemblée.
1.1 - Appendice à la première lettre
2 - Deuxième Lettre : L’Église édifiée par des dons.
5.1 - Appendice à la Cinquième Lettre
Préface de la première édition en anglais
Les lettres suivantes furent adressées, il y a plusieurs années, à une assemblée de chrétiens, avec lesquels l’auteur était particulièrement lié, tant par son service au milieu d’eux que par son affection ; c’est ce qui lui a donné le courage de s’entretenir très librement avec eux sur des sujets d’un profond intérêt mutuel. On lui a souvent demandé dès lors de publier ces lettres ; mais il s’y était toujours refusé, de crainte que ce qui était applicable à une assemblée donnée, dans un certain état, ne fût pas aussi bien adapté aux besoins d’autres assemblées chrétiennes, dont la condition pourrait être fort différente. Il redoutait de plus d’avoir même l’apparence de prendre, parmi ses frères en général, une position qu’il ne se serait pas attribuée dans sa localité même, mais qui lui était joyeusement accordée par ceux au milieu desquels il avait eu la joie et le privilège de travailler pour le Seigneur. Ces deux objections ont été levées par le fait, en apprenant que des copies manuscrites de ces lettres circulaient en divers lieux — sorte de demi-publicité qui peut, à bon droit, donner lieu à de très graves objections. Les facilités que présente un tel mode de circulation à la diffusion clandestine d’erreurs mortelles, sont sûrement suffisantes pour rendre ceux qui ont à cœur le soin des âmes, jaloux de répandre la vérité. C’est pour cette raison que les lettres suivantes sont mises sous presse. Ainsi la circulation qu’elles pourront avoir sera publique ; leurs allégations pourront être soumises à l’épreuve de la sainte parole de Dieu. Et si elles se trouvaient contenir quelque chose de contraire à ses enseignements, personne ne sera plus reconnaissant que l’auteur, de la correction de ses erreurs, par cette pure et parfaite règle de la vérité.
Quinze ans d’expériences variées ont contribué à enraciner et fortifier la conviction, que la marche et la position signalées dans ces lettres, sont l’une et l’autre de Dieu, quels qu’aient été les manquements des hommes qui les ont adoptées. Ce dont nous avons besoin, c’est de patience, de foi dans le Dieu vivant, d’amour pour Christ, de vraie soumission à l’Esprit, d’étude diligente de la Parole et d’une sincère soumission les uns aux autres dans la crainte du Seigneur.
Il n’y a plus qu’à ajouter, qu’en préparant ces pages pour la presse, on a usé de la liberté d’y faire des changements nécessités par des lumières actuelles sur l’Écriture, ainsi que d’omettre ou de modifier quelques expressions qui auraient pu signaler l’assemblée particulière à laquelle les lettres étaient adressées.
Telles qu’elles sont, on les recommande à la bénédiction de Dieu et à la conscience des saints.
W.T. 1857
* * *
Bien-aimés frères,
Il y a plusieurs points relatifs à notre position, en tant que rassemblés au nom de Jésus, sur lesquels je sens le besoin de m’entretenir avec vous. Je choisis ce moyen de le faire, comme vous offrant plus de facilité pour examiner et peser mûrement ce qui vous sera communiqué, que vous n’en auriez probablement dans un entretien ou une discussion libre à laquelle tous assisteraient. Je serais très reconnaissant qu’une telle discussion pût avoir lieu, si le Seigneur y inclinait vos cœurs, quand vous aurez examiné et pesé, en sa présence, les choses que j’ai à vous soumettre.
Un mot, en commençant, pour reconnaître la miséricorde de Dieu envers nous, comme assemblés au nom de Jésus. Je ne puis que courber la tête et adorer, en me rappelant les nombreux moments de réel rafraîchissement et de joie sincère qu’il nous a donné de passer ensemble en sa présence. Le souvenir de ces moments, tout en remplissant le cœur d’adoration devant Dieu, nous rend indiciblement chers ceux avec lesquels nous avons joui de telles bénédictions. Le lien de l’Esprit est un lien réel ; et c’est dans la confiance qu’il m’inspire en l’amour de mes frères, que je voudrais, comme votre frère et votre serviteur pour l’amour de Christ, vous exprimer sans réserve ce qui me paraît être d’une grande importance pour la continuation de notre bonheur et de notre avantage commun, aussi bien que pour ce qui est beaucoup plus précieux encore : la gloire de Celui au nom duquel nous sommes assemblés.
Lorsque, en juillet dernier, nous fûmes conduits par le Seigneur, comme je n’en doute pas, à substituer des réunions libres, le dimanche soir, à la prédication de l’Évangile, qui avait eu lieu jusqu’alors, je prévoyais tout ce qui s’en est suivi. Je puis dire que le résultat ne m’a point du tout surpris. Il y a des leçons relatives à la direction pratique du Saint-Esprit qui ne peuvent être apprises que par l’expérience ; et bien des choses, qui peuvent maintenant, par la bénédiction du Seigneur, être appréciées par votre entendement spirituel et par vos consciences, auraient été alors complètement inintelligibles, si vous n’eussiez appris à connaître le genre de réunions auxquelles ces vérités s’appliquent. On dit que l’expérience est le meilleur des maîtres. Cela pourrait souvent être justement mis en doute ; mais on ne saurait douter que l’expérience ne nous fasse sentir des besoins que l’enseignement divin peut seul faire naître. Vous me croirez, quand je vous dirai que le fait de voir mes frères mutuellement mécontents de la part qu’ils prennent les uns et les autres dans les assemblées, n’est pas pour moi un sujet de joie ; mais si cet état de choses contribuait, comme j’ai la confiance qu’il le fera, à ouvrir tous nos cœurs aux leçons de la parole de Dieu, qu’autrement nous n’aurions pu apprendre aussi bien, ce résultat serait au moins un sujet de reconnaissance et de joie.
La doctrine de l’habitation du Saint-Esprit dans l’Église sur la
terre, et par conséquent, de sa présence et de sa direction dans les assemblées
des saints, m’apparaît depuis bien des années, sinon comme la grande vérité
de la dispensation
actuelle, du moins comme une des plus
importantes vérités
qui distinguent cette dispensation. La négation
virtuelle ou réelle de cette vérité constitue un des traits les plus sérieux de
l’apostasie qui s’est fait jour. Ce sentiment ne diminue pas chez moi, mais
s’approfondit plutôt à mesure que le temps s’écoule. Je vous confesse
ouvertement que, tout en reconnaissant pleinement qu’il y a des enfants
bien-aimés de Dieu dans toutes les dénominations qui nous entourent, et tout en
désirant tenir mon cœur ouvert à tous, il ne me serait plus possible d’être en
communion avec un corps quelconque de chrétiens professants, qui substituerait
des formes cléricales quelconques à la souveraine direction du Saint-Esprit —
pas plus que, si j’eusse été Israélite, je n’aurais pu avoir communion avec
l’érection d’un veau d’or à la place du Dieu vivant. Que cela ait eu lieu dans
toute la chrétienté, et que le jugement soit suspendu sur elle, à cause de ce
péché et de tant d’autres, c’est ce que nous ne pouvons que reconnaître avec
douleur, en nous humiliant devant Dieu, comme y ayant tous participé, et comme
étant un seul corps en Christ avec un grand nombre de chrétiens qui,
aujourd’hui encore, demeurent dans cet état de choses et s’en glorifient. Mais
les difficultés qui accompagnent la séparation d’avec ce mal, difficultés que
nous aurions certes dû prévoir et que nous commençons tous à éprouver, n’ont
pas le pouvoir d’affaiblir mes convictions relativement à ce mal dont Dieu,
dans sa grâce, nous a fait sortir, et elles n’éveillent en moi aucun désir de
retourner à cette espèce de position et d’autorité humaine et officielle ;
position et autorité que s’arrogent une certaine classe de personnes, ce qui
caractérise l’église professante, et contribue à hâter le jugement qui tombera
bientôt sur elle.
Mais, bien-aimés frères, si notre conviction de la vérité et de
l’importance de la doctrine
de la
présence du Saint-Esprit ne saurait être trop profonde, permettez-moi de vous
rappeler, que cette présence du Saint-Esprit dans les assemblées des saints est
elle-même un fait
accompagnant celui
de la présence personnelle du Seigneur Jésus (Matt. 18:20). C’est d’une simple
foi en cela que nous avons besoin. Nous sommes enclins à l’oublier. Et l’oubli
ou l’ignorance de ces faits est la cause principale de ce que nous nous
assemblons sans en retirer aucun profit pour nos âmes. Si seulement nous nous
assemblions pour être en la présence de Dieu ; si seulement, lorsque nous
sommes réunis ensemble, nous croyions que le Seigneur est réellement présent,
quel effet cette conviction aurait sur nos âmes ! Le fait est que, aussi
réellement que Christ était
présent
avec ses disciples sur la terre, aussi
réellement Il est maintenant présent, ainsi que son Esprit, dans les assemblées
des saints. Si
cette présence pouvait, de quelque manière, être manifestée
à nos sens — si nous pouvions la voir comme les disciples voyaient Jésus — quel
sentiment solennel nous éprouverions, et comme nos cœurs en seraient dominés !
Quel calme profond, quelle attention respectueuse, quelle solennelle confiance
en lui, en résulteraient ! Comme il serait impossible qu’il
y eût aucune précipitation, aucun sentiment de rivalité, d’agitation, si
la présence de Christ et du Saint-Esprit était ainsi révélée à notre vue et à
nos sens. Et le fait de cette présence aurait-il moins d’influence, parce que
c’est une affaire de foi
et non de vue ?
Christ et l’Esprit sont-ils
moins réellement présents, parce qu’ils sont invisibles ? C’est le pauvre
monde qui ne reçoit point cela, parce qu’il ne le voit point ;
prendrons-nous donc la place du monde et abandonnerons-nous la nôtre ?
« Car là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis là au milieu
d’eux », dit le Seigneur, et aussi : « Et moi, je prierai le Père, et il vous
donnera un autre Consolateur, pour être avec vous éternellement, l’Esprit de
vérité, que le monde ne peut pas recevoir, parce qu’il ne le voit pas et ne le
connaît pas ; mais vous, vous le connaissez, parce qu’il demeure avec
vous, et il sera en vous » (Jean 14:16-17).
Je suis de plus en plus persuadé que la grande chose qui nous
manque, c’est la foi en la présence personnelle du Seigneur, et dans l’action
de l’Esprit. N’y a-t-il pas eu des temps, où cette présence était réalisée au
milieu de nous comme un fait ? et combien de tels
moments étaient bénis ! Il pouvait y avoir, et il y avait des intervalles
de silence ; mais comment étaient-ils employés ? À s’attendre
sérieusement à Dieu. Non dans une inquiète agitation de savoir qui prierait ou
qui parlerait ; non en tournant les feuilles des bibles ou des livres de
cantiques pour trouver quelque chose qu’il nous parût convenable de lire ou de
chanter. Non, ni dans des pensées anxieuses au sujet de ce que penseraient de ce
silence ceux qui étaient là comme assistants. Dieu était là.
Chaque cœur était occupé de lui. Et si quelqu’un avait ouvert la
bouche uniquement pour rompre le silence, on aurait senti que c’était là une
interruption réelle. Quand le silence était rompu, c’était par une prière qui
renfermait les désirs, et exprimait les aspirations de tous les
assistants ; ou par un cantique auquel chacun pouvait s’unir de toute son
âme ; ou par une parole qui s’adressait avec puissance à nos cœurs. Et
quoique plusieurs personnes pussent être employées, pour indiquer ces hymnes,
prononcer ces prières ou ces paroles, il était si évident qu’Un seul et même Esprit
les dirigeait dans tout ce service,
que c’était comme si le programme en avait été déterminé d’avance, et que
chacun y eût eu sa part assignée. Aucune sagesse humaine n’aurait pu faire un
tel plan. L’harmonie était divine. C’était le Saint-Esprit qui agissait par les
différents membres, dans leurs diverses places, pour exprimer l’adoration, ou
pour répondre aux besoins de tous ceux qui étaient présents.
Et pourquoi n’en serait-il pas toujours ainsi ? Je le
répète, bien-aimés frères, la présence et l’action du Saint-Esprit sont des
faits, et non pas une pure doctrine. Et assurément si, de fait, le Seigneur et
l’Esprit sont présents avec nous quand nous sommes réunis ensemble, aucun fait
ne peut être d’une importance comparable à celui-là. C’est certainement le
grand fait, celui qui absorbe tous les autres, le fait qui devrait caractériser
tout le reste dans l’assemblée. Il ne s’agit pas ici seulement d’une négation.
Cette présence ne signifie pas seulement que l’assemblée ne doit pas être
conduite d’après un ordre humain et fixé d’avance ; elle signifie plus que
cela : si le Saint-Esprit est là, il faut qu’il dirige l’assemblée. Sa présence
ne veut pas dire non plus que chacun a la liberté de prendre part à l’action. Non, elle signifie l’opposé de cela.
Il
est vrai qu’il ne doit y avoir aucune restriction humaine ; mais si
l’Esprit de Dieu est présent, nul ne doit prendre une part quelconque au culte,
excepté celle que l’Esprit lui assigne et pour laquelle il le qualifie. La
liberté du ministère provient de la liberté du Saint-Esprit de distribuer à
chacun en particulier comme il lui plaît (1 Cor. 12:11). Mais nous ne sommes
pas le Saint-Esprit ; et si l’usurpation de sa place par un seul individu
est une chose intolérable, que dira-t-on de l’usurpation de sa place par un
certain nombre d’individus, agissant parce qu’il y a liberté d’agir, et non
parce qu’ils savent qu’ils ne font que se conformer à la direction du
Saint-Esprit en agissant comme ils le font ? Une foi réelle en la présence
du Seigneur mettrait ordre à toutes ces choses. Ce n’est pas que l’on doive
désirer le silence pour soi, ou que quelqu’un doive s’abstenir d’agir,
uniquement à cause de la présence de tel ou tel frère. J’aimerais tout autant
qu’il y eût toute sorte de désordres, afin que l’état réel des choses se
manifestât, que de le sentir contenu par la présence d’un individu. Ce qui est
à désirer, c’est que la présence du Saint-Esprit soit réalisée de telle sorte
que personne ne rompe le silence que sous sa direction ; et que le
sentiment de sa présence nous garde ainsi de tout ce qui est indigne de lui et
du nom de Jésus qui nous rassemble.
Sous une autre dispensation, nous lisons l’exhortation suivante : « Prends garde à ton pied, quand tu vas dans la maison de Dieu ; et approche-toi pour entendre, plutôt que pour donner le sacrifice des sots ; car ils ne savent pas qu’ils font mal. Ne te presse point de ta bouche, et que ton cœur ne se hâte point de proférer une parole devant Dieu ; car Dieu est dans les cieux, et toi sur la terre : c’est pourquoi, que tes paroles soient peu nombreuses » (Éccl. 5:1-2). Certes, si la grâce dans laquelle nous sommes, nous a donné un plus libre accès auprès de Dieu, nous ne devons pas user de cette liberté, comme d’une excuse pour le manque de respect et pour la précipitation. La présence réelle du Seigneur au milieu de nous devrait certainement être un motif plus pressant encore à une sainte révérence et à une pieuse crainte, que la considération que Dieu est au ciel et nous sur la terre. « C’est pourquoi, recevant un royaume inébranlable, retenons la grâce par laquelle nous servions Dieu d’une manière qui lui soit agréable, avec révérence et avec crainte ; car aussi notre Dieu est un feu consumant » (Héb. 12:28-29).
Espérant reprendre ce sujet, je suis, chers frères, votre indigne serviteur en Christ
* * *
Quelque importante que soit la doctrine de la présence et de l’action du Saint-Esprit dans l’Église, il ne faudrait pourtant pas la confondre avec celle de la présence personnelle du Seigneur Jésus dans l’assemblée des deux ou trois réunis en Son nom.
Quelques-uns ont pensé que le Seigneur était présent dans l’assemblée par son Esprit, ne distinguant pas entre la présence personnelle du Seigneur et celle du Saint-Esprit. Celui-ci administre et dirige ; il n’est pas souverain. C’est le Seigneur qui est souverain.
Le Seigneur dit du Consolateur, l’Esprit de vérité : « Il ne parlera pas de par lui-même… Celui-là me glorifiera… Il prendra de ce qui est à moi, et vous l’annoncera, etc. » Mais le Seigneur promet de se trouver lui-même là ou deux ou trois sont assemblés en son nom. Il est au milieu de ceux pour lesquels Lui s’est donné lui-même, tandis que le Saint-Esprit a été donné, et ne s’est pas donné lui-même.
Il est de toute importance de retenir la vérité de la présence et de l’action du Saint-Esprit dans l’assemblée. Ce fait a été perdu de vue par l’Église, et c’est ce qui a été sa ruine. Elle a substitué le clergé à la présence et à l’action du Saint-Esprit.
Il ne faudrait pas cependant que l’attachement à cette vérité tendît à faire méconnaître la présence personnelle et effective du Seigneur Jésus au milieu de l’assemblée.
En Matt. 18:20, le Seigneur ne dit pas : « Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, l’Esprit est là au milieu d’eux » (quelque vrai et béni que cela soit), mais : « Je suis là au milieu d’eux ».
C’est une grande perte pour l’âme et pour l’assemblée, si la
présence personnelle du Seigneur, comme Seigneur
, est remplacée par
celle du Saint-Esprit, qui n’est pas Seigneur, mais Paraclet
; qui administre et dirige.
En Éphésiens 4:4-6, nous avons, au v. 4, l’unité
vitale ; au v, 5, l’unité de profession ; au v. 6, l’unité
extérieure et universelle ; la première, en rapport avec le seul
Esprit ; la seconde, avec le seul Seigneur ;
la troisième, avec le seul Dieu. La première unité comprend tous ceux qui
ont la vie ; la seconde, tous ceux qui professent le nom de Christ ;
ceux donc qui ont la vie s’y trouvent en première ligne, mais cette seconde
sphère peut embrasser ce qui n’est pas vital. La troisième unité, v. 6,
comprend universellement tous les hommes, mais les enfants de Dieu y sont au
premier rang ; Dieu est leur Père, et il est en eux, tout en étant
extérieurement au-dessus de tout et partout. Nous disons que la seconde unité
(v. 5) est en rapport avec le seul Seigneur ;
il a autorité sur tous ceux qui se réclament de son nom, qu’ils aient la
vie ou qu’ils n’aient que la profession. « Tous ceux qui en tout lieu invoquent
le nom de notre Seigneur
Jésus-Christ,
et leur Seigneur
et le nôtre » (1 Cor.
1:2).
En 1 Cor. 12:4-6, nous trouvons les trois mêmes choses :
l’Esprit, le Seigneur, et Dieu. Il y a diversité de dons, mais le même Esprit.
Et s’il y a diversité de dons, il y a par conséquent diversité de services, et
le même Seigneur.
Les serviteurs ont
reçu de l’Esprit la distribution de leurs dons (v. 11), et ils accomplissent
leurs services sous la direction de l’Esprit ; mais comme serviteurs, ils
sont sous l’autorité de leur Seigneur,
qui
n’est pas l’Esprit, mais qui est Jésus. L’Esprit distribue et dirige les
services, mais les serviteurs sont serviteurs du Seigneur.
De même, s’il s’agit de la cène, elle est la cène du Seigneur.
C’est la mort du Seigneur
qui y est annoncée, c’est la
coupe du Seigneur,
c’est la table du Seigneur
(en contraste avec celle des
démons). C’est donc Lui qui a l’autorité là, pour déterminer qui sont ceux qui doivent
y prendre part (1 Cor. 11).
Remarquons toutefois, que c’est par l’Esprit Saint seulement,
que l’on peut dire : « Seigneur Jésus » (
1
Cor. 12:3).
Mais sans le vouloir, on peut méconnaître l’autorité du Seigneur
dans l’assemblée, et y substituer celle du Saint-Esprit qui n’est pas Seigneur,
mais qui administre de la part
de celui qui est Seigneur.
L’église du moyen age était tombée dans un autre extrême, en substituant l’administration de l’homme à celle du Saint-Esprit.
Il est bien de remarquer qu’en Matt. 18:18-20, le Seigneur ne parle pas de l’Esprit. Il s’agit de son autorité à lui le Seigneur, de son nom, et de sa présence personnelle. Sans doute, tout cela est réalisé sous la direction du Saint-Esprit, mais l’on n’est pas réuni au nom du Saint-Esprit ni autour de lui. Si l’on ne pense qu’à la présence du Saint-Esprit, on perd la vérité de la présence personnelle du Seigneur dans l’assemblée, et l’on est obligé de faire Seigneur le Saint-Esprit. Mais par contre, on ne peut posséder la vérité de la présence personnelle du Seigneur comme souverain, sans avoir celle de la présence et de l’action de l’Esprit comme celui qui administre de la part du Seigneur qui est souverain, et alors on a tout ce qu’il faut.
Une autre remarque, qui fait ressortir ce qui distingue la
présence du Saint-Esprit, de la présence personnelle du Seigneur dans
l’assemblée des deux ou trois réunis en son nom, c’est que le Saint-Esprit peut
se trouver, — attristé hélas ! — là où le Seigneur ne peut se trouver.
Dans une assemblée sectaire, les saints qui la composent ont cependant le
Saint-Esprit en eux et avec eux. Ils peuvent l’ignorer, ne penser qu’à son
influence, et lui y est attristé, mais de fait il ne les laisse pas, il ne s’en
va pas : « Il demeure avec vous, et … sera en vous ». Mais le Seigneur Jésus, lui,
ne peut se trouver présent dans une assemblée sectaire. Il ne s’agit pas, en
Matt. 18:20, de sa toute-présence, car dans ce sens là il est partout
indistinctement, mais s’il s’agit d’assemblées
religieuses,
le Seigneur n’a pas promis d’être dans toutes, mais
exclusivement là où son nom est le centre et la base du rassemblement : « Là où
deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis là au milieu d’eux ». Et s’il
est là, c’est lui qui a l’autorité, et l’Esprit l’administration.
Oh ! si nous avions le sentiment
intime que le Seigneur est là comme Seigneur,
que nous sommes là chez lui, quelle influence solennelle cela exercerait
sur nos cœurs, et en même temps quelle sécurité et quel repos ! Combien
alors le Saint Esprit serait libre de nous administrer les bénédictions de
Christ, prenant de ce qui est au Seigneur pour nous l’annoncer.
Quel immense privilège d’être rassemblés par le nom glorieux de
Celui qui est venu, de Celui qui est mort, de Celui qui est ressuscité, de Celui
qui est glorifié à la droite de Dieu, de Celui qui nous a envoyé le
Consolateur, de Celui qui de là vient nous chercher ! — Oui, c’est ce nom
glorieux qui est la base du rassemblement dont il dit : « Je suis là au milieu
d’eux ! » Ce Seigneur, corporellement absent, se trouve spirituellement
présent d’une manière positive (et non seulement par son Esprit), au milieu de
ceux que son nom a réunis. Il est là et pas ailleurs, s’il s’agit d’assemblées,
et quelle sécurité que là il soit Seigneur !
Bien-aimés frères,
En revenant au sujet sur lequel je vous écrivis dernièrement, je voudrais vous présenter l’extrait suivant d’un traité, écrit il y a au moins neuf ou dix ans. L’auteur, si je suis bien informé, est un frère qui a été grandement honoré de Dieu parmi nous, et qui est connu personnellement de la plupart d’entre vous. Le traité est sous la forme d’un dialogue.
E. —
J’ai appris que
vous affirmez que chaque frère est capable d’enseigner dans l’assemblée des
saints.
W. — Si je disais cela, je nierais le Saint-Esprit. Personne n’est capable d’enseigner dans l’assemblée des saints, s’il n’a pas reçu de Dieu un don particulier pour cela.
E. —
Bien, mais vous
croyez que tout frère a le
droit
de
parler dans l’assemblée, s’il le peut.
W. — Non, certainement pas. Je nie ce droit
à qui que ce
soit, comme un droit. Un homme peut être naturellement très capable de parler
et de bien
parler, mais s’il ne peut
pas « plaire à son prochain, en vue du bien, pour l’édification », le
Saint-Esprit ne l’a pas qualifié pour parler ; et s’il le fait, il
déshonore Dieu son Père, il contriste l’Esprit, et méprise l’Église de
Christ ; et de plus, il ne fait que manifester sa propre volonté.
E. — Quelle est donc votre vue particulière là-dessus ?
W. — Pensez-vous que ce soit une vue à moi particulière, de croire que, comme l’Église appartient à Christ, il lui a accordé des dons, par lesquels seuls elle doit être édifiée et gouvernée, afin que son attention ne soit pas mal dirigée et son temps mal employé, en écoutant ce qui ne lui serait pas profitable, quelque bien dit que ce pût être ?
E. —
Non, j’admets
cela, et je désirerais seulement que l’on ambitionnât davantage ces dons de
Dieu, et que l’on mît plus de soin à combattre l’usage de tous les autres
moyens, quelque crédit que puissent leur donner l’éloquence ou le patronage
humain.
W. — Je soutiens encore que le Saint-Esprit donne des dons à qui il lui plaît, et les dons qu’il lui plaît ; et que les saints devraient être tellement unis ensemble, que les dons d’un frère ne devraient jamais rendre irrégulier l’exercice des dons d’un autre, et que la porte fût ouverte aux petits dons aussi bien qu’aux grands.
E. —
Cela va sans
dire.
W. — Pas du tout ; car ni dans l’église nationale ni chez les dissidents, on ne trouve 1 Cor. 14, mis en pratique. En outre, j’affirme qu’aucun don de Dieu n’a à attendre la sanction de l’Église pour être exercé. S’il est de Dieu, Dieu l’accréditera et les saints en reconnaîtront la valeur.
E. —
Admettez-vous un
ministère régulier ?
W. — Si, par un ministère régulier, vous entendez un ministère constaté
(c’est-à-dire que, dans chaque
assemblée, ceux qui ont reçu des dons de Dieu pour l’édification, soient en
nombre limité et connus des autres) je l’admets : mais si, par un ministère régulier
, vous entendez un ministère exclusif
,
je n’en veux pas. Par un ministère exclusif,
j’entends la reconnaissance de certaines personnes comme occupant si exclusivement
la place de docteurs, que l’exercice de dons réels par quelqu’un d’autre
deviendrait irrégulier,
comme, par
exemple, dans l’église nationale et dans la plupart des chapelles dissidentes,
où l’on regarderait comme irrégulier,
un
service accompli par deux ou trois personnes réellement douées par le
Saint-Esprit.
E. — Sur quoi fondez-vous cette distinction ?
W. — Sur Act. 13:1. Je vois qu’il y
avait à Antioche cinq personnes surtout, reconnues par le Saint-Esprit comme
propres à enseigner : Barnabas, Siméon, Lucius, Manahem et Saul. Sans doute que, dans toutes les réunions,
c’étaient ces cinq, que les saints s’attendaient à entendre parler. C’était là
un ministère constaté ;
mais non
pas un ministère exclusif : car
quand Judas et Silas vinrent (15:32), ils purent sans
difficulté prendre leurs places parmi les autres, et alors les docteurs
reconnus furent plus nombreux.
E. —
Mais quel rapport
cela aurait-il avec l’indication d’un cantique, etc., ou avec une prière, ou la
lecture d’une portion de l’Écriture ?
W. — Tout cela, comme le reste, tomberait sous la direction du Saint-Esprit. Malheur à l’homme qui, uniquement par volonté propre, indiquerait un hymne, ou ferait une prière, ou lirait l’Écriture dans une assemblée, sans être conduit par le Saint Esprit ! En agissant ainsi dans l’assemblée des saints, il fait profession d’être dirigé par le Saint Esprit ; et cette profession, lorsqu’elle n’est pas vraie, est quelque chose de très présomptueux. Si les saints savent ce que c’est que la communion, ils sauront aussi combien il est difficile de conduire la congrégation dans la prière et dans le chant. S’adresser à Dieu, au nom de l’assemblée, ou proposer à celle-ci un cantique, comme le moyen d’exprimer à Dieu son état réel, demande beaucoup de discernement, ou au moins la direction la plus immédiate de la part de Dieu.
Tel est le jour sous lequel ces sujets étaient envisagés par un
frère, connu, je crois, de la plupart d’entre vous — un des premiers ouvriers
parmi ceux qui, depuis plus de quarante ans, ont cherché à se réunir au nom de
Jésus. À l’appui de l’idée principale de l’extrait ci-dessus — savoir que Dieu
ne désigne jamais tous les saints pour prendre part au ministère public de la
Parole, ou pour conduire le culte d’une assemblée, je voudrais vous renvoyer
premièrement à 1 Cor. 12:29-30: « Tous sont-ils apôtres ? Tous sont-ils
prophètes ? Tous sont-ils docteurs ? Tous font-ils des
miracles ? Tous ont-ils des dons de grâce de guérisons ? Tous
parlent-ils en langues ? Tous interprètent-ils ? » Ces questions
n’auraient pas de sens, s’il n’eût pas été évident, que de telles places dans
le corps n’étaient remplies que par quelques-uns. L’apôtre venait de dire : « Et
Dieu a placé les uns dans l’assemblée : d’abord des apôtres, en second
lieu des prophètes, en troisième lieu des docteurs, ensuite des miracles », etc.
Après quoi il dit : « Tous sont-ils apôtres ? » etc. Ainsi, dans la portion
même des Écritures qui traite avec le plus de détails de la souveraineté du
Saint-Esprit, dans la distribution et l’exercice des dons dans le corps,
l’Église ; dans la portion même, à laquelle on en appelle toujours, et
avec raison, pour prouver que la liberté du ministère est ce que Dieu a établi
dans Son Église ; dans cette portion même, il nous est dit que tous
n’étaient pas des frères doués de Dieu, mais que Dieu en
avait établi
dans le Corps ; puis vient l’énumération des différents ordres et espèces
de dons qui les distinguaient.
Voulez-vous prendre maintenant Éph. 4 ? — On a élevé des doutes quand à la possibilité d’agir suivant les principes contenus dans 1 Cor. 12 et 14, en l’absence d’une si grande partie des dons énumérés dans ces chapitres. Je n’ai point moi-même de doutes pareils, et je me bornerai à demander à ceux qui en ont, où se trouvent dans l’Écriture d’autres principes, d’après lesquels nous puissions agir ; et, s’il n’y en a point, quelle autorité nous possédons pour agir suivant des principes qui ne sont nulle part dans l’Écriture ? Mais aucun doute de ce genre ne peut exister quant à Éph. 4:8-13: « C’est pourquoi il dit : Étant monté en haut, il a emmené captive la captivité, et a donné des dons aux hommes… Et lui, a donné les uns comme apôtres, les autres comme prophètes, les autres comme évangélistes, les autres comme pasteurs et docteurs, en vue du perfectionnement des saints, pour l’œuvre du service, pour l’édification du corps du Christ ». Et remarquez qu’ils sont donnés jusqu’à ce que l’Église soit complète. Aussi longtemps que Christ a sur la terre un Corps, auquel le service de tels hommes est nécessaire, il leur confère les dons de son amour, pour la nourriture et l’entretien de ce Corps : « Jusqu’à ce que nous parvenions tous », etc.
C’est donc par le ministère d’hommes vivants, donnés et appelés pour ce ministère ou ce service, que Christ prend soin de son troupeau et le nourrit, et que le Saint-Esprit opère dans le Corps. Peut-être, il est vrai, ces hommes ont-ils un métier : Paul était un faiseur de tentes ; peut-être sont-ils très loin (plus loin est mieux) de toute espèce de prétentions à une dignité cléricale, à une position officielle ; mais ils n’en constituent pas moins la provision de Christ pour l’édification de ses saints et pour l’appel des âmes ; et la vraie sagesse des saints est de discerner ces dons, là où Christ les a mis, et de les reconnaître à la place qu’il leur a assignée dans son corps. Les reconnaître de cette manière, c’est reconnaître Christ ; refuser de le faire, c’est, à la fois, nous faire tort à nous-mêmes, et déshonorer le Seigneur.
Rappelons-nous aussi que Dieu a mis ces dons dans le Corps, dans
tout le Corps ; que c’est à l’ensemble du Corps que Christ les a donnés,
et que nous ne sommes pas tout le Corps. Supposez que l’Église fût restée
manifestement une, comme elle l’était au temps des apôtres : même alors, il se
pourrait très bien que, dans tel endroit, il n’y eût point d’évangéliste, et,
dans tel autre, point de pasteur ou docteur ; tandis qu’ailleurs, au
contraire, se trouverait plus d’un évangéliste, plus d’un pasteur et docteur.
Mais maintenant que l’Église est tellement dispersée et tellement divisée,
combien ce que nous venons de dire ne doit-il pas être plus vrai des petites
assemblées qui se réunissent ici et là au nom de Jésus ! Le Seigneur Jésus
ne se soucie-t-il plus de son Église, parce qu’elle est divisée,
déchirée ? À Dieu ne plaise ! A-t-il cessé de manifester ses soins
pour elle, en lui accordant les dons nécessaires et convenables ?
Nullement. Mais c’est dans l’unité de tout
le Corps qu’on les trouve :
nous avons besoin de nous rappeler cela. Tous les saints de X… forment l’église
de Dieu de cet endroit ; et il peut y avoir des évangélistes, des pasteurs
et docteurs parmi ceux des membres du Corps qui sont encore dans l’Église
établie, ou au milieu des méthodistes et des dissidents. Quel profit
retirons-nous de leur ministère ? et comment les
saints qui sont avec eux peuvent-ils profiter des dons que Christ a mis au
milieu de nous ?
En exposant ces pensées, bien-aimés frères, mon but a été de
vous faire bien comprendre que, si, parmi les soixante-dix ou quatre-vingts qui
se réunissent à X… au nom du Seigneur, il ne s’en trouve point qui soient ses
dons, selon ce qui est dit dans Éph. 4 ; ou qu’il y en ait seulement deux ou trois, le
fait que nous nous réunissons de cette manière, n’augmentera pas, par lui-même,
le nombre de ces dons. Un frère que Christ lui-même n’a pas fait pasteur ou
évangéliste, ne le deviendra pas en commençant à se réunir là où la présence du
Saint-Esprit et la liberté du ministère sont
reconnues. Et si, parce qu’il y a affranchissement des restrictions humaines,
ceux qui n’ont pas été donnés par Christ à son Église, comme pasteurs, docteurs
ou évangélistes, s’en attribuent la position ou agissent comme tels, en
résultera-t-il de l’édification ? Non, mais, au contraire, de la
confusion ; et « Dieu n’est pas un Dieu de désordre, mais de paix, comme
dans toutes les assemblées des saints ». Si de tels dons manquent au milieu de
nous, confessons notre pauvreté ; si nous en possédons deux ou trois,
soyons-en pleins de gratitude, reconnaissons-les à la place que Dieu leur a
assignée, et prions afin d’obtenir des dons et des ministères plus nombreux et
meilleurs. Mais gardons-nous de supposer que l’action d’un frère quelconque,
que le Seigneur n’a pas lui-même établi dans cette position, puisse remplacer
un don. L’unique effet d’une telle action est d’attrister l’Esprit, et de
l’empêcher d’agir par le moyen de ceux qu’il emploierait, sans cela, au service
des saints.
Une heureuse pensée se présente à moi, en terminant cette lettre. Si la position dans laquelle nous sommes ne répondait nullement à ce qui se trouve dans l’Écriture, de telles questions s’élèveraient difficilement au milieu de nous. Lorsque tout est arrangé, réglé par un système humain, que des hommes établis par un évêque, une conférence ou une congrégation, n’ont qu’à se conformer, dans leurs offices, à une routine prescrite par les règles auxquelles ils sont soumis, de telles questions n’ont point de raison d’être. Les difficultés mêmes de notre position prouvent, par leur caractère, que cette position est de Dieu. Oui, et Dieu, qui nous y a amenés par son Esprit, par le moyen de la Parole, est pleinement suffisant, et ne nous fera pas défaut dans les difficultés ; mais il nous les fera traverser d’une manière profitable pour nous et pour sa propre gloire. Soyons seulement simples, humbles et modestes. Ne prétendons pas à quelque chose de plus que ce que nous possédons, ou avoir à faire ce pour quoi Dieu ne nous a pas qualifiés. Je réserve quelques points de détail pour une autre lettre.
En attendant, je reste votre affectionné en Christ.
* * *
Bien-aimés frères,
Il est deux points sur lesquels je désire me faire clairement
comprendre, avant d’aborder le sujet spécial de cette lettre. Premièrement, la
différence qui existe entre le ministère et le culte. Je prends ici le mot culte
dans son sens le plus étendu,
comme désignant les diverses manières dont l’homme s’adresse à Dieu : la prière,
la confession, et ce qui est plus
proprement
le culte, savoir, l’adoration, l’action de grâces et la louange.
La différence essentielle entre le ministère et le culte, c’est que dans
celui-ci l’homme parle à Dieu, et que dans celui-là Dieu parle aux hommes par
ses serviteurs. Notre unique titre, mais pleinement suffisant, pour pouvoir
rendre culte, est cette surabondante grâce de Dieu, laquelle nous a tellement
rapprochés par le sang de Jésus, que maintenant nous connaissons et adorons
Dieu comme notre Père, et que nous sommes rois et sacrificateurs à Dieu. À cet
égard, tous les saints sont égaux : le plus faible et le plus fort, celui qui a
le plus d’expérience et celui qui n’est encore qu’un petit enfant, ont tous la
même part à ce privilège. Le serviteur de Christ le plus doué ne possède pas
plus de droit à s’approcher de Dieu, que le plus ignorant d’entre les saints
parmi lesquels il exerce son ministère. Admettre le contraire serait agir comme
on ne l’a que trop fait dans toute la chrétienté, c’est-à-dire instituer un
ordre de sacrificateurs ou de prêtres entre l’Église et Dieu. Nous avons un
grand Souverain Sacrificateur. La seule sacrificature qui existe actuellement à
côté de la sienne, est cette sacrificature que tous les saints partagent, et
qu’ils partagent tous également. Aussi ne pourrais-je pas supposer que, dans
une assemblée de chrétiens, ceux que Dieu a qualifiés pour enseigner, pour
exhorter ou pour prêcher l’Évangile, fussent seuls appelés à indiquer des
hymnes, à prier, à louer Dieu, à lui rendre grâces (j’entends l’expression
de l’action de grâces, de
la louange, etc.). Il se peut que Dieu se serve d’autres frères, ou pour
indiquer un hymne qui soit l’expression vraie de l’adoration de
l’assemblée ; ou pour exprimer, dans des prières, les désirs réels et les
vrais besoins de ceux dont ils font profession d’être l’organe ou la bouche. Et
si Dieu trouve bon d’agir de cette manière, qui sommes-nous pour nous opposer à
sa volonté ? Toutefois souvenons-nous bien que, si ces actes de culte ne
peuvent être le privilège exclusif de ceux qui ont des dons, il faut qu’ils
soient subordonnés à la direction du Saint-Esprit ; et ils sont tous régis
par les principes contenus dans 1 Cor. 14, d’après lesquels toutes choses
doivent se faire avec ordre et pour l’édification.
Le ministère (c’est-à-dire le ministère de la Parole, dans
lequel Dieu parle aux hommes par le moyen de ses serviteurs) est le résultat du
dépôt spécial, dans l’individu, d’un don ou de dons, de l’usage desquels il est
responsable envers Christ. Notre droit à rendre culte est ce en quoi nous sommes
tous égaux ;
la responsabilité
du ministère découle de ce en quoi nous différons
. « Or, ayant des dons de grâce différents,
selon la grâce qui nous a
été donnée… » (Rom. 12:6). Ce passage établit, de lui-même, la différence dont
je parle entre le ministère et le culte.
Le second point est la liberté du ministère. La vraie idée,
l’idée scripturaire de liberté du ministère, ne comprend pas seulement la
liberté dans l’exercice des dons, mais aussi pour leur développement. Elle
implique que nous reconnaissons dans nos assemblées la présence et l’action de
l’Esprit, à tel point que nous ne mettons aucun obstacle quelconque à cette action,
par qui il veut ; il
est donc parfaitement clair que le premier développement d’un don doit être
l’œuvre de l’Esprit, commençant à agir par des frères qu’il n’employait pas
ainsi auparavant. Tout principe contraire serait, il me semble, également
attentatoire aux privilèges de l’Église et aux droits du Seigneur. Mais alors,
il est évident que, si les enfants de Dieu se réunissent sur un principe qui
laisse au Saint Esprit la liberté d’agir par tel frère pour indiquer un
cantique, par tel autre pour prier, par un troisième pour donner une parole
d’exhortation ou une doctrine ; et si l’Esprit doit de même être laissé
libre de développer des dons pour l’édification du corps ; il est évident,
dis-je, que cela ne peut avoir lieu sans que, par là même, l’occasion ne soit
fournie à la précipitation et à la suffisance, d’agir en dehors de toute
direction de l’Esprit. De là l’importance de savoir comment on peut distinguer
entre ce qui est de la chair et ce qui est de l’Esprit. Je déteste l’abus que
l’on fait trop souvent d’expressions telles que « le ministère de la chair » et
« le ministère de l’Esprit » ; cependant elles renferment une bien
importante vérité, quand on les emploie avec justesse. Chaque chrétien a au
dedans de lui deux sources de pensées, de sentiments, de motifs, de paroles et
d’actions, et ces deux sources sont appelées dans l’Écriture « la chair » et
« l’Esprit ». Notre action dans les assemblées des saints peut provenir de l’une
ou de l’autre de ces sources. Il est donc très important de savoir bien
distinguer entre elles ; il est important pour ceux qui agissent dans les
assemblées, soit habituellement soit par occasion, de se juger eux-mêmes à cet
égard ; c’est une chose essentielle pour tous les saints, puisque nous
sommes exhortés à « éprouver les esprits » ; ce qui peut parfois placer
l’assemblée sous la responsabilité de reconnaître ce qui est de Dieu, et de
signaler en le repoussant ce qui procéderait d’une autre source.
C’est sur quelques-unes des principales marques à l’aide desquelles nous pouvons distinguer la direction de l’Esprit des prétentions et des contrefaçons de la chair, que je désirerais maintenant attirer votre attention. Et d’abord, je voudrais mentionner plusieurs choses qui ne sont pas pour nous une autorisation à prendre part à la direction des assemblées des saints.
1°. On n’est pas autorisé à agir, simplement parce qu’il y a liberté d’agir. La chose est tellement évidente qu’il n’est nullement besoin de la démontrer ; et cependant nous avons besoin qu’on nous en fasse souvenir. Le fait qu’aucun obstacle formel ne s’oppose à ce que chaque frère agisse dans l’assemblée, donne la possibilité à ceux dont l’unique capacité est de savoir lire, de prendre une grande partie du temps en lisant chapitre après chapitre et indiquant hymne après hymne. Tout enfant qui a appris à lire pourrait en faire autant ; et, en vérité, peu de frères au milieu de nous seraient incapables de diriger les assemblées, si toute la capacité requise consistait à savoir lire comme il faut des chapitres et des hymnes. Il est assez facile de lire un chapitre ; mais discerner celui qu’il convient de lire et le moment convenable pour le lire, c’est tout autre chose. Il n’est pas difficile non plus d’indiquer un hymne ; mais en indiquer un qui renferme et exprime réellement l’adoration de l’assemblée, voilà ce qu’il est impossible de faire sans la direction du Saint Esprit. Je vous l’avoue, mes frères, lorsque, il y a quelque temps (non pas dernièrement, grâce à Dieu), nous avions lu cinq ou six chapitres et chanté autant d’hymnes autour de la table du Seigneur, et prié ou rendu grâces peut-être une seule fois, je me demandais si nous avions été réunis pour annoncer la mort du Seigneur, ou bien pour nous perfectionner dans la lecture et dans le chant. Je bénis Dieu sincèrement des progrès qui ont eu lieu à cet égard depuis quelques mois ; toutefois il est bon que nous nous rappelions sans cesse que la liberté d’agir dans les assemblées ne nous autorise pas à y agir à notre gré.
2°. On n’est pas suffisamment autorisé à agir dans tel ou tel
moment, parce que aucun autre frère ne le fait. Le silence ayant pour but le
silence ne peut être trop évité ; rien n’empêche qu’il ne devienne une
forme tout aussi bien qu’autre chose ; mais le silence vaut mieux encore
que ce qu’on dirait ou ferait simplement pour le rompre. Je sais bien ce que
c’est que de penser aux personnes présentes qui ne sont pas de l’assemblée,
peut-être même pas converties, et de se sentir mal à l’aise du silence à cause
d’elles. Lorsqu’un tel état de choses est fréquent ou habituel, il est possible
que ce soit un appel sérieux de Dieu à rechercher d’où cela peut
provenir ; mais jamais cela ne peut autoriser un frère, à parler, à prier
ou à indiquer un hymne, dans l’unique but
que l’on fasse quelque chose.
3°. De plus, nos expériences et notre état individuels, ne sont
pas des guides sûrs quant à la part d’action que nous pouvons prendre dans les
assemblées des saints. Il se peut qu’un hymne ait été d’une grande douceur pour
mon âme, ou que je l’aie entendu chanter ailleurs avec une grande jouissance de
la présence du Seigneur ; mais dois-je en conclure que je suis appelé à
indiquer cet hymne dans la première réunion à laquelle j’assisterai ? Il
est possible qu’il ne soit nullement en rapport avec l’état actuel de
l’assemblée. Peut-être aussi ne serait-ce point du tout
l’intention de l’Esprit qu’un hymne fût chanté. « Quelqu’un parmi vous est-il
maltraité ? qu’il prie. Quelqu’un est-il
joyeux ? qu’il chante des cantiques » (Jacq. 5:13). Un hymne doit exprimer les sentiments de ceux
qui sont réunis ; autrement, en le chantant, ils ne seront pas sincères.
Et qui pourra faire trouver un tel hymne, sinon Celui qui connaît l’état actuel
de l’assemblée ? Il en est de même quant à la prière : si quelqu’un prie
dans l’assemblée, c’est comme l’organe des requêtes et de l’expression de tous.
Je puis avoir à me décharger sur le Seigneur, au moyen de la prière, de
fardeaux à moi particuliers, qu’il ne conviendrait nullement de mentionner dans
l’assemblée. Si j’agissais de cette manière, l’unique effet en serait,
probablement, de rabaisser tous mes frères au même niveau que moi. D’un autre
côté, il se peut que mon âme soit parfaitement heureuse dans le Seigneur ;
mais, s’il n’en est pas ainsi de l’assemblée, c’est seulement en m’identifiant
avec son état à elle, que je serai rendu capable de présenter ses requêtes à
Dieu. C’est-à-dire que, si je suis dirigé par l’Esprit à prier dans
l’assemblée, ce ne devra pas être comme dans mon cabinet, où nul ne se trouve,
excepté le Seigneur et moi, et où mes propres besoins et mes propres joies
forment le sujet spécial de mes prières et de mes actions de grâces ; mais
il faudra que je sois rendu capable de faire au Seigneur les confessions, et de
lui présenter les actions de grâces et les requêtes qui s’accordent avec l’état
de ceux dont je deviens la bouche, en m’adressant ainsi à Dieu. Une des plus
grandes méprises que nous puissions faire, c’est de nous imaginer que le moi
et ce qui se rapporte au moi,
doive nous
guider dans la direction des assemblées des saints. Une portion de l’Écriture
peut avoir intéressé à un haut degré mon âme, et je puis en avoir
profité ; mais il ne s’ensuit pas que je doive la lire à la table du
Seigneur ou dans d’autres réunions des saints. Il se peut aussi que quelque
sujet particulier m’occupe ou me préoccupe, et que ce soit pour le bien de mon
âme ; mais il se peut, en même temps, que ce ne soit pas du tout le sujet
sur lequel Dieu veut que l’attention des saints en général soit attirée.
Remarquez-le, je ne nie pas que nous ne puissions avoir été occupés
spécialement, nous-mêmes, de sujets dont la volonté de Dieu serait que nous
occupions aussi les saints. Peut-être en est-il souvent, ou même ordinairement
ainsi chez les serviteurs de Dieu ? mais ce que
je ne crains pas d’affirmer, c’est que, en soi-même,
le fait que nous avons été occupés de cette manière n’est pas une direction
suffisante. Nous pouvons avoir des besoins que les enfants de Dieu en général
n’ont pas, et pareillement leurs besoins peuvent ne pas être les nôtres.
Permettez-moi d’ajouter que l’Esprit ne me dirigera jamais à indiquer des hymnes, parce qu’ils expriment mes vues particulières. Il se peut que, sur certains points d’interprétation, les saints qui se réunissent ensemble ne soient pas entièrement du même avis. Dans ce cas, si quelques-uns d’entre eux choisissent des hymnes dans le dessein d’exprimer leur propre opinion, — quelque bons et vrais que soient d’ailleurs ces hymnes, — il est impossible que les autres membres de l’assemblée les chantent ; et, au lieu d’harmonie, il en résulte du désaccord. Dans une réunion de culte, les hymnes que l’Esprit de Dieu fera choisir seront l’expression des sentiments communs à tous. En tout temps, mais en tout cas dans l’assemblée, empressons-nous « de conserver l’unité de l’Esprit par le lien de la paix » ; et souvenons-nous que le moyen d’y parvenir, c’est de marcher « avec toute humilité et douceur, avec longanimité, nous supportant l’un l’autre dans l’amour ».
Laissez-moi vous rappeler ici que, dans le chant, dans la prière, dans le culte en un mot, quel que puisse être l’organe ou la bouche de l’assemblée, c’est l’assemblée qui parle à Dieu ; par conséquent le culte ne sera vrai, sincère, qu’autant qu’il ne dépassera pas, mais exprimera fidèlement l’état de cette assemblée. Béni soit Dieu, de ce qu’il peut, par son Esprit, faire entendre une note plus haute (et il le fait souvent) qui vibre immédiatement dans tous les cœurs, et de ce qu’il donne ainsi au culte un ton plus élevé. Mais si l’assemblée n’est pas en état de répondre tout de suite à ce diapason de louange, rien ne peut être plus pénible que d’entendre un frère se répandre en ardents accents d’actions de grâces et d’adoration, tandis que les autres cœurs sont tristes, froids et distraits. Celui qui exprime le culte de l’assemblée doit avoir avec lui les cœurs de l’assemblée ; sans cela, on n’est pas dans le vrai. D’un autre côté, puisque c’est Dieu qui nous parle dans le ministère, celui-ci n’est pas, comme le culte, limité par notre état ; il peut toujours être à un degré plus élevé. Si un frère employé dans le ministère est réellement, en parlant, la bouche de Dieu, comme il doit l’être, ce sera souvent pour nous présenter des vérités que nous n’avons pas encore reçues, ou pour nous en rappeler d’autres qui ont cessé d’agir avec puissance sur nos âmes. Combien il est évident que, dans l’un et l’autre de ces cas, et dans tous les cas, il faut que ce soit l’Esprit de Dieu qui dirige.
Je trouve qu’il vaut mieux laisser pour une autre lettre ce qui distingue la direction positive de l’Esprit. Je n’ai présenté jusqu’ici que la partie négative de ce sujet.
Je suis, bien-aimés frères, votre affectionné en Christ.
* * *
L’homme qui tenterait de définir les opérations de l’Esprit dans le réveil ou dans la conversion d’une âme, ne ferait que trahir sa propre ignorance, et nierait, de plus, cette souveraineté de l’Esprit déclarée dans ces paroles bien connues : « Le vent souffle où il veut, et tu en entends le son ; mais tu ne sais d’où il vient, ni où il va ; il en est ainsi de tout homme qui est né de l’Esprit ». Et cependant l’Écriture abonde en signes, qui peuvent servir à reconnaître ceux qui sont nés de l’Esprit et ceux qui ne le sont pas. Il en est de même du sujet de cette lettre. J’espère être préservé du danger d’usurper la place du Saint Esprit, en croyant pouvoir définir exactement le mode de ses opérations sur les âmes de ceux qu’il dirige pour agir dans l’assemblée, soit dans le culte, soit en exerçant un ministère au milieu des saints. La chose peut être, dans certains cas, beaucoup plus claire et beaucoup plus sensible que dans d’autres (je veux dire, sensible à celui qui est ainsi appelé à agir). Mais, quelque vain et présomptueux qu’il pût être de chercher à donner une vraie et complète définition sur ce sujet, l’Écriture nous offre d’amples instructions touchant les marques du vrai ministère ; et c’est sur quelques-unes des plus simples et des plus évidentes de ces marques que je désire maintenant attirer votre attention. Il en est qui s’appliquent à la matière qui est l’objet du ministère ; et d’autres qui concernent les motifs qui nous portent à agir dans le ministère, ou à prendre une part quelconque à la direction des assemblées des saints. Les unes fourniront à ceux qui agissent ainsi, une pierre de touche, au moyen de laquelle ils pourront se juger eux-mêmes ; et à l’aide des autres, tous les saints pourront discerner ce qui est de l’Esprit et ce qui procède d’une autre source. Les unes serviront à montrer ceux qui sont les dons de Christ à son Église pour le ministère de la parole ; et les autres aideront ceux qui sont réellement ces dons-là, à décider l’importante question de savoir quand ils doivent parler et quand ils doivent se taire. Mon âme tremble lorsque je pense à ma responsabilité en écrivant sur un tel sujet ; mais ce qui m’encourage, c’est que « notre capacité vient de Dieu », et que « l’Écriture est utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire dans la justice, afin que l’homme de Dieu soit accompli, et parfaitement accompli pour toute bonne œuvre ». Éprouvez tout ce que je pourrai écrire au moyen de cette règle parfaite, et, si quelque chose ne supportait pas cette épreuve, que Dieu vous accorde la grâce, bien-aimés frères, d’être assez sages pour le rejeter.
Ce n’est point par des impulsions aveugles et des impressions
inintelligentes que l’Esprit dirige,
mais
c’est en remplissant l’entendement spirituel des pensées de Dieu, telles
qu’elles sont révélées dans la parole écrite, et en agissant sur les affections
renouvelées. Dans les premiers temps de l’Église, il y avait, il est vrai, des
dons de Dieu, dont l’emploi pouvait ne pas être lié à l’intelligence
spirituelle. Je veux parler du don des langues, quand il n’y avait pas
d’interprète ; et il paraîtrait que ce don étant aux yeux des hommes plus
merveilleux que les autres, les Corinthiens aimaient beaucoup à l’exercer et à
l’étaler. L’apôtre les en reprend : « Je rends grâces à Dieu de ce que je parle
en langue plus que vous tous ; mais, dans l’assemblée, j’aime mieux
prononcer cinq paroles avec mon intelligence, afin que j’instruise aussi les
autres, que dix mille paroles en langue. Frères, ne soyez pas des enfants dans
vos entendements ; mais, pour la malice, soyez de petits enfants ;
mais, dans vos entendements, soyez des hommes faits » (1 Cor. 14:18-20). Le
moins, donc, qu’on puisse attendre de ceux qui exercent un ministère, c’est
qu’ils connaissent l’Écriture, qu’ils aient l’intelligence de la pensée de Dieu
telle qu’elle est révélée dans la Parole. Cette connaissance, cette intelligence,
remarquez-le, peuvent se trouver chez un frère et n’être accompagnées d’aucun
don d’élocution, d’aucune capacité pour les communiquer à d’autres ; mais
sans elles, qu’aurions-nous à communiquer ? Assurément les enfants de Dieu
ne s’assemblent pas de temps en temps au nom de Jésus, pour qu’on leur présente
des pensées tout humaines, ou pour qu’on leur répète ce que d’autres ont dit ou
écrit. Une connaissance personnelle de l’Écriture, l’intelligence de son
contenu, sont certainement des choses essentielles au
ministère de la Parole. « Jésus leur dit : Avez-vous compris
toutes ces choses ? Ils lui disent
: Oui,
Seigneur. Et il leur dit : C’est pour cela que tout scribe qui a été fait
disciple du royaume des cieux est semblable à un maître de maison qui produit
de son trésor des choses nouvelles et des choses vieilles » (Matt. 13:51-52).
Quand notre Seigneur était sur le point d’envoyer ses disciples pour qu’ils
fussent ses témoins, « il leur ouvrit l’intelligence, pour entendre
les Écritures » (Luc 24:45). Et combien de fois ne
lisons-nous pas que Paul, quand il prêchait aux Juifs, s’entretenait avec eux
d’après les Écritures (Act. 18:2, 4). Si l’apôtre
s’adresse aux Romains comme à des chrétiens capables de s’avertir les uns les
autres, c’est parce qu’il peut dire d’eux : « Or je suis persuadé, mes frères,
moi-même aussi, à votre égard, que vous-mêmes aussi vous êtes pleins de bonté,
remplis de toute connaissance, capables de vous exhorter l’un l’autre » (Rom.
15:14). Dans les portions de l’Écriture qui traitent le plus expressément de
l’action de l’Esprit dans l’assemblée, dans 1 Cor. 12, par exemple, ce n’est
pas à l’exclusion de la Parole,
que
cette action est dite avoir lieu. « Car à l’un est donnée, par l’Esprit, la parole
de sagesse ; et à un autre,
la parole
de connaissance, selon le
même Esprit » (1 Cor. 12:8). Lorsque l’apôtre énumère les choses par lesquelles
lui et d’autres se rendent recommandables comme serviteurs de Dieu, nous
trouvons ce qui suit dans cette admirable liste : « par la connaissance… par la Parole
de la vérité… par les armes de la justice, de la main droite et de la main
gauche » (2 Cor. 6:6, 7) ; et si vous faites attention à ce qui constitue
cette armure, vous trouverez que c’est la vérité qui est une ceinture pour les
reins, et l’épée de l’Esprit qui est la parole de Dieu (Éph.
6:14, 17). L’apôtre, faisant allusion à ce qu’il avait déjà écrit aux
Éphésiens, dit : « D’après quoi, en le lisant, vous pouvez comprendre quelle est
mon intelligence dans le mystère du Christ » (Éph.
3:4). Quand le même apôtre presse les saints de s’exhorter les uns les autres,
voyez ce qu’il mentionne avant tout, comme une condition essentielle et
préalable pour cela : « Que la parole du Christ habite en vous richement, — en
toute sagesse, vous enseignant et vous exhortant l’un l’autre, par des psaumes,
des hymnes, des cantiques spirituels, chantant de vos cœurs à Dieu dans un
esprit de grâce » (Col. 3:16). Il dit de même à Timothée : « En proposant ces
choses aux frères, tu seras un bon serviteur de Jésus-Christ, nourri dans les
paroles de la foi et de la bonne doctrine que tu as pleinement comprise ». Et il
l’exhorte, en disant : « Jusqu’à ce que je vienne, attache-toi à la lecture, à
l’exhortation, à l’enseignement… Occupe-toi de ces choses ; sois-y tout
entier, afin que tes progrès soient évidents à tous », « Sois attentif à toi-même
et à l’enseignement ; persévère dans ces choses, car en faisant ainsi tu
te sauveras toi-même et ceux qui t’écoutent » (1 Tim. 4:6, 13, 15, 16). Dans la
seconde épître, Timothée est exhorté de cette manière : « Et les choses que tu as
entendues de moi devant plusieurs témoins, commets-les à des hommes fidèles qui
soient capables d’instruire aussi les autres » (2:2). Et, quant à Timothée
lui-même, nous lisons : « Étudie-toi à te présenter approuvé à Dieu, ouvrier qui
n’a pas à avoir honte, exposant justement la parole de la vérité » (v. 15).
Parmi les qualités requises pour être évêque ou surveillant, telles qu’elles
sont mentionnées dans Tite 1, nous trouvons ceci : « Tenant ferme la fidèle
parole selon la doctrine, afin qu’il soit capable tant d’exhorter par un sain
enseignement que de réfuter les contredisants ». Tout ce qui précède prouve avec
évidence, mes frères, que ce n’est pas seulement par de petits fragments de
vérité, présentés toutes les fois que nous nous sentons pressés de le faire,
que l’Église peut être édifiée (*). Non, les
frères par le moyen desquels le Saint-Esprit agit pour paître, nourrir, et
conduire les saints de Dieu, sont ceux dont l’âme est habituellement exercée
par la méditation de la Parole ; ceux « qui, par le fait de l’habitude, ont
les sens exercés à discerner le bien et le mal » (Héb.
5:14). Comme nous l’avons dit, le moins qu’on puisse attendre de ceux qui ont
un ministère dans l’Église, c’est qu’ils aient une telle connaissance de la
parole de Dieu.
(*) À Dieu ne plaise que des frères quelconques pussent être par ces lignes découragés de dire, ne fût-ce que quelques paroles, tendant à une réelle édification ! Mais ceux que le Seigneur emploie ainsi, seraient les derniers à supposer que leur ministère est le seul ministère, ou celui par lequel Dieu subvient principalement aux besoins des saints.
Cependant cette connaissance ne suffit pas ; il faut aussi que la parole de Dieu soit appliquée à la conscience des saints, de telle sorte qu’elle réponde à leurs besoins actuels. Pour cela, il faut ou apprendre à connaître l’état des saints, en ayant des communications avec eux, etc (et cette connaissance ne serait jamais que fort imparfaite), ou bien être directement dirigé de Dieu. Ceci est vrai des frères qui, comme évangélistes, pasteurs et docteurs, sont, dans le sens le plus complet du mot, et le plus manifestement, les dons de Christ à son Église. C’est Dieu seul qui peut leur faire trouver les portions de la vérité qui atteindront la conscience et répondront aux besoins des âmes ; c’est Lui seul qui peut les rendre capables de présenter cette vérité de telle manière qu’elle ait son effet. Dieu connaît les besoins de tous en général et de chacun en particulier dans l’assemblée, et il peut donner à ceux qui parlent de faire entendre la vérité même qui convient, qui est nécessaire ; qu’ils connaissent ou non l’état de ceux auxquels ils s’adressent. Combien n’est-il donc pas important d’être sans réserve et sincèrement soumis à l’Esprit !
Une chose qui devrait distinguer toujours le ministère de l’Esprit, ce seraient des effusions découlant d’une affection personnelle pour Christ. « M’aimes-tu ? » Telle fut la question répétée trois fois à Pierre, en même temps qu’il lui était ordonné, aussi jusqu’à trois fois, de paître le troupeau de Christ. « Car l’amour de Christ nous étreint », dit Paul. Combien ceci diffère de tant de motifs qui pourraient nous influencer naturellement ! Combien il serait important que nous puissions, en bonne conscience, dire chaque fois que nous exerçons quelque ministère : « Ce n’est pas le désir de me mettre en avant, ni la force de l’habitude, ni l’impatience, qui ne peut supporter que l’on ne fasse rien, qui m’a porté à agir ; mais c’est l’amour pour Christ, et pour son troupeau à cause de Celui qui l’a acquis au prix de Son propre sang ». Certainement, c’était là le motif qui manquait au méchant serviteur, qui avait caché dans la terre le talent de son maître.
Outre cela, le ministère de l’Esprit, et toute autre action faite,
dans l’assemblée, sous l’impulsion de ce même Esprit, se distinguerait toujours
par un sentiment profond de responsabilité envers Christ. Laissez-moi vous
adresser une question, mes frères, et me l’adresser aussi à moi-même. Supposez
que quelquefois, à la fin d’une réunion, on nous demandât : « Pourquoi avez-vous
indiqué un tel hymne, ou lu un tel chapitre, ou fait entendre une telle parole,
ou prié de cette manière ? » Pourrions-nous répondre avec une pure et bonne
conscience : « Mon seul motif en le faisant a été la conviction sincère que telle
était la volonté de mon Maître ? » Pourrions-nous dire : « J’ai indiqué cet
hymne, parce que j’avais conscience qu’il répondait à l’intention de l’Esprit
dans ce moment-là ? J’ai lu ce chapitre, ou dit cette parole, parce que je
sentais clairement devant Dieu que c’était là le service que mon Seigneur et
Maître m’assignait ? J’ai prié de cette manière,
parce que j’avais conscience que l’Esprit de Dieu me dirigeait à demander,
comme bouche de l’assemblée, les bénédictions implorées dans cette
prière ? » Mes frères, pourrions-nous répondre cela, — quoique souvent on
le sache mieux après qu’au moment même ? Ou n’agissons-nous pas souvent,
plutôt, sans aucun sentiment de notre responsabilité envers Christ ? « Si
quelqu’un parle, qu’il le fasse comme oracle de Dieu », dit l’apôtre Pierre.
Cela ne signifie pas : qu’il parle selon l’Écriture, quoique naturellement ceci
soit vrai aussi ; ce passage veut dire, ou plutôt dit, que ceux qui
parlent doivent parler comme oracles de
Dieu
. Si je ne puis avoir conscience que Dieu m’a enseigné ce que je fais
entendre à l’assemblée, et que je le dis au moment opportun, je dois me taire.
Naturellement un homme peut se tromper en disant cela, et c’est aux saints de
juger par la parole de Dieu, tout ce qu’ils entendent ; mais rien que la
conviction sincère devant Dieu, que Dieu lui a donné quelque chose à faire ou à
dire, rien que cette conviction ne devrait porter qui que ce soit à parler ou à
agir de quelque autre manière dans les réunions. Si nos consciences agissaient
habituellement sous cette responsabilité, ce serait sans doute un obstacle à
beaucoup de choses ; mais en même temps, Dieu pourrait librement
manifester sa présence, que souvent nous ne réalisons pas assez.
Combien ce sentiment de responsabilité immédiate envers Christ
est frappant chez l’apôtre Paul. « Car si j’évangélise »,
dit-il, « je n’ai pas de quoi me glorifier, car c’est une nécessité
qui m’en est imposée ; car malheur à moi si je n’évangélise pas. Car si je
fais cela volontairement, j’en ai un salaire ; mais si c’est malgré moi,
l’administration m’en est cependant confiée » (1 Cor. 9:16, 17). Et combien sont
touchantes ces paroles qu’il adresse aux mêmes chrétiens : « J’ai été parmi vous,
dans la faiblesse, et dans la crainte, et dans un grand tremblement » (2:3).
Quel reproche pour la légèreté de cœur et la présomption avec lesquelles,
hélas ! nous traitons trop souvent, tous, la
sainte parole de notre Dieu ! « Car nous ne sommes pas comme plusieurs »,
dit encore le même apôtre, « qui frelatent la parole de Dieu ; mais comme
avec sincérité, comme de la part de Dieu, devant Dieu, nous parlons en Christ »
(2 Cor. 2:17).
Je voudrais toucher un autre point. « Dieu ne nous a pas donné un
esprit de crainte, mais de puissance, et d’amour et de conseil (= sobre bons
sens) » (2 Tim. 1:7). « Un esprit de bon sens ». Il est possible qu’un homme ait
peu ou point de science humaine ; il est possible qu’il soit incapable de
s’exprimer d’une manière élégante, ou même correcte ; il est possible
qu’il manque de tout cela, et que, pourtant, il soit « un bon serviteur de
Jésus-Christ ». Mais il faut qu’il possède un esprit de bon sens. Et, pendant
que nous sommes sur ce sujet, m’est-il permis de mentionner une chose qui m’a
quelquefois rendu très triste, ailleurs aussi bien qu’au milieu de nous ?
Je veux parler de la confusion entre les personnes de la Divinité, confusion
qu’on fait souvent dans les prières. Lorsqu’un frère, en commençant à prier,
s’adresse à Dieu le Père,
et continue
en parlant comme si c’était lui qui fût mort et ressuscité ; ou lorsque,
s’adressant à Jésus, il lui rend grâces d’avoir envoyé son Fils unique au
monde, je vous l’avoue, je me dis : « Est-ce l’Esprit de Dieu qui peut inspirer
de telles prières ? » Certainement tous ceux qui agissent dans le culte ont
aussi besoin de l’esprit de « bon sens », pour éviter cette confusion. Aucun
d’eux ne croit que le Père soit mort sur le Calvaire, ni que Christ ait envoyé
son Fils au monde. Où donc se trouve l’esprit rassis, l’esprit intelligent qui
devraient caractériser ceux qui se mettent en avant comme les canaux du culte
des saints, lorsque le langage dont ils se servent exprime réellement ce qu’ils
ne croient pas eux-mêmes, ce qu’il serait choquant de croire !
En réservant encore quelques points pour une autre lettre, je suis votre affectionné en Christ,
* * *
À ce que dit ici l’auteur sur certains défauts des prières, lesquels ne peuvent jamais provenir de l’Esprit de Dieu, l’éditeur se permet d’ajouter quelques mots sur le même sujet.
1° Quand un frère, priant dans l’assemblée, s’adresse au Seigneur, en disant : « Mon Dieu », cela ne peut certes pas davantage venir de l’Esprit, qui identifie avec tous ses frères celui auquel il donne de se lever pour être leur bouche.
2° Quand une prière ou une action de grâces renferme de longues expositions de doctrines, je n’y puis voir, non plus, un effet du Saint-Esprit. Celui qui prie parle à Dieu, et non pas aux frères. Or il ne nous convient nullement de prêcher Dieu.
3° Je doute que des actes du culte, se succédant toujours
dans le même ordre, soient toujours
dus aux directions de l’Esprit.
Est-ce l’Esprit, par exemple, qui veut que toute réunion se termine par une
prière, sans laquelle on n’oserait pas se lever pour sortir ? Sans doute,
une prière finale est tout à fait convenable et à sa place, si c’est Dieu
qui la donne
. Sinon, ce n’est qu’une pauvre forme qui ne vaut guère mieux
qu’une liturgie.
Bien-aimés frères,
Mes remarques dans cette lettre seront plus décousues que dans les lettres précédentes, mon but étant de relever divers points qui ne pouvaient guère entrer aisément dans les sujets que j’ai traités auparavant.
Et d’abord, qu’il me soit permis de vous rappeler que tout ce qui se fait dans une réunion d’édification mutuelle doit être le fruit de la communion. C’est-à-dire que, si je lis un chapitre de la Parole, il ne faut pas que j’aie à feuilleter longtemps ma Bible pour y chercher un chapitre qu’il convienne de lire ; mais, en admettant que je connais plus ou moins cette Parole, il faut que l’Esprit de Dieu m’ait mis au cœur la portion que j’en dois lire. De même, si un hymne doit être chanté, ce ne sera pas parce que j’aurai senti que le moment de chanter était venu, et qu’ainsi j’aurai cherché dans mon Recueil un hymne qui me plaise ; non, mais il faut que, suivant la mesure de connaissance que j’ai du livre d’hymnes, l’Esprit de Dieu m’ait fait souvenir d’un des hymnes et m’ait dirigé à l’indiquer. L’idée d’une demi-douzaine de frères parcourant leurs recueils de cantiques et leurs Bibles pour trouver des chapitres et des hymnes convenables, est aussi subversive que possible du véritable caractère d’une réunion d’édification mutuelle dans la dépendance du Saint-Esprit. Je puis, il est vrai, à cause d’une connaissance imparfaite de ma Bible, avoir besoin de chercher un chapitre que l’Esprit m’a mis au cœur de lire ; et la même chose quand il s’agit d’un hymne ; mais il est clair que c’est le seul but que l’on doive avoir en feuilletant l’un et l’autre de ces livres, lorsqu’on est assemblé sur le principe de la dépendance du Saint-Esprit pour s’édifier mutuellement.
En second lieu, si ce que nous venons de dire était bien compris, il s’ensuivrait, comme une conséquence naturelle, qu’en voyant un frère ouvrir sa Bible ou son livre de cantiques, on saurait qu’il le fait avec la pensée de lire une portion de la Parole, ou d’indiquer un hymne. Le passage : « C’est pourquoi, mes frères, quand vous vous réunissez pour manger, attendez-vous l’un l’autre » (1 Cor. 11:33), empêcherait alors tout autre frère d’avoir l’idée d’agir dans la réunion, jusqu’à ce que celui qui aurait ainsi manifesté son désir de lire, etc., eût mis la chose à exécution ou y eût renoncé. Ceci m’amène au sujet de la dépendance mutuelle, sur lequel nous ferons bien de méditer un moment.
Dans ce chapitre (1 Cor. 11), la question, quant aux
Corinthiens, n’était pas le ministère, mais la manière de prendre la cène du
Seigneur. La question du ministère se présente dans le chapitre 14 ; mais
la racine morale du désordre était la même dans les deux cas. Les Corinthiens
ne discernaient pas le corps, et ainsi chacun d’eux était occupé de sa propre
personne. « Car lorsqu’on mange, chacun prend par avance son propre souper » (v.
21). Il en résultait ce qui suit : « Et l’un a faim et l’autre s’ennivre ». Le principe du moi produisait là des fruits
tellement visibles et tellement monstrueux qu’ils choquaient même les
sentiments naturels. Mais si, en allant aux réunions et en y étant, je ne fais
que penser au chapitre que je lirai, à l’hymne que j’indiquerai, en un mot à la
part que je prendrai au culte, le moi est, dans les choses spirituelles, le
pivot sur lequel tournent mes pensées et mes sollicitudes, tout autant que si,
comme les Corinthiens dans les choses naturelles, j’avais apporté un souper et
que je le mangeasse, tandis que mon pauvre frère qui n’aurait pas pu s’en
procurer un, s’en irait sans avoir soupé. C’est dans l’unité du seul corps
de Christ, vivifié, animé,
enseigné et gouverné par le seul Esprit,
que
nous nous assemblons ; et assurément la pensée de nos cœurs, en nous
réunissant ainsi, ne devrait être ni le souper que j’ai, moi, à manger, ni la part
que j’ai, moi, à prendre à la réunion, mais la bonté et la grâce admirable de
Celui qui nous a confiés à la garde du Saint-Esprit, lequel ne manquera pas, si
nous nous attendons humblement à lui, d’assigner à chacun la place et l’action
qui lui conviennent, sans qu’il doive y avoir en nous aucune préoccupation
fiévreuse à ce sujet. Chaque chrétien n’est qu’un membre du corps de Christ,
et, si les Corinthiens avaient discerné et réalisé cela, certainement celui qui
avait un souper aurait attendu ceux qui n’en avaient point, pour le partager
avec eux. De la même manière, si mon âme réalise cette précieuse unité du
corps, et l’humble place que j’y ai comme en étant seulement un des membres, je
me garderai d’agir dans l’assemblée avec une précipitation qui pourrait
empêcher d’autres saints de le faire ; et, si je sens que j’ai une parole
à adresser de la part du Seigneur, ou qu’il m’appelle à quelque service, je me
souviendrai toujours que d’autres peuvent avoir aussi quelque chose à dire,
avoir reçu le même appel, et je leur laisserai du temps pour agir ; et,
par-dessus tout, si j’aperçois un frère qui a son livre ouvert pour lire une
portion de la Parole ou pour indiquer un hymne, j’attendrai qu’il l’ait fait,
au lieu de me hâter de le prévenir. Ces mots : « Attendez-vous l’un l’autre »,
peuvent s’appliquer à cela aussi bien qu’à la fraction du pain ; et dans
le 14° chapitre nous trouvons que, lorsque des prophètes parlaient dans
l’assemblée par une révélation immédiate, ils devaient être tellement soumis
les uns aux autres que, même quand l’un d’entre eux parlait, si un autre qui
était assis recevait une révélation, le premier devait « se taire ». En outre,
si, comme nous l’avons déjà dit, nous réalisions notre place dans le corps et
l’unité de celui-ci, la portée générale et morale de cette parole : « Que tout
homme soit prompt à écouter, lent à parler » (Jacq.
1:19), nous enseignerait à nous attendre ainsi les uns les autres.
Troisièmement, le but de notre réunion est l’édification ;
c’est là-dessus que l’apôtre insiste dans 1 Cor. 14. Dans le chapitre 12, nous
avons le corps de Christ soumis à lui comme à son Seigneur, et témoin ici-bas
de cette souveraineté de Christ, en vertu de l’habitation et de l’action du
Saint-Esprit, qui distribue ses grâces à chacun en particulier, selon qu’il le
veut ; ce chapitre se terminant par la liste des dons : apôtres, prophètes,
etc., que Dieu a placés dans l’Église dans leurs diverses places d’utilité ou
de service pour tout le corps. Il nous est recommandé d’avoir du zèle pour les
dons les meilleurs, mais en même temps il est fait allusion à un chemin par
excellence, c’est-à-dire la charité ou l’amour, dont parle le chapitre 13, sans
laquelle les dons les plus magnifiques ne sont rien, et qui doit régler
l’exercice de tous les dons, pour que le résultat en soit réellement
l’édification. Celle-ci est le sujet du chapitre 14. Le don des langues étant
le plus merveilleux aux yeux des hommes, les Corinthiens prenaient plaisir à
l’étaler. Au lieu de l’amour cherchant l’édification de tous, c’était la vanité
cherchant à faire parade de ses talents. Ceux-ci étaient réellement des dons,
des dons de l’Esprit ; et c’est ici pour nous, bien-aimés frères, une
chose sérieuse à considérer, que la puissance
de l’Esprit manifestée dans les dons pour le service, peut être séparée de la
direction vivante du même Esprit dans l’exercice de ces dons.
Cette
direction ne peut se faire sentir que là ou le moi est
crucifié, où Christ est tout pour l’âme. Le but du Saint-Esprit n’est pas de
glorifier les pauvres vases de terre qui contiennent ses dons ; mais, et
cela par l’édification de tout le corps, de glorifier Christ de qui ces dons
procèdent, en donnant à ceux qui les ont reçus d’en faire usage avec grâce,
humilité et renoncement à eux-mêmes. Combien ce renoncement à soi-même est beau
dans l’apôtre Paul ! Possédant tous les dons, avec quelle simplicité de
cœur il cherchait, non à les déployer, mais à exalter son Seigneur et à édifier
les saints ! « Je rends grâces à mon Dieu de ce que je parle en langue plus
que vous tous ; mais, dans l’assemblée, j’aime mieux prononcer cinq
paroles, avec mon intelligence, afin d’instruire aussi les autres, que dix
mille paroles en langue ». Combien elles ont de force, sorties de la plume d’un
tel homme, ces paroles du Saint-Esprit : « Que tout se fasse pour l’édification ».
« Ainsi vous aussi, puisque vous désirez avec ardeur des dons de l’Esprit,
cherchez à en être abondamment doués pour l’édification de l’assemblée ».
De plus, tout serviteur, pour être fidèle, doit agir d’après les directions de son maître. De là l’importance de ce sur quoi j’ai tant insisté dans ma dernière lettre, savoir que, si j’agis dans l’assemblée des saints, il ne faut rien moins pour m’y pousser que la pleine et sérieuse conviction dans mon âme, et devant Dieu, que c’est bien selon sa volonté actuelle. « Car, par la grâce qui m’a été donnée, je dis à chacun de ceux qui sont parmi vous de ne pas avoir une haute pensée de lui-même, au-dessus de celle qu’il convient d’avoir, mais de penser de manière à avoir de saines pensées, selon la mesure de foi que Dieu a départie à chacun » (Rom. 12:3). La mesure de foi que Dieu m’a donnée doit être la mesure de ce que je fais ; et Dieu, en leur donnant la mesure de foi nécessaire, aura soin que ses serviteurs sachent ainsi ce qu’il faudra qu’ils fassent. Une conviction ferme et sincère que telle est la volonté de Dieu, peut donc seule m’autoriser à agir comme son serviteur dans l’assemblée, et même partout ailleurs. Cependant, comme on peut faire abus de ce principe, Dieu a pourvu, par la direction contenue dans ce passage : « Que les prophètes parlent, deux ou trois, et que les autres jugent » (1 Cor. 14:29), à ce qu’il y eût un frein à cet abus dans l’assemblée. C’est à mon âme, en premier lieu, de juger et de savoir si le Seigneur m’appelle à parler, ou à agir d’une autre manière, dans l’assemblée ; mais, lorsque j’ai parlé ou agi, c’est à mes frères de juger, et, dans la très grande majorité des cas, je dois me soumettre à leur jugement. En effet, il arrivera bien rarement qu’un serviteur de Christ se sente autorisé à continuer d’agir dans les réunions, quand même son action serait désapprouvée par ses frères. Si Dieu m’appelle à parler ou à prier dans les réunions, — que ce soit vraiment de lui que procède ma conviction d’y être appelé, — il est évident qu’il lui est aussi facile de disposer les cœurs des saints à recevoir mon ministère et à s’unir à mes prières, qu’il lui est facile de disposer mon propre cœur à un tel service. Si c’est réellement l’Esprit qui me fait agir, le même Esprit qui agit ainsi par moi demeure dans les saints, et, dans quatre-vingt-dix-neuf cas sur cent, l’Esprit dans les saints répondra au ministère ou au culte par l’Esprit de la part d’un frère quelconque. C’est pourquoi, si, à l’ordinaire, je m’apercevais que mon action dans les réunions, au lieu d’édifier les saints, fût un fardeau et une peine pour eux, je serais autorisé à conclure que je me trompais en prenant cette position, et que je n’étais point appelé à agir ainsi. Supposez, ensuite, que la raison qui empêche que le ministère d’un frère ne soit apprécié pendant un temps, se trouve être, non l’état de ce frère, mais celui de l’assemblée ; supposez que ce frère soit tellement plus spirituel que l’assemblée qu’elle ne puisse ni goûter ni apprécier son service : dans ce cas, qui n’est pas très fréquent, il se peut que ce serviteur de Christ doive examiner s’il n’a point à apprendre à être comme son Maître, qui enseignait et « annonçait la parole, selon qu’ils pouvaient l’entendre » ; s’il n’a pas besoin d’un peu plus de l’esprit de Paul, qui pouvait dire : « Nous avons été doux au milieu de vous. Comme une nourrice chérit ses propres enfants » ; et qui dit aussi dans un autre endroit : « Je vous ai donné du lait à boire, non pas de la viande, car vous ne pouviez pas encore la supporter ; et même maintenant encore, vous ne le pouvez pas ». Si, malgré cette tendresse et ces soins pleins de discernement, le ministère de ce frère continue à n’être pas reçu, ce sera certainement une épreuve pour sa foi ; mais, puisque le but de tout ministère est l’édification, et qu’il est impossible que les saints soient édifiés par un ministère qui ne se recommande pas à leurs consciences, il ne pourrait être d’aucune utilité de le leur imposer, qu’ils fussent ou non capables de le recevoir. L’état général de faiblesse ou de maladie d’un corps, peut amener la dislocation de quelque jointure ; dans un cas pareil, ce ne sera pas en forçant la jointure disloquée à fonctionner, qu’on améliorera l’état du corps. C’est peut-être une chose déplorable que cette jointure ne puisse pas agir ; mais la seule manière de la remettre en bon état, c’est de lui accorder un complet repos, pendant qu’on cherche, par d’autres moyens, à rétablir la santé du corps. Il en est de même dans le cas que nous avons supposé. Continuer à exercer un ministère là où il n’est pas reçu, même quand la cause en est l’état misérable de l’assemblée, ne fait qu’ajouter de l’irritation à l’état généralement mauvais des choses, et ainsi le rendre pire. Le serviteur du Seigneur trouvera alors que sa sagesse, c’est de se taire ; ou bien, peut-être, son Maître veut-il lui faire comprendre de cette manière que sa volonté est qu’il exerce son ministère ailleurs.
D’un autre côté, bien-aimés frères, permettez-moi de vous mettre
sérieusement en garde contre le piège que, assez probablement, Satan cherchera
maintenant à nous tendre ; je veux parler de l’esprit de critique à
l’égard de ce qui se fait dans les réunions. Les efforts de l’ennemi ont
toujours pour but de nous pousser d’un extrême à l’autre ; en sorte que,
si nous avons péché par indifférence, en mettant trop peu d’importance à ce qui
se faisait, pourvu que le temps fût rempli, il est plus que probable que nous
serons maintenant exposés au danger contraire. Le Seigneur, dans sa
miséricorde, veuille nous garder ! Rien n’indique un état de cœur plus
déplorable, et rien ne peut être un plus grand obstacle à la bénédiction, qu’un
esprit de censure et de critique. Nous nous
assemblons pour adorer Dieu et nous édifier les uns les autres, et non pas pour
nous occuper à juger nos frères qui agissent, à décider qu’un tel exerce son
ministère d’une manière charnelle, et qu’un autre prie par l’Esprit. Quand la
chair se manifeste, il faut, sans doute, qu’elle soit jugée ; mais c’est
une chose triste et humiliante de la discerner et de la juger ainsi, au lieu de
jouir ensemble (ce qui est notre heureux privilège) de la plénitude de notre
divin Sauveur et Chef. Gardons-nous donc d’un esprit de jugement. Il y a des
dons inférieurs, aussi bien que des dons plus grands, et nous savons qui est
celui qui a donné plus d’honneur aux membres du corps qui en manquaient. Les
actes d’un frère dans l’assemblée ne sont pas, nécessairement, tous charnels,
parce qu’il agit jusqu’à un certain point dans la chair ; et, à ce propos,
il serait bon pour nous tous de peser ces paroles d’un serviteur de Dieu des
plus estimés parmi nous : « Il est des plus nécessaires, dit-il, que nous
considérions premièrement la nature de notre don, et, en second lieu, sa mesure.
Quant à cette dernière, je ne doute pas, permettez-moi de le
dire, que plus d’un don qui n’est pas reconnu, ne le fût, si, dans l’exercice
de ces dons, les frères qui les ont reçus n’en dépassaient pas la mesure
. « Soit la prophétie, prophétisons selon la proportion de la foi
». Tout ce qui est au delà de cette limite
, est chair : l’homme se met en avant, et la chose est sentie et
le don tout entier rejeté ; et cela, parce que le frère qui a agi n’a pas
su se renfermer dans la mesure de son don. C’est pourquoi sa chair agit, et ce
qu’il dit est attribué à la chair ; et ce n’est pas étonnant. De même,
quant à la nature du don, si un homme se met à enseigner au lieu de s’en tenir
à l’exhortation (s’il peut exhorter), il n’édifiera pas ; il est impossible
qu’il édifie. Je désirerais surtout que l’attention de chacun des frères
employés dans le ministère de la Parole, fût attirée sur cette remarque, qui
peut-être ne leur parviendra jamais autrement, à cause d’un manque de fidélité
de la part de leurs auditeurs ».
Ces paroles sont adressées à ceux qui exercent un ministère, mais je les cite, bien-aimés frères, afin que nous apprenions à ne pas condamner tout ce qu’un frère peut dire ou faire, parce que nous y discernons quelque chose de charnel. Reconnaissons avec actions de grâces ce qui est de l’Esprit, en le distinguant de tout autre chose, même dans le ministère et les actes du même individu.
Il est encore deux ou trois petits détails sur lesquels je voudrais, dans la simplicité de l’amour fraternel, ajouter quelques mots. Et d’abord, quant à la distribution du pain et du vin à la table du Seigneur. D’un côté, il serait fort désirable que cette distribution ne fût pas constamment et exclusivement faite par un ou deux frères, comme si c’était là une distinction cléricale ; mais, d’un autre côté, je ne vois rien dans l’Écriture qui puisse autoriser quelque frère que ce soit à rompre le pain, ou à donner la coupe, sans rendre grâces. Dans Matt. 26:26-27 ; Marc 14:22-23 ; Luc 22:19 et 1 Cor. 11:24, il nous est dit que le Seigneur Jésus rendit grâces lorsqu’il rompit le pain et lorsqu’il prit la coupe ; et, dans 1 Cor. 10:16, la coupe est appelée la coupe de bénédiction ou d’action de grâces. Si, donc, l’Écriture doit être notre guide, n’est-il pas évident que celui qui rompt le pain, ou qui prend la coupe, devrait en même temps rendre grâces ; et, si quelqu’un d’entre nous se sentait incapable de le faire, ne serait-ce pas pour lui une raison de se demander s’il est bien appelé à distribuer le pain et le vin ?
Puis, quant à la direction ou à la surveillance dans l’Église, et aussi quant aux qualifications qui doivent se trouver dans ceux qui exercent un service ostensible au milieu des saints, nous devrions tous étudier avec prières 1 Tim. 3, et Tite 1. Le premier de ces chapitres, au v. 6, renferme une particularité dont il peut être bon qu’on nous fasse souvenir : « Qu’il ne soit pas nouvellement converti, de peur qu’étant enflé d’orgueil, il ne tombe dans la faute du diable ». Il est possible que l’appel de Dieu et le don de Christ se rencontrent chez un jeune homme comme Timothée (ou, dans l’Ancien Testament, comme Jérémie) ; et ces mots : « Que personne ne méprise ta jeunesse », s’appliqueraient de nos jours à un tel jeune homme, comme anciennement à Timothée ; mais c’est à Timothée que ces paroles : « Qu’il ne soit pas nouvellement converti », etc., étaient adressées. Sa jeunesse ne devait pas être un encouragement à agir pour ceux en qui ne se trouvaient ni la grâce ni le don qui lui avaient été accordés. Et il y a même une convenance naturelle à ce que le jeune homme prenne la place de la soumission plutôt que celle du gouvernement ; c’est là un bel exemple, que, malheureusement, on me paraît oublier quelquefois. « Pareillement, vous, jeunes gens, soyez soumis aux anciens ; et tous les uns à l’égard des autres, soyez revêtus d’humilité ; car Dieu résiste aux orgueilleux, mais il donne la grâce aux humbles » (1 Pierre 5:5).
Que le Seigneur, dans sa miséricorde, bien-aimés frères, nous donne de marcher humblement avec lui, et qu’ainsi rien ne s’oppose à l’œuvre de son Saint-Esprit au milieu de nous.
Votre sincèrement affectionné,
* * *
Cher frère,
Quant à votre première question : « Comment un frère peut-il savoir quand il parle ou agit par l’Esprit »,
il
faut être au clair sur ce que l’on entend par là, car on peut prétendre à une
espèce d’inspiration spontanée au moment où l’on se lève pour parler, ce qui
n’est en général que de l’imagination ou de la volonté propre. Il est inexact
de considérer l’action du Saint Esprit dans l’assemblée, comme s’il était un
président présent au milieu d’elle sans
être dans les individus,
et s’emparant tout à coup de celui-ci ou de
celui-là pour les faire agir. On ne trouve rien de semblable dans la Parole
depuis la descente personnelle du Saint-Esprit. On pourrait examiner, depuis le
chapitre 7 de l’évangile de Jean jusqu’au 2° de la 1ère épître de
Jean, une cinquantaine de passages qui traitent de la présence et de l’action
de l’Esprit dans les saints et au milieu d’eux, et se convaincre qu’il n’existe
pas trace de cette prétendue présidence du Saint-Esprit dans l’assemblée.
Je crois que la réaction légitime contre les principes du
clergé, qui veut établir un seul homme pour tout faire dans une congrégation, peut
induire à tomber dans l’extrême contraire, et à faire de l’assemblée une
république démocratique sous la prétendue présidence du Saint Esprit. Le
passage le plus important à cet égard est 1 Cor. 12:11, qui est souvent très
mal appliqué comme s’il autorisait cette idée de présidence : « Mais le seul et
même Esprit opère toutes ces choses, distribuant à chacun en particulier comme
il lui plaît ». Or la question est de savoir quand
l’Esprit distribue un don à quelqu’un. Est-ce une fois pour toutes, ou
chaque fois que ce don doit agir ? Évidemment c’est une fois pour toutes.
L’idée que le Saint Esprit s’empare soudainement d’un frère et
le fait se lever dans l’assemblée comme un ressort, pour rendre grâces, pour
lire, pour méditer, ne se trouve pas dans l’Écriture depuis la descente
personnelle du Saint Esprit. Je puis édifier l’assemblée, en lui parlant
aujourd’hui de ce que le Saint Esprit peut m’avoir donné par la Parole il y a
dix ans. Je nie formellement qu’un frère qui se lève dans un des cas précités, puisse
dire positivement au moment où il se lève, que c’est par l’Esprit qu’il le
fait. Même quand un frère s’assied, après avoir rendu grâces, par exemple, il
n’a pas à rechercher pour lui-même,
s’il
a réellement agi selon l’Esprit (quoiqu’il puisse en avoir conscience), mais
l’assemblée qui écoute l’action de grâces, a immédiatement conscience ou non,
si l’action de grâces rendue était le fruit de l’Esprit ou celui de la
chair ; son amen
confirme la
chose. Je dis : l’assemblée comme
telle ;
je ne parle pas des personnes, qui, par un mauvais esprit et
par antipathie, décideraient à l’avance de rejeter l’action de tel ou tel
frère. Celles-là verraient des Nadab et des Abihu là où l’assemblée
ajoute son amen par l’Esprit.
Nous voyons comme principe, en 1 Cor. 14, que ce n’était pas
même tout que de parler par l’Esprit dans l’assemblée ; il fallait encore
parler au moment opportun afin d’édifier
l’assemblée.
Ceux qui avaient des dons de langues parlaient bien par
l’Esprit, mais quand, dans l’assemblée, ils usaient de ces dons, qui étaient un
signe pour ceux de dehors (1 Cor. 14:22), ils
n’édifiaient pas l’assemblée ;
et l’apôtre leur dit que s’ils n’ont
pas d’interprètes, ils doivent se taire
dans l’assemblée.
D’après ces principes, votre question devrait plutôt être
celle-ci : « Est-ce que l’action d’un frère, qui parle plus ou moins souvent dans
l’assemblée, édifie l’assemblée ?
»
Si l’assemblée comme telle (il n’est pas question d’individus) peut répondre
oui, alors ce frère a le témoignage qu’il parle selon l’Esprit, — sans
prétendre à une inspiration quand il parle. — Mais si l’assemblée (or comme
telle elle est toujours supposée dans son état normal) répondait que l’action
de ce dit frère n’édifie pas ; alors, d’après les principes émis en 1 Cor.
14:22, ce frère devrait se taire. Toute l’affaire est là. La Parole nous
enseigne dans ce chapitre, qu’elle ne veut pas d’autre action dans l’assemblée
que celle qui édifie l’assemblée, pas plus s’il s’agit d’actions de grâces que
d’enseignement (voyez les versets 13-25). Il arrivait même que l’on priât par
l’Esprit, sans être l’organe de l’assemblée, celle-ci ne pouvant pas comprendre
pour dire : Amen.
Votre question : « L’Esprit
peut-il appeler un frère à évangéliser dans le culte ? »
repose encore
sur cette fausse notion d’inspiration spontanée. Or je dis qu’un frère,
enseigné de Dieu, n’évangélisera pas dans le culte, parce qu’on est là pour
Dieu et non pour les hommes (1 Pierre 2:5).
L’étrange question : « Que
vient-on faire aux réunions de culte ? »
trouve sa réponse en particulier
dans ce même passage de 1 Pierre 2:5, puis entre autres, dans les paroles du
Seigneur en Jean 4:23-24, ensuite en Luc 22:19-20, relativement à la cène, qui
est la base du culte, et encore en Actes 20: 7, où nous trouvons que le but
exprès du rassemblement, le premier jour de la semaine, était « pour rompre le
pain ».
Quant à votre dernière question : « Si un frère évangéliste en passage tient une réunion, un frère auditeur
doit-il se mêler de lui aider ? Et doit-on reconnaître ce frère
évangéliste comme envoyé ? »
Je réponds premièrement qu’il est bien
simple de reconnaître ce frère évangéliste
comme envoyé ; puisque la Parole ne connaît pas d’autres évangélistes
que ceux que le Seigneur a donnés
après
être entré dans la gloire (Éph. 4:11-12) (Je ne mets
pas en question la liberté d’annoncer Christ, que possède tout chrétien, en son lieu et place
).
Mais il faut bien remarquer qu’un de
ces évangélistes d’Éphésiens 4, — comme aussi un docteur, etc., — exerce son
don sous sa propre responsabilité devant le Seigneur qui l’a envoyé. Un tel
frère agit pour son Seigneur. Il est responsable de son propre travail devant
son Seigneur qui l’a envoyé. Or quand ce frère exerce son don devant un
auditoire convoqué pour lui, si un auditeur se mêle de lui venir en aide, cet
auditeur empiète sur les droits de l’évangéliste, et sur les droits du Seigneur
qui l’a envoyé. Pour moi, ce principe est de toute importance. Quand je suis
auditeur d’un frère qui a convoqué une réunion pour exercer son don, je
n’indiquerais pas même un cantique s’il ne me l’a pas demandé. Deux frères
peuvent s’accorder pour agir ensemble ; c’est leur affaire. L’Esprit avait
mis à part Barnabas et Paul (Act.
13) Cependant même alors on voit que c’était spécialement Paul qui portait la
parole (Act. 14:12).
À l’égard de l’évangélisation, il est bon de remarquer que
l’évangéliste est un individu. La Parole ne connaît pas une assemblée évangéliste.
J’ajouterai encore, quant aux dons et à leur exercice dans
l’assemblée, qu’un frère qui a un don, ne doit pas, dans les réunions d’assemblée,
prendre sur lui de tenir la réunion,
surtout dans une
assemblée locale. Un tel frère sera plus heureux d’entendre d’autres frères
rendre grâces, indiquer des cantiques, et exprimer quelques pensées, non pas
toutefois sur le principe radical que chacun a le droit
de parler. Remarquez à ce sujet que le passage 1 Cor.
14:26, est plutôt un reproche qu’une exhortation ; ce n’est pas : « Si
chacun a ». Chacun avait quelque chose,
et attendait le moment de
se produire avec ce qu’il avait, sans trop s’inquiéter si cela tendait à
l’édification.
Un frère qui a un don doit encore moins
s’imaginer que ce soit à lui à faire le
culte
le dimanche matin, soit dans son assemblée locale, soit ailleurs.
Comme sacrificateur et adorateur, il est sur le même pied que tous ceux qui
composent l’assemblée. Comme homme
(1
Tim. 2:8), ayant l’action publique en contraste avec la femme,
qui ne l’a pas, il n’est pas davantage qu’un autre, simplement
l’organe de l’assemblée dans les actions de grâces. Mais si, comme frère,
il est près du Seigneur, il peut
avoir des actions de grâces à rendre plus qu’un autre, qui par exemple serait
envahi par les affaires de la vie. Ainsi ce frère pourrait offrir trois ou
quatre actions de grâces dans la même réunion de culte, et être chaque fois
l’organe de l’assemblée. Mais en même temps, ce frère sera plus heureux d’être
auditeur, et de dire amen aux actions de grâces d’autres frères qui sont près
du Seigneur. Il souffrira s’il s’aperçoit que l’on s’attend à lui pour les actions
de grâces, comme aussi s’il s’aperçoit que de chers frères qui rendent grâces
ailleurs, se gênent de le faire en sa présence.
Mais lorsqu’il s’agit de l’enseignement de la Parole, ce frère a toujours le sentiment, au culte comme ailleurs, qu’il est responsable du don que le Seigneur lui a confié pour l’édification de l’assemblée. Et si son action est le fruit de la communion avec le Seigneur, elle se légitimera chaque fois à l’assemblée, en dépit de l’élément radical qui peut exister dans le sein de celle-ci.
La notion qu’un frère doué ne doit pas exercer son don dans les réunions de culte, ni y rendre grâces plus qu’un autre, n’a aucun fondement scripturaire. Comment supposer qu’un Timothée, un Tite, un Épaphras, un Stéphanas (pour ne pas nommer Paul, Jean, Pierre), fussent moins propres que d’autres à être les organes de l’assemblée dans les actions de grâces du culte ; et que ces frères-là dussent s’abstenir pour laisser la place aux autres ?…
On pense aussi que les adorateurs sont les frères qui se lèvent pour rendre grâces ; cela est faux… Toutes les sœurs sont des adorateurs, et elles ne doivent jamais se lever pour rendre grâces. Tous les frères sont adorateurs, mais, hélas, tous ne sont pas spirituels, pieux, près du Seigneur, pour pouvoir être chacun l’organe de l’assemblée dans l’action de grâces. De même aussi quelques-uns ne sont pas assez simples pour le faire comme ils le font à table chez eux.
Enfin, quant à agir par l’Esprit, prenons encore l’exemple de
Paul et Barnabas en Act.
13. Voilà des hommes qui étaient donnés par le Seigneur, monté dans la gloire,
selon Éph. 4:11-12 ; et, en Actes 13, le
Saint-Esprit les met à part et les envoie. Ils sont donc désignés par le
Saint-Esprit une fois pour toutes, pour aller parler du Seigneur partout, tous
les jours, sous sa dépendance sans doute. Ils n’avaient donc pas à se demander
lorsqu’ils se trouvaient devant la foule, sur les places publiques, dans les
synagogues, et plus tard dans les assemblées des frères, si le Saint-Esprit les
appelait à parler dans ce moment-là ; ils
étaient là
dans ce but, envoyés d’Antioche par le Saint-Esprit…
Lorsque, plus tard, Paul se trouva pour un seul dimanche, et
pour la dernière fois, dans une certaine assemblée (Actes 20: 7-12), où il
parla très longuement, qu’aurait-on pensé d’un frère de Troade qui aurait
insinué aux autres frères que Paul prenait trop de place dans le culte ?…
Je prends cet exemple comme principe ; tous ne sont pas des Paul. Heureux
sont les saints qui, dégagés de cet esprit niveleur, savent reconnaître le Seigneur
,
là où il a accordé quelque grâce pour l’utilité commune. Outre Éph. 4:11-12, et 1 Cor. 12, lisez encore avec soin 1 Cor.
16:15-18 ; 1 Thess. 5:12-13 ; Héb. 13:17.